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Mai 2008 – Lieu dit – Hamaha, la ville nouvelle

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Quand la population mahoraise prépare la riposte

Sur les réseaux sociaux ou dans la rue, formellement ou spontanément, les initiatives se multiplient pour répondre à la délinquance qui flambe à nouveau sur l’île aux parfums. Au risque, parfois, de voir l’exaspération prendre le pas sur la loi. 

Mayotte : une naissance dont ils se souviendront

Une naissance dans la rue, ce n’est pas si courant. C’est pourtant ce qu’ont vécu Jonathan et Mouna, lundi 18 mai, date à laquelle Sarah, leur petite fille, a décidé d’arriver. Un évènement auquel ont participé quelques passants, sur les lieux par hasard. Et quand s’improvise une chaîne de soutien, cela donne une belle histoire. Récit. 

À Mayotte, “le confinement a révélé la capacité perverse de certains à faire du mal aux autres sans qu’ils ne s’en rendent compte”

Deux mois de confinement peuvent en dire long sur un individu, mais ils peuvent également dévoiler les pires et les meilleurs aspects d’une société. La crise sanitaire a mis en évidence les failles de la société mahoraise, partagée entre la conscience de certains et l’irresponsabilité des autres. Le sociologue Combo Abdallah Combo nous explique pourquoi il est urgent de tirer les leçons de ce confinement et essayer de changer la donne. 

Camille Miansoni, procureur de Mayotte : “Mon rôle est de protéger la société avant tout”

L’affaire du rapt en Petite-Terre qui suscite l’émoi dans l’ensemble du Département est révélatrice de nombre de maux dont souffre la société mahoraise au sein de laquelle nombre de personnes semblent valider l’idée que l’on puisse se faire justice soi-même à défaut d’une carence supposée de l’État. Le procureur de la République, Camille Miansoni, revient ici sur ces éléments. C’est aussi l’occasion pour lui de rappeler le rôle qu’il occupe et la vision qui l’anime alors que les critiques pleuvent sur sa personne.

Si jamais le paysage métropolitain, les immeubles vous manquent, une solution s'offre à vous : Hamaha, la ville nouvelle. En pénétrant dans cette zone au nord de Mamoudzou, à la frontière avec Koungou, quelle que soit l'entrée, la différence entre l'île tropicale que représente Mayotte et n'importe quel centre-ville de France est sans conteste. Le changement demeure radical. Plus de cocotier, plus de verdure, aucun signe d'eau de mer à l'horizon et encore moins d'animaux sauvages.
"Quand nous sommes en plein cœur de cette ville, on oublie qu'on est à Mayotte", affirment les passants qui n'ont jamais quitté l'île. En effet, tous les éléments qui reflètent l'image d'une île exotique disparaissent pour laisser place, instantanément, au béton. Bâtiments qui poussent, chantiers en marche ou en finition… La ville nouvelle est animée par ces multiples projets de constructions.
En journée, on y croise des architectes dirigeant les travaux, des maçons et des peintres, tous munis d'un bleu et d'un casque de sécurité. Des employés distinctement emportés dans leur élan pour certains, ou préoccupés à échanger les faits divers de leur village pour d'autres. En faisant le tour de la zone, plusieurs endroits constituent l'image de la ville nouvelle en dehors des heures de travail : clean et surtout apaisant. On perçoit dans chacune des rues – sans nom – des villas différentes et aussi admirables les unes que les autres. Ces allées n'ont de temps à autre aucune issue, à l'inverse d'autres chemins finissent sur la route principale. Une sorte de labyrinthe géant composé de résidences avec ou sans étage.
Lorsque la nuit tombe, les lumières des foyers et des rues accentuent la vision des lieux comparables à certaines localités françaises. Concernant l'activité, seuls le vidéo club et le M'biwi Café composent les établissements ouverts. Tout est calme : ni chat, ni maki, ni chauve-souris. Il s'agit, à cette période de la journée, de manger puis dormir, en tout cas dans l'apparence physique. Un comportement qui devrait changer selon les habitants de Hamaha, "d'ici deux à trois ans". La ville sera alors nettement plus animée qu'aujourd'hui.
Ceux qui souhaitent effectuer un voyage dans l'Hexagone et découvrir à quoi ressemblent les villes de France savent dorénavