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Coupure généralisée : un individu vandalise un câble 20.000 Volts et plonge Mayotte dans l’obscurité

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Une panne de courant a coupé l’électricité sur toute l’île dans la nuit de mercredi à jeudi. Les équipes d’EDM ont mis plusieurs heures à retrouver la cause du problème et à rétablir le courant pour les milliers de clients touchés.

Et nox fuit. Ce mercredi 16 décembre, à 22h42, les lumières s’éteignent sur Mayotte. Seules quelques ampoules alimentées par des groupes électrogènes, comme dans les supermarchés ou au CHM, font encore concurrence aux étoiles qui scintillent dans le ciel. Et encore. “Il y a eu une première coupure, et il a fallu attendre peut-être deux trois minutes avant de récupérer du courant”, témoigne une infirmière en service cette nuit-là. Une ligne du SMUR, le service mobile d’urgence et de réanimation, aurait même été indisponible… C’est dire le bazar !

Dès les premières minutes, les commentaires ne se font pas attendre sur les réseaux sociaux. Allusions sarcastiques au quotidien des voisins Comoriens, et autres coups de gueule en cascade n’ont pas manqué d’inonder la toile, tapés rageusement sur des smartphones encore chargés et chauffés à bloc. “Juste au moment du match de Marseille !”, ironise un internaute, quand une mère de famille raconte sa nuit blanche étalée sur le carrelage avec son bébé, les fenêtres grandes ouvertes.

La peur de tout perdre

“J’étais en stress, je n’ai pas dormi de la nuit !”, s’exclame quant à elle Sandy Devilaine, la gérante du Dandy’s sushis de Petite-Terre. Cette entrepreneure fraîchement installée sur l’île aux parfums a vraiment cru qu’elle allait devoir se défaire de sa marchandise, à cause de la rupture de la chaîne du froid. Bilan des courses : 1,5 kilo de poiscaille jeté par la fenêtre, – environ 20 euros – pour éviter le risque d’intoxication alimentaire. “Plus de peur que de mal ! Mais quand même, j’ai eu peur de tout perdre…”, souffle-t-elle, la voix éreintée après cette nuit d’angoisse.

Haute tension

La cause de tout ce tintouin ? Un câble souterrain de 20.000 Volts, vandalisé dans le secteur de Vahibé par “un individu qui voulait voler de l’énergie en s’alimentant directement sur le réseau haute tension”, a fini par communiquer EDM en fin de journée jeudi, plusieurs heures après le rétablissement du courant pour ses milliers de clients. Toute l’île, Grande-Terre comme Petite-Terre, aura donc fait les frais de l’incident. Plutôt rare, même pour Mayotte. Sur les coups de 6h, plus de 90% des abonnés avaient toutefois pu rebrancher leurs batteries, pour un retour à la normale à 11h30 ce jeudi.

“Des brûlures graves voire même l’électrocution”

Mais il aura fallu encore quelques heures de plus pour que les équipes d’astreinte et les renforts mobilisés depuis 23h cette nuit-là, soit une quarantaine d’agents au total, parviennent à déterminer la source du problème. De prime abord, les experts tablaient plutôt sur un défaut d’armoire électrique au départ de Passamaïnty, qui, couplé à un réseau fragilisé par des travaux de maintenance, aurait provoqué la panne. Ils étaient sûrement loin d’imaginer qu’une personne puisse volontairement tenter de se brancher sur 20.000 Volts… “Cet acte s’avère inutile et d’une absurdité totale puisqu’on ne peut utiliser de la haute tension à des fins domestiques, en plus d’être d’une extrême dangerosité”, signale encore EDM sur sa page Facebook.

Le fournisseur d’électricité va donc “déposer plainte contre X dans les prochains jours afin de déterminer l’auteur des faits”. Pas sûr toutefois de retrouver le pauvre bougre… qui n’a pas dû sortir indemne après un tel coup de jus. Le risque ? “Des brûlures graves voire même l’électrocution”. Or, d’après nos informations, aucun cas de ce genre n’a été recensé depuis mercredi à l’hôpital. Qui s’y frotte s’y pique !

Coupe de France : le FC M’tsapéré à 180 minutes d’un rêve

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Dimanche à 14h30, le FC M’tsapéré défie la JS St-Pierroise à la Réunion, pour une place en 32ème de finale de Coupe de France. En cas de qualification pour les deux prochains tours, les champions de Mayotte pourraient, selon le tirage au sort, rencontrer un club de Ligue 1…

Fermez les yeux, et imaginez un instant le Football Club M’tsapéré affronter le finaliste de la dernière Ligue des champions, le Paris Saint-Germain et ses supers stars au Parc des Princes. Imaginez les footballeurs amateurs mahorais défier le grand Olympique de Marseille des champions du Monde Steve Mandanda et Florian Thauvin dans le mythique Orange Vélodrome.

Mais encore, imaginez le club champion de Mayotte sur la pelouse du Matmut Stadium Gerland, disputer un match officiel face à l’Olympique Lyonnais des internationaux Memphis Depay, Anthony Lopez, Karl Toko-Ekambi et Houssem Aouar… Faire opposer les plus petits clubs amateurs de l’hexagone et d’Outre-mer aux plus grands clubs de France : c’est ce que propose la Coupe de France de football depuis 1917.

L’une de ses plus belles histoires a été marquée en 2000 avec l’épopée de Calais. Le club amateur qui évoluait en quatrième division avait atteint la finale et s’était incliné 2-1 au Stade de France, contre le FC Nantes de Landreau, Gillet, Carrière, Sibierski, Da Rocha ou Monterrubio. Un parcours exceptionnel avec la cerise sur le gâteau pour Réginald Becque, capitaine calésien, invité par Mickaël Landreau à soulever la Coupe de France que lui avait remise le président de la République de l’époque Jacques Chirac…

Après leur étincelant parcours en coupe régionale de France ces dernières semaines, où ils ont sorti tour à tour l’ACSJ M’liha, l’UCS Sada, l’Olympique Miréréni, la Racine du Nord Acoua, l’US Ouangani et le Pamandzi SC, les Diables Rouges m’tsapérois se sont qualifiés pour le huitième tour de la Coupe de France et étaient à 90 minutes – 120 si prolongations – d’un 32ème de finale, où entraient habituellement en lice les clubs de Ligue 1…

Mais ce jeudi, la Fédération française de football a réadapté la formule Coupe de France version 2020/2021, dont l’épilogue était menacé par la crise sanitaire. Pour espérer aller au bout de sa compétition, la 3F a décidé il y a quelques heures à peine de séparer les clubs amateurs des clubs professionnels jusqu’aux 16èmes de finale.

Une nouvelle formule de qualification qui change tout

À deux matchs d’affronter des pros… Jusqu’à présent, ce rêve était difficilement accessible aux Mahorais tant les différents clubs locaux se sont cognés sur un mur ces deux dernières décennies. Le mur du septième tour de Coupe de France face aux clubs de l’hexagone, que ni M’tsapéré (2001, 2004, 2012, 2016, 2018, 2019), ni Pamandzi (2002, 2003), ni M’zouasia (2014, 2015), ni Kani-Kéli (2005, 2013), ni Dzoumogné (2007, 2008), ni d’autres encore (M’tzamboro, Koropa, Kani-Bé, Tsingoni, Combani…), n’ont pu franchir.

Mais cette année, la donne a changé. D’abord, la 3F a accédé à une requête de la Ligue mahoraise de football d’organiser un tour de coupe régionale de France supplémentaire à Mayotte, pour ainsi qualifier le représentant mahorais, non plus pour le septième mais pour le huitième tour de la Coupe de France. Mais surtout, la FFF a modifié la formule de qualification pour les équipes ultramarines, notamment les qualifiés réunionnais et mahorais. Ceux-ci doivent s’affronter au huitième tour de la Coupe de France, et le vainqueur représentera l’Outre-mer zone océan Indien en 32ème de finale.

Le FC M’tsapéré a donc rendez-vous avec la Jeunesse Sportive Saint Pierroise, vainqueur de la Coupe régionale de France à La Réunion, ce dimanche à 14h30 à Saint-Pierre. La JSSP avait créé la sensation lors de la dernière coupe de France en atteignant les 16èmes de finale : battu par Epinal après avoir notamment éliminé Niort, club de Ligue 2 au tour précédent.

Le parcours des Réunionnais leur avait valu les plus belles louanges du football ultramarin et une exposition nationale avec la réalisation de plusieurs reportages dont celui de l’émission populaire Téléfoot. C’est cette Saint-Pierroise que défieront les M’tsapérois du FCM ce week-end. Un septième tour à Mayotte, une formule de qualification plus abordable, un adversaire régional de division identique pour le huitième tour et, depuis hier, la garantie d’affronter un nouveau club amateur en 32ème de finale…

Le rêve de tout footballeur amateur d’affronter une Ligue 2, voire une Ligue 1, n’a jamais été aussi proche pour les représentants mahorais de la Coupe de France. Reste à contrecarrer les plans de la Jeunesse sportive pour espérer l’atteindre.

Comprendre l’origine des violences à Mayotte grâce à un observatoire

C’est un partenariat tripartite (entre le rectorat, l’agence régionale de santé de Mayotte et le parquet de Mamoudzou) qui s’engage dans la lutte contre tous types de violences. À travers un observatoire, ces trois institutions, accompagnées du Département et de la préfecture, souhaitent comprendre le fond du problème en collectant des données.

Pourquoi Mayotte subit une montée des violences ? Qui en sont les auteurs ? Quelles peuvent être les solutions ? Des questions auxquelles l’observatoire des violences à Mayotte va tenter de répondre. Autour de la table : l’agence régionale de santé, le rectorat, le parquet, le Département, l’association des maires et la caisse d’allocations familiales. Chaque institution devra se pencher sur le fond du problème et collecter des données pour “appréhender scientifiquement cette situation préoccupante, aux fins de proposer des solutions de fond et des outils pragmatiques permettant d’agir efficacement sur le phénomène et sur le long terme”. Concrètement, il s’agit de récolter des témoignages, de définir l’origine des violences, d’identifier leurs auteurs, de comprendre leurs motivations, et de sensibiliser la population à ces différentes problématiques. Chaque institution aura un rôle bien précis. Tous les partis devront par la suite mettre leurs travaux en commun.

Le parquet met à disposition ses données

Le tribunal de grande instance de Mamoudzou fait partie des signataires de l’accord portant sur l’observatoire des violences. “La contribution du tribunal est de mettre à disposition des données qui sont fiables de telle sorte à pouvoir analyser l’âge des auteurs, le genre, leurs domiciles, l’endroit où ils sont nés… En bref, des éléments assez riches pour pouvoir analyser ces violences”, indique Virginie Benech, magistrate au TGI de Mamoudzou. Le tribunal possède également des éléments concernant le nombre d’infractions commises sur le territoire et devra les communiquer. Des informations transmises par la gendarmerie et la police. À ce jour, aucune analyse ne permet de tout regrouper. D’où l’importance de cette contribution du monde judiciaire.

Car la répression n’est pas l’unique solution face à la montée de la violence. “Il est souvent reproché au tribunal de ne pas prononcer des peines assez longues et sévères, mais la réponse n’est pas là, en réalité. La solution n’est pas d’enfermer et de jeter la clé du centre pénitentiaire. La question est de savoir comment ces violences sont arrivées à Mayotte afin que nous puissions tous vivre ensemble.” Et l’une des pistes pour y parvenir est de diffuser, partager et comprendre les valeurs de la République.

Le rectorat veut travailler avec les parents

 L’Éducation nationale n’est pas en reste : c’est l’une des trois institutions à l’origine de ce projet. Le rectorat de Mayotte s’est déjà penché sur la question des violences sur l’île. “Nous avons un groupe de travail qui agit et étudie les violences scolaires, les violences faites aux élèves, celles faites aux femmes et bien d’autres. Nous avons récolté des témoignages intéressants qui permettent de faire un état des lieux de cette société ainsi que des différentes formes de violences. Nous allons continuer ce travail”, affirme le recteur de Mayotte, Gilles Halbout. Il faudra par la suite enclencher le processus de sensibilisation pour permettre aux jeunes d’apprendre à s’exprimer et à mettre des mots sur leurs ressentis et leur vécu. Une étape clé pour dénoncer les violences. Quant aux parents, pas question de les laisser sur le bas-côté. Le dispositif “école des parents” doit justement les mettre à contribution. “Il y a un travail de prévention à faire avec eux sur les différents types de violences même celles qu’on ne voit pas”, poursuit Gilles Halbout. Un congrès sur la parentalité et la jeunesse devrait prochainement être organisé. Il s’agira d’un moment de recherche et d’échanges entre les différents acteurs actifs sur le terrain. Un point sera fait toutes les 6 à 7 semaines afin qu’il ne finisse pas au fond d’un tiroir dans quelques mois.

Le conseil départemental apporte 360.000 euros

Et le Département aussi va devoir mettre la main à la patte… ou plutôt au portefeuille, avec une jolie somme de 360.000 euros. La collectivité a confié la tâche au conseil de la culture, de l’environnement, et de l’éducation de Mayotte (CCEEM) qui est chargé de collecter des données sur toutes les formes de violences présentes sur l’île. “Ce travail de recherche d’informations et d’analyse est indispensable pour ensuite orienter les politiques publiques et les solutions”, estime Issa Issa Abdou, quatrième vice-président du conseil départemental. Elles devront être concrètes et efficaces pour que les Mahorais voient le résultat sur leur quotidien. “Autrement, nous aurons raté notre coup. Il faut donc que tous les maillons de la chaîne agissent ensemble”, avertit Issa Issa Abdou.

L’ARS de Mayotte pour une approche scientifique

Dernier pilier de cet observatoire : Salim Mouhoutar, le directeur adjoint de l’agence régionale de santé. “La violence conduit toujours à une mauvaise santé qu’il s’agisse de la santé psychique ou physique”, explique celui qui assume le rôle de chargé de mission. L’objectif de l’ARS est de faire valoir la science au sein de ce projet. “L’ARS n’est pas signataire mais sera dans le comité scientifique. Nous allons fournir des données de santé, notamment sur les addictions, les problèmes d’alcoolémie… Nous allons essayer de comprendre le comportement d’une personne dépendante par exemple”, précise Salim Mouhoutar.

Lutte contre le braconnage : un pacte de sauvegarde des tortues à 2.5 millions d’euros

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Mercredi, les communautés de communes du Sud et de Petite-Terre, le Département, la préfecture et les associations Oulanga Na Nyamba et les Naturalistes ont signé un pacte de sauvegarde des tortues, qui engage six axes prioritaires pour l’année 2021. Renforcement des effectifs et moyens matériels sont au cœur de ce partenariat qui doit permettre de lutter efficacement contre le braconnage.

Bien connue pour être un vivier de pontes de tortues marines, Mayotte subit avec effarement le braconnage de ces espèces. Quelques semaines après avoir dévoilé sur la plage de Grand Moya en Petite-Terre leur nouveau plan d’actions pour lutter efficacement contre ce fléau, les parties prenantes viennent de signer ce mercredi 16 décembre le fameux pacte de sauvegarde. « En un mois, j’ai déjà l’impression que nous avons un peu fait bouger les lignes », se félicite Jean-François Colombet, le préfet, au moment de parapher cet engagement avec les communautés de communes du Sud et de Petite-Terre, le Département, Oulanga Na Nyamba et les Naturalistes.

Un engagement évalué à 2.5 millions d’euros, dont la moitié à la charge de l’État, qui doit permettre d’afficher des résultats concrets. Comment ? En poursuivant un certain nombre d’objectifs durant l’année 2021. En premier lieu, il apparaît primordial de mieux connaître les raisons qui poussent à la consommation. D’où le financement d’une étude sur ces pratiques socio-culturelles réalisée par l’institut de recherche pour le développement de Nouvelle-Calédonie. Mais aussi d’accroître les recensements de braconnage et de les remonter systématiquement au réseau d’échouage mahorais de mammifères marins et de tortues marines (REMMAT).

Pour cela, les associations vont toutes les deux recevoir un chèque de 30.000 euros et bénéficier de 5 parcours emploi compétences et de 12 services civiques, formés par l’office français de la biodiversité. « Il ne s’agit pas d’installer des brigades qui vont verbaliser et se substituer aux polices environnementales déjà existantes », rassure le délégué du gouvernement. L’idée est d’intensifier les rondes la nuit sur les plages les plus exposées. « Les experts nous disent que la présence humaine dissuade les actes de braconnage. » Le tout sous la coupe de deux employés Fonjep (fonds jeunesses et éducation populaire), qui auront la lourde tâche d’assurer l’organisation des patrouilles. D’ailleurs, ces dernières seront mixtes dans le but de créer une synergie entre les différents partenaires.

La PAF au secours des tortues

Pour animer ce groupe de coordination opérationnelle, ce pacte prévoit l’arrivée au mois de mars prochain d’un nouvel élément à la direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement, dans le cadre d’une mission inter-services de l’eau et de la nature (MISEN). Mais la préservation des tortues marines ne se joue pas seulement sur les plages. D’où la mise en place d’une cohérence entre la terre et la mer. « Le poste de commandement de l’action de l’État en mer, qui est beaucoup mobilisé sur la lutte contre l’immigration clandestine, pourra conduire quelque fois lors d’une opération Shikandra des actions de lutte contre le braconnage, lorsque les braconniers arrivent par voie maritime », complète Jean-François Colombet.

Pour mener à bien ces missions communes, des investissements vont suivre pour rassurer les patrouilleurs. À l’instar des agents du Département qui vont recevoir de nouveaux véhicules mais aussi des jumelles à vision nocturne. « Nous pourrons le cas échéant [les] autoriser à se doter d’armes de forces intermédiaires », ajoute le préfet. Des bombes à gaz pour être précis. « Les équiper de matériel de protection un peu plus militaire était l’une de leurs demandes », rappelle Raïssa Andhum, vice-présidente de la collectivité. Toujours dans la même lignée, le conservatoire du littoral et la communauté de communes du Sud réfléchissent à la construction d’un abri à Charifou et poursuivent la rénovation de la maison de Saziley.

Un arrêté pour interdire l’accès aux plages

Par ailleurs, le point fort de ce pacte est le renforcement de la protection réglementaire des sites les plus sensibles, grâce à la future adoption d’un arrêté de biotope pour Moya et Saziley. « C’est un acte assez fréquent en métropole, qui manque ici, c’est incontestable », souligne le préfet de Mayotte. Et ainsi interdire l’accès aux plages, comme le fait déjà l’intercommunalité de Petite-Terre.

Enfin, il est essentiel de communiquer le plus largement possible auprès du grand public sur la protection des tortues. Mais aussi de sensibiliser les scolaires grâce à la signature d’une convention avec le rectorat. Cerise sur le gâteau avec l’ouverture d’un centre de soins pour les tortues marines au début de l’année 2022, dont le montant de l’opération s’élève à 1.873.000 euros.

Aujourd’hui, les associations et les autorités ont toutes les cartes en main pour faire de ce vœu une réussite sans précédent. « Ce pacte a une approche globale, partenariale et cohérente. Et surtout, nous y mettons notre volonté et notre détermination », résume Jean-François Colombet. Qui donne rendez-vous le mois prochain pour tirer un premier bilan de ces engagements.

Quelle réponse pénale face au braconnage des tortues ?

Le préfet de Mayotte l’assure : « Ce plan ne se substitue pas à l’autorité judiciaire qui joue son rôle. » Un rôle rappelé par Sarah M’Buta, substitut du procureur en charge de l’environnement. « La politique pénale du parquet est ferme concernant le braconnage des tortues. Nous avons un déféremment systématique devant le procureur de la République et un envoi en comparution immédiate devant le tribunal correctionnel avec des peines fermes d’emprisonnement et un mandat de dépôt. »

Agression sexuelle : l’homme qui murmurait à l’oreille du zébu devant le juge

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Un prévenu comparaissait ce mercredi au tribunal pour une tentative d’atteinte sexuelle sur mineure de moins de quinze ans. Atteints de troubles psychiatriques, il écopera de dix-huit mois de prison avec sursis. Une affaire qui rappelle surtout l’insuffisante prise en charge des cas psychiatriques à Mayotte, faute de structure.

Il lève ses yeux ronds comme des billes et demande avec une naïveté sans feinte : “J’ai une maladie ? Ça fait partie de mon sang ?” Plus d’une fois, c’est cette même interrogation qui revient dans la bouche du prévenu, entendu ce mercredi au tribunal pour une tentative d’agression sexuelle sur une mineure de 14 ans. “J’ai quelque chose dans la tête ?”, répond-t-il encore en éludant sans le vouloir les questions du juge. Face à cet homme en quasi guenilles qui marmonne tantôt en shimaoré, tantôt dans un français approximatif, les robes noires ont tout le mal du monde à obtenir un discours à peu près cohérent sur les faits reprochés.

L’homme de la rivière

Ce jour de mai 2020, une fillette s’affaire à la rivière avec sa vaisselle, du côté de Bandraboua. Un homme s’approche. Il est torse nu, vêtu d’un simple caleçon gris. « Ça va bien ?”, l’alpague-t-il avant de la questionner sur son âge. Tout à coup, il l’agrippe, lui dit qu’il va la violer, et commence à soulever sa jupe. La jeune fille parvient à s’extirper et à courir vers sa mère un peu plus loin. Ouf ! Une voisine, qui l’a entendue crier et l’a vue s’échapper, confirmera aux gendarmes avoir elle aussi aperçu le prévenu. “Elle vous a croisé, vêtu de ce short gris. Elle dit que vous avez sollicité une relation sexuelle avec elle, et qu’elle pouvait constater que vous étiez en érection”, déroule le président à l’audience.

