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la filière bio à Mayotte, bientôt une réalité ?

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Quatorze agriculteurs et quatre partenaires s’étaient donné rendez-vous ce mardi à la SCEA Vahibio, pour signer un passeport bio. Un premier pas qui les engage dans une démarche de conversion, avant la certification et la structuration de la filière sur l’île aux parfums.

Sortie de Vahibé. On accède à la parcelle par une piste de terre rouge cabossée et sinueuse, où les rares morceaux de bitume élimé laissent apparaître ici et là de méchants trous caillouteux. Puis encore quelques mètres à faire au milieu de la brousse, avant un petit saut au-dessus d’un cours d’eau à sec. Quelques pas de plus sur les herbes folles et trois bananiers plus tard, voilà l’exploitation Vahibio ! Presque trois hectares bien touffus, où les manguiers côtoient les jeunes cacaoiers, et où abeilles et papillons viennent butiner les arbres à litchi en fleurs. Ici, tout pousse un peu de façon anarchique. Ou plutôt naturelle. “Vous voyez là, c’est la saison sèche, on n’a même pas désherbé. De toute façon, tant qu’on ne cueille pas, on n’arrache rien !”, lance Dominique Labotte en pointant un versant en friche. “C’est simple, ça fait 22 ans qu’on est sur ce terrain et qu’on ne met rien dessus ! Certains arbres n’aiment pas ça d’ailleurs”, sourit cette convertie à l’agriculture, avec un air espiègle. Rien, cela signifie bien sûr aucun produit chimique ou phytosanitaire.

Et c’est d’ailleurs pour cette raison que Dominique Labotte et son mari Wirdane Mkadara avaient donné rendez-vous à plusieurs agriculteurs ce mardi, pour la cérémonie officielle de signature des passeports “bios”. À l’origine de l’événement, une initiative lancée par les membres du projet partenarial pour la structuration de la filière Fruits et Légumes de Mayotte, que sont la Coopac (coopérative des agriculteurs du centre), l’Ucoopam (union des coopératives de Mayotte), l’EPFAM (établissement public foncier et d’aménagement de Mayotte), et le lycée agricole de Coconi. Leur projet, financé par le FEADER (fonds européen agricole pour le développement rural) et l’ODEADOM (office de développement de l’économie agricole des départements d’Outre-mer), vise au développement de la production de fruits et légumes pour répondre aux attentes de la population de Mayotte en termes de qualité, quantité et disponibilité. En tout, un budget de 1,1 million d’euros réparti sur trois ans, doit permettre l’accompagnement administratif et technique des producteurs, l’expérimentation de méthodes de production, d’approvisionnement et de commercialisation.

Pas encore de label AB

Aujourd’hui, la première convention arrive à son terme, et l’enveloppe a déjà permis d’accompagner 14 agriculteurs de Mayotte, principalement du centre de l’île. “Beaucoup sont déjà bio techniquement, mais c’est vrai qu’il y a encore du travail à faire sur l’aspect administratif, par exemple sur la compta, sur le suivi des cultures, des choses qui ne sont pas forcément dans la culture mahoraise”, explique Laurent Guichaoua, producteur maraîcher affilié à la Coopac. Or pour bénéficier du petit logo vert “AB” apposé à ses produits, il faut en effet remplir un cahier des charges bien précis, qui fait l’objet d’un contrôle régulier par un organisme certificateur. Et pour les agriculteurs mahorais engagés désormais dans cette démarche, c’est la prochaine étape à franchir. C’est pourquoi un comité de pilotage est prévu prochainement avec la direction de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DAAF), pour expliquer la nécessité de poursuivre leur accompagnement. “D’autant que ce projet a permis de faire du lobbying pour obtenir l’application d’une mesure du PDR (programme de développement rural) à Mayotte, qui rend possible l’aide à la conversion pour les agriculteurs inscrits dans cette démarche bio”, appuie Cécile Morelli, chargée de mission à l’EPN de Coconi.

Des “bio pilotes” pour développer la filière

Cette cérémonie était donc à la fois l’occasion de faire le bilan des actions passées, et de poursuivre cette lancée ensemble, partenaires comme agriculteurs, en signant ce passeport “bio”. Les premiers s’engagent ainsi à continuer leur accompagnement ; les seconds, surnommés pour l’occasion les “bio pilotes”, à communiquer et échanger sur leurs pratiques pour une meilleure diffusion de ce mode de production sur tout le territoire mahorais. “Notre but est vraiment de structurer cette filière de l’amont à l’aval, c’est-à-dire de l’intrant, du produit, au conseil technique jusqu’à la commercialisation”, déroule Pierre-Emmanuel, le coordinateur du projet.

Au moment de signer, les premiers ambassadeurs du réseau ont déjà bien intégré le discours. “Je fais de l’agriculture depuis cinq-six ans et j’ai vu les dégâts avec les produits phytosanitaires donc je n’aime pas ça”, confirme Taoussi, un maraîcher de Mroalé. “Je n’en veux pas car cela fait des dégâts dangereux”, résonne Antouria, qui commence tout juste à cultiver son champ à Combani. Établie depuis un peu plus longtemps, Fatima Daoud a quant à elle deux exploitations et s’est lancée dans le maraîchage depuis trois ans “pas tant car ça me plaît, mais parce qu’il faut bien gagner des sous”.

Le bio, un défi pour les maraîchers de Mayotte

Or, comme l’explique Valérie Ferrier, maraîchère à Combani, ce type de culture, pratiqué de manière intensive et cible des parasites, a plus de difficultés à se passer d’intrants chimique. En 2019, le sénateur Thani Mohamed Soilihi évoquait d’ailleurs cette caractéristique nouvelle pour l’île aux parfums, dans une question adressée au gouvernement. “À Mayotte, où la quasi totalité de la production agricole est destinée à la consommation, on a pendant longtemps estimé que la certification « agriculture biologique » était superflue tant la culture des produits locaux était assimilable à celle des produits biologiques”, rappelait-il en s’appuyant sur une étude publiée en 2017 par la DAAF de Mayotte, qui attestait ce potentiel de labellisation. “Pourtant, depuis quelques années, les services de l’État constatent un recours accru aux produits phytosanitaires, notamment dans le secteur maraîcher”.

D’où le défi qui repose sur les épaules de cette quinzaine d’agriculteurs. Pour eux, le challenge est même économique. “J’ai l’habitude de dire que je fais tout naturellement, mais c’est vrai que certains clients demandent la certification”, acquiesce Fatima Daoud. Surtout, celle qui vend ses produits tous les dimanches au marché de producteurs de Chirongui a vu débarquer une nouvelle concurrence. “Il y a des revendeurs qui viennent, et ça fait un peu peur, tous les produits se mélangent sans distinction”, raconte-t-elle. “Raison de plus pour obtenir la certification !” Reste que la route est longue. D’autres initiatives ont bien été lancées par le passé, mais elles se sont heurtées aux difficultés du territoire, comme l’absence d’organisme certificateur sur place. Résultat, le coût de la certification peut vite revenir cher pour l’agriculteur, s’il faut compter le billet d’avion depuis la métropole… “Mais avec le réseau que nous sommes en train de construire, nous pourrons justement mutualiser ces coûts à l’avenir”, répond Laurent Guichaoua. En attendant le petit autocollant vert, les agriculteurs devront pour l’instant se contenter d’une communication orale, pour informer sur leur démarche de conversion. Et il leur faudra sans doute encore jouer un peu des coudes pour séduire une clientèle en quête de produits sains.

Étudiant en architecture, Nahed Saidali ouvre Six Barbershop à M’Tsapéré

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En plein cœur de M’Tsapéré, un barbershop s’est invité dans le paysage économique du quartier. À sa tête, un jeune étudiant en architecture de 24 ans qui s’est pris de passion pour ce milieu. Moins d’un mois après son ouverture, la nouvelle adresse cartonne déjà. Rencontre.

Tondeuse dans une main, spray dans l’autre, Négro, l’un des deux coiffeurs diplômés avec DT du Six Barbershop, s’évertue à tailler la barbe du client, affalé sur le siège, au millimètre près. Derrière son masque bleu, un large sourire se devine. Lunettes de soleil noires sur le nez, Nahed Saidali s’amuse à immortaliser la nouvelle coupe. En deux clics, le grand gaillard d’1m90 partage la vidéo sur les réseaux sociaux pour en faire profiter la communauté. La communication, c’est son dada. Lui-même le dit, il surfe sur cette vague pour « attirer une clientèle masculine et apporter ce côté soin du visage, un concept encore trop peu présent sur l’île ». Deux semaines après le lancement de son salon, le business tourne déjà à plein régime. « On a une clientèle très diversifiée entre les cheveux typés européens et afro », s’amuse-t-il, au détour d’un pas de danse. Et ce n’est pas l’inauguration de samedi dernier qui dira le contraire… « On a accueilli beaucoup de monde, ça a dépassé nos espérances », avoue le jeune homme de seulement 24 ans, qui a réussi à collaborer pour l’occasion avec Caresse Cream et DJ Madis pour rameuter les troupes. « Ça a créé l’engouement. Ça a coiffé, ça a mangé des glaces ! »

« Une culture très urbaine »

Toute cette folle aventure remonte pourtant seulement au mois dernier lors du retour de ce natif de M’Tsapéré à Mayotte. Avec cette idée bien en tête : ouvrir un barbershop. Un lieu que fréquente chaque semaine à Paris Nahed Saidali. Et surtout inconnu au bataillon sur l’île aux parfums. Banco, l’opportunité fait mouche ! Une fois le local trouvé, les travaux s’enchaînent en un temps record. En moins de trois semaines et demi, l’adresse à deux pas de la mosquée du vendredi et du plateau sportif fait peau neuve. « On a voulu mettre en lumière un concept bien identifié, avec des vrais sièges de barbier, des coiffeurs habillés d’un tablier en cuir et de gants noirs pour créer cette ambiance et s’y fondre. » L’environnement intérieur, lui, plonge les curieux dans un univers à la fois personnalisé et épuré, en attendant l’aménagement mobilier expédié depuis Dubaï, « qui restera minimaliste ». Sa marque de fabrique ! Tout comme la musique, qui relate « une culture très urbaine, avec du rap français et américain ».

Un quartier « au fort potentiel économique »

Si Nahed Saidali réalise un rêve de gosse, lui qui bichonne ses frères et ses cousins à la maison depuis belle lurette, il voit en cette activité une moyen de redynamiser un quartier « en plein boom » et « au fort potentiel économique ». Une manière aussi de montrer l’exemple à l’égard d’une jeunesse parfois désoeuvrée qui côtoie la zone. D’ailleurs, le gérant doit retourner en métropole incessamment sous peu pour débuter son master en architecture et ainsi suivre les traces de son défunt père, à l’origine de l’entreprise Concept Architecture. « Le dessin joue un rôle essentiel dans les deux milieux », explique-t-il avec une pointe de philosophie. Son éloignement de plus 8.000 kilomètres n’effraie en aucun cas l’entrepreneur, bien au contraire. « Je vais pouvoir envoyer du matériel beaucoup plus facilement et surtout concrétiser des projets en cours de finalisation, comme l’utilisation de serviettes chaudes et la coloration. » Et une fois son diplôme en poche, Nahed Saidali n’aspire pas à faire de vieux os en Hexagone et compte bien revenir aussi sec dans le 101ème département, pour poursuivre son expansion. Avec pourquoi pas, un développement « d’ici deux ou trois ans dans le centre de Mamoudzou, à Combani ».

Éducation : les protocoles sanitaires font grincer les dents des syndicats de Mayotte

Alors que l’épidémie semble repartir au niveau national, le ministère de l’Éducation a publié un nouveau protocole allégé pour les écoles primaires et élémentaires. Des mesures que les antennes syndicales locales jugent trop peu strictes, alors que les protocoles initiaux peinent déjà à être respectés pour assurer la santé de tous. Et que Mayotte n’est toujours pas passée au vert…

Et un de plus ! Ce mardi, un nouveau protocole sanitaire allégé entre en vigueur dans les écoles primaires et élémentaires. L’annonce, formulée par le ministre de la Santé Olivier Véran à la suite de la publication d’un nouvel avis du Haut conseil pour la santé publique publié jeudi, a été confirmée dimanche soir par le ministère de l’Éducation. Désormais, si un enfant est positif au Covid-19, sa classe pourra « continuer de se tenir normalement pour les autres élèves, qui ne sont plus considérés comme cas contacts », précise le communiqué. L’élève qui présente des symptômes pourra revenir à l’école si ses parents attestent par écrit avoir consulté un médecin et qu’un test n’a pas été prescrit ; ou bien, à défaut, sept jours plus tard s’il ne présente plus de symptôme. Quant aux cas contacts, ils peuvent désormais retrouver les bancs de l’école sept jours plus tard, sans passer obligatoirement par la phase coton-tige (s’ils n’ont pas de symptôme). Par ailleurs, la fermeture d’une classe ou d’une école pourra être décidée seulement à partir de trois cas confirmés.

