Son tatouage et le manque de preuves entraînent sa libération

En détention depuis un an, un homme de 35 ans a été relaxé, ce mardi 29 août. Il était jugé en lien avec une agression sexuelle en mai 2022 commise à Mamoudzou, par le tribunal correctionnel. Seulement voilà, le tatouage de lion qui ne correspond pas à celui décrit par la victime, l’absence d’ADN et son discours parfois incohérent n’ont pas permis d’établir sa culpabilité.

C’est un véritable cauchemar qu’a vécu la victime, le soir du 22 mai 2022. A Mamoudzou, à proximité du carrefour en haut de la côte Sogea, alors que la nuit est tombée depuis peu, la jeune femme de 25 ans a croisé la route de deux hommes, qu’elle estime « d’un 1,80m » pour l’un et d’une taille plus petite pour l’autre. Alcoolisés, ils s’approchent d’elle et l’un d’eux sort un couteau au manche noir pour la menacer. « Ce n’est pas la peine de pleurer, ça va bien se passer », aurait dit le plus grand. Mise à l’écart de la route, puis à genoux, les deux hommes en profitent pour commencer à lui toucher les seins. « Le plus grand a sorti son sexe et l’a mis contre sa bouche », raconte Ivan Mercier-Bosni, le président du tribunal correctionnel de Mamoudzou, ce mardi matin. La scène aurait duré plusieurs minutes et c’est en état de choc que cette femme s’est retrouvée au centre hospitalier. De cet acte, elle se rappelle l’odeur alcoolisé et un tatouage « artisanal » sur l’épaule droite de l’agresseur, « un cœur avec des ailes ».

Plusieurs éléments ont alors poussé les policiers à s’intéresser à un homme qu’ils connaissent bien. Le prévenu, âgé de 35 ans, est connu pour son comportement erratique. En outre, cet habitant de Passamaïnty a déjà sévi dans ce quartier et a également fait de la prison pour des agressions sexuelles. L’enquête permet, quatre mois plus tard, d’organiser une reconnaissance d’abord sur photos, puis derrière une glace sans tain. Au milieu de quatre hommes ainsi alignés, elle reconnaît le prévenu comme son agresseur le plus grand. Originaire de Mamoudzou, l’homme a vécu à Marseille et est passé par un séjour en hôpital psychiatrique. Alors que ses envies de carrière militaire se sont révélées une impasse, il est revenu à Mayotte, où il habite avec sa mère. Ce retour au domicile familial n’a pourtant pas eu l’effet escompté. Ses proches ont décrit un changement de comportement. Sous médicaments normalement, il boit « quatre à cinq bières par jour ». « C’est la solitude du poète comme ils disent », explique, à la barre, ce chômeur qui n’a pas terminé sa formation de carreleur au RSMA. « Sa mère a raconté qu’elle s’enfermait parfois dans sa chambre », lit le président du tribunal correctionnel. Des précédentes condamnations l’ont également amené à Majicavo. Il a été d’ailleurs jugé deux jours, après les faits. Quand le juge demande au prévenu son rapport avec les femmes, ce dernier admet « [qu’il] drague. Mais si elle refuse, je me taille ».

« Je marche tout seul »

Ses premières déclarations et ses propos sur « un hélicoptère qui [le] suit » ou « la Soupe aux choux » ne l’aident pas à se défendre. Plutôt que de s’adresser aux juges, il grommelle en tournant sa tête vers la gauche, disant vouloir s’adresser à la petite caméra, qui pourtant ne fonctionne pas. Une certitude selon lui, il n’a jamais agressé sexuellement cette femme. « Je marche tout seul », fait-il remarquer, ce qui exclut à ses yeux la présence d’un complice. Même le mode opératoire ne lui est pas familier. « Il n’a jamais fait usage d’un couteau. Il a été condamné pour une agression avec arme parce qu’il a lancé un caillou », plaide maître Aurore Baudry. L’ADN non plus n’a rien apporté. Seul celui de la jeune femme apparaît sur ses vêtements. Enfin, s’il a bien un tatouage sur l’épaule droite, il s’agit d’un lion et pas d’un cœur avec des ailes. Le substitut du procureur de la République, Tarik Belamiri, n’exclut pas l’altération du discernement (ce qui réduit la peine d’un tiers) au vu des expertises psychiatriques. Il demande cependant la peine maximale pour l’agression sexuelle sous la menace d’une arme et en récidive légale, soit dix ans (en incluant la réduction pour le discernement). Les juges ne l’ont pas suivi, estimant qu’en raison du manque de preuves, le doute doit bénéficier au prévenu.

Alors qu’il en a la possibilité, le Parquet n’a pas encore décidé s’il allait faire appel de la décision. Soulagé, le relaxé est retourné à Majicavo, cette fois, pour reprendre ses affaires.

Le politique Daniel Zaïdani jugé en mars 2024

Le conseiller départemental du canton de Pamandzi, Daniel Zaïdani, devait être initialement jugé, ce mardi 29 août, dans l’affaire des concerts du groupe Sexion d’Assaut à Diego-Suarez (Madagascar) et aux Comores, en 2012. Il lui est reproché d’avoir fait venir dans l’océan Indien et rétribuer le collectif de rappeurs aux frais du conseil général de Mayotte dont il a été président de 2011 à 2015. Trois autres faits sont visés par la prévention. Il y a d’abord ce repas de rupture du jeun organisé chez lui, aux frais du Département, des voitures de fonction mises à disposition de collaborateurs qui n’en ont pas le droit et un marché public concernant deux véhicules achetés par le CD sans appel d’offres.

Les deux coprévenus, poursuivis pour des complicités, étaient également présents. Les trois (seul Daniel Zaïdani est sous contrôle judiciaire) se retrouveront le 19 mars 2024, lors d’une audience moins chargée en dossiers. « Je ne pense pas qu’on puisse aborder cette affaire en moins de trois heures », a reconnu Bruno Fisselier, le président du tribunal correctionnel de Mamoudzou, ce mardi.

Pour rappel, l’ancien président du conseil départemental a été déjà condamné en appel, en juillet 2023, pour une histoire de terrains vendus par sa famille à la commune de Kani-Kéli, en 2015. Problème, quelques mois plutôt, la somme utilisée avait été versée à la commune du sud via une subvention départementale. Outre les 80.000 euros d’amende, la chambre d’appel a prononcé une peine de cinq ans d’inéligibilité à l’encontre du Pamandzien.

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