La nuit, tous les zébus sont gris

Pour le prévenu, en revanche, c’est le trou noir. Tout ce qu’il sait ? Il se rendait au magasin pour aller acheter de l’eau, et à son retour, il a remarqué son érection. “Je ne sais pas si c’est parce que j’avais mis des plantes dans ma bouche”, ânonne-t-il l’air éteint. Visiblement, le problème remonte à loin. Et ce n’est pas la première fois que cet individu tente de s’obtenir quelques faveurs. Sa famille, ses sœurs, sa mère… et un zébu, malencontreusement rencontré la nuit aux champs, en auront fait les frais. Manque de pot pour le dernier, il n’aura pas eu l’opportunité de dire non.

La responsabilité pénale en question

On l’aura compris, le bougre n’a pas vraiment toute sa tête. C’est d’ailleurs à cause de ses problèmes mentaux que sa mère l’a isolé du reste de la famille pour s’épargner ces avances répétées. Suivi par un psychiatre, l’homme a déjà été interné quelques fois, pour de courts séjours. “Une fois, j’ai été interné parce que j’avais une machette”, confirme-t-il à la barre. Des troubles attestés par l’expertise psychiatrique jointe à la procédure. Sujet à des visions qui “l’empêchent de se reposer”, le prévenu entend des voix, souffre de psychoses, de symptômes dépressifs, de tristesse et d’oublis réguliers. Et une consommation occasionnelle de chimique, qu’il nie, n’a pas dû arranger ce joli cocktail… Diagnostic : l’homme est sans doute schizophrène. Et il n’est que partiellement responsable au pénal des faits qui l’ont amené devant le tribunal.

Mayotte face au manque de structure psychiatrique

La bonne nouvelle ? Son cas n’est pas désespéré. “Sous traitement ou avec prise en charge, c’est curable”, résume en substance l’expertise. Mais c’est là que le bât blesse : car cette prise en charge a plutôt fait défaut, comme souvent à Mayotte, faute de structure psychiatrique adaptée. Avec seulement dix lits dans le service dédié au CHM, la capacité d’hospitalisation reste très insuffisante au regard des besoins. Et “son fonctionnement est pensé comme celui d’une unité de crise et impose une pratique médicale de durées de séjour courtes avec parfois des sorties précoces de patients encore très symptomatiques”, peut-on ainsi lire dans un rapport de visite du contrôleur général des lieux de privation de liberté, réalisée en 2016.

Et si le tribunal a pris le temps d’examiner dans les détails cette expertise et la personnalité du prévenu, c’est que tout cela pèse lourd dans la balance. “S’il avait la pleine possession de ses moyens, j’aurais demandé la prison ferme”, justifie le procureur. Dans ses réquisitions, il demandera ainsi une peine de 18 mois de prison avec sursis probatoire et deux obligations : celle de se faire soigner et l’interdiction de voir la victime. Les juges iront dans le sens du ministère public, et le prévenu écopera donc de cette peine. À condition de ne pas l’oublier…

 

À Passamaïnty stade, le dispositif « école ouverte » fait sa rentrée

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Pour la première fois, l’établissement scolaire de Passamaïnty stade met en place le dispositif « école ouverte » durant les vacances et accueille pendant 3 semaines 45 élèves de l’élémentaire pour leur proposer des cours pédagogiques le matin et des activités ludiques l’après-midi. Le directeur, Ali Hafarou Ahamada, s’en réjouit et espère pérenniser l’action sur le long terme.

Si le brouahah quotidien des quelque 800 élèves de Passamaïnty stade s’estompe avec les vacances, l’établissement scolaire n’en reste pas moins vivant pour autant puisqu’il accueille pour la première fois le dispositif « école ouverte » au cours des trois prochaines semaines. Au total, 45 enfants de CE1, CE2 et CM1 participent tous les matins à un renforcement pédagogique en français et en mathématiques de 8h à 11h, sous le regard avisé de leurs professeurs. Le choix des heureux élus repose sur différents critères : le volontariat des élèves mais aussi ceux qui ont des problèmes d’apprentissage et de comportement. Le tout avec l’accord des parents, « qui ont signé une autorisation », souligne le directeur Ali Hafarou Ahamada.

L’après-midi, place aux activités ludiques avec les animatrices de la ville de Mamoudzou. « Chaque semaine, nous organisons deux sorties extérieures pour leur faire découvrir un endroit où ils ne sont jamais allés, comme Saziley, le lac Dziani ou le Choungui », souligne l’une d’elles au recteur, Gilles Halbout, venu prendre la température ce mardi 15 décembre. Un programme alléchant salué d’un « super » par le responsable académique, qui s’efforce, tout au long de l’année, de visiter un maximum de groupes scolaires aux quatre coins de l’île pour recueillir les doléances de ses collaborateurs de l’Éducation nationale.

Un souci électrique de plus de 30 ans

L’occasion pour Ali Harafou Ahamada de pointer du doigt quelques dysfonctionnements repérés à l’intérieur de son enceinte. À l’instar de l’installation électrique défectueuse. « Lorsque j’étais moi-même CP, je connaissais déjà ce problème », rembobine-t-il pour démontrer l’urgence de la mise en place d’un nouveau système aux normes. Un souci qui donne également du fil à retordre à l’inspectrice, Mariama Abdou Kaphet, qui doit faire régulièrement face à des mouvements de crispation de la part des parents et des enseignants. « Il faudrait également remplacer le plafond à l’étage car la chaleur y est insoutenable et réaliser une extension pour supprimer la rotation », ajoute le directeur, en poste depuis cinq ans.

Concernant le sujet du jour, Ali Harafou Ahamada plaide pour un prolongement de cette action, ô combien bénéfique après les retards accumulés durant le confinement, mais aussi primordiale pour la continuité pédagogique. Seul hic, cela ne dépend pas que de lui… « Si la mairie acceptait d’augmenter le nombre de collations, nous pourrions prendre plus d’élèves », résume-t-il. Et précise même avoir reçu plus de 100 demandes pour participer à ce dispositif. Toutefois, il garde confiance en l’avenir. « Les enfants qui sont ici, nous les aurions retrouvés dehors en train de traîner dans la rue à cette période. Là, ils sont encadrés, c’est le point de départ. » Un message partagé par Gilles Halbout, qui a pour habitude de ressasser inlassablement le même discours. « Merci pour votre engagement », lâche-t-il, avant de prendre la direction de Tsoundzou 1, dans le cadre de sa tournée des popotes.

Assises de la sécurité à Mayotte : le chemin est encore long

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Ce mardi 15 décembre, le maire de Mamoudzou a convié les différentes autorités de l’île et les présidents des ateliers des Assises de la sécurité et de la citoyenneté pour valider le document de synthèse qui en a découlé. Cependant, quelques remarques de certains ont entraîné des modifications. Le document devra donc être retravaillé afin d’être à nouveau soumis à la délégation.

73 propositions réparties en 11 thématiques découlent des Assises de la sécurité et de la citoyenneté de Mayotte. Il ne s’agit là que le début d’un long travail laborieux et minutieux à la charge de l’État, du Département, des maires, du grand cadi ou encore du rectorat, pour ne citer qu’eux. Ce travail consiste en premier lieu à valider les propositions écrites qui reprennent les solutions évoquées par les participants lors des différents ateliers tenus pendant deux jours. Soumis aux institutions présentes lors de la réunion à l’hôtel de ville de Mamoudzou, ce document n’a pas été validé à cause des nombreuses modifications suggérées. “Il y a des raccourcis qui risquent d’être mal interprétés s’ils ne sont pas contextualisés”, rappelle l’un des présidents des ateliers des Assises de la sécurité. D’autres, à l’image du président de l’association des maires, ont insisté sur l’importance de mener à bien la mission jusqu’au bout. “C’est bien beau de faire des Assises, mais à chaque fois nous les multiplions et les Mahorais ne voient rien arriver. Ils finiront par ne plus y croire. Les élus doivent prendre leurs responsabilités, et l’État doit mettre les moyens pour que nous puissions sortir de cette insécurité”, déclare-t-il.

La sous-préfete et directrice de cabinet du préfet confirme l’investissement de la préfecture dans les solutions proposées, mais indique que même l’État a ses limites et qu’il ne pourra tout faire. “Il y a un certain nombre de propositions sur lesquelles la préfecture n’a pas la main. Que ce soit l’ouverture des frontières de l’espace Schengen, ou la réponse judiciaire”, souligne Laurence Carval. Les Mahorais attendent de voir les effets des Assises de la sécurité sur leur vie quotidienne, mais ils devront prendre leur mal en patience. “Il ne faut pas se tromper en se disant que les 73 propositions vont être validées et seront mises en oeuvre demain. Certes, certaines sont quasiment immédiatement applicables, mais beaucoup d’entre elles sont plus longues à réaliser ou ne seront pas accessibles”, prévient d’emblée la directrice de cabinet du préfet.

Des thématiques imprécises et floues

Si la majorité des participants s’accordent à dire que le document de synthèse reflète, dans l’ensemble, l’esprit des Assises de la sécurité, nombreux sont ceux qui évoquent des points à revoir. De son côté, le recteur souhaite l’intégration des langues régionales dans les propositions. “Lors des différents ateliers, nous avions évoqué le fait de faire de ces langues régionales un point fort dans l’apprentissage du français et dans une meilleure reconnaissance des cultures des uns et des autres.” Mais cela semble avoir été oublié lors de l’écriture du document de synthèse.

L’un des présidents des ateliers, Bacar Achiraf, pointe lui du doigt le chapitre intitulé “Au-delà de la pauvreté”, qui fait un amalgame. “Ce thème fait clairement le lien entre la délinquance et la pauvreté. Nous pourrions penser qu’on est délinquant parce qu’on est pauvre. C’est une façon réducteur de dire les choses, alors il faut contextualiser et formuler à nouveau le texte”, insiste-t-il.

Le grand cadi et son conseil cadial ont également pris part à la réunion. Ils militent pour que l’Islam ait une place plus importante parmi les 73 propositions. “À Mayotte, très peu d’enfants peuvent faire la distinction entre la culture et la religion, parce que toutes nos activités quotidiennes sont liées à la religion musulmane. Mais cela ne ressort pas dans le document. Il faut l’expliquer pour que les gens à Paris comprennent que nous ne pouvons pas dissocier la culture et la religion à Mayotte”, déclare l’un des conseillers.

Toutes ces suggestions n’ont pas permis la validation du document de synthèse des Assises de la sécurité et de la citoyenneté de Mayotte. Un calendrier sera mis en place par un groupe de travail pour suivre l’avancée des travaux et élaborer un plan d’action.

 

Entre Miréréni et Combani, la tension est de nouveau palpable

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Depuis vendredi dernier, de nouveaux affrontements ont éclaté entre les habitants de Miréréni et ceux de Combani. Si la raison de cette recrudescence de la délinquance reste pour l’heure inconnue aux yeux de la gendarmerie, l’agression d’un jeune de Vahibé aux abords du RSMA en serait l’origine. La municipalité a pris un arrêté pour limiter la circulation des mineurs des deux villages entre 19h et 5h.