Tout dépend du masque

Une énième mouture qui fait s’arracher les cheveux à Henri Nouri, secrétaire départemental du SNES-FSU. “Les textes changent sans arrêt ! À force, c’est très difficile à suivre pour les collègues, surtout quand vous n’êtes pas affilié à un syndicat et que vous n’êtes pas habitué à vérifier les nouvelles dispositions tous les quatre matins”, déplore-t-il. Trop tirés par les cheveux, ces protocoles publiés à la chaîne ? Ce n’est toutefois pas l’avis de Gilles Halbout, le recteur de Mayotte. Au contraire, le nouveau texte “clarifie surtout les choses”, souligne le responsable de l’Académie. “Dans la limite où nous portons un masque pour éviter la diffusion du virus quand nous sommes dans un lieu qui accueille du public sans pouvoir assurer le respect de la distanciation physique, si un cas Covid est détecté et qu’il portait un masque, on part du principe qu’il ne l’a pas diffusé dans son entourage”, déroule-t-il. En résumé, désormais, une personne qui avait un masque n’est plus considérée comme un “cas contact à risque”. Une nouvelle dénomination qui simplifie sans doute le laborieux travail de contact tracing ! Et la même logique s’applique pour les plus jeunes, de moins de 11 ans, qui n’ont pas l’obligation de se couvrir le visage et qui “diffusent très peu le virus”.

Peu de transmission par les enfants

C’est d’ailleurs ce qu’explique le nouvel avis du Haut conseil à la santé publique dans son avis complémentaire du 17 septembre sur les stratégies de prévention de la diffusion du Sars-Cov-2 en EAJE (établissement d’accueil du jeune enfant) et milieux scolaires : “Le HCSP prend en considération que les enfants sont peu à risque de forme grave et peu actifs dans la transmission du SARS-CoV-2. Le risque de transmission existe surtout d’adulte à adulte et d’adulte à enfant et rarement d’enfant à enfant ou d’enfant à adulte”, décrit l’instance. Du coup, un enseignant de maternelle ou de primaire muni de son masque ne sera plus considéré comme cas contact même s’il a cotoyé un enfant positif au Covid-19 et il n’aura plus à s’isoler. Et sa classe n’aura donc plus à fermer faute de maîtresse ou de maître !

Aucune classe fermée à Mayotte

Car ces nouvelles dispositions visent aussi à assurer la continuité pédagogique et éviter de laisser les enfants sur les bras de parents à cause de fermetures inopinées. À Mayotte, les quelques fermetures de classe ou d’école sont d’ailleurs plus liée à cette absence de personnel qu’à de véritables clusters. Au collège de Mtsamboro, par exemple, seul établissement scolaire ayant dû fermer totalement ses portes jeudi et vendredi derniers, l’absence de trois personnels de la vie scolaire pour suspicion de Covid rendait difficile la tenue normale des cours. “C’était une fermeture provisoire le temps d’avoir les résultats de leurs tests, et de fait, ils étaient tous négatifs”, relève Gilles Halbout. De plus, aucune classe n’est actuellement fermée. “Et si l’on enlève le cluster des professeurs de sport de la rentrée, on doit avoir une dizaine de cas que nous suivons à ce jour, ce qui n’est pas énorme.”

Simple grippette ?

Reste que les syndicats n’en dorment toujours pas sur leurs deux oreilles. “Les collègues sont inquiets, nous avons des classes surchargées… On joue avec la santé des gens. Soit on dit que c’est un virus dangereux et on prend des mesures strictes, soit ce n’est qu’une simple grippette, mais je crois qu’il s’agit de plus que cela”, lâche Laurent Draghi, secrétaire académique à Sud Éducation Mayotte. Son syndicat s’est d’ailleurs fendu d’un communiqué ce dimanche, pour dénoncer le “flou” des “protocoles mis en place”, et “le sentiment que la réalité dans les établissements scolaires est passée sous silence”. “On a des témoignages qui nous remontent, à Dembéni, à Chiconi, un peu partout sur l’île et les classes ne ferment pas”, rapporte encore le représentant syndical, qui demande un protocole plus strict et rigoureux. Par exemple sur les masques, car “on a donné des masques aux élèves, mais on sait bien qu’ils ne sont jamais lavés. On devrait leur en donner chaque jour à l’entrée, les récupérer à la sortie et les laver pour le lendemain”. Même son de cloche chez son homologue de la SNES-FSU : “les protocoles qui se sont succédé ont vu un allègement progressif des conditions pour en arriver au masque, protection ultime !”, grince-t-il. Un bout de tissu qui aura décidément gagné en lettres de noblesse depuis le début de la crise…

Un master de CUFR fermé ce lundi par mesure de précaution

C’était l’autre exemple brandi par le secrétaire académique de Sud Éducation pour rappeler que le virus circule toujours. “On entend parler de cas Covid depuis la fin de la semaine dernière, résultat, des cours sont arrêtés seulement aujourd’hui. Il y a un temps d’attente trop long entre le moment où on établit le constat, celui où on transmet l’information à l’ARS et au Rectorat, et la décision”, avance Laurent Draghi. Contacté, le directeur du centre universitaire confirme la fermeture ce lundi du master MEEF (métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation) à cause de deux cas confirmés positifs entre “hier soir et ce matin”. D’après le Rectorat en milieu de journée ce lundi, une troisième personne était dans l’attente du résultat de son test. “En lien avec l’ARS et le Rectorat, nous avons donc pris la décision de fermer juste cette filière, par mesure de précaution, le temps de mener l’enquête sur les cas contacts.” Le master regroupe deux années, avec tout de même quelque 200 élèves chaque… “Mais nous travaillons avec l’agence de santé, et grâce aux emplois du temps nous pouvons rapidement savoir quel étudiant assistait à quel cours, et il faut aller déterminer si le cas positif portait son masque”, développe-t-il. Et de rappeler que le masque est obligatoire dans l’enceinte de l’université. “Si le masque est porté, il y a peu de chance d’avoir des contacts à risque.”

Alignement des droits : le statut très particulier des travailleurs du secteur privé à Mayotte

On entend souvent dire que les travailleurs du secteur privé à Mayotte sont défavorisés si on les compare à ceux du reste du territoire national. En effet, plusieurs avantages sociaux et salariaux ne leur sont pas attribués, et cela engendre des grèves incessantes. Presqu’aucun secteur du privé n’est pas épargné par une grogne dénonçant le caractère discriminatoire du régime mahorais, alors, concrètement, de quelles manières se caractérisent ces inégalités ? Explications.

Pour les syndicats de Mayotte, le combat est toujours le même depuis des dizaines d’années. Ils veulent que les salariés de l’île bénéficient des mêmes droits que ceux de l’hexagone et des autres territoires de l’Outre-mer. Et le chemin est encore long. « Le Medef et la Dieccte voudraient qu’on ait des accords locaux, mais nous nous sommes rendus compte qu’en faisant cela, nous sommes écartés lors des mises à jour nationales. Maintenant, on veut éviter d’avoir des spécificités », explique Antoine Tava, secrétaire général adjoint de la CFDT Mayotte. « Cette différenciation est avantageuse pour les entreprises. Elles ne veulent pas s’aligner sur les modèles nationaux parce qu’elles se font beaucoup de marges avec le système actuel », ajoute, El Anzize Hamidou, secrétaire général d’UD-FO. Code de la sécurité sociale, conventions collectives nationales, code du travail, SMIC, retraite, tous ces aspects qui régulent le monde du travail posent problème chez nous. Certaines garanties sociales sont tout bonnement inexistantes quand presque toutes les autres ont des spécificités. « En 2012, les agents de la Caisse de sécurité sociale ont réussi à avoir les mêmes droits que leurs collègues du territoire national en obtenant l’application de la convention collective nationale, mais ils se sont battus pendant 20 ans pour y arriver », rappelle El Anzize Hamidou. Le groupe Total a également été contraint d’appliquer la convention collective nationale, car il n’a pas de concurrents sur l’île. Récemment, les transporteurs scolaires ont obtenu gain de cause en signant l’application de la convention collective nationale, même si elle n’est effective qu’en partie. Les autres domaines se battent encore, mais selon les différents syndicats, le Medef serait opposé à cette uniformisation. Sa présidente, Carla Baltus s’en défend en expliquant que le patronat comprend ces revendications, mais qu’il ne faut pas précipiter les choses. « On échange souvent avec les partenaires sociaux parce qu’on a aussi cette volonté d’aller vers une convergence. Mais ils souhaitent que ça soit plus rapide, alors que nous prônons la progressivité parce que nous pensons à la santé financière des entreprises. Si on applique immédiatement les conventions collectives nationales, combien d’entreprises vont supporter cette hausse de charge qui peut être de l’ordre de 50% ? On comprend les droits des salariés, mais on leur demande aussi de comprendre les difficultés », a-t-elle indiqué sur les ondes de Mayotte la 1ère. De leur côté, les syndicats ne comprennent pas cette volonté, répétée depuis trop longtemps à leur goût, d’aller progressivement. Et demandent au gouvernement de prendre la main afin d’obliger tous les secteurs à s’aligner sur les modèles nationaux. « Sinon à quoi bon avoir départementalisé Mayotte si ensuite on lui refuse les mêmes droits que les autres ? Nous voulons une République unie et indivisible. Nous ne voulons plus être écartés », clame le secrétaire général d’UD-FO.

Le code de la sécurité sociale

Le code de la sécurité sociale est l’illustration parfaite des différences entre les travailleurs mahorais et ceux du reste de la France, puisqu’il n’est tout simplement pas appliqué à Mayotte. Pourtant, il est en quelque sorte la bible des droits sociaux des salariés. Tous les chemins mènent au code de la sécurité sociale. Sa non-application engendre la perte de certains droits à l’exemple des congés paternité accordés aux hommes. « À Mayotte, lorsque vous êtes père, vous pouvez prendre les 3 jours de déclaration uniquement sécurisés par le code du travail. Les 11 jours restants sont régis par le code de la sécurité sociale. Mais, comme il n’est pas appliqué à Mayotte, si vous prenez ces 11 jours, ils seront considérés comme des absences justifiées qui ne seront pas payées. Par conséquent, beaucoup de parents y renoncent », explique Antoine Tava, le secrétaire général adjoint de la CFDT Mayotte.

Les conventions collectives nationales

L’application des conventions collectives nationales est une revendication qui revient régulièrement lors des conflits entre une entreprise et ses salariés. Pourtant, à en croire Antoine Tava, demander leur mise en vigueur n’est pas une bonne stratégie. « L’application des conventions peut apaiser les tensions, mais ce n’est pas le plus important. Le plus important reste le code de la sécurité sociale qui va gérer tout cela. La plupart des garanties des conventions collectives sont régies par le code de la sécurité sociale. » Or, si ce dernier n’existe pas sur l’île, ces conventions seraient comme des coquilles vides. De plus, aucune entreprise n’est prête à se porter volontaire pour être la seule à appliquer une convention alors que ses concurrents du même secteur ne le font pas. « Par exemple, le groupe Bourbon distribution Mayotte ne va pas le faire alors que Sodifram ou Somaco ne le font pas. Ce n’est que le code de la sécurité sociale qui peut obliger toutes les entreprises à s’aligner », précise Antoine Tava.

Le code du travail

Jusqu’au 1er janvier 2018, le code du travail national n’était pas en vigueur dans le 101ème département de France. Depuis cette date, il existe un code du travail spécifique à Mayotte, mais il n’est pas encore parachevé. « Il reste encore des instances à mettre en place comme la CPRI (commission paritaire régionale interprofessionnelle) qui n’a toujours pas vu le jour alors qu’elle permet d’arbitrer les TPE (Très petites entreprises) », explique Antoine Tava. Avant ce code du travail, le statut d’auto-entrepreneur, notamment, n’existait pas à Mayotte jusqu’au mois de mai 2020, où il a été mis en place.

