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« Quand ce n’est pas l’eau, c’est la violence »

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Depuis la rentrée, les jours sans heurts aux abords du lycée Younoussa-Bamana se comptent sur les doigts de la main. C’était encore le cas, ce mardi matin, vers 7h, ce qui a entrainé la fermeture de l’établissement de Mamoudzou (ce sera le cas ce mercredi et possiblement vendredi). Remontés, des élèves ont rencontré les représentants du rectorat, les parents d’élèves, les directeurs des polices nationale et municipale, à la mairie de Mamoudzou. Cependant, ils en ressortent sans la sensation d’avoir été écoutés.

Une cinquantaine de jeunes qui s’affrontent en se lançant des pierres ou en se baladant machettes ou barres de fer à la main, c’est devenu le quotidien des élèves qui se rendent au lycée Younoussa-Bamana, au centre de Mamoudzou. C’était encore le cas, ce mardi matin, avant 7h, au rond-point Baobab. Effrayés, les lycéens qui passaient par là (originaires de Cavani, M’tsapéré et Doujani) sont vite montés jusqu’à leur établissement,… qu’ils ont trouvé fermé en raison d’un confinement. Dans la confusion et alors que les élèves ont pu commencer à rentrer, l’alerte anti-intrusion a retenti et les policiers sont intervenus rapidement pour disperser ceux qui étaient devant l’établissement à l’aide de grenades de désencerclement.

Même s’il s’agit d’un événement déjà connu, la tension et parfois la peur dans l’établissement ont atteint un niveau important, ce mardi. « On a récupéré des collègues en larmes, des élèves traumatisés », raconte un professeur, qui a suggéré l’ouverture d’une cellule d’écoute psychologique. Les élèves ne disent pas autre chose. « On vit ça et on doit aller en cours comme si de rien n’était », disent-ils d’une même voix. Celle-ci d’ailleurs, ils ont voulu la faire entendre en demandant une réunion avec les autorités concernées. A 15h30, ils ont pu obtenir un rendez-vous avec les parents d’élèves, des professeurs, des représentants du rectorat de Mayotte, Laurent Simonin, le directeur territorial de la police nationale, ainsi que le directeur de la police municipale de Mamoudzou, Chaharoumani Chamassi. L’échange, qui a eu lieu à la mairie de Mamoudzou, a duré deux heures.

« On nous a dit ce qu’on sait déjà »

Si tout le monde a eu le droit à la parole, le dialogue constructif n’était apparemment au rendez-vous. « On nous a dit pendant deux heures ce qu’on sait déjà », regrette Salami. Le jeune de terminale craint, comme ses camarades, le retour au lycée sans solutions à présenter aux autres élèves. « A chaque fois qu’on proposait quelque chose on nous a dit : « On ne peut pas », « on n’a pas de solutions » », poursuit-il. Résultat des courses, une autre réunion est déjà prévue, le mercredi 4 octobre, au lycée. « C’est dommage qu’ils disent cela. Les élèves ont été écoutés », analyse de son côté le directeur de la police municipal, qui annonce un renforcement des effectifs sur ce secteur.

Pour davantage de vidéosurveillance, par contre, le cadre législatif empêche pour l’instant toute évolution. L’initiateur des parents-relais sur la commune de Mamoudzou plaide pour élargir son dispositif devant le lycée. « Lorsque les parents s’impliquent, ça change la donne », défend Chaharoumani Chamassi. Il admet que la difficulté demeure au vu de la situation du lycée qui rassemble des élèves sur une plus grande zone géographique où il est moins aisé de mobiliser les parents, contrairement aux écoles et collèges.

Des départs en « bateau »

De son côté, le commissaire Laurent Simonin, le directeur de la police nationale à Mayotte, a promis également de renforcer les effectifs et a révélé que le lycée fait l’objet d’une étroite surveillance, notamment par drone. Il a aussi proposé l’idée de faire sortir les lycéens par vagues en fonction des quartiers afin d’éviter que les groupes ne se rencontrent. Celle-ci a été retenue et devrait être appliquée lundi à la reprise des cours (voir encadré), même si les élèves sont circonspects parce qu’ils l’appliquent déjà. En effet, ne voulant pas être isolés en cas d’attaque par des bandes, ils s’attroupent et forment ce qu’ils appellent des « bateaux ». Partant à heure fixe depuis le quartier où ils résident ou du lycée, ces groupes peuvent ainsi circuler plus sereinement grâce à la force du nombre. « Le dernier « bateau » du mercredi pour les élèves de Doujani part à midi. Il y en a qui préfère sécher les cours l’après-midi que de le louper », fait remarquer Dahalami, élève en BTS.

Quelles sanctions ?

Les élèves aimeraient revenir au lycée sans craindre pour leur intégrité physique ou suivre une scolarité normale. « Quand ce n’est pas l’eau, c’est la violence », s’attriste Narma, en référence à la fermeture récente due à un problème sur le réseau d’eau. Mais ces affrontements impliquent des jeunes qu’ils fréquentent parfois dans les couloirs, en quoi est-ce si dur de les identifier ? Les élèves interrogés admettent en connaître une partie. Cependant, la peur rend difficile de les dénoncer sans craindre pour leur propre sécurité. Pour cela, ils ont notamment demandé qu’une « ligne d’écoute anonyme » soit mise en place pour aider à identifier les participants aux rixes. Ils ont aussi souhaité que des exclusions soient plus rapides pour les auteurs de faits de violence. L’établissement et le rectorat ont répondu que les procédures ne peuvent se faire sur une simple dénonciation.

Au cours de la réunion, Soula Saïd-Souffou, le conseiller départemental, a fait un discours remarqué sur « terroristes », « les enfants du juge » pour qualifier les participants aux rixes et surtout en insistant sur la responsabilité des parents. Un discours qui n’a pas plu ni auprès des élèves, encore moins aux parents, furieux d’être ainsi pointés du doigt. Car les bandes ne sont pas seulement constituées de lycéens. Selon les élèves rencontrés, certains gravitent à l’intérieur, mais « le noyau est déscolarisé ». L’élu a aussi promis de se renseigner pour qu’un bus achemine les élèves de Doujani, une mesure que le Département de Mayotte n’a jamais fait appliquer malgré les nombreuses demandes.

« De toute façon, Ils attendent qu’il y ait un mort pour réagir », lâche une lycéenne, désabusée.

Vers une fin de semaine banalisée ?

Avant la réunion à la mairie, une autre a eu lieu entre le rectorat de Mayotte, la direction du lycée, les professeurs et le personnel de l’établissement. Ces derniers n’ont pas souhaité reprendre le travail, ce mercredi, et veulent exercer un droit de retrait. « Je comprends leur émotion. Ils ont besoin de souffler », reconnaît Benjamin Lazare-Peillon, le directeur de cabinet du recteur. Le personnel lui a demandé un doublement des EMS (équipes mobiles de sécurité) et des AED (assistants d’éducation). Ce jeudi étant férié, ils ne devraient pas non plus revenir le vendredi. En effet, des élèves sont prêts à bloquer le lycée et au vu de tensions actuelles, cela peut faire craindre des menaces sur la sécurité aux abords de l’institution. Le samedi, où des réunions de parents d’élèves sont prévues, pourrait se dérouler normalement. C’est donc dès lundi que les autorités sont particulièrement attendues pour « casser la spirale de la violence », selon l’expression du collaborateur du recteur.

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