« Tous les quatre matins, Combani essaie de nous chatouiller. » Résidente à Miréréni, Zakia* en a gros sur la patate. Depuis vendredi soir, les deux villages font de nouveau l’objet d’affrontements. Passages à tabac, magasins cambriolés, incendies multiples et caillassages sont le lot quotidien des habitants. Si pour l’heure, les forces de l’ordre disent ne pas connaître l’origine de cette étincelle, la population tient un discours plus pimenté. « L’agression d’un garçon de Vahibé qui se rendait au RSMA a mis le feu au poudre », raconte Mohamed*, visiblement bien au fait des événements de ces derniers jours.

La réplique ne se fait pas attendre avec le débarquement d’une centaine de jeunes de la commune voisine dès l’après-midi. « Les rumeurs vont bon train. L’enquête est en cours », tempère la gendarmerie. Dès lors, les bandes se rendent coup pour coup. Avec une nouvelle envolée le lendemain en fin d‘après-midi à l’occasion d’un guet-apens subis par les joueurs de football du club Miréréni à l’issue de leur match à Tchanga, faisant un blessé grave à l’oreille. Le soir-même, deux versions s’opposent. Tandis que Zakia évoque l’attaque de 30 jeunes casqués et cagoulés, munis de cocktails molotov et de boulons, Mohamed dénonce l’envahissement du quartier de Badjoni dans le but d’y mettre le feu. « Des jeunes de 12-13 ans se baladaient avec des bidons d’essence ! »

Miréréni, interdit de séjour à Combani

« Depuis samedi, nous avons interdiction de pénétrer à Combani », précise l’habitante de Miréréni, qui relate l’exclusion des femmes qui vendent leurs produits au marché. « Elles ont été traînées par terre… » Plus aucun travailleur ne peut se rendre sur son lieu de travail en passant par le pont. Et les menaces fusent. « Ces gens-là ne descendront plus chez nous », explique clairement Mohamed.

Mais le paroxysme intervient lundi, à la suite du décès d’une vieille dame de Combani, intervenu la veille. Sauf que le cimetière se trouve dans le village adverse. Œil pour œil, dent pour dent, les habitants de Miréréni leur refusent l’accès. De quoi remettre de l’huile sur le feu, surtout lorsqu’il s’agit de religion. « Nous avons dû l’enterrer à côté de la mosquée », précise le Combanien. Une décision soutenue par Zakia, qui met en garde les « parents qui utilisent les délinquants » pour se venger. « Nous nous faisons tabasser quand nous voulons faire des choses simples de la vie », poursuit-il.

« Nous sommes terrorisés »

D’un côté comme de l’autre, on se renvoie la balle. Plus personne ne semble vouloir mettre de l’eau dans son vin, comme cela a pu être le cas il y a quelques mois. « Les réunions ne donnent rien, car ils ne sont pas honnêtes. Nous ne pouvons plus échanger, ils veulent nous pousser à bout. Nous avons peur de sortir de chez nous, nous sommes terrorisés ! », déplore Zakia. Même son de cloche de la part de Mohamed qui craint une recrudescence des violences, même si ces derniers tendent à se calmer. « Quand ils commencent à boire et à fumer de la chimique, nous ne pouvons plus les contrôler. »

La gendarmerie, qui a déployé un escadron mobile depuis vendredi, se montre plus rassurante et ne recense aucun affrontement entre jeunes au cours des dernières 48 heures. Un calme relatif qui fait peut-être suite à l’arrêté municipale  « important » pris dimanche en fin de journée pour interdire la circulation des mineurs de 19h à 5h. Leur objectif ? Sécuriser les commerces, les restaurants, les lieux de vie habituels pour que « chacun reprenne son quotidien, sans avoir à vivre avec la peur au ventre ». Avant de tenter de dédramatiser : « Cela n’a rien à voir avec l’intensité des violences qu’il y a eu en septembre. »

* prénoms d’emprunt

À Combani, l’école de la deuxième chance pour les « invisibles » de Mayotte

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Lundi matin, Mlézi Maoré a inauguré la première école de la deuxième chance du territoire sur Combani, en lieu et place de l’ancien Café room. Une structure inédite qui peut accueillir jusqu’à 100 élèves, âgés de 16 à 25 ans, sans diplôme ni qualification pour une durée moyenne de 9 mois dans le but de les remettre sur le chemin de la formation qualifiante et du marché du travail. L’association espère pouvoir déployer ce nouveau dispositif dans les autres communes de l’île d’ici 3 ans.

Lunettes sur le nez, Aline Gardey adresse les consignes à ses 5 élèves du jour, quand une délégation d’officiels débarquent dans sa classe. Enseignante de mathématiques au lycée et bénévole à la toute première école de la deuxième chance de Mlézi Maoré, fraîchement inaugurée ce lundi 14 décembre à Combani, elle dévoile alors les résultats des tests de niveau au préfet, Jean-François Colombet. « Sur les 12 jeunes, seulement 3 ont réussi au moins 70% des items attendus à la fin du cycle 3, c’est-à-dire en fin de sixième », constate-t-elle, en lisant ses notes gribouillées sur son tableau.

Un constat plus ou moins alarmant qui justifie l’ouverture de cette nouvelle structure, susceptible d’accueillir jusqu’à 100 personnes, âgés de 16 à 25 ans, sans diplôme ni qualification, sur une année civile. Avec un seul mot d’ordre en tête : l’adaptation au cas par cas. « La présence moyenne à l’école est de 9 mois », précise Dahalani M’Houmadi, le directeur général de l’association. « Mais en fonction du parcours, des capacités et des acquisitions des uns et des autres, cela peut durer 6 ou 12 mois. »

Pas question pour autant de rester assis sur une chaise à bachoter de la théorie durant toute cette période. L’intérêt du dispositif consiste à prendre part à des immersions en entreprise via un programme sur-mesure, la moitié du temps de la scolarité, et à mettre en pratique l’apprentissage des savoir de base (lire, écrire et compter). Des notions indispensables, « même pour aller élaguer », note Hanima Ibrahima, la présidente, également ancienne maire de Chirongui. Le tout, dans le but de leur ouvrir la voie d’une formation qualifiante ou bien du marché de l’emploi.

Des adolescents en perdition

La cible privilégiée à traiter en urgence donc ? « La jeunesse, qui n’a plus de connaissances, de repères et de valeurs », insiste le délégué du gouvernement, qui veut « mettre le paquet pour récupérer un maximum de gamins et faire en sorte qu’ils ne fassent plus de bêtises ». Encore faut-il trouver et convaincre « ces adolescents en perdition »… Pour cela, Dahalani M’Houmadi compte sur les autres services de l’association en lien avec ces « invisibles », à l’instar des groupes de médiation citoyenne, de la protection de l’enfance et du pacte d’investissement des compétences. Mais aussi sur le rectorat et le régiment du service militaire adapté (RSMA) pour orienter les « décrocheurs » et les « 1.000 candidats non retenus ». Et ainsi les encadrer par une équipe pluridisciplinaire, composée de formateurs en mathématiques, en français et en informatique, de travailleurs sociaux et de conciliants en insertion professionnelle. « C’est un accompagnement à 360 degrés », résume le directeur général de Mlézi Maoré.

Un accompagnement qui se veut aussi attractif financièrement. Considérés comme stagiaires de la formation professionnelle, les bénéficiaires vont recevoir une indemnité mensuelle de plusieurs centaines d’euros de la part du Département pour « acheter à manger et économiser pour leurs projets d’avenir ». Mais aussi « pour se déplacer ». Car la mobilité est l’un des freins à l’inclusion sur le territoire. D’où l’intérêt de proposer un internat de 12 places pour les élèves originaires de villages éloignés.

Dupliquer cette école d’ici 3 ans

La collectivité justement place beaucoup d’espoir en ce dispositif. « Il faut réussir cette première expérimentation pour qu’elle serve d’exemple aux autres communes », martèle Mariame Said, la vice-présidente du conseil départemental en charge de l’éducation, de la formation et de l’insertion. Une ambition complètement partagée par Dahalani M’Houmadi, qui invite les villes situées dans le Nord et dans le Sud à prendre le train en marche et à rejoindre l’aventure pour favoriser la proximité. « Nous démarrons timidement, mais nous faisons le pari que cette école de la deuxième chance va se dupliquer d’ici 3 ans. Nous tirerons les leçons en temps et en heure pour la déployer. Nous savons qu’il s’agit d’une formule qui marche. » L’échec n’apparaît pas envisageable aux yeux des autorités locales, qui voient en cette école une chance de reprendre en main leur avenir social et professionnel. Le premier jour du reste de leur vie en quelque sorte.

Cour des comptes : un rapport pointe les défaillances de l’Éducation nationale à Mayotte et dans les Outre-mer

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Sur-rémunérations, faible taux de remplacement des enseignants, mauvais calibrage des moyens… Malgré les efforts budgétaires consentis, le système scolaire en Outre-mer pâtit de l’organisation des académies, calquée sur le modèle métropolitain.

Quatre milliards d’euros. C’est le coût annuel du système scolaire dans les cinq académies ultramarines, pour le seul ministère de l’Éducation nationale. “Rapporté au nombre d’élèves, il est supérieur d’environ 30 % à la moyenne nationale”, écrivent les magistrats de la Cour des comptes. Les sur-rémunérations versées aux agents titulaires affectés en Outre-mer n’y sont pas pour rien… Tout comme l’effort consenti pour étendre les dispositifs d’éducation prioritaire – à Mayotte, il concerne la quasi-totalité de l’académie. Le hic : cet effort budgétaire ne s’accompagne pas vraiment des résultats escomptés…

À la demande de la commission des finances du Sénat en janvier dernier, les rapporteurs ont rendu public ce mois-ci leur enquête sur le système éducatif dans les académies ultramarines. Et si ces territoires paient le prix de certaines caractéristiques géographiques, climatiques et socio-économiques “dont le cumul rend objectivement la mission éducative plus ardue que dans la plupart des académies métropolitaines”, soulignent-ils, il faut aussi “rechercher les causes d’une performance insuffisante du système scolaire de ces rectorats dans une organisation administrative et une gestion des dispositifs éducatifs trop peu adaptée aux réalités locales”.

 

Un temps d’enseignement plus court

Résultat, les modes de fonctionnement du système scolaire dans ces territoires sont jugés “peu satisfaisants”, par les rapporteurs, qui relèvent en autres “le taux faible de remplacement des absences des enseignants” et donc un “temps d’enseignement plus court pour ces élèves qu’en métropole”. “Un suivi attentif du temps effectif d’instruction s’impose, sa diminution pouvant expliquer des niveaux d’acquis scolaires préoccupants.”