Le SMIC

Le Smic brut de Mayotte est différent du Smic brut de l’hexagone. Au 1er janvier 2020, sur l’île, il s’élève à 7,66€ brut par heure, contre 10,15€ à l’échelle nationale y compris dans les DOM et certaines collectivités d’Outre-mer. Une différence de presque 360€ mensuel sur la base de la durée légale de travail de 35 heures par semaine. Cet écart passe à 150€ par mois lorsque le SMIC est converti en net car le taux de charges salariales des travailleurs n’est que de 8% chez nous contre 22% partout en France. « Tant qu’on n’aura pas le taux de cotisation égal à celui du national, on aura toujours un SMIC différent », souligne le secrétaire général adjoint de la CFDT Mayotte. Il s’agit en réalité d’un cercle vicieux. Les salariés mahorais ont un Smic plus bas car le taux de cotisation est plus bas. Mais ce taux de cotisation est en dessous du national car le Smic de l’île est en dessous. Cette différence pose un autre problème puisque de nombreuses indemnisations s’appuient sur le Smic brut à l’image du chômage partiel. Les sommes perçues par les travailleurs de l’île sont par conséquent inférieures à celles des autres.

La retraite

La retraite fait également partie des exceptions mahoraises. Le plafonnement du taux de cotisation à la caisse de retraite en serait la cause. Résultat, les pensions sont en moyenne de 500 euros sur l’île, contre 1.472 euros bruts au niveau national. Pourtant, tous les syndicats s’accordent à dire que les salariés du privé sont prêts à débourser plus pour préparer leur avenir. « Dans le privé, les employeurs prétendent que les agents vivront mal cette augmentation de cotisation car cela aura un impact sur leur pouvoir d’achat. Ce qui est faux car lorsque les agents du secteur public ont été alignés sur le système national de retraite, ils ont compris et accepté », rappelle Ousseni Balahachi, secrétaire général de la CFDT Mayotte. Les retraites très basses seraient le fruit d’une mauvaise volonté et d’une mauvaise stratégie de la part du patronat, selon Antoine Tava. « Le Medef ne voit pas sur le long terme et c’est très dangereux parce que beaucoup d’agents qui sont en âge de partir à la retraite ne le font pas parce qu’ils vont recevoir une retraite qui ne leur permettra même pas de payer leurs loyers. » Un employeur peut obliger un salarié à partir à la retraite uniquement à partir de 70 ans. Pendant ce temps, le chômage des jeunes ne cesse d’augmenter puisque les places ne se libèrent pas pour eux.

« Célébrer quelque chose qui est vraiment le reflet de la culture mahoraise »

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Le week-end dernier se déroulaient les Journées européennes du patrimoine. Malgré les répercussions de la crise sanitaire, bon nombre de communes et d’associations ont joué le jeu pour proposer des animations et des activités aux visiteurs. En charge du patrimoine immatériel à la direction des affaires culturelles de Mayotte, Arnauld Martin relate les premiers retours de cette 37ème édition et se tourne déjà vers l’année prochaine.

Flash Infos : Quel bilan tirez-vous de ces journées européennes du patrimoine (JEP) consacrées à la culture « malagasy » ? Que retiendrez-vous en particulier ?

Arnauld Martin : À l’heure actuelle [lundi soir], nous avons le retour de comptage de cinq porteurs de projet sur les 17 recensés. Toujours est-il que ces premiers éléments sont quand même intéressants : en tout, nous avons comptabilisé 893 visiteurs, sachant que cela représente à peine un tiers des sites. Par exemple, le Muma, le musée de Mayotte, a reçu 537 personnes, ce qui est proche des chiffres de fréquentation des années précédentes ! Musique à Mayotte a accueilli 107 visiteurs, le lycée de Coconi, avec ses activités de découvertes, a vu 40 visiteurs pointer le bout de leur nez. Mais de toute façon, nous ne sommes pas dans une logique de chiffres.

Pour avoir visité plusieurs sites le samedi et le dimanche, nous retenons l’engouement du public, qui a dégagé une sensation de joie et une volonté de célébrer quelque chose qui est vraiment le reflet de la culture mahoraise. Les JEP mettent en avant le patrimoine immatériel mahorais, qui fait partie de la culture quotidienne, à l’instar de la langue, du savoir-faire… Il y a une grande fierté à mettre en avant cette culture quotidienne dans le patrimoine immatériel.

À Mayotte, nous ne venons pas spécialement visiter des monuments, mais plutôt constater que nous avons une richesse culturelle qui n’a pas toujours été bien traitée au cours de l’histoire. Les Mahorais ont souvent été dénigrés par le passé à ce sujet. Or, les JEP démontrent bel et bien le contraire. Pour moi, c’est vraiment ça l’important à retenir !

FI : Sur les neuf communes ayant participé à l’événement, lesquelles ont accueilli la plus grande affluence ? Quels sites ont le plus intrigué les visiteurs ?

A. M. : À chaque endroit, il y avait « beaucoup » de monde, et notamment une participation assez marquée à Mamoudzou, à Bandrélé, à Chirongui… Après, ce ne sont pas des foules, car les porteurs de projets avaient des restrictions quant au nombre de participants. Mais, je dirais que toutes les grandes communes qui ont organisé des activités ont reçu du monde.

À Mamoudzou, l’ensemble des activités était réuni sur l’ancienne place du marché avec un chapiteau, des démonstrations, des expositions… Il s’agit d’un lieu très central qui a accueilli des gens en continu venus découvrir des aspects du patrimoine parfois méconnus. À l’écomusée du sel à Bandrélé, il y avait la possibilité de voir le travail des « Mamas shingos », les ateliers de musique et de danse, la gastronomie. Concentrer toutes ces activités au même endroit a permis de fidéliser les visiteurs. Choisir ce principe de foyer a été payant. Les Naturalistes ont également proposé des sorties en bateau pour visiter l’îlot Mbouzi. La quarantaine de curieux a partagé une expédition qualitative avec l’histoire de ce site. À Dembéni, le village d’Iloni a participé aux JEP pour la première fois. Forcément, ça attire, ça mobilise et ça motive. Cette réappropriation du savoir-faire de l’association témoigne de cette reprise en main du patrimoine par les Mahorais. À Chirongui, la commune a un service patrimoine, donc il y a eu une manifestation centralisée autour du pôle culturel, mais aussi des animations dans la mangrove. Cela a répondu à différentes demandes. Certains ont préféré la randonnée dans les hauts de la commune tandis que d’autres ont privilégié l’aspect foire artisanale et spectacle. En clair, il y en a eu pour tous goûts et tous les publics.

FI : Comment comptez-vous vous y prendre pour fédérer encore davantage les partenaires et les institutions, à l’instar du rectorat, l’année prochaine ?

A. M. : Nous nous y prendrons plus tôt pour mobiliser les acteurs. À la direction des affaires culturelles, nous souhaiterions réunir les porteurs de projets dès le premier trimestre de l’année 2021 pour mieux travailler sur l’harmonisation des programmes et la communication, qui a été rendue compliquée.

Avec le rectorat, le problème est que les JEP tombent très tôt après la rentrée scolaire donc les enseignants n’ont pas tous la possibilité de s’organiser. Mais cela pourrait leur permettre de lancer un projet pédagogique mené sur toute l’année.

Après bien sûr que nous aimerions que d’autres partenaires ouvrent leur porte. J’ai vu qu’EDM avait tourné un film sur sa centrale des Badamiers en Petite-Terre. Ce serait génial que le public puisse s’y rendre pour la visiter. Je pense aussi à la Légion étrangère ou à Mayotte la 1ère. Ce sont autant de pistes que d’institutions que nous allons solliciter dans les prochains mois, en amont de la prochaine édition.

Enfin, l’objectif est d’inciter les associations et les mairies à pérenniser ces activités tout au long de l’année pour en faire bénéficier les scolaires et le plus grand nombre. Il y a une envie d’activités qui est débordante à Mayotte et le travail des associations est extraordinaire de ce point de vue-là !

SMEAM : la nouvelle équipe face à une situation catastrophique

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Les élus arrivés fin juillet sur les bancs du syndicat des eaux sont tombés des nues face à l’ampleur des problèmes qui touchent la structure. Rapports à l’appui, ils dénoncent la gestion calamiteuse de l’ancienne équipe, qui les pousse aujourd’hui à jouer la carte de la transparence, pour restaurer la confiance. Et tenter de sauver le syndicat…

On leur a refilé la patate chaude, et ça, la nouvelle équipe du SMEAM entend bien le faire savoir. C’est pour cette raison qu’elle avait donné rendez-vous à la presse vendredi à Kawéni, pour présenter la “situation réelle” du syndicat. Et elle n’est pas belle à voir. “Nous avons été élus pour être transparents et dire la vérité”, a d’abord introduit le nouveau président et actuel maire de Bandraboua, Fahardine Bacar. Avant de lâcher, sans détour : “nous avons hérité d’une situation que l’on connaissait plus ou moins, mais on s’est vite rendu compte de l’ampleur des problèmes au sein du syndicat. La situation est si critique, qu’il se pourrait que nous ne puissions pas payer les salaires des agents le mois prochain…”, souffle l’élu.

Plus payer les salaires ! Silence dans l’assistance. Mais si l’annonce fait son effet, il faut toutefois rappeler que ce n’est pas la première fois que les voyants clignotent rouge au sujet de l’ex-SIEAM, devenu le syndicat mixte d’eau et d’assainissement de Mayotte au 1er janvier 2020 avec l’intégration des intercommunalités. Déjà en 2018, la Chambre régionale des comptes étrillait les nombreux dysfonctionnements au sein de la structure, censée exercer les compétences en matière d’eau et d’assainissement déléguées par les 17 communes de l’île. Au vu d’une gestion “lacunaire” et d’une évolution de sa trésorerie “préoccupante”, “le syndicat pourrait être confronté à une cessation de paiement”, avertissait déjà la chambre.

Dette et gestion magnégné

Deux ans après et deux autres rapports incendiaires au compteur, on peut dire que les sages ont visé juste. Le syndicat fait face à une situation financière catastrophique, dont la nouvelle équipe a eu le plaisir de découvrir l’étendue au moment de la publication d’un nouveau rapport, paru en août 2020 celui-là. On y apprend entre autres joyeusetés que les factures impayées s’élèvent à plus 23 millions d’euros pour un total de dettes qui frôle les 40 millions d’euros. Pire, à cause de cette fameuse gestion “magnégné”, le syndicat pourrait perdre des subventions à la pêle, faute d’un suivi régulier des opérations d’investissement permettant le respect des délais, ou encore à cause du non-respect des règles des subventions.

Le contrat de progrès de 2018, passé en urgence après le crise de l’eau de 2017 et qui devait permettre d’améliorer la situation du territoire en matière d’eau potable et d’assainissement, pourrait même être remis en cause, car le syndicat serait dans l’incapacité de le poursuivre, note le rapport de la CRC. Ce contrat, d’un montant de 140,5 millions d’euros sur trois ans (2018-2020) doit être renégocié. Or, “sur l’année 2020, l’intégralité des investissements programmés et en cours d’exécution sont financés à 100% par l’État”, révèle le président du SMEAM. Ce n’est pas comme si Mayotte, qui s’apprête par ailleurs à vivre une nouvelle crise de l’eau, pouvait faire l’économie de ces investissements stratégiques pour le territoire…

Petit chèque à Vinci

“Vraiment, tous les jours, nous apprenons de nouvelles choses”, complète avec effarement la première vice-présidente en charge de l’eau potable, Aminat Hariti. Comme ce petit chèque adressé à l’entreprise délégataire, alors même que Vinci doit s’acquitter d’une redevance trimestrielle de 2,4 millions d’euros. Cadeau de départ, bons comptes entre amis, ou solde de tout compte ? L’histoire ne le dit pas, mais l’ex-président du syndicat, directement visé par la nouvelle équipe, aurait ainsi signé juste avant son départ un accord pour reverser 1,9 millions à la maison-mère de la SMAE. “Paraît-il pour rembourser la dette, mais on ne comprend pas”, tente d’expliquer Aminat Hariti. “Et si c’est un acte sur lequel on ne peut pas revenir, la situation financière à court terme risque d’être d’autant plus tendue.” D’autant plus qu’il ne s’agit pas là des seuls déboires du syndicat. Le rapport de la Chambre régionale des comptes mentionne aussi les “travaux de débroussaillage, dépenses de formation sans réalisation effective, voyages et déplacements en métropole, à Madagascar, en Inde, ou encore (une) flotte de 34 véhicules pour 105 agents”, sans compter la gestion des ressources humaines qui “souffre d’irrégularités et d’effectifs élevés”.

