Une militante franco-comorienne de la diaspora arrêtée mardi

Fatima Mze Said, connue pour ses prises de position contre le régime d’Azali Assoumani, est une membre de la diaspora comorienne, installée à l’île de La Réunion et passant ses vacances aux Comores. Les motifs de son interpellation ne sont pas révélés. Un autre militant s’est vu confisquer son passeport français depuis le 11 juillet. 

C’est un séjour qui restera gravé dans sa mémoire. Arrivée dans son pays d’origine pour passer ses vacances, Fatima Mze Said dort depuis mardi dans les locaux de la gendarmerie nationale. Cette franco-comorienne de 54 ans, militante de l’état de droit, a été arrêtée dans la matinée du 23 juillet. Alors qu’elle se trouvait dans sa ville natale, Foumbouni, chef-lieu situé au sud de la Grande Comore, Fatima Mze Said s’est vu remettre une convocation. Une fois à la brigade la plus proche, les gendarmes l’informent qu’ils vont la conduire dans la capitale, Moroni. Au moment où nous écrivons ces lignes, on ignore encore les raisons officielles de son maintien en détention. Ni la gendarmerie nationale et encore moins le parquet de la République n’ont communiqué. Résidente de l’île de La Réunion, Fatima Mze Said est en train de faire les frais de ses prises de position critiques contre le régime de l’ex-putschiste, Azali Assoumani, estiment de nombreux mouvements politiques qui appellent à sa libération. Si officiellement, les motifs de son interpellation sont flous, certains y voient une sorte de règlement de compte du pouvoir qui musèle toute voix discordante. Le nom qui revient sur les réseaux sociaux est celui de l’actuel directeur de cabinet chargé de la défense, dont les relations avec Fatima Mze Said ont toujours été distendues. « Quelques jours avant son interpellation, elle n’arrêtait pas de me dire que ça sentait mauvais« , a confié, Ali Ahmed Youssouf Nachida, une amie de la militante. 

Des prises de position critiques 

Cette dernière pense, tout comme l’opposition, que Fatima Mze Said paie le prix fort de ses critiques, notamment celles qui visaient l’actuel directeur de cabinet chargé de la défense, Youssoufa Mohamed Ali, originaire comme elle de Foumbouni. En début d’année, après avoir accompli la Umra, le petit pèlerinage, Fatima avait posé ses valises à Moroni. Et au moment de rentrer, elle avait rencontré quelques difficultés à l’aéroport. « Quand elle s’est installée dans l’avion, un agent est venu lui demander de descendre. Sans résistance, Fatima a obéi. Elle a patienté dans un bureau de l’aéroport et au bout de quinze minutes, on lui a remis un téléphone. Son interlocuteur n’est autre que le Délégué à la défense qui se présente en sauveur parce qu’il a appris son interpellation. Une fois à La Réunion, Fatima a vertement dénoncé ces intimidations. On pense que c’est ce qui a entraîné cette garde à vue« , avance, Ali Ahmed Youssouf Nachida, qui considère Fatima comme une grande sœur. 

À Foumbouni, ce direct virulent que la militante avait fait sur son mur Facebook, il y a presque cinq mois, est aussi cité comme la raison de l’emprisonnement de cette partisane d’un état de droit aux Comores. Mais ce n’est pas le seul membre de la diaspora dont le séjour ne se passe pas comme prévu. Hadji Mbae Soilihi, voix critique du régime, actuellement en vacances aux Comores, s’est vu retirer son passeport français depuis le 10 juillet. « À notre arrivée à l’aéroport, j’ai présenté mon passeport, ceux de mes enfants et celui de ma femme. On les a laissés passer. Mais bizarrement à mon tour, l’agent de la police aux frontières m’informe que la machine est tombée en panne. Tout de suite, j’ai compris que mon nom était signalé. D’autant que l’agent m’invite à partir avec les bagages car ils me rappelleraient dès que la machine sera à nouveau opérationnelle. Jusqu’à nos jours, ils ont toujours mon passeport« , a relevé Mbae Hadji de son vrai nom, Abdou Hamadi, qui a déjà saisi l’ambassade de France aux Comores ainsi que le Quai d’Orsay. Ce militant résidant en France n’a pas l’air étonné, lui qui était conscient des risques qu’il encourait en rentrant. Approchée, l’ambassade de France aux Comores a transmis cette réaction : « S’agissant de ressortissants français qui pourraient être détenus, la France exerce la protection consulaire, dans le respect de la souveraineté comorienne, comme elle le fait partout dans le monde, pour autant que les personnes le souhaitent« , a indiqué la chancellerie

“Elle a toujours milité pour les droits”

Au niveau de la société civile et de la classe politique, ces agissements du régime suscitent des réactions « Le Comred dénonce vigoureusement les atteintes aux libertés fondamentales orchestrées par le gouvernement Azali à l’encontre des mouvements de la société civile et des personnalités engagées pour la défense des droits civils et politiques aux Comores. Il exprime sa profonde inquiétude face à l’escalade des attaques, à l’intimidation contre les militants de la démocratie, ainsi qu’aux arrestations arbitraires et au harcèlement sous toutes ses formes« , a écrit dans un communiqué, publié ce mercredi, la convergence des mouvements pour la République et l’état de droit (Comred).

Ce groupement a cité le cas de Fatima Mze Said. « Ce climat de répression visant à réduire au silence les voix critiques est inacceptable. Le Comred condamne fermement ces pratiques despotiques qui cherchent à museler toute forme de contestation du régime et à restreindre les libertés fondamentales », tacle le Comred qui appelle la communauté internationale, les organisations de défense des droits de l’Homme, tous les amis des Comores et les défenseurs de l’État de droit à se mobiliser pour dénoncer ces injustices flagrantes. Sur les réseaux sociaux, beaucoup rendent hommage à Fatima Mze Said, non seulement pour son militantisme, mais surtout pour son engagement dans le social, notamment au service de la communauté comorienne. Depuis La Réunion, la quinquagénaire est connue pour son assistance en faveur des malades comoriens envoyés seuls à l’île Bourbon pour des soins. Quand elle résidait à Lyon, Fatima Mze Said avait lancé avec d’autres compatriotes une association pour aider les pêcheurs perdus dans les pays voisins à pouvoir rentrer. « Elle a toujours milité pour les droits, peu importe. À La Réunion, si un enfant malade se trouvait seul, elle se battait pour obtenir l’arrivée de l’un des parents ou d’un proche. C’est la Fatima que j’ai connue. Durant le ramadan, elle lançait des cagnottes pour aider les nécessiteux à rompre le jeûne « , a témoigné, son amie, Ali Ahmed Youssouf Nachida, contactée par Flash infos. 

Journaliste presse écrite basé aux #Comores. Travaille chez @alwatwancomore
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