Mauvais maîtrise du français à Mayotte

Et Mayotte n’est pas en reste. Particulièrement concernée par certains facteurs communs aux cinq académies ultramarines, comme son éloignement de la métropole, qui rend plus complexe le recrutement des personnels, mais aussi son climat tropical, son isolement, la défectuosité des équipements collectifs, le taux de pauvreté et de chômage, l’île aux parfums souffre en plus de difficultés qui lui sont propres. En haut de la pile : les “taux de progression vertigineux, alimentés par une immigration importante et largement clandestine”, de sa population totale et scolaire et la faible connaissance du français. 75,4% des élèves mahorais ont une maîtrise insuffisante ou fragile de la langue de Molière, contre 13,3% en moyenne nationale ! Sans parler de certains retards sur le déploiement du système éducatif dans le 101ème département. Pour l’anecdote, un siècle sépare ainsi l’ouverture du premier lycée à la Martinique (1883) et à Mayotte (1980).

Pas de “marges suffisantes” pour le rectorat

Pour les sages de la Cour des comptes, ces défaillances du système scolaire trouvent leur source dans “une organisation calquée sur le modèle métropolitain”, avec “de rares aménagements parfois contre-productifs”. Si cette homogénéité est censée être le gage d’une égalité de traitement entre tous les élèves français, elle ne laisse pas “aux recteurs de marges suffisantes dans l’application des règles pour répondre aux réalités locales”. Conséquence : les mécanismes d’affectation selon le droit commun ne permettent pas, par exemple, de pourvoir tous les postes. Un meilleur calibrage des moyens doit être envisagé pour s’adapter aux situations locales. La situation est en effet bien différente entre les académies des Antilles et de La Réunion, “où une gestion rectorale plus vigoureuse est attendue, qu’en Guyane et à Mayotte, où l’Éducation nationale est confrontée à plusieurs défis majeurs”, comme le “nombre d’enfants à scolariser dans des bâtiments déjà saturés, quasiment privés de cantines et dépourvus de places d’internat” ; “l’attractivité pour les enseignants” ; ou encore “la langue maternelle qui n’est généralement pas le français”, poursuit le rapport.

Adaptation des concours et formations aux besoins locaux

Pour autant, “le seul effort financier accordant des moyens quantitativement supérieurs aux académies ultramarines ne suffit pas à obtenir des résultats convenables en termes de niveaux et d’acquis”, martèlent les magistrats. Qui formulent plusieurs recommandations, notamment pour Mayotte : adaptation des concours d’enseignement aux besoins locaux, amélioration du processus de recrutement des contractuels pour les affecter dès la rentrée ; meilleur dimensionnement des moyens pour la scolarisation des élèves allophones nouvellement arrivés ou encore sensibilisation et formation des enseignants nouvellement affectés à la question linguistique, font partie des pistes envisagées.

Une association météorologique lance un appel pour s’installer à Mayotte

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L’association Météor Océan indien souhaite poser ses valises à Mayotte. L’objectif est de collecter des données météorologiques qui permettraient de mieux anticiper les épisodes orageux et cycloniques. Pour cela, la structure a besoin de bénévoles installés dans le 101ème département et de dons.

L’association Météor Océan Indien lance une bouteille à la mer, dans l’espoir de trouver des bénévoles et donateurs pour répondre à l’appel. Implantée à La Réunion depuis 2015, à Madagascar et à Maurice, elle collecte tous types de données météorologiques afin de créer un réseau d’observation météo climatique. La suite logique ? S’enraciner à Mayotte. “L’année dernière, nous avons beaucoup suivi le cyclone Belna. Nous nous sommes rendus compte que la donnée météo de Météo France à Mayotte était très parcellaire. Nous souhaitons apporter de la donnée complémentaire”, explique Alexandre Bijoux, président de l’association Météor Océan Indien.

Pour se faire, l’association est à la recherche de bénévoles pour contribuer au réseau. Nul besoin d’être un scientifique, tout passionné de météo et de climat peut s’investir. Chaque volontaire peut également participer en faisant un don financier ou matériel. “Notre association est d’intérêt général donc tous les dons sont défiscalisables à hauteur de 66%. Même les entreprises peuvent s’y intéresser comme c’est le cas à La Réunion”, précise Alexandre Bijoux.

Les collectivités locales sont également appelées à contribution puisque les données collectées leur seront d’une grande utilité. “Les stations météo qui seront implantées sur l’île peuvent aussi servir lors d’épisodes d’inondation. J’ai déjà échangé avec des gens qui travaillent à Mayotte sur la gestion de crise, et il y a un manque de données dans ce domaine”, selon le président de l’association. Au-delà des données, Météor Océan Indien a une logique pédagogique qui consiste à travailler avec les élèves afin de les sensibiliser sur les questions climatiques.

Un travail minutieux pour compléter celui de Météo France

L’association n’a pas l’intention de concurrencer Météo France, bien au contraire. Les deux partis ont signé une convention qui les autorise à se partager les données. “Cela a un intérêt particulier puisque lorsque nous nous retrouvons dans un épisode cyclonique ou d’inondation. Météo France doit réaliser pour l’État un diagnostique pour la déclaration de catastrophe naturelle. À ce moment-là ils sont à la recherche de toutes les données météorologiques disponibles”, éclaire Alexandre Bijoux. De plus, celles de l’association sont accessibles gratuitement et actualisées toutes les 5 minutes, contrairement à celles de Météo France qui ne sont que partiellement gratuites et actualisées toutes les heures.

Météor Océan Indien souhaite installer à Mayotte deux à trois stations météo d’une valeur de 1.000 à 1.500 euros pour commencer. Soit 10 fois moins cher que celles de Météo France. L’intérêt d’implanter ces stations météo dans le 101ème département est d’avoir des données plus précises. “Mayotte est peut-être une île de taille modeste, mais nous voyons bien que le relief fait que nous avons des micros climats à l’intérieur du territoire. La station météo sera représentative de la donnée où elle se trouve jusqu’à une zone de 500 mètres”, justifie Alexandre Bijoux. Il est donc nécessaire de les multiplier afin de couvrir toute l’île. Les stations météo qui seront placées à Mayotte pourraient également être utiles à toute la zone ouest de l’Océan indien, extrêmement exposée aux orages. Alexandre Bijoux rappelle qu’“aujourd’hui les deux données de détection d’orages sont implantées à La Réunion et à Maurice. Alors que pour couvrir au mieux l’Océan Indien, il faudrait qu’il y en ait sur toutes les îles. Les capteurs les plus proches sont en Afrique australe donc assez loin. Si nous arrivons à en installer un ou deux à Mayotte, nous pourrions mieux couvrir la zone.” L’appel est donc lancé dans l’espoir d’attirer un nombre important de bénévoles.

Vous pouvez contacter l’association sur :

  • Leur page facebook : Météor Océan Indien
  • Leur adresse e-mail : contact@meteor-oi.re

Leur site web : http://www.meteor-oi.re

Dissolution de la Cadema : le Caribus en danger ?

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Décidément, la victoire de Dembéni lors de l’élection, en juillet dernier, de la communauté d’agglomération qui la lie à Mamoudzou est restée en travers de la gorge du maire de la commune chef-lieu. Mais pour se séparer de ses voisins, Ambdilwahedou Soumaila a du pain sur la planche…

Cette information qui a fuité dans la presse n’aura pas fait que des heureux. Le maire de Mamoudzou aurait écrit au préfet de Mayotte le 19 novembre dernier pour l’informer qu’il engageait la procédure de dissolution de la Cadema. Une procédure qui s’annonce difficile en pratique… et qui serait surtout lourde de conséquences pour le territoire. Car s’il y a bien un dossier structurant et qui apparaît en haut du panier pour l’interco, c’est bien le Caribus.

Dans les cartons depuis 2008 – plus de dix ans ! – le projet qui doit désengorger Mamoudzou grâce à la mise en œuvre d’un réseau de transport collectif urbain (TCU), pourrait en effet pâtir de cette annonce. “Les travaux allaient commencer dans les prochains mois, voire les prochaines semaines !”, déplore Mohamed Moindjie, l’ancien vice-président en charge des transports à la Cadema, qui a travaillé d’arrache-pied sur le projet depuis 2014. “Cette annonce ou ce courrier pour des raisons qui m’échappent, cela n’augure rien de bon pour l’avenir”, poursuit-il.

Un château de cartes prêt à s’effondrer

Il faut dire que le Caribus est un sacré château de cartes. Outre la quantité d’études, d’enquêtes ou de marchés publics lancés depuis toutes ces années – cerise sur le gâteau, EDM et la Cadema viennent d’ailleurs de signer une convention le 8 décembre -, et qui menaceraient d’être réduits à néant avec la dissolution de l’interco, ce sont aussi les financements qui risquent de nous passer sous le nez. Ce ne serait d’ailleurs pas la première fois que la Cadema joue ainsi avec le feu. Petit coup d’œil dans le rétro pour s’en convaincre ? En 2016, l’État avait accordé une subvention dans le cadre d’un appel à projet Grenelle de l’environnement  – 10% de l’enveloppe initiale de 90 millions d’euros – conditionnée à un engagement des fonds de 25% au moins dans les années suivantes. “J’avais déjà dû négocier une fois le report jusqu’en 2019”, se souvient Mohamed Moindjie.

La pression de Bruxelles

Aujourd’hui, entre les fonds européens et ceux du contrat de convergence, le plan de financement pour un projet chiffré aujourd’hui à près de 140 millions d’euros, est “aussi structuré que complexe”. “Les financeurs ont besoin de sérénité pour envisager l’avenir. Créer une incertitude en faisant croire que la Cadema pourrait être dissoute, cela ne rassure pas”, s’inquiète encore Mohamed Moindjie. Surtout dans le cadre de la programmation 2014-2020 des fonds européens. Or, du côté de Bruxelles, l’on surveille de près l’avancement du fameux Caribus… Quitte à menacer d’adapter les enveloppes accordées, si les décideurs échouaient à finaliser ce totem.

Majorité qualifiée

Reste à savoir si cette annonce de la dissolution de la Cadema, est un coup de bluff ou une vraie volonté politique. “Je n’ai jamais entendu parler de cela en séance, et je ne vois d’ailleurs pas bien comment il compte s’y prendre”, confie un conseiller municipal à Mamoudzou. Pour mettre fin à cette interco qui lie la commune chef-lieu à Dembeni depuis 2015, le maire avance l’article L5210-1-1 du code général des collectivités territoriales et le soutien de sa majorité, relaient nos confrères. Cet article prévoit notamment la mise en place d’un schéma départemental de coopération intercommunale, qui peut “proposer la création, la transformation ou la fusion d’établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, ainsi que la modification de leurs périmètres” et “la suppression, la transformation, ainsi que la fusion de syndicats de communes ou de syndicats mixtes”.