40 à 50 ans pour rembourser la dette

Le drame de l’histoire ? Ce sont les Mahorais qui devront payer, si ce n’est déjà le cas, les pots cassés. “Nous avons un réseau qui est défaillant, et aujourd’hui nous le voyons bien avec les coupures. Certes, certaines visent à économiser la ressource. Mais ne nous mentons pas, d’autres sont bien le fait de problèmes techniques”, décoche la vice-présidente. Et d’évoquer à titre d’exemple, les réservoirs, d’une autonomie de 4h seulement dès qu’une intervention d’urgence doit être effectuée. Pour tenter de sortir la tête de l’eau, la nouvelle équipe planche d’ores-et-déjà sur un plan de redressement et un schéma directeur, pour préparer les investissements sur le long terme. Mais avant toute chose, il faut “sauver le SMEAM”. Et pour ce faire, “il nous faut au moins 80 millions d’euros d’emprunts. Or ces dettes-là, ce sont les Mahorais qui vont les payer, sur quarante voire cinquante ans”, signale Fahardine Bacar. La facture d’eau, déjà cible des commentaires les plus hargneux, pourrait devenir encore plus salée…

Pas d’investissement depuis 2001

Une nouvelle qui risque bien de faire du bruit dans les chaumières, alors que le spectre de la crise de 2017 pointe à nouveau le bout de son nez. Les deux retenues collinaires sont presque vides, l’usine de dessalement de Petite-Terre ne produit que 2.300 m3 contre les 5.300 m3 qui étaient prévus, tandis que l’usine de dessalement de Grande-Terre et la troisième retenue collinaire restent de beaux projets, mais sur le papier. “Les derniers investissements datent de la période 1994-2001. Depuis, aucun gros investissement n’a été mené à part quelques forages. Nous subissons aujourd’hui ces manques d’investissement”, analyse Aminat Hariti. Or, même en prenant le problème à bras le corps et en utilisant efficacement les quelque 40 millions d’euros qui resteront de l’emprunt de 80 millions d’euros, il faut sept ans pour construire une retenue collinaire, relève le DGS Ibrahim Aboubacar.

Bref, la nouvelle équipe du SMEAM a du pain sur la planche. Et cette réunion “transparente”, pour “rétablir la confiance”, était sans doute une manière de rappeler qu’elle n’en était pas la seule responsable. Dans le viseur des élus, l’ancien président Moussa Mohamadi Bavi, qui tente d’ailleurs depuis l’élection fin juillet de contester les résultats, car le quorum n’aurait pas été respecté. Mais pour les nouveaux venus, c’est presque le cadet de leur souci. “Oh vous savez, cette plainte, il a quand même peu de chance de la voir aboutir. Surtout quand on voit ce bilan…”, ironise un délégué de Pamandzi. Prêt à se retrousser les manches et à sauver le SMEAM ? “Inch’Allah !”

Le BTS commerce international fait sa première rentrée à Mayotte

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Vendredi dernier, le lycée Mamoudzou Nord faisait honneur aux étudiants qui ont in-tégré le BTS commerce international. Cette formation est une première sur le terri-toire et les étudiants sont déterminés à en faire un véritable succès. Pour cela, ils peuvent compter sur les entreprises qui ont accepté de les embaucher le temps de leur formation.

Ils sont 16. 11 jeunes femmes et 5 jeunes hommes qui vont vivre une expérience inédite à Mayotte. Ils sont les tous premiers étudiants en BTS commerce international au lycée Mamoudzou Nord, mais surtout sur l’île. Cette nouvelle formation leur a permis de choisir Mayotte face aux nombreuses tentatives d’une vie ailleurs, à La Réunion ou dans l’hexagone. “ Je conseillerai à tous ceux qui veulent faire un BTS commerce international de tenter leur chance ici. Il ne faut pas tout le temps vouloir partir, il y a aussi de belles choses chez nous ”, clame fièrement Amar devant ses camarades, son proviseur, ses profes-seurs, les entreprises, les instituions partenaires et le recteur. D’autres voient en cette formation des chances de mieux réussir leur parcours. “ Il y a trop d’élèves qui échouent en métropole. Ici, je suis plus tranquille, je n’ai pas à me soucier des problèmes d’argent et je peux mieux me concentrer dans mes études ”, explique Oumaya, également étudiante.

Ces jeunes ne sont pas de simples étudiants, mais des apprentis. Tous ont été acceptés en alternance dans différentes entreprises: Total, EDM, Groupe 3M, Carla Mayotte Trans-ports Baltus, Maison des livres ou encore Bureau vallée, pour ne citer qu’eux.

La particularité de cette classe réside également dans la diversité des profils des élèves. Ils viennent de filières complètement différentes. Certains sont issus d’un bac littéraire, d’autres d’un bac scientifique, économique et social ou encore STMG. Alors pour certains, les matières du BTS commerce international sont une nouveauté pour eux. “ À part les langues, tout est nouveau pour moi. Le marketing est un peu difficile mais je sais que je vais y arriver”, se rassure Oumaya, issue d’un bac L.

Un accompagnement crucial

Le proviseur du lycée Mamoudzou Nord, Patrick Loval, ne le cache pas, il aurait été impossible pour lui et le rectorat de mener à bien ce projet sans l’aide de leurs partenaires. “ On n’aurait pas pu le faire sans l’appui des entreprises, la CCI et le Medef qui nous a aussi aidé financièrement.” Le Medef a surtout encouragé les entreprises à accepter les étudiants en alternance malgré leur santé financière mise à mal par la crise sanitaire. Les entreprises ont dû également accepter le fait que leurs nouveaux collaborateurs s’absentent 8 semaines pour effectuer un stage à l’étranger. “L’idéal aurait été qu’ils effectuent leur alternance dans une société d’import-export, mais il n’y en a pas tant que ça sur le territoire donc les entreprises ont accepté que les élèves aillent faire leur stage ailleurs dans une autre entreprise ou une succursale ”, explique le proviseur.

Ce BTS commerce international est une première à Mayotte, mais l’objectif est de le développer afin de l’inscrire dans la durée. Un véritable défi pour l’enseignement et les entreprises puisque le concept d’apprentissage “est récent sur le territoire”, selon le recteur de l’académie. Pour cette rentrée, 300 étudiants sont en apprentissage à Mayotte. Un chiffre non négligeable quand on sait les difficultés financières qu’ont rencontré les entreprises pendant la crise Covid-19.

Mayotte : Éole 1er en plein cœur du cratère de Moya 2

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Pour la première fois de sa jeune existence, le catamaran Éole 1er s’est engouffré dans le cratère de Moya 2. Une aventure dont rêvait son capitaine Patrick Varela qui a souhaité médiatiser cette étape pour rappeler les trésors cachés sur l’île aux parfums. Plongeon dans un écrin multicolore à bord de ce navire de 16 mètres.

Jeudi, 16h. Sur le ponton de Mamoudzou, un silence de cathédrale règne. Les clapotements de l’eau sur l’enfilade de bateaux restés à quai répondent coup pour coup aux moteurs de la barge. Comme un air de calme avant la tempête. L’unique rescapé du port se nomme Marco. Au téléphone, le regard rivé vers l’horizon, le gérant de Cétamayotte grille sa tige. « J’attends les journalistes et je te rejoins », glisse-t-il entre deux taffes. À l’autre bout du fil, Patrick Varela, le capitaine d’ Éole 1er. En plein cœur du cratère de Moya 2 avec son catamaran, il attend ses passagers avec impatience pour partager cette aventure unique, rendue possible grâce aux grandes marées. « S’il y a trop de vagues, je ne prends aucun risque et je rentre au bercail », annonce celui qui est labellisé High Quality Whale-Watching. Ni une ni deux, le petit groupe de trois personnes embarque à bord du zodiac et fonce vers Petite-Terre. « Tout le monde sait nager ? », demande-t-il malicieusement. Un « oui » timide s’envole avec le vent. Sorti du lagon, les murs d’eau se fracassent sur la coque. La traversée est rude mais le jeu en vaut la chandelle. 20 minutes plus tard, l’étape ultime se profile avec l’entrée à l’intérieur de l’anse. Le mât rouge pétant se dessine au loin. Les moteurs vrombissent une dernière fois pour l’atteindre. Et quelques sauts plus tard, la petite embarcation se retrouve nez à nez avec le mastodonde, arrivé tout droit du Sri Lanka en décembre 2017.

Sourire jusqu’aux oreilles, Patrick Varela et sa femme Gwen accueillent les passagers du jour à bord de son daily charter. Alors que des séries de déferlantes s’écrasent sur le bi-coque, le capitaine, mains sur les manettes, effectue deux-trois manœuvres pour positionner son « bébé » et profiter de la vue à 360 degrés qui s’offre à lui. Ce rêve, vieux de trois ans, se réalise enfin. « Je voulais absolument rentrer dans ce site paradisiaque, surtout que ce catamaran est beaucoup plus maniable que le catamaran de croisières que nous avons. » Le spectacle est tout simplement saisissant, avec une mangrove en plein essor, des falaises de poudre friables, une plage recouverte, des têtes de tortues… Et surtout « ce fer à cheval qui s’ouvre sur l’océan », dit-il l’air ébahi.

« Dégager une image positive »

Avec des yeux d’enfant, le navigateur se réjouit de cette expérience. Qu’il souhaite partager avec le plus grand monde. « J’ai voulu attirer l’attention de milliers personnes qui ne sont pas forcément toujours au courant de la présence des trois cratères sur l’île [Dziani, Moya 1 et 2, ndlr]. » De ce fait, Patrick Varela se la joue pédagogue pour « faire découvrir des endroits parfois méconnus » dans le but de « dégager une image positive de Mayotte », en cette période troublante. « En ce moment, il y a trop de délinquance et de violences relatées dans les médias. Cela me fatigue… Il faut montrer qu’il n’y a pas que cela », souligne-t-il en balayant de la main le spot autour de lui.

Malheureusement, toutes les bonnes choses ont une fin. Après plus d’une heure de parenthèse, l’eau redescend à vitesse grand V. « Nous avons perdu 50 centimètres en seulement quelques minutes. Il va falloir se dépêcher sinon, nous allons rester bloqués », annonce Patric Varela, pris entre l’envie de prolonger cet instant magique et la peur de le voir virer à la catastrophe. Et c’est sous les couleurs orangées du coucher de soleil, que le cataramaran rouge vogue vers de nouveaux horizons, s’éloignant d’un bleu saissisant qui restera à jamais gravé dans la mémoire de Patrick Varela, complètement conquis par cette opportunité, qui « malheureusement ne se présente pas souvent ». Mais qu’il ne manquera pas de raconter dans les moindres détails à sa clientèle.

Mobilisation du 17 septembre : le grand soir attendra

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L’appel des syndicats à la mobilisation massive a trouvé un écho relativement faible chez les salariés du public et du privé. Alors même que le mouvement national était l’occasion de porter des revendications spécifiques et justifiées quant au droit du travail à Mayotte.

Clac ! Au son du déclencheur, les visages réjouis se tournent vers la caméra. Ça prend la pause, ça tire sur son drapeau rouge ou orange, ça alpague les camarades. “Viens, une photo pour le patron !”, rigole une bande de syndicalistes, avant de reprendre tranquillement sa marche autour du rond-point de la barge. L’ambiance est plutôt bon enfant mais derrière les blagues et les tapes dans le dos, les revendications sont sérieuses. “Il faut qu’on montre qu’on est là, qu’on ne lâche rien”, poursuit plus calmement Moussa*, un chauffeur de poids lourd qui défile derrière les bannières de la CGT.

Coïncidence cocasse, le petit cortège passe alors pour la troisième fois devant le panneau publicitaire Stop Insectes : “On leur en fait voir de toutes les couleurs !” En guise de couleurs, la manifestation du jour est certes plutôt servie, les bandeaux oranges de la CFDT flottant aux côtés des nuances rouges de la CGT et de Force Ouvrière. Une fois n’est pas coutume, les uns et les autres battaient le pavé ensemble, à l’appel de l’intersyndicale départementale (UD-FO, UI-CFDT, CGT-Ma et CFE-CGC) qui avait invité ce jeudi 17 septembre “tous les travailleurs de Mayotte à une journée de grève pour revendiquer l’égalité républicaine”. Un mouvement national qui était en effet l’occasion à Mayotte de porter des revendications locales, notamment sur l’alignement du code du Travail. “Disons tous non à ce système discriminatoire en nous mobilisant massivement pour des manifestations et grève générale interprofessionnelle”, écrivait ainsi le communiqué de l’intersyndicale.

Un SMIC toujours trop bas

Malheureusement, la mayonnaise n’aura pas pris. Du moins pas autant que les syndicats ne pouvaient l’espérer. Le “gros des troupes”, arrivé sur les coups de 9h place de la République, n’a pas excédé la centaine de personnes qui a d’abord écouté les discours des représentants syndicaux, avant d’entamer une marche vers le conseil départemental puis la préfecture. Principale revendication du jour : la convergence du SMIC net sur celui de la métropole. En effet, malgré l’application du code national du travail à Mayotte depuis le 1er janvier 2018, qui prévoyait notamment le passage du SMIG au SMIC, et une durée de travail hebdomadaire de 39 à 35 heures, le niveau du salaire minimum de croissance à Mayotte reste très en deçà du reste de la population : augmenté d’1,2% en janvier dernier à l’image du reste du pays, il n’atteint toujours que 7,56 euros bruts de l’heure contre 10,15 euros au national. Soit un montant de 1.161,77 euros brut mensuels pour un contrat aux 35h, contre 1.539,42 euros en France métropolitaine. Et avec le passage aux 35 heures, l’intersyndicale dénonce en plus une perte de 148 euros pour les salariés de Mayotte qui “ont toujours travaillé 39h”.

