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Une cagnotte pour des enfants mahorais passés de “la faim à la famine”

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Lassés par l’inertie des pouvoirs publics face au manque alimentaire de leurs élèves, une poignée d’enseignants de Passamaïnty ont décidé d’agir. Leur cagnotte a déjà récolté 3.200 euros et doit venir en soutien aux autres dispositifs d’aides alimentaires.

“On est là, avec notre petit tableau Excel du matin au soir pour essayer de joindre les gamins.” Dans le combiné, la voix de Louise* tremble un peu, se casse parfois, signe que l’enseignante est à bout de nerfs. La quatrième semaine de confinement arrive à son terme, et pourtant, depuis le 16 mars, les choses n’avancent pas assez vite, au grand dam de ces professeurs qui ont peur de perdre le contact avec leurs élèves les plus démunis. Et qu’ils savent dans une profonde détresse depuis plusieurs jours. Car le confinement a débuté juste après deux semaines de vacances, une période déjà difficile pour ces enfants privés de fait de leur collation quotidienne. Et désormais, ce sont aussi leurs parents, dont très peu ici ont une épargne, qui doivent trouver de quoi nourrir la famille sans leur gagne-pain habituel. “Dès la deuxième semaine, ces foyers n’avaient déjà plus rien, ce sont des gens habitués à vivre au jour le jour et avec le confinement, ils ne peuvent plus”, souffle encore l’enseignante. “On a fait remonter ce problème aux autorités, mais les réponses qui nous sont parvenues restent à ce jour très vagues.”

Or il y “urgence”, d’après l’enseignante, qui estime entre 5 et 10 élèves en manque alimentaire par classe – avec des différences selon les établissements de l’île, bien sûr. Face à l’inertie des pouvoirs publics, plusieurs professeurs du collège Ouvoimoja de Passamaïnty, particulièrement concernés, ont donc lancé une cagnotte en ligne, sur le site lepotcommun.fr., qui a déjà recueilli plus de 3.200 euros (cf https://www.lepotcommun.fr/pot/xd6um2qm) – voire plus de 5.000 euros, en prenant en compte certains dons en liquide. Objectif : venir en aide aux familles de Passamaïnty et de Vahibé. En guise d’explication, la description de la cagnotte rappelle simplement que “le confinement rend d’autant plus compliquée la vie de ceux qui n’ont pour vivre que des petits emplois de subsistance (vente de légumes, ménages, etc.)”, et qu’ils ont décidé de “soutenir ces personnes, à leur échelle, en organisant des distributions de colis alimentaires aux familles dans le besoin” tout en s’engageant à respecter “toutes les consignes de sécurité et les gestes barrières recommandés par l’ARS”.

Une cagnotte pour gagner du temps

Avant d’en venir à cette cagnotte, chacun y est allé de sa propre initiative. “Il n’y a pas une journée sans que nous allions leur apporter du riz”, témoigne ainsi Louise. Mais rapidement, ces petites actions individuelles ne suffisent plus : la liste des enfants dans le besoin commence à s’allonger dangereusement. Car les familles qui parviennent d’ordinaire à gagner péniblement de quoi payer la PARS, viennent aujourd’hui s’ajouter à celles qui en bénéficient grâce au fond social de l’établissement. Ceux-là sont passés de “la faim à la famine”, résume l’enseignante. L’idée de la cagnotte est donc née, “un peu vite à mon goût, car il ne faut pas que cela permette aux gens de se détourner du problème en donnant dix euros”. Pour elle, il s’agit surtout de proposer une solution, car “nous manquons de directives qui viennent d’en haut”. Alors, la “base” s’organise comme elle peut, pour pallier le retard des pouvoirs publics. À terme, il s’agira de négocier avec les enseignes de distribution pour transformer ces précieux euros en bons et éviter ainsi les attroupements. “Cette cagnotte pourra venir en complément des bons de la Croix Rouge, qui restent assez frugaux, et surtout en attendant de recevoir les aides du conseil départemental et de l’État”, explique-t-elle. Une cagnotte tampon donc, pour gagner du temps.

Des vacances qui tombent mal

Car le temps, justement, vient à manquer. Et là-dessus, Louise n’en démord pas : l’État, le rectorat, les mairies ne semblent pas toujours avoir conscience d’après elle de l’urgence de la situation. Quand le rectorat a annoncé une semaine de vacances improvisée à partir du 11 avril, la professeure de Passamaïnty est d’ailleurs tombée des nues : “Ils nous parlent de vacances alors qu’il reste un travail monstre à effectuer pour identifier tous les enfants en difficulté. Certains n’ont pas de téléphone, vivent dans des coins reculés, des dizaines d’entre eux risquent d’être oubliés”, s’inquiète-t-elle.

Pour le recteur Gilles Halbout, il s’agit surtout de donner “une semaine de coupure”, après quatre semaines intensives qui ont nécessité “beaucoup d’investissement de la part de tous pour s’adapter, adapter les supports pédagogiques, revoir les cours”. Et cela permettra de se “calquer sur le rythme de la métropole (qui vient d’entamer les vacances de Pâques) en prévision du déconfinement”, ajoute-t-il. Quant aux distributions alimentaires, le représentant de l’Éducation nationale mise encore sur le dialogue avec les mairies, la préfecture et le CSSM, sans qui “rien ne peut être fait”. Une nouvelle distribution de PARS devrait toutefois avoir lieu cette semaine, sans qu’il sache pour l’heure quand et comment elle aura lieu. “Mais ce seront désormais des paniers qui correspondent à une semaine de nourriture”, décrit-il. La dernière distribution des PARS avait connu quelques couacs de dernière minute, car la crainte d’attroupements avait poussé la préfecture à annuler ces distributions, pour les laisser aux soins des mairies et des associations. Mais pour passer aux bons, là encore, il faudra attendre. “Les bons ne sont pas juste une photocopie, et il nous faut étudier la question avec la préfecture. Avec des bons, vous créez une monnaie, qui peut être stockée, ce n’est pas anodin”, soulève Gilles Halbout. Certes, mais l’heure n’est pas vraiment à l’épargne, surtout pour les familles les plus précaires…

* le prénom a été modifié

 

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