Encore faut-il que les deux communes acceptent, ainsi que l’organe délibérant de l’EPCI (établissement public de coopération intercommunale). Et pas dans n’importe quelles conditions : la demande de retrait doit recueillir une majorité qualifiée, à voir les deux tiers des conseils municipaux des communes représentant au moins la moitié de la population ou la moitié des conseils municipaux représentant au moins les deux tiers de la population. Un pari difficile à relever pour la liste d’Ambdilwahedou Soumaïla, et ses quinze sièges à la mairie de Mamoudzou. On imagine mal Mohamed Majani et sa liste d’opposition – qui avaient déjà soutenu Dembéni lors de l’élection de la Cadema en juillet dernier – se rallier à sa cause… Encore un coup d’épée dans l’eau entre les deux communes ?

Mayotte : Les travaux de la piste longue promis au tout début de l’année 2023

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Vendredi matin s’est tenu le second comité de pilotage sur la piste longue au sein de l’hémicycle Younoussa Bamana. Le préfet Jean-François Colombet a confirmé à la sortie de la réunion la réalisation de cet ouvrage d’État avec un début des travaux prévus en 2023. Reste encore à déterminer les matériaux utilisés, le mode d’acheminement ainsi que le profil et la longueur de la piste.

 À la sortie du second comité de pilotage sur la piste longue de vendredi dernier, auquel les médias n’ont pas pu – malheureusement – assister, tous les journalistes restent sur leur faim. À quoi s’attendre du point presse tenu par Jean-François Colombet, le préfet de Mayotte ? Un énième effet d’annonce ou un calendrier préétabli avec des chiffres et des dates ? « Malgré les difficultés auxquelles ont dû faire face les services de l’État,  pour faire avancer ce projet, nous n’avons perdu aucun délai sur le programme de réalisation », introduit le délégué du gouvernement. Mieux encore, le locataire de la Case Rocher assure le lancement par la direction générale de l’aviation civile de tous les marchés. Voilà du concret à se mettre sous la dent !

Première information et non des moindres : le profil du futur ouvrage « sera définitivement arrêté en octobre 2021 ». Un laps de temps indispensable qui correspond à une phase dite de consolidation du dossier, « complexe sur le plan technique et juridique », pour mener à bien tous les travaux préparatoires et ainsi « éviter les erreurs que d’autres ont pu commettre ». En ligne de mire, sans le nommer directement, le projet pharaoïnique de la nouvelle route du littoral à La Réunion… À l’arrêt depuis plusieurs mois. Pas question d’envisager un tel dénouement.

La piste convergente privilégiée

Le mystère demeure donc, même si « tous les experts ont en tête les conclusions du débat public qui a déjà eu lieu ». Vu l’importance de la population à proximité de l’aéroport, un scénario s’avère « très, très, très privilégié ». À savoir la piste convergente, qui permettrait d’autant plus de ne pas impacter le trafic aérien durant le chantier. Reste encore à décider de sa longueur, 2.500, 2.600 ou 2.800 mètres, en fonction de la prise en compte des conditions météorologiques et des caractéristiques techniques des appareils susceptibles de se poser sur le 101ème département. Dans l’optique que « tous les gros porteurs – l’A330neo, l’A350-900 et le 787 – puissent atterrir à Mayotte et redécoller sans escale en direction de Paris ».

Bien avant d’envisager ces conclusions, il faut déterminer les gisements de matériaux mobilisés. Là encore, plusieurs options sortent du lot, dont certaines sont propres au territoire. Comme l’exploitation de carrières existantes et celles à venir, le recyclage de déchets issus du BTP avec une approche environnementale ou encore des solutions lagunaires. « Nous avons besoin de remblais et de granulats pour remettre à niveau et réaliser la piste », souligne Jean-François Colombet, qui indique une décision d’ici « à peine 2 mois ». Sans oublier la question des modes d’acheminement, puisqu’il n’apparaît pas concevable d’imaginer la circulation quotidienne d’une barrière de camions pendant 3 ou 4 ans à travers les villages. Une chose est sure, ils devront « préserver le milieu naturel et la tranquillité des habitants ». D’ailleurs, les autorités veulent jouer la carte de la transparence. Comme en témoigne la poursuite de la concertation publique avec Renée Aupetite, garante de la commission nationale du débat public, dont le rôle consiste à faire en sorte que toutes les procédures menées par le maître d’ouvrage soient accessibles aux élus et au public.

 Un montant de 250 millions d’euros… affiné

 La dernière inconnue réside dans le plan de financement exact. Et sur ce point, le préfet salue les 80 millions d’euros débloqués en séance plénière par le Département il y a de cela quelques semaines. Quid du reste sachant que le coût approximatif est de l’ordre de 250 millions d’euros ? Le montant « sera affiné au fur et à mesure que les études seront rendues », précise-t-il, en assurant que l’État sera au rendez-vous. « C’est au cours d’une réunion interministérielle que [sa] participation sera déterminée précisemment. » Dans ces conditions, le schéma actuel table sur un engagement de étatique de 120 millions d’euros et un apport de l’Europe de 50 millions d’euros.

Peu importe les choix des prochains mois, « la piste longue sera bel et bien réalisée à Mayotte », martèle Jean-François Colombet, comme l’a promis le président de la République, Emmanuel Macron, durant sa visite en octobre 2019. Véridique ? « Les travaux pourront débuter, sauf un aléa exceptionnel, notamment climatique, au tout début de l’année 2023 ! » Sans toutefois connaître la date de livraison… Une réponse peut-être apportée lors d’un nouveau comité de pilotage, qui doit se tenir avant la fin du premier semestre 2021.

Corsair se pose à nouveau à Mayotte après deux ans d’absence

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L’annonce a été faite il y a quelques mois, et elle s’est concrétisée le samedi 12 décembre. Après deux ans d’absence, la compagnie aérienne Corsair International a fait son grand retour sur le ciel et le sol mahorais. Un évènement qui devrait s’inscrire sur le long terme puisque Corsair a l’ambition de devenir la compagnie de l’Outre-mer, avec des prix qui défient la concurrence.

Il était 15h50 lorsque l’Airbus A330 de la compagnie Corsair International a atterri sur le tarmac de l’aéroport de Dzaoudzi-Pamandzi. Et ce premier vol en provenance de l’île de La Réunion était déjà complet. Les dirigeants de la compagnie ont fait le déplacement jusqu’à Mayotte pour assister à l’évènement. L’émotion était présente lorsque l’avion a défilé le long de la piste, accompagné de trois camions de pompiers en guise de cortège. “C’est un jour très spécial pour nous. Nous l’attendions avec impatience. C’est une fierté et un honneur”, s’émeut Jules Perreau, le directeur régional Océan Indien de Corsair. L’appareil n’a pas eu droit à son water salute, à cause de la crise de l’eau, mais la pluie s’en est chargée. Dès lors qu’il s’est posé sur le sol mahorais, une grosse averse est tombée.

Est-ce le signe d’un avenir heureux à Mayotte pour la compagnie ? C’est ce que souhaitent ses dirigeants. Au-delà de l’émotion, Corsair a l’ambition d’être LA compagnie de l’Outre-mer et LA compagnie préférée des Mahorais. Pour cela, elle a établi un plan d’une durée de 5 ans à Mayotte. “Dans le monde de l’aéronautique, 5 ans c’est du long terme. Si nous avons pris la décision de venir à Mayotte c’est parce que nous sommes convaincus de rester très longtemps de manière pérenne et rentable”, assure Gilles Ringwald, directeur général adjoint, chargé des affaires commerciales de Corsair. Cela va s’articuler par une augmentation de la fréquence des vols. Pour l’heure, les avions de la compagnie desserviront Mayotte deux fois par semaine, avec deux exceptions le 17 décembre et le 7 janvier 2021 afin d’assurer les départs et retours des vacances. À partir du 15 juin 2021, et jusqu’au 15 septembre de la même année, Corsair doublera ses vols hebdomadaires. Une belle surprise pour les voyageurs puisqu’initialement la compagnie n’avait prévu que 3 vols.

Pour mener à bien ce projet, 5 Airbus A330-900NEO viendront compléter progressivement la flotte de la compagnie à partir du mois d’avril 2021 jusqu’à la fin de l’année. Corsair a vendu tous ses appareils Boieng afin de mieux s’adapter. “Le passage en tout Airbus nous permet de nous installer durablement sur Mayotte. En terme de fret, l’ouverture de la ligne et l’arrivée de ces nouveaux Airbus nous permettront de répondre au marché. Nous allons améliorer significativement les capacités d’emport de fret, en multipliant par 2 la capacité actuelle soit entre 10 et 15 tonnes”, annonce le directeur général adjoint. Grâce à tous ces projets, Corsair a l’intention de s’approprier 40% de part de marché parmi les vols Mayotte-Paris.

Des prix qui défient la concurrence

Si les Mahorais ont longtemps souhaité que d’autres compagnies aériennes s’installent à Mayotte, c’est notamment à cause des prix souvent exorbitants d’Air Austral. Son principal concurrent, Corsair, se met au défi de proposer des prix imbattables. “Nous prenons l’engagement de toujours offrir le meilleur prix avec un service de très bonne qualité. Nous commençons avec un tarif promotionnel de 598 euros toutes taxes comprises sans bagages et à 678 euros toutes taxes comprises avec bagages pour un aller retour Mayotte-Paris à partir du 25 janvier”, précise Gilles Ringwald. Les tarifs étudiants qui existent sur les autres territoires d’Outre-mer devraient également s’appliquer prochainement sur le territoire. Mais les représentants de la compagnie préviennent les Mahorais. Nous ne pouvons pas nous attendre à bénéficier des mêmes prix qu’à La Réunion ou les autres destinations ultramarines. “Notre ADN est de permettre aux gens de pouvoir voyager et pour cela il y a un juste prix. Il s’agit du prix que le client est prêt à payer pour pouvoir partir mais également du prix qui doit être suffisant à la compagnie aérienne pour continuer à opérer. Tout a un coût et si nous mettions un billet à 300 euros pour Mayotte-Paris, là nous pourrions nous poser des questions sur la pérennité de Corsair à Mayotte, selon Gilles Ringwald, le directeur général adjoint de Corsair. Les Mahorais ne pourront pas non plus bénéficier d’une ligne direct entre l’île aux parfum et l’hexagone. Les voyageurs devront obligatoirement passer par l’île Bourbon tant que la piste ne sera pas prolongée.

À Kawéni Poste, le théâtre met tous les élèves au même niveau

Les élèves du premier degré ont découvert l’art de la scène et le théâtre au travers d’une action nouvelle, mise en place par la circonscription de Mamoudzou Nord et financée par la cité éducative de Kawéni. Du 7 au 10 décembre ont eu lieu les représentations des pièces jouées par les acteurs en herbe de cinq écoles élémentaires, clôturant plusieurs semaines d’initiation animées par l’association du quartier « Action Coup de Pouce ».  Retour sur la performance de la classe de CM2 E de Kawéni Poste.