Les mêmes droits que tout le monde

Un constat que tous les salariés présents ce jour partagent. “Avant, je bossais à La Réunion. Je suis revenu ici et j’ai dû perdre presque 300 euros !”, grogne Ibrahim*, syndiqué à la CGT-Ma. “On travaille dans une société de distribution qui est aussi implantée à La Réunion. Là-bas, ils gagnent 10 euros de l’heure et nous seulement 7,56 euros, ce n’est pas normal”, témoignent quant à eux Ahmed et Ali. Même son de cloche chez leur homologue de la CFDT, agente de vente dans une entreprise d’audiovisuel. “En tant que Française, je ne comprends pas pourquoi en métropole ils ont un certain salaire et ici nous avons autre chose. Nous devons avoir les mêmes droits que tout le monde”, abonde la jeune femme, qui espère aussi pouvoir progresser dans sa carrière. Une évolution difficile quand tout est “centralisé à La Réunion”. “Là où je suis, je peux rester agente de vente jusqu’à ma retraite…”, souffle-t-elle à l’ombre du marché couvert.

C’est là que les plus vaillants attendent encore les représentants syndicaux, reçus à la préfecture dans la matinée pour faire entendre ces revendications. Il est bientôt midi, et ils ne sont déjà guère plus d’une cinquantaine. Mais ceux qui sont là ne se découragent pas. “Je suis la seule à être venue, je crois que mes collègues ont un peu peur. Mais moi je n’ai pas peur, c’est mon droit”, assure cette salariée du privé. Avant de lâcher, avec un petit haussement d’épaules : “Qui ne tente rien n’a rien !”

Violences conjugales : un oeil crevé pour un “manque d’amour”

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Un homme a éborgné sa compagne il y a cinq ans à Passamaïnty. Entendu ce mercredi au tribunal correctionnel de Mamoudzou, le prévenu a enchaîné de graves maladresses face aux juges. Des propos qui illustrent bien le phénomène de culpabilisation de la victime dans les affaires de violences conjugales.

L’histoire est “horrible”. À en frissonner dans cette salle d’audience sans clim. À faire résonner les paroles creuses et les explications vaines d’un prévenu plus que maladroit face aux juges. L’homme qui se tient devant eux, ses maigres épaules voûtées dans sa chemise trop large et la calvitie naissante dans ses cheveux poivre sel, a 49 ans, mais ses traits tirés par l’alcool lui en donnent dix de plus. Son tort ? Avoir crevé l’oeil de sa compagne, un jour d’octobre 2015, à Passamaïnty. Cuisiné tour à tour par les robes noires qui tentent de lui faire comprendre sa pleine responsabilité, le prévenu s’enfonce. “J’aurais toujours un doute sur l’origine de la blessure…”, souffle-t-il à voix basse, comme pour se rassurer.

Mais les faits tels qu’il sont présentés ce mercredi au tribunal correctionnel de Mamoudzou, ne jouent pas vraiment en sa faveur. Ce soir fatidique, l’homme déjà passablement éméché rentre chez la victime où il enchaîne les bières avec sa fille et son petit-ami. Après leur départ, cet originaire d’Annecy qui aime un peu trop lever le coude part en quête d’un petit complément de bangué, à son spot habituel, au rond-point du collège. Mais le vendeur est en rade. Alors, le quadragénaire se rabat sur un autre stupéfiant, autrement plus dangereux : la chimique. De retour à la maison, on lui passe un savon. Sa compagne ne veut pas de ça chez elle, elle lui ordonne de quitter les lieux. Fou de rage, l’homme fond sur elle, et lui assène plusieurs coups à la tête et au visage.

Greffe connue à l’oeil

Le problème ? C’est que sa dulcinée a une fragilité toute particulière à l’oeil droit, à cause d’une greffe de cornée. Un fait que le prévenu n’ignorait pas au moment d’envoyer ses coups de poing précisément dans cette direction. Quand les gendarmes arrivent, la femme est donc prise en charge par les pompiers. Le premier examen note un éclatement du globe oculaire droit possiblement provoqué par les coups avec un “risque de perte définitive de l’oeil qui n’est pas exclu”. L’usage d’un mortier ou des bris de verre provoqués par les déferlements de violence sont évoqués pendant l’enquête, et même un doigt sadique enfoncé alors que la victime était inconsciente. Un récit glaçant qui conduira le prévenu à lâcher, presque plaintif à la barre : “Je ne comprends pas ces propos, c’est déjà grave, alors vouloir ajouter de l’horreur à l’horreur…”

80 euros et des bourdes

“Vous vous dites choqué, mais vous vous rendez compte qu’elle est marquée à vie ?”, s’estomaque alors le juge. En effet, la femme perdra finalement son oeil malgré plusieurs tentatives de soins. Et au prévenu d’enchaîner les bourdes : “J’ai défiguré la personne que j’aime le plus au monde.” Poussé à s’expliquer face à l’audience, l’homme peine à convaincre. Dans sa version des faits, arrivent pêle-mêle : “B. elle a un caractère quand même…”, “c’était beaucoup d’insultes”, “on ne peut pas mettre un terme à sept ans de relation juste comme ça, sur des mots”, “la violence m’a emporté, à cause de ce rejet, ce manque d’amour”. Pire, quand il revient sur l’origine de la dispute, le prévenu mentionne aussi de l’argent que sa compagne aurait pris dans son portefeuille et qu’il aurait retrouvé à côté de son lit. Une coquette somme de 80 euros…

Une repentance insuffisante

Certes, l’homme affiche aujourd’hui sa repentance. Il assure ne plus consommer d’alcool ni de stupéfiant, une déclaration que son avocate tente d’appuyer en apportant ses dernières analyses sanguines. Il affirme travailler aussi sur son impulsivité – le prévenu, au moment des faits, avait déjà fait l’objet d’une main courante pour avoir frappé sa compagne, et il était connu du voisinage pour ses fréquentes bouffées de rage. Mais il avoue avoir renoncé au suivi des addictologues et refusé les médicaments. Ce qui n’est visiblement pas au goût des juges… Ni du conseil de la victime. Maître Andjilani rappelle d’ailleurs à l’audience que la gravité des faits aurait dû conduire l’homme violent devant une cour d’Assises où il risquait bien plus, car l’affaire relevait davantage du crime que du délit (une correctionnalisation souhaitée par le parquet et la victime pour accélérer la procédure). Face à ces constats, le procureur de la République a donc requis cinq ans de prison dont deux ans de sursis probatoire, avec mandat de dépôt. Le tribunal décidera d’une peine de quatre ans dont deux avec sursis. Envoyé directement à Majicavo, le prévenu devra aussi verser 40.000 euros de provision de dommages et intérêts à la victime.

Deux groupes de médiation citoyenne à Tsingoni pour prévenir les violence

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Ce jeudi, le préfet de Mayotte et le président du conseil départemental se sont réunis à la Maison France Services de Combani pour signer un avenant à la convention de médiation citoyenne installant deux nouveaux groupes à Tsingoni, à la suite des violences entre bandes rivales de la semaine passée. L’objectif ? Faire de la prévention et remonter les incidents aux autorités compétentes.

Pendant plus d’une semaine, Tsingoni a été le théâtre d’affrontements d’une violence inouïe entre bandes rivales de Combani et de Miréréni. Habitants terrorisés, voitures caillassées et brûlées, maisons incendiées… Ce triste constat a poussé le préfet de Mayotte, Jean-François Colombet, à se déplacer sur place jeudi dernier pour rencontrer les élus et la population. Le délégué du gouvernement a alors annoncé la mise en place d’ici la fin du mois d’un pacte de sécurité avec la commune et a apporté quelques garanties, notamment sur l’immigration clandestine avec l’installation d’une commission sur les demandes de titres de séjour.

Et ce n’est pas tout. Une nouvelle étape a été franchie hier avec la signature d’un avenant à la convention Groupe de médiation citoyenne. Action pour la sécurité de Mroalé et la Régie de territoire viennent ainsi grossir les rangs de ce dispositif préfectoral et départemental. Pour autant, la première association se plie en quatre depuis trois mois pour sécuriser la ville et réaliser des patrouilles et des rondes le soir. « Les événements des derniers jours nous ont propulsés au premier plan et ont précipité notre intégration au GMC. C’est la suite logique des choses », se réjouit Mahamoudou Soulaimana, le secrétaire d’Action pour la sécurité de Mroalé. Concernant leurs missions, elles consistent à échanger, faire de la prévention et apaiser les tensions. « Nous ne sommes ni des forces de l’ordre, ni une milice. Si nous tombons sur des actes de violence, nous appellerons la police, comme nous l’avons toujours fait jusqu’à présent, pour signaler les faits et nous recueillerons le maximum d’éléments pour aider à la poursuite de l’enquête. » Hors de question donc de prendre des risques inconsidérés et d’intervenir directement en cas d’attaques au couteau par exemple. « Si nous sentons que nous ne pouvons pas sécuriser nos adhérents, nous n’allons pas les mettre en danger ! »

Le collège, principal lieu de surveillance

D’ailleurs, les 56 bénévoles – « des jeunes, des moins jeunes, des mamans, des bacocos, des foundis » – s’engagent à se relayer jour et nuit pour créer un climat de sérénité. Leur point de chute ? Principalement les alentours du collège, qui accueille plus de 1.500 élèves. « Nous savons très bien que les actes de violence se déroulent très souvent dans le milieu scolaire », souligne Mahamoudou Soulaimana. « Nous sommes là pour sécuriser la zone, d’autant plus que le village de Mroalé attire pas mal d’ennuis… » Et le secrétaire de l’association compte bien travailler main dans la main avec l’autre cosignataire, la Régie de territoire. « Nous avons des talkies walkies pour communiquer ensemble. Mais ce serait bien que nous ayons chacun un référent pour discuter avec les structures des autres localités. Comme ça, nous pourrons mener des actions communes. »

Cette convention lie les deux associations avec les services de l’État pour une durée d’un an, renouvelable en décembre 2021. En échange de remontées régulières du terrain, chaque bénévole recevra chaque mois un bon d’achat alimentaire d’un montant de 100 euros. « Même avant de rejoindre le dispositif GMC, nous envoyions déjà des rapports sur les incidents que nous observions, comme des bagarres et des événements louches, à la police municipale et à la gendarmerie », précise Mahamoudou Soulaimana. Cette signature n’est donc qu’une manière d’officialiser et de légitimer l’agissement de ces hommes et ces femmes, qui ne recherchent qu’à retrouver le calme.

Fin de l’urgence sanitaire : quelles implications pour Mayotte ?

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Prévue initialement le 31 octobre à Mayotte et en Guyane, la levée de l’état d’urgence sanitaire a finalement été décidée ce mercredi en conseil des ministres, soit un peu plus tôt que prévu. Une bonne nouvelle qui ne signifie pas la fin de toutes les restrictions, à l’heure où le 101ème département est toujours classé orange.

C’est la nouvelle que beaucoup attendaient. À l’issue du conseil des ministres, le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal a annoncé la fin de l’état d’urgence sanitaire à Mayotte et en Guyane. Les deux départements, encore touchés par une hausse des cas de Covid-19 en mai dernier, étaient les seuls toujours soumis à cette contrainte, prévue initialement jusqu’au 31 octobre, avec possibilité pour le gouvernement de revoir sa copie à mi-parcours. L’urgence sanitaire avait été levée pour le reste du pays le 10 juillet 2020.

« L’évolution sanitaire dans ces territoires permet de mettre fin dès aujourd’hui à l’état d’urgence, et à Mayotte et la Guyane de rentrer dans le régime transitoire, c’est-à-dire le même régime que le reste du pays », a précisé le porte-parole. En tout état de cause, Mayotte devrait donc s’aligner sur la Loi organisant la sortie de l’état d’urgence sanitaire parue au Journal officiel le 10 juillet 2020 et qui prévoit un régime transitoire de quatre mois. Voire plus, car la situation reste très évolutive. La reprise de l’épidémie dans plusieurs régions de l’Hexagone a d’ailleurs conduit le gouvernement, à l’occasion du même conseil des ministres, à examiner un projet de loi pour proroger ce régime transitoire, jusqu’au 1er avril 2021. Le texte doit être examiné par les députés de l’Assemblée nationale à partir du 1er octobre.

Arsenal préfectoral

Or cette période de transition ne vient pas sans contrainte. Et la fin de l’état d’urgence à Mayotte ne signifie pas la levée de toutes les restrictions. À l’image du reste du pays, le préfet devrait ainsi toujours disposer d’un large arsenal pour reprendre des mesures si la situation sanitaire l’exige : limitation de la circulation des personnes, fermeture d’établissements, parcs, centres nautiques, plages, ou encore port du masque obligatoire. Le décret du 27 août dernier pris par le préfet de Mayotte pour imposer le masque autour des établissements scolaires, des bureaux de poste, des établissements du CHM, des centres de protection maternelle et infantile, des pharmacies, des gares maritimes et dans les marchés couverts, devrait donc vraisemblablement rester de mise.

Quid du reste ? Pour les événements, l’étau devrait se desserrer, avec la possibilité de participer à des rassemblements de moins de 5.000 personnes. À l’échelle du pays, les préfets peuvent déroger à cette règle en zone verte, mais pas en zone rouge, et ce, au moins jusqu’au 30 octobre prochain. Les rassemblements et réunions de plus de dix personnes devront quant à eux toujours faire l’objet d’une déclaration à la préfecture, qui pourra les interdire ou les restreindre.

Mayotte encore en orange

Mais la sortie de l’état d’urgence intéressera surtout les entreprises. Il faut ici noter que les mesures avaient déjà largement été allégées à Mayotte, et ce, dès le 18 mai et l’ouverture des petits commerces. Nouveauté apportée par la décision du gouvernement : les salles de sport, toujours fermées depuis la fin du confinement, pourront peut-être enfin ressortir les haltères et les tapis roulants, pour le plus grand bonheur des sportifs en manque de sérotonine.

Ce qui ne sera pas le cas des amoureux des pistes de danses, les discothèques ne pouvant toujours pas ouvrir leurs portes, même sans l’état d’urgence. “Aujourd’hui, nous n’avons toujours pas de date définitive de sortie, et c’est un combat que nous menons aussi au niveau national, car certaines sont en très grande difficulté”, abonde Charles-Henri Mandallaz, le président de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie de Mayotte (UMIH 976). Si le gérant du L’Orient Express se réjouit de la levée de l’état d’urgence, il reste néanmoins sur ses gardes. “Mayotte est toujours en orange, et les mêmes restrictions continuent de s’appliquer sur nos salles, que nous ne pouvons pas ouvrir”, soupire-t-il.

Des aides révisées

Quant aux aides, dont certaines, comme l’activité partielle, avaient été prolongées jusqu’au 31 octobre à Mayotte, la levée de l’urgence sanitaire pourrait bien rebattre quelques cartes. Rappelons toutefois que le dispositif a déjà fait l’objet d’un léger ajustement, par un décret du 18 août fixant un taux horaire minimum de l’allocation d’activité partielle à 7,05 euros brut dans le 101ème département. Au niveau national, désormais, deux dispositifs se côtoient : le premier, qui a permis pendant le confinement d’indemniser les salariés à hauteur de 84% de la rémunération nette, est dégressif, avec un reste à charge des entreprises qui doit être porté à 40% contre 15% actuellement ; le deuxième, de longue durée, permet de réduire le temps de travail, jusqu’à 40%, pour une durée maximale de deux ans. Côté restauration et tourisme, le dispositif d’activité partielle à 100% a lui été prolongé jusqu’à fin décembre (même chose pour certains secteurs bien précis, comme la production cinématographique ou les galeries d’art par exemple, qui justifient encore d’une baisse d’activité importante).

L’augmentation du fonds de solidarité à 3.000 euros pour les petites entreprises de Guyane et de Mayotte, pendant toute la période d’urgence, annoncée par le ministre des Outre-mer en juillet dernier, pourrait quant à elle être annulée. “Dans ces cas-là, on retomberait à 1.500 euros, jusqu’à la fin de l’année”, table Charles-Henri Mandallaz, qui attend aussi de voir quel protocole sanitaire sera imposé en cas de réouverture autorisée des salles de restaurant. Le représentant de l’UMIH a rendez-vous avec la préfecture lundi prochain pour élaborer le calendrier de sortie de crise. La préfecture doit par ailleurs donner plus de précisions sur la fin de l’état d’urgence ce jour.

Pour Ramlati Ali, « Mayotte se trouve dans une situation de pourrissement »

Lors de la séance de questions au gouvernement, la députée Ramlati Ali a rappelé tous les maux dont souffre actuellement Mayotte : flambée de violences, crise socio-économique, situation de pourrissement et fragilité économique. Mais aussi que les Mahorais ne supportent plus l’insuffisance de réaction de l’État. En guise de réponse, le ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu, s’est rabattu sur l’opération Shikandra et sa lutte contre l’immigration clandestine et sur les renforts de la gendarmerie et de la police nationale envoyés depuis 2015.

Que faire et que dire pour que l’État prenne conscience de la recrudescence de la délinquance dans le 101ème département ? Alors que Mansour Kamardine s’époumone habituellement à jouer les lanceurs d’alerte, c’est Ramlati Ali qui a pris le relais ce mardi lors de la séance de questions au gouvernement. Et la députée de la majorité n’y est pas allée de main morte et a sorti l’artillerie lourde pour créer un électrochoc. « Mayotte connaît actuellement une flambée de violences sans précédent. En effet, depuis plus d’un mois, de très vives tensions matérialisées par des actes de violences physiques et sociales se multiplient quotidiennement, accentuées par une grave crise socio-économique », a-t-elle lâché en préambule, en s’adressant au ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu. « Le constat est sévère et génère une forte inquiétude au sein de la population. Pas un jour ne passe sans que l’on assiste au triste spectacle de voitures dégradées et brûlées, de rackets d’automobilistes, de pillages, d’affrontements entre bandes rivales. »

Un message sous le signe d’un ras-le-bol généralisé qui intervient après des scènes de « guérilla » de plusieurs jours entre des jeunes « armés de machettes » de Miréréni et de Combani, qui « sèment le chaos » sur la commune de Tsingoni. N’ayant pas sa langue dans sa poche, Ramlati Ali a continué : « Mayotte se trouve dans une situation de pourrissement, avec des habitants apeurés, exaspérés, qui décident de se protéger eux-mêmes. » Première réponse apportée par le successeur d’Annick Girardin ? « Il faut se parler très franchement : la situation à Mayotte est extraordinairement préoccupante et malheureusement, [elle] ne date pas d’hier. Sur ces défis qui nous attendent, il faut qu’on arrive à dresser des solutions en regardant les choses et en parlant sans tabou. » Une belle manière de botter en touche et de faire comprendre que le gouvernement n’a pas de recette miracle sous le coude…

Une grève à durée indéterminée

La députée en a profité pour insister sur le mouvement social Chez Jumbo Score qui gangrène l’approvisionnement en denrées alimentaires depuis près de 60 jours. « Et dans deux jours [ce jeudi 17 septembre, ndlr], l’intersyndicale sera en grève pour une durée qui risque d’être indéterminée. » Face à ce climat social plus que tendu, la médecin de profession a rappelé les propositions faites par les 4 parlementaires, le président de l’association des maires et les 2 élus du Département au cours de leur récente entrevue avec le MOM. En ligne de mire : le recours aux militaires et le déploiement d’un plan Harpi sur le territoire, à l’instar de l’opération similaire qui se déroule en Guyane contre l’orpaillage clandestin. Une possibilité évoquée « par le président, Emmanuel Macron, lors de la rencontre avec les maires d’Outre-mer à l’Élysée en février 2019, dans le cadre du grand débat national ». Rappelant au passage que la direction territoriale de la police nationale « ne demande qu’à voir ses équipes renforcées ».

1.200 militaires et policiers positionnés

Pour se défendre sur ce sujet, Sébastien Lecornu a sorti le grand jeu en vantant la montée en puissance régalienne sur le territoire. « Je rappelle un chiffre : pratiquement plus de 1.200 militaires de la gendarmerie et policiers nationaux sont désormais positionnés à Mayotte, soit pratiquement plus de 400 effectifs supplémentaires depuis 2015. » Suffisant ? Pas assez diront les habitants de l’île aux parfums. Alors le ministre des Outre-mer a aussi mis l’accent sur la désormais trop célèbre « lutte contre l’immigration clandestine », plus connu sous le nom du « plan Shikandra ». Qui a produit « des résultats tout à fait significatifs en 2019 » avec ses 27.421 reconduites à la frontière. Sauf que le Covid-19 et le confinement ont « gêné » ces belles promesses… « Ce dispositif doit de nouveau produire ses effets, en lien notamment avec les forces armées qui sont déployées dans le cadre de l’action d’État en mer. » Sans oublier « une initiative diplomatique forte » avec les Comores « pour avoir des résultats en la matière ». Plus convaincant ? Toujours pas si l’on décrypte la fin de l’intervention de Ramlati Ali. « Force est de constater qu’en dépit des efforts de l’État, l’arsenal de lutte contre l’insécurité mis en place est insuffisant au regard de la situation incendiaire que connaît Mayotte. » Comme si elle se doutait que la réponse de Sébastien Lecornu ne serait pas à la hauteur de ses espérances. « Le désespoir et le sentiment d’abandon sont très forts au sein de la population mahoraise. Elle est excédée par cette insuffisance de réactions face à cette violence sans fin. Les Mahorais sont des Français qui attendent des résultats concrets et des mesures adéquates afin de rétablir la loi et l’ordre sur le territoire mahorais. »

Selon la CGT, depuis Paris, « on veut faire taire la classe ouvrière à Mayotte »

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La grève des salariés de Bourbon Distribution Mayotte ne faiblit pas depuis le 20 juillet. Salaire minimum inférieur à celui de leurs homologues réunionnais, 14ème mois, prime de transport, égalité homme-femme, les sujets de discorde sont nombreux du côté des salariés. Les répressions aussi, à en croire un courrier transmis mardi aux ministres de l’Intérieur et du Travail par la CGT – nationale et non départementale – qui envisage même de mener une action à Paris. Secrétaire général de la fédération commerce et services, Amar Lagha évoque un véritable « scandale », à la veille d’une grève générale prévue par l’intersyndicale dans tout le territoire national, et suivi à Mayotte, ce jeudi. Entretien.

Flash Infos : Qu’est-ce qui vous a motivé, depuis Paris, à interpeller le ministre de l’Intérieur et la ministre du Travail à propos de la situation à Mayotte ?

Amar Lagha : Ce n’est pas le premier courrier qu’on leur envoie, mais le troisième ! Nous sommes régulièrement en lien avec nos camarades de la CGT Mayotte. Ils nous ont interpellés et nous avons décidé de nous entraider pour porter leurs revendications jusqu’à Paris. Depuis mi-juillet, ce qui se passe à Mayotte est un scandale. Ce que nous exigeons à travers ce courrier, c’est que le gouvernement traite Mayotte comme n’importe quel autre département français. Nous n’avons pas peur de le dire : si ce conflit avait éclaté en métropole ou sur une autre île, nous n’en serions pas là aujourd’hui. Ça aurait été réglé depuis longtemps, et largement. Mayotte ne doit pas être une zone de non-droit et la police ne doit pas y devenir une milice, ni entraver le droit de grève des salariés.

FI : En effet, votre courrier évoque une « répression virulente », des « agressions physiques et verbales de la part des figures d’autorité », des « exactions » à l’encontre des grévistes. De quoi s’agit-il exactement ?

A. L. : Nous avons reçus plein de vidéos, qui sont sur le site de la CGT et sur celui de la CGT Mayotte, où nous voyons des policiers et des gendarmes refuser de porter un masque, avant de gazer des grévistes en plein visage ou même de les frapper, nous avons les preuves ! Il y a même un camarade blessé qui a dû être évacué par le Samu au mois de juillet. Certains agents de sécurité d’une société externes s’en sont aussi pris aux grévistes, alors qu’ils n’ont évidemment pas le droit de le faire. Il y a aussi beaucoup d’intimidations : certains se sont vu mettre la pression par des membres de leurs propres familles pour qu’ils reprennent le boulot. On menace le cousin, parfois même le mari, pour que leur femme, leur mère ou leur cousine rentre à la maison au lieu de faire grève. Ce sont des méthodes dignes du XVème siècle, qui sont précisément appliquées parce que 80% des grévistes sont des femmes, des mères de famille qui se battent pour pouvoir nourrir leurs enfants. Nous prônons l’égalité homme-femme, mais quand quelqu’un demande à un homme de faire en sorte que sa femme reprenne le travail, ça pose un gros problème.

FI : Les négociations entre les syndicats et la direction sont dans l’impasse depuis deux mois. Comment, alors, la situation peut-elle s’apaiser ?