Jeudi, 10h. Dans leur classe, les élèves de la classe de CM2 E de Kawéni Poste se préparent à monter sur les planches, ou plutôt à descendre dans la cour de récréation pour se mettre en scène. Quelques minutes pour enfiler les costumes finalisés dans la matinée. Le rythme cardiaque des uns s’accélère, les jambes des autres s’engourdissent. Le stress, lui, est à son paroxysme. « Pour cacher ma peur, je me concentre », confie Ibrahim, avec son regard malicieux. Sa camarade, Zaël, éprouve plus de difficulté à contenir son trac, mais peut compter sur une accolade de sa maîtresse, Marguerite, pour l’encourager. « Ça m’a rassuré ! », murmure-t-elle, un brin impressionnée par la foule assise en arc de cercle.

« Important de montrer l’exemple »

Plus le temps de rebrousser chemin. Pas de « trois coups » pour donner le signal, mais un silence de cathédrale. La première saynète sensibilise à la préservation de l’environnement : un voulé vient mettre à mal la plantation d’un agriculteur. Une image ô combien symbolique de ce qui se trame chaque jour sur l’île aux parfums. Message reçu 5 sur 5 par les acteurs en herbe, vu leurs réactions à la fin de cette représentation. « Tout le monde jette ses déchets par terre », s’indigne Roihamatou, complètement désabusée par la pratique des habitants. À l’instar de la tante et des grands-parents d’Irma, qui « n’ose pas [leur] dire que c’est mal ». Un comportement qui fait tout simplement grincer des dents sa copine Zaël : « L’écologie est importante car sans les arbres, on n’aura plus d’oxygène pour respirer. » Alors pour Diana, il faut que les enfants prennent ce sujet à bras le corps et sensibilisent leur entourage. « Je pense que c’est important de montrer l’exemple », lâche-t-elle d’un ton solennel, comme pour dire « stop, y en a assez ».

Bis repetita avec la deuxième mise en scène, qui aborde cette fois-ci la thématique de la liberté de circulation. Chapeaux vissés sur la tête, deux policiers vérifient les identités des passants, d’un chat et d’un oiseau dans le centre de Mamoudzou. À fond dans son rôle, El-Hadji enchante le public par sa prestance. « Bonjour, contrôle de papiers s’il vous plaît ! » À peine ses interlocuteurs ont-ils le temps de jacasser que le jeune garçon vitupère : « Pas de papier ? Au cachot ! » Une réplique qui fait pouffer de rire les autres classes spectatrices. Même si son ton vilipendeur colle plutôt bien à la politique migratoire menée dans le 101ème département. Une stratégie rejetée totalement par Ilarry. « Il faut faire comprendre que tout le monde peut circuler librement », insiste-t-elle avec son air innocent.

« C’est ça aussi, le théâtre »

Une quinzaine de minutes leur suffit pour convaincre le public et le corps enseignant. Un tonnerre d’applaudissements s’élève instinctivement. Auquel répondent les futurs collégiens par un sobre salut, le sentiment du devoir accompli. « Je suis très satisfait du résultat, je ne m’attendais pas du tout à ça », concède Abacar, animateur salarié de l’association de quartier « Action Coup de Pouce », qui a, pendant cinq semaines, initié la classe de CM2 E à l’art de la scène. « Leur maîtresse les a vraiment portés pour que le rendu soit à la hauteur. »

Conquise, Marguerite accourt vers ses élèves pour les féliciter un par un. « Vous avez improvisé à certains moments, mais c’est ça aussi, le théâtre », leur glisse-t-elle, bluffée par le jeu d’acteur de ses protégés. « Quand j’ai postulé à ces ateliers, ils étaient terrorisés à l’idée de se donner en spectacle devant les autres élèves de l’école. » Pas de regret à la vue du résultat et surtout du vibrant hommage. « Cela a permis à certains de se dévoiler un peu plus ! C’était très bien de découvrir une nouvelle activité dans laquelle tout le monde était au même niveau », souligne-t-elle, en guise de baisser de rideau. Avant de reprendre les répétitions au mois de janvier, au retour des vacances de fin d’année. Pour le plus grand bonheur de Toianti : « On rigole, on s’amuse. C’est mieux d’apprendre en jouant ! »

Exposition Made in Mayotte 2020 : Marlène Fraytag, du bois et des lettres

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Du 7 au 19 décembre 2020, 13 producteurs et artisans proposent le fruit de leur travail lors d’une exposition au comité du tourisme de Mayotte. À cette occasion, Flash Infos vous propose cette semaine des portraits de ces acteurs qui font vivre l’artisanat local. Aujourd’hui, Marlène Fraytag, le visage derrière Touch’du bois.

Elle dévisse délicatement un stylo à plumes, comme s’il s’agissait d’un pétale de rose. “D’abord, il faut découper le bois avec une scie à rebond. Puis, il faut le percer pour insérer un tube en laiton à l’intérieur. Enfin, ça passe sur la tour à bois et avec un couteau je travaille la forme que je veux”, décrit Marlène Fraytag en montrant du doigt chacune des pièces ainsi désassemblées. La touche finale ? Un hippocampe. Sa “signature”.

Sur cet étal à l’exposition Made in Mayotte, des dizaines de stylos attendent à leur tour de tracer la leur. En bois de litchi, de bambou, d’ylang, de jacquier, de cocotier, de palmier, de takamaka ou de cannelle, ils sont le fruit de ce travail d’orfèvre. En tout, il lui faut deux heures pour fabriquer chaque pièce.

Mais encore faut-il trouver la matière première. Que de la récup’ !, assure Marlène Fraytag, obtenue grâce au bouche-à-oreilles… et un bon sens du relationnel et de la débrouille. “Je me suis rapprochée des entreprises d’élagages ou bien je cherche en bord de route”, décrit la gérante de Touch’du bois. “Parfois, il faut deux années pour parvenir à un séchage complet.”

Maître tourneur

C’est en 2013, que cette ancienne fleuriste opère sa reconversion pour vivre sa passion. “J’adore la calligraphie, c’est pour cela que j’ai choisi de fabriquer des stylos”, déroule-t-elle. Formée par “une personne qui était du métier”, cette artisane qui tourne ses ramures inlassablement au fond de son jardin à Tsingoni, a de la reconnaissance à revendre. “C’est Mayotte qui m’a appris le métier de tourneur de bois. Et je suis contente d’avoir eu un maître avant de me lancer”, sourit-elle.

Aujourd’hui, Marlène n’hésite pas à transmettre ses connaissances à des petites mains, dès que les affaires tournent. “Cette année a été plus calme à cause du Covid, mais d’habitude, en cette période, nous sommes au moins deux à l’atelier !” Il faut dire qu’il y a du pain sur la planche. Outre ses gammes de stylos, la créatrice a aussi diversifié son offre avec des bijoux, des ouvre-bouteilles et autres vaporisateurs de parfums. Le tout personnalisable grâce à la gravure laser. Encore un clin d’œil aux belles lettres !

Ces signaux qui prouvent que le Covid-19 est toujours actif à Mayotte

Plusieurs indicateurs montrent une progression du virus à Mayotte, signe possible d’un relâchement ou d’une lassitude de la population face à l’épidémie. Mais alors que les vacances scolaires et les fêtes de fin d’année approchent, l’agence régionale de santé a tenu à rappeler l’importance de ne pas baisser la garde.

Une fois n’est pas coutume, Mayotte est l’un des départements français les mieux lotis, en ces temps de deuxième vague. Derniers chiffres au compteur : 177 nouveaux cas positifs au Covid-19 entre le 30 novembre et le 6 décembre et huit personnes hospitalisées ce jeudi. Rien à voir avec la France métropolitaine, qui patauge entre ses quelque 11.000 nouvelles contaminations en 24h, et un déconfinement corsé, loin de l’objectif des 5.000 cas attendu le 15 décembre. Pas étonnant, donc, que sur l’artère bouchée de Kawéni en semaine ou dans les voulés festifs du week-end, l’épidémie semble bien loin des préoccupations locales… Mais quand même. “Je préfère regarder l’évolution globale que les chiffres au jour le jour : et aujourd’hui, je peux vous affirmer que l’épidémie ne régresse pas”, insiste Dominique Voynet, la directrice de l’Agence régionale de santé.

À l’approche des fêtes de fin d’année et des vacances scolaires, l’ex-ministre a tenu à envoyer un message de prudence alors que les gestes barrières “ont fait leur preuve”. “Nous sommes toujours dans la seconde vague. Et ce qui nous inquiète, c’est la persistance de cas qui justifient des hospitalisations et qui provoquent des décès.” Alors que pendant la période de juin, juillet, août, l’épidémie avait, semble-t-il, marqué le pas, “nous en avons à nouveau un petit peu plus aujourd’hui. Tous les trois quatre jours, nous avons un décès”, déplore-t-elle. Derniers en date, deux personnes en réanimation, dont un homme d’une soixantaine d’années qui a succombé après une longue période passée sous respirateur.

Bouéni dans le rouge

Et ce n’est pas le seul signal d’alerte : avec un taux d’incidence de 63,7 cas pour 100.000 habitants et un taux de positivité qui se maintient désormais “plus souvent au-dessus qu’en dessous” des 10%, les indicateurs montrent une phase ascendante du virus sur les dernières semaines. Enfin, le R0, c’est-à-dire le nombre de personnes contaminées par un cas positif, resté inférieur à 1 depuis l’hiver austral, a lui aussi recommencé à frémir depuis une dizaine de jours. Huit communes sont particulièrement concernées. Or, le virus circule. Et si Ouangani semble désormais hors de danger après une vaste campagne de dépistage, c’est au tour de Bouéni d’affoler les statistiques de l’agence de santé. “Le taux d’incidence y est le plus élevé, au-dessus de 200. Cela s’apparente à certaines régions les plus contaminées de métropole…”, analyse Dominique Voynet.

Plus de réactifs, moins de candidats

Juste une histoire de tests ? Pas vraiment, explique la directrice. Certes, les stocks du CHM et du laboratoire privé sont désormais suffisants pour dépister plus largement. Une bouffée d’air rendue possible entre autres par l’arrivée des tests antigéniques, dont le résultat est disponible en seulement quelques minutes. Mais force est de constater que les candidats ne se bousculent pas sous le coton-tige. Encore une preuve de la lassitude de la population face à une menace qu’elle aimerait bien oublier…

Il faut dire que du côté du CHM, la panique de la première vague semble elle aussi s’être évanouie. Mais, “nous étions alors durement frappés par une épidémie de dengue qui elle aussi chargeait les services de l’hôpital”, répond la responsable de l’ARS. Une piqûre de rappel, alors que la saison des pluies pointe le bout de son nez. “Pour l’instant, il n’y a pas de raison de durcir les règles”, tempère toutefois Dominique Voynet, en référence aux rares et légères restrictions qui s’appliquent à Mayotte. “Mais cela arrivera après les vacances si les gens font n’importe quoi !” Le retour risque de piquer !