A. L. : Le préfet de Mayotte a une grosse part de responsabilité sur ce qu’il se passe. Nous sommes face à un gouvernement qui se cache derrière la distance qui le sépare de Mayotte. C’est un peu « loin des yeux loin du cœur » en quelque sorte. Il y a un taux de pauvreté très élevé, mais Mayotte n’est pas la Martinique ou La Réunion, il n’y a pas de tourisme, donc ce n’est pas une vitrine, alors nous laissons pourrir la situation ! Si vous faites une action sur les Champs Elysées, tout le monde en parlera. Mais à Mayotte… C’est malheureux, mais c’est la vérité aujourd’hui. Et ça arrange bien le gouvernement. La ministre du Travail nous a garanti que le préfet réagirait, mais je crois qu’il n’a pas bien compris ce que nous attendions de lui, c’est-à-dire qu’il joue un rôle de médiateur pour créer les conditions nécessaires à l’apaisement et au dialogue, pas comme la dernière fois où le patron et les agents de sécurité ont menacés les salariés, dont certains ont été arrêtés par la police. Ce n’est pas comme ça que nous réglerons ce conflit. Aujourd’hui, nous disons aux ministres de l’Intérieur et du Travail : « vous ne pouvez plus fermer les yeux ! » Nous ne verrons jamais en France ce que nous voyons aujourd’hui à Mayotte. Et ça, ça nous pose un gros problème démocratique. Mais nous avons beaucoup d’interrogations quant au silence du gouvernement, et nous n’allons pas passer nos journées à lui écrire. Alors nous sommes en train de réfléchir à une action devant le ministère du travail, à Paris, pour défendre la situation de Mayotte.

Des réflexions en cours pour désenclaver le ciel mahorais

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Mercredi s’est tenue une réunion relative à la restitution intermédiaire de l’étude de faisabilité sur l’amélioration de la desserte aérienne de Mayotte. L’occasion d’évoquer l’allongement de la piste, le hub aérien en relation avec le projet gazier au Mozambique ou encore la création d’une compagnie aérienne mahoraise. Un document final doit être restitué au Département d’ici quelques semaines pour lui permettre de prendre les décisions adéquates sur ces sujets.

En octobre dernier, le président de la République, Emmanuel Macron, a promis l’allongement de la piste de l’aéroport. Mais depuis, plus rien ou presque, mise à part l’installation d’un comité de pilotage pour exécuter la promesse du chef de l’État. En parallèle, le Département a commandé un certain nombre d’études dans le cadre du schéma régional de développement économique, de l’innovation et d’internationalisation pour permettre aux élus de prendre les décisions idoines en réponse aux besoins des Mahorais. Ce mercredi s’est tenue une réunion relative à la restitution intermédiaire de l’étude de faisabilité sur l’amélioration de la desserte aérienne à Mayotte, en compagnie des parlementaires, des maires et des intercommunalités. « Nous voulions partager l’information en notre possession », souligne Fatima Souffou, 1ère vice-présidente, chargée de l’administration générale, des infrastructures et des transports. « Nous avons voulu communiquer et avoir quelques retours de la population. C’est toujours important d’avoir son ressenti. »

Un hub aérien sur fond de diplomatie ?

Concrètement, que s’est-il dit lors de cette rencontre ? Et surtout que faut-il en retenir ? « L’objet des études est de nous accompagner à arrêter une décision sur l’aérien », confie l’élue du conseil départemental. Première information : plusieurs freins subsistent lorsque l’on évoque le désenclavement aérien, à l’instar du prix du carburant – « 40% plus cher qu’ailleurs » -, de la piste longue et des autorisations à donner aux différentes compagnies. Autre réflexion avec la faisabilité d’un hub aérien en relation avec le projet gazier au Mozambique. Et à ce sujet, plusieurs scenarrii se démarquent, en lien avec Dubaï, Johannesbourg, ou encore Marseille. « Nous avons aussi eu des retours sur les marges éventuelles de nouvelles compagnies qui accepteraient de travailler avec nous et sur les suggestions concernant les subventions européennes. » Toutefois, la collectivité risque aussi de rencontrer quelques difficultés impondérables avec certains pays de l’océan Indien si elle souhaite s’engager dans cette démarche, notamment avec l’Union des Comores et l’île Maurice. En effet, ces deux-là « ne reconnaissent pas Mayotte comme département français », regrette Fatima Souffou. De ce fait, « cela nous ramènerait à de la diplomatie qui ne serait pas de notre ressort » pour tenter de faire bouger les lignes et de trouver un terrain d’entente pour mener ce projet à terme.

Une compagnie aérienne dès 2021 ?

Toujours est-il que ces présentations n’étaient qu’un « point d’étape des études en attendant le document final ». S’il est encore trop tôt pour se prononcer sur la date de sa restitution, la 1ère vice-présidente assure que « ce sera avant la fin de l’année ». Ensuite, « nous nous prononcerons sur une orientation définitive en fonction des recommandations ». Tout cela semble donc encore relativement abstrait. Alors que peut-on espérer à court terme ? Selon Fatima Souffou, « il est possible de démarrer quelque chose en 2021, ne serait-ce si nous décisions de créer une compagnie aérienne ou d’intégrer une compagnie existante. Cela serait possible dès l’année prochaine », assure-t-elle. Une bonne nouvelle en perspective après le vrai-faux lancement d’une nouvelle ligne entre Mayotte et La Réunion en fin d’année dernière…

Grève BDM : quatre jours après l’incendie à Jumbo, un conflit au point mort

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Après l’escalade du week-end, qui a conduit des grévistes à incendier des pneus de voiture devant le supermarché, le mouvement de contestation des salariés contre Bourbon Distribution Mayotte – le groupe de distribution racheté par le géant ultramarin GBH (Groupe Bernard Hayot) – semble dans l’impasse. Un moment de flottement qui se ressentait dans les allées comme sur les piquets de grève, ce mardi.

C’est calme. Trop calme ? À Jumbo Score ce mardi, on pourrait presque entendre les mouches voler. Et croire que les grévistes ont levé le camp… Seul signe que leur mouvement social contre la direction de Bourbon Distribution Mayotte se poursuit, leur bannière, qui flotte au vent à côté des lettres de l’enseigne rouge et bleue. “Non à la discrimination dans le groupe GBH. Salaire mini net à Mayotte 1.069 euros contre 1.218 euros à La Réunion. Partageons les richesses et non la misère”, signent les syndicalistes, toujours remontés comme des coucous suisses. Et comme pour rappeler qu’ils étaient toujours là, un employé a d’ailleurs prévenu le groupe de distribution dans un post Facebook ce mardi matin de “respecter le droit de grève des salariés (…) et de ne pas enlever notre banderole jusqu’à la fin de notre mouvement social”. “À bon entendeur”, croit-il bon de préciser.

Du coup, dans les allées du supermarché, on ne peut pas dire qu’il y ait foule. Les employés, occupés au réassort, sont presque plus nombreux que les clients… Alors même qu’on “tourne en effectif réduit”, assure une responsable du magasin. “Il y a surtout des grévistes ici à Jumbo, beaucoup moins dans les Doukas. Et je dirais que 60% sont des employés des entrepôts, contre 40% dans les rayons”, décrit-elle. En tout, ils sont encore 120 salariés à faire grève, dont seulement six dans les petites épiceries rouges, sur les 540 employés que compte BDM à Mayotte. Et vu que les entrepôts sont bloqués, les réapprovisionnements prennent du retard, car les chauffeurs livreurs doivent amener et dépoter les conteneurs directement derrière les enseignes. Ce qui ne permet pas de traiter les mêmes volumes.

Appel au soutien et pneus cramés

Conséquence, étagères et caddies se vident, et seuls quelques rares clients font aujourd’hui leurs emplettes à Jumbo. “D’habitude, il y a plus de monde les midis, là c’est vrai que c’est plus tranquille. Et il y a peut-être un peu moins de produits mais ce n’est pas plus mal, ça évite de tomber sur du périmé”, constate une femme en réajustant son foulard léopard sur son nez, avant de faire son choix parmi les boites de conserve. Certes, la CGT-Ma avait aussi appelé, il y a quelques jours, la population mahoraise à les soutenir dans leur lutte, en boycottant l’enseigne. Mais difficile de savoir si c’est par solidarité ou par crainte des ennuis, que les clients ne se pressent pas dans les allées ce midi.

Il faut dire que le mouvement a déjà connu quelques coups d’éclats. Jusqu’à l’escalade du week-end, qui a conduit une école voisine à fermer ses portes à cause des fumées provoquées par l’incendie de pneus devant le supermarché. Loin de faire évoluer les négociations, cet épisode a plutôt grippé la machine. Les salariés réclament toujours une revalorisation des salaires de 150 euros, des chèques déjeuners d’une valeur de neuf euros, la majoration des jours fériés à 200%, des réductions de 10% pour leurs achats chez leur employeur ou encore un 14ème mois et une prime transport.

Une médiation entravée

Pourtant, une médiation avait bien été lancée avec la Dieccte, qui avait conduit les uns et les autres à se réunir le 21 août dernier pour poser les bases d’un dialogue. Mais les négociations ont été stoppées net quand les syndicalistes de la CGT-Ma ont repris leur poste devant les trois entrepôts du groupe. La levée de ces “entraves” était la condition sine qua non pour que la direction accepte d’entendre leurs doléances. Si certaines demandes ont été acceptées, comme le 13ème mois à 100%, d’autres crispent les débats. “Au début, on était prêt à baisser nos exigences de revalorisation à 70 euros pour sortir du conflit, mais la direction ne nous a proposé que 23 euros, et pas pour tout le monde”, peste ainsi Attoumani Bora, délégué membre du CSE qui porte la voix des grévistes à l’entrepôt de la zone Nel.

En guise d’entrave, lui et sa bande font en effet le piquet, d’ailleurs plutôt allongés sur leurs nattes que debout, devant les rideaux métalliques résolument fermés du bâtiment de stockage. Là, ils sont encore une dizaine à papoter à l’ombre à côté des drapeaux rouges. Et derrière l’apparente bonne humeur et le calme qui règnent, on sent toujours pointer l’exaspération face à une direction qui refuse le dialogue et “nous envoie les forces de l’ordre tous les jours”, soupire celui qui tranche en temps normal ses pièces de boucher derrière le comptoir de Jumbo. “Hier encore, ils tentaient d’ouvrir la porte.” Une réaction pas vraiment à même d’apaiser les esprits, surtout après les heurts de vendredi et samedi derniers devant le Jumbo. “C’était juste un geste car on nous a envoyé la police pour nous gazer”, marmonne un employé d’entrepôt. “Il y a quelque chose de cassé entre les patrons, la Dieccte et nous.”

Mayotte valorise ses liens avec Madagascar à l’occasion des journées européennes du patrimoine

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Patrimoine et éducation. C’est le thème des journées européennes du patrimoine des 19 et 20 septembre. À Mayotte, 9 communes, une vingtaine d’associations et le conseil départemental participeront à l’évènement. Cette année sera l’année malgache puisque le lien entre Mayotte et Madagascar sera mis à l’honneur.

Il est indéniable que l’île aux parfums a un lien particulier avec sa voisine la Grande île. C’est dans cette optique que cette année, les journées européennes du patrimoine (JEP) seront consacrées à la culture « malagasy ». Et qui d’autre que le sultan Andriantsoly pour représenter ce lien d’attache ? Ancien prince d’origine malgache, il a élu domicile à Mayotte lorsqu’il fut chassé de sa région de la côte ouest malgache. Depuis sa mort, le sultan Andriantsoly repose dans son tombeau à Mahabou. Cet endroit sera au cœur des événements le samedi 19 septembre. Le président du Département, le préfet et le maire de Mamoudzou seront présents lors de l’ouverture. La journée sera rythmée par un mawlida shengué (chants religieux et traditionnels), par un trutrube (danse traditionnelle) et différents autres rites. Le tombeau sera uniquement ouvert le samedi.

En parallèle, les archives départementales dévoileront leurs trésors en ouvrant leurs portes au public pendant les deux jours. Il y aura une exposition sur l’Histoire de Mayotte de 1841 à nos jours. « Cette exposition présentée pour la première fois en 2007 recense les évènements les plus marquants et les chiffres les plus significatifs de l’histoire de l’île », peut-on lire sur le programme. Enfin, le musée de Mayotte participera aux journées du patrimoine, mais en dehors de ses murs, Covid-19 oblige. Le Muma « propose de découvrir le quartier historique de Dzaoudzi à travers un parcours ludique ». Dzaoudzi sort le grand jeu pour attirer le maximum de visiteurs en organisant un escape game samedi, une visite du parc de la résidence du gouverneur dimanche, et bien d‘autres ateliers sur la culture mahoraise.

Les grands absents

Une question vient à l’esprit lorsque l’on regarde de plus près le programme des journées du patrimoine de cette année dédiées à l’éducation. Le rectorat de Mayotte fait partie des grands absents. Aucun collège ni lycée n’est associé aux évènements. Seule la commune de Mamoudzou organisera des séances découverte de l’école de musique et des instruments traditionnels de Mayotte pour 4 classes de CE1 le vendredi 18 septembre. Le Muma dédiera également la journée du vendredi aux scolaires, mais n’entre pas dans les détails. « Il est vrai que le rectorat n’est pas présent en tant qu’acteur, et il faut l’inciter à l’être un peu plus l’année prochaine. Mais le thème choisi par l’Europe n’est qu’une indication, les porteurs de projets ont le choix de se l’approprier ou pas », rappelle Arnauld Martin, représentant de la direction des affaires culturelles (DAC) de Mayotte lors de la conférence de presse présentant le programme des JEP.

Mayotte a donc décidé de s’approprier l’évènement en mettant en valeur le lien historique avec Madagascar, mais là encore le contenu est maigre. Seul le tombeau d’Andriantsouly représentera ce lien particulier. Aucun autre lieu, aucun autre atelier ne sera à la culture malgache. À la grande surprise de tous, les communes qui partagent cette même culture telle qu’Acoua, Ouangani ou encore Kani-Kéli ne participeront pas aux journées du patrimoine. Quant à Boueni et Chirongui où l’on parle shibushi, rien n’est prévu pour « l’année malagasy ».

Selon les différents partenaires à Mayotte, le nombre d’événements a été réduit cette année, compte tenu de la crise sanitaire. « Ça n’était pas évident pour les communes d’organiser ces journées du patrimoine dans les conditions sanitaires, peu de temps après les élections municipales », indique le représentant de la DAC. Le programme reste tout de même assez dense avec une trentaine d’évènements organisés sur neuf communes. Enfilez donc vos masques et allez découvrir le patrimoine de Mayotte.

 

Quelles communes y prendront part ?

Les communes qui participeront aux journées européennes du patrimoine sont Bandrélé, Bouéni, Chiconi, Chirongui, Coconi, Dembéni, Dzaoudzi, Mamoudzou, et Tsingoni. Le programme complet et les conditions pour participer à certains évènements sont disponibles sur le site https:/journeesdupatrimoine.culture.gouv.fr/

Mayotte : Un barrage à Bambo Est pour dénoncer les incivilités dans le village

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Mardi matin, de nombreux automobilistes venus du Sud se sont retrouvés bloqués à Bambo Est. Les habitants ont érigé un barrage pour dénoncer les vitesses excessives des véhicules à l’entrée du village et exiger des lumières sur les arrêts de bus, après l’agression de deux jeunes la veille. Le Département et la commune de Bandrélé se sont engagés à répondre favorablement aux diverses revendications.

Une fois n’est pas coutume, Mayotte s’est une nouvelle fois réveillée avec un sentiment de gueule de bois. Ou plutôt à l’arrêt. Les automobilistes sont en effet tombés nez à nez avec un barrage à Bambo Est. Un blocage érigé sur la RN3 par la moitié des habitants. Une cinquantaine d’enfants, de jeunes et d’adultes ont décidé de tirer la sonnette d’alarme dès 4h30 et d’empêcher les usagers de circuler librement, à l’aide de poubelles, de pneus et de tout un tas de détritus. La raison de cette mobilisation intergénérationnelle ? « L’insécurité au niveau de la circulation routière et des passages piétons », précise le commandement de la gendarmerie. Mais pas que, un événement survenu la veille a vraisemblablement déclenché cette vague de mécontentement. Le lundi vers 5h, deux garçons âgés de 14 et de 17 ans se sont fait menacer par quatre individus alors qu’ils attendaient tranquillement le bus pour se rendre dans leur établissement scolaire. « Ils leur ont dérobé leurs téléphones portables. Ils ont déposé plainte. L’enquête est en cours. ».

Ralentisseurs, éclairage et médiateurs

Deux revendications distinctes sur le papier. Mais dans ce petit village situé sur la côte est de Mayotte, la solidarité semble de mise. Ainsi, une grande partie du patelin a décidé d’unir ses forces pour se faire entendre d’une seule et même voix. Et l’opération a visiblement fonctionné d’une main de maître puisque les réponses des collectivités ne sont pas fait attendre. D’un côté, le conseiller départemental de la circonscription, Ahamed Attoumani Douchina, pris en étau dans les bouchons, s’est engagé pour le compte du Département à poser des ralentisseurs d’ici le mercredi 23 septembre pour réduire la vitesse, trop souvent, excessive des véhicules. « J’ai immédiatement décidé de répondre favorablement à leur demande pour éviter un drame. Cette route n’est pas forcément accidentogène mais quand les automobilistes arrivent de Chirongui, il y a un risque réel. L’idée est de décourager les fous du volant qui accélèrent et dépassent dans la descente ! » Il n’est pas non plus exclu que des bandes rugueuses soient ajoutées. La décision sera prise dans les prochains jours par les agents du conseil départemental et de la Deal (direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement) qui se rendront sur place. De l’autre, la commune de Bandrélé a promis d’installer de l’éclairage public sur les arrêts de bus de Mgnambani mais aussi d’envoyer des médiateurs entre 4h30 et 6h pour éviter tout incident. Si le soutien de la police municipale a, à un moment, été envisagé, cette option n’a pu être retenue en raison d’un sous-effectif chronique ces derniers temps…

Levée du barrage à 8h

Finalement, face aux engagements des uns et des autres, les « grévistes » de seulement quelques heures ont accepté de lever leur barrage vers 8h et de reprendre le cours normal de leur matinée. Des négociations rapides et efficaces qui ne sont pas sans rappeler celles menées il y a quelques mois à Kahani pour les mêmes raisons. Reste maintenant à voir si le calendrier des promesses des élus sera respecté, au risque de voir les villageois reproduire le même scénario. Toujours est-il qu’Ahamed Attoumani Douchina a tenu à féliciter leur comportement plus que correct. « Il n’y a eu aucune animosité. Ils savaient ce qu’ils voulaient. » Point à la ligne.

À la découverte des sites de Mtsoumbatsou à l’ouest de Mayotte

L’association Jardin de M’tsangamouji, en partenariat avec l’office du tourisme de la communauté des communes du Centre-Ouest ont organisé une journée dé-couverte le samedi 12 septembre des sites de Mtsoumbatsou à l’ouest de l’île. Plages paradisiaques, grotte cachée, ancienne mosquée, ce lieu a encore gardé toute sa splendeur. Une quarantaine de personnes ont répondu présent.

Il existe encore des endroits sur notre île aux parfums méconnus par le grand public. À l’image des sites de Mtsoumbatsou, situés à quelques minutes de Mliha. Au XXème siècle, cet endroit était un village habité à part entière. Aujourd’hui, il ne reste que quelques traces de l’activité humaine d’autrefois. L’association Jardin de M’tsanga-mouji souhaite que des endroits comme celui-ci soient connus de tous, mais pas à n’importe quel prix. L’ancien village de Mtsoumbatsou a encore préservé sa beauté à l’état brut, et il est important qu’il en demeure ainsi. Le développement du tourisme pourrait dénaturer sa beauté. Il est donc nécessaire de faire appel aux professionnels qui sauront aider les touristes tout en préservant le charme du site.

Une quarantaine de personnes s’est retrouvée à 10h devant le gîte de Mliha. Enfants comme adultes, tous sont impatients et curieux de découvrir la beauté des sites de Mtsoumbatsou. Une grande partie d’entre eux vont découvrir les paysages exception-nels de cet ancien village, ainsi que son histoire.

Le parcours commence par une marche d’une dizaine de minutes. Ce laps de temps est suffisant pour puiser une bonne partie de l’énergie des randonneurs. Ils doivent alter-ner entre les montées exiguës et les descentes glissante.

Le premier arrêt se fait devant ce puits asséché qui a servi au XXème siècle. Les en-fants sont impressionnés. À moins d’un mètre se trouve du béton en forme de rec-tangle. Selon les guides, il faisait office de laverie. Ceci expliquerait sa proximité avec le puits.

Quelques pas plus loin, des arbres cachent les vestiges d’une ancienne mosquée datant du début du XXème siècle. Elle a été entièrement construite avec le sable de plage et des coraux. Ces derniers étaient chauffés puis mélangés au sable pour créer le ciment de l’époque. Une construction qui serait impossible de nos jours, à l’heure de la préser-vation du lagon.

La beauté à l’état sauvage du site de Mtsoumbatsou, n’est pas épargnée par l’activité humaine. La visite guidée est perturbée par des bruits de tronçonneuses. Il s’agit en ré-alité d’un groupe d’hommes qui s’acharnent à couper des dizaines d’arbres “pour un projet”. Les visiteurs indignés par un tel acte, poursuivent leur chemin non sans quelques remarques.

La ballade se poursuit et non loin de l’ancienne mosquée nous découvrons une vue à couper le souffle. Du sable blanc, quelques rochers et 3 nuances de bleu de mer s’éten-dent devant nous. Contrairement à certaines plages de Mayotte où les déchets traînent au bord de la mer, sur celle-ci, seuls les coquillages sont rois. Les randonneurs sont sous le charme.

L’isolement de cette plage est une aubaine pour les braconniers qui sévissent en toute tranquillité. Des carcasses d’une tortue dépecée sont cachées dans un coin de la plage. Une cruauté qui se répète selon le président de l’office du tourisme de la communauté des communes du Centre-Ouest. Il redoute le pire et prend l’exemple de l’île de La Ré-union. Il y a 100 ans, on pouvait y observer des tortues partout sur le littoral. Au-jourd’hui, il n’en existe qu’en élevage hautement surveillé.

Les marcheurs se mettent à nouveau en route. Cette fois-ci, les descentes sont un peu longues. Un petit garçon glisse mais se relève très rapidement.

Le chemin broussailleux mène à une autre plage appelée “Les Seychelles”. Elle porte bien son nom puisque l’endroit fait penser aux plages paradisiaques de nos voisins Seychellois. Le sable est plus blanc que la première plage, la mer est bleue turquoise. Difficile d’y résister.

Les marcheurs continuent leur découverte jusqu’à la grotte de Mtsoumbatsou. Ce mo-ment était très attendu. La fatigue est rapidement oubliée. Pas d’ours en vue, seulement des rochers gigantesques qui s’empilent. Les plus courageux s’aventurent à les escala-der pour arriver au sommet. D’autres se mettent dans la peau de Tarzan et grimpent sur les lianes.

La découverte se termine autour d’un repas bien mérité sur la plage. Les aventuriers émerveillés, assurent tous qu’ils reviendront.

Mayotte est-elle repassée en rouge ?

Après plusieurs semaines d’accalmie, la situation sanitaire de l’île à parfums a semble-t-il évolué. Mais Mayotte fait-elle de nouveau l’objet du plus haut niveau de vigilance ? Dominique Voynet, directrice de l’ARS, fait le point.

Orange, violet, et maintenant rouge… Depuis le début de la crise sanitaire, Mayotte en voit de toutes les couleurs. Vendredi dernier, le gouvernement dévoilait, à l’issue d’un conseil de défense, la liste actualisée des 42 départements encore ou nouvellement placés en vigilance rouge, au milieu desquels Mayotte et la Guyane apparaissent encore en violet, symbole de l’état d’urgence sanitaire, localement en vigueur jusqu’à la fin octobre. Sommes nous alors, comme l’ont annoncé nos confrères, de nouveau classés en vigilance rouge ? « Pas du tout », a démenti hier soir la directrice de l’Agence régionale de santé.

Pour autant, la situation a évolué puisque deux nouveaux clusters « très actifs », selon l’ARS, ont été identifiés : le premier au sein de « plusieurs dizaines de professeurs d’EPS » qui avaient partagé une soirée ensemble, et le second parmi des gendarmes. Pour autant, « il n’y a aucune raison d’être alarmistes », tempère Dominique Voynet, puisque le taux d’incidence s’établit à 31,8 cas pour 100.000 habitants entre le 5 et le 11 septembre. Bien en deça des 50 nécessaires au passage d’un territoire en zone rouge. Si la circulation du virus reste donc active, seuls 5% des 1.788 tests réalisés la semaine dernière étaient positifs. Quatre patients sont actuellement hospitalisés, mais aucun en réanimation.

Les règles de déplacements entre les départements d’outre-mer n’ont pas été modifiées par le conseil de défense, toutefois, l’ARS rappelle que les voyageurs à destination de La Réunion font l’objet d’un dispositif de prélèvement dédié.

Mayotte Hebdo de la semaine

Mayotte Hebdo n°1116

Le journal des jeunes