Une campagne de vaccination technique et complexe à mener

C’est officiel. Margaret Keenan, une Britannique de 90 ans, a reçu la première injection du vaccin Pfizer/BioNTech. Et alors que le monde entier a les yeux rivés sur le Royaume-Uni, Mayotte, elle aussi, se prépare à accueillir le précieux sésame. “Mais ces vaccins, que ce soit Pfizer ou Moderna, reposent sur une technique très complexe”, met en garde Dominique Voynet. Outre les conditions de conservation des flacons, à -80 degrés, qui nécessitent des équipements spécifiques, c’est aussi la stratégie de vaccination qui interroge. La campagne pour la France a été détaillée début décembre par le premier ministre Jean Castex et le ministre de la Santé Olivier Véran. La première phase, qui doit débuter de janvier à février, concernera 1 million de personnes, en priorité les résidents et le personnel des Ehpad. Or, il n’existe pas d’établissement de ce type dans le 101ème département. “Nous sommes en train de négocier avec le ministère de la Santé les conditions d’administration du vaccin pour les personnes les plus fragiles, les personnes âgées, celles atteintes de pathologies connues et qui peuvent présenter un risque… Mais cette négociation n’est pas finie”, explique la directrice de l’ARS, qui se donne entre deux et quatre semaines pour préparer la campagne vaccinale. Un travail d’autant plus compliqué à Mayotte qu’une partie importante de la population n’est pas assurée sociale…

 

 

Mayotte : une interpellation qui vire au procès

Les faits se sont déroulés au mois de novembre 2019, mais le grand public ne les découvrent que maintenant. Il y a un an, le docteur Youssouf Ali se fait interpeller par deux agents de la police nationale alors qu’il commet une infraction routière. Mais l’arrestation vire rapidement au conflit et prend une proportion que le principal concerné n’aurait jamais imaginée.

Novembre 2019. Médecin à Mayotte depuis 20 ans,  le docteur Youssouf Ali se retrouve coincé dans les embouteillages  lors d’une journée de travail habituelle et décide d’emprunter un raccourci. « Je suis passé par la route qui va au rectorat en descendant par les 100 villas pour arriver rapidement au travail. Je n’ai pas fait attention et j’ai pris une voie à contresens », raconte-t-il. Des policiers stationnés devant le lycée Bamana l’interpellent. « L’un d’eux m’a question sur la provenance de mon permis. J’ai trouvé cela déplacée. Je lui ai demandé pourquoi il disait ça, puis il m’a montré le sens interdit. J’ai alors compris mon infraction avant de présenter mes excuses, en expliquant être pressé », continue le médecin. Espérant n’avoir qu’une amende ou dans le pire des cas un retrait de points, tout ne se passe pas comme il l’imagine. L’agent de police en question lui prie d’arrêter le moteur et de présenter son permis.

Le docteur Youssouf Ali obtempère mais une phrase de son interlocuteur vient tout chambouler. « Il m’a traité de sac de merde ! Je lui ai dit que je ne pouvais pas accepter ce manque de respect. Il a alors répété ses propos, ce que j’ai fait également. Il a donc appelé son collègue pour lui dire d’amener des menottes », rembobine-t-il, en avouant s’être rebellé  en raison de ce sentiment d’injustice. N’arrivant pas à le menotter, les forces de l’ordre appellent du renfort. À ce moment-là, le docteur Youssouf Ali décide d’obtempérer et entre dans le véhicule , direction le commissariat. « Pendant le trajet, je l’ai interrogé sur l’image renvoyée aux jeunes qui ont assisté à toute la scène. Il n’a pas supporté ma remarque… Il m’a donné un coup au ventre et m’a dit que si je ne suis pas content je peux aller vivre ailleurs en France. »

Une garde à vue et un procès

Une fois arrivé dans les locaux, le docteur Youssouf Ali est placé en garde à vue pendant 12h. Il doit alors se confronter au policier, qui aurait tenu une version complètement différente de la réalité. « Selon lui, je l’aurais traité de sale blanc et apparemment j’aurais rajouté que s’il n’était pas content il pouvait rentrer chez lui en France. Il a complétement changé de version. Il a voulu me faire passer pour un raciste », s’indigne l’accusé. Au moment de la garde à vue, les deux parties affirment vouloir porter plainte, mais le docteur Youssouf Ali ne prend pas d’initiative car il attendait des images des caméras de surveillance se trouvant sur les lieux des faits. Des images qu’il ne visionnera finalement jamais…

Une année passe. Et tout s’accélère il y a de cela un mois et demi. « J’ai appris que j’étais poursuivi en correctionnel par le procureur. Le procès devait avoir lieu le 4 décembre, mais mon avocat a exigé un report car nous n’avions pas eu le dossier à temps. »  Le médecin a toujours l’intention de porter plainte dans le but de rétablir la vérité. Pour lui, cet évènement reste encore incompréhensible . « Dans le cadre de mon métier, je côtoie des gens qui sont agressifs. Malgré tout, je n’ai jamais eu affaire à ce genre de situation », conclut le docteur Youssouf Ali, qui devra rendre des comptes le 6 avril prochain. Et pouvoir ainsi lever le voile sur cette banale interpellation, qui n’en est plus une.

Affrontements au lycée de Kahani : une habitude avant les vacances scolaires

La scène était presque attendue. Ce mercredi 9 décembre, une trentaine de jeunes extérieurs au lycée de Kahani se sont dirigés vers l’établissement, dans l’unique objectif d’en découdre avec certains élèves. Les gendarmes mobiles qui étaient déjà sur place pour assurer la sécurité ont évité le pire.

L’alerte orages ne les a pas arrêtés. Dans la journée de mercredi, vers 6h30 du matin, 30 à 40 individus se sont rués vers le lycée de Kahani, armés de pierres. Leur objectif ? En découdre avec certains lycéens, pour des raisons qui restent encore inconnues. Mais ils n’ont pas pu aller jusqu’au bout car ils se sont retrouvés face à une cinquantaine de gendarmes mobiles, déjà présents sur les lieux depuis 5h30 du matin. Rapidement, les jeunes scolarisés sont mis à l’abris au sein de l’établissement, rejoints par des militaires pour assurer la sécurité du personnel et des élèves.

“Ne pouvant pas atteindre leurs cibles, ils ont été vexés et ont harcelé les gendarmes mobiles qui étaient déployés”, indique le colonel François Bisquert, de la gendarmerie nationale. Plus explicitement, les délinquants se sont divisés par petits groupes afin de pouvoir mieux se déplacer et lancer leurs pierres sur les forces de l’ordre. Idem pour les automobilistes qui en ont fait les frais. Si certains véhicules ont reçu des impacts de jets de pierres, aucun blessé n’est à déplorer parmi les conducteurs.

Un scénario attendu par les forces de l’ordre

Ayant conscience que cette période de l’année est extrêmement sensible, les autorités ont dépoyé en conséquence un escadron de la gendarmerie afin d’anticiper tout acte de violences. “Cela fait partie de notre stratégie de prévention. On sait qu’avant les vacances scolaires il y a toujours des affrontements. On définit donc les zones sensibles pour mettre des effectifs aux abords des établissements scolaires”, explique le colonel François Bisquert. Cette stratégie de prévention est également mise en place autour des collèges et lycées de Majivaco, Koungou, Dzoumogné, Tsararano et Chirongui. Les gendarmes resteront sur ces lieux jusqu’au dernier jour d’école avant la pause de décembre.

Et afin de renfoncer une nouvelle fois la sécurité, des fouilles seront effectuées sur “certaines lignes de bus scolaires sensibles”, annonce le colonel François Bisquert. L’objectif est d’empêcher les élèves d’emmener des armes à l’école ou quelconque objet interdit. À deux jours des vacances, la tension reste palpable à proximité des établissements scolaires, même si elle est désormais habituelle.

 

Exposition Made in Mayotte 2020 : Asmane Houdjati, l’entrepreneure aux mille parfums

Du 7 au 19 décembre 2020, 13 producteurs et artisans proposent le fruit de leur travail lors d’une exposition au comité du tourisme de Mayotte. À cette occasion, Flash Infos vous propose cette semaine des portraits de ces acteurs qui font vivre l’artisanat local. Aujourd’hui, Asmane Houdjati, l’entrepreneure de la terre des roses.

“Moi, les parfums, j’ai grandi dedans”, expose Asmane Houdjati, campée face à ses bâtonnets d’ylang-ylang et ses flacons aux senteurs variées. Derrière ses airs de business woman endurcie, la jeune mère de famille n’a pas oublié la terre de ses aïeux. Et c’est d’ailleurs en honneur à ces terrains agricoles du centre de l’île que l’entrepreneure a nommé sa marque, Terre de Rose. “On dit, ‘‘Tani ma rosa’’, c’est un clin d’œil à ma grand-mère”, traduit cette native de Mayotte, qui a fait ses premières armes à La Réunion.

La fibre de l’entreprise

Son BTS commercial en poche, la jeune femme rejoint une entreprise de parfums sur l’île voisine. En 2009, elle revient s’installer sur sa terre natale, quand son employeur décide d’y ouvrir une antenne. Mais les grèves de 2011 plongent la société dans une crise dont elle ne se relève pas. Pour Asmane, c’est un premier déclic : la jeune femme travaille d’abord en individuel. Puis, à la naissance de ses deux filles, cette entrepreneure-née décide enfin de se jeter dans le grand bain : en 2017, elle crée officiellement sa société à responsabilité limitée unipersonnelle (SARL). Terre de Rose vient d’éclore.

Et à 34 ans, la gérante à la fibre créatrice n’a pas froid aux yeux. “J’aime vendre !”, lâche-t-elle sans faux semblants. “J’ai compris dès le début qu’il était important d’investir dans des grosses machines.” Pour connaître toutes les ficelles du métier, l’artisane fait aussi venir de métropole un maître cirier de plus de trente ans d’expériences. “Car ce qui prime, c’est le savoir-faire français.”

 600 bougies massages et 1.000 savons par jour

La clé du succès ! Avec ses énormes cuves dans son atelier de M’Tsapéré, Asmane peut produire jusqu’à 600 bougies massages et 1.000 savons par jour. Pour le plus grand bonheur de ses clients, particuliers comme entreprises, qui raffolent de ses produits sucrés et délicats, aux saveurs de Mayotte. Ylang, jasmin, coco, vanille, citronnelle… En lien avec le Jardin d’Imany et AROmaoré, la parfumeuse fournit plusieurs entreprises locales, des instituts de massage au CSE (comité social et économique) de Mayotte la 1ère ou Mlezi Maoré. Sur son étal, de jolis paniers en feuilles de cocotiers tressés attirent en effet le regard… et le nez ! “Ce n’est pas pour rien que Guerlain s’était lancé ici ! Tout cela, c’est grâce à ce capital mondial de l’île aux parfums”, conclut Asmane Houdjati. En vraie maître cirier.ère.

Mayotte Hebdo de la semaine

Mayotte Hebdo n°1116

Le journal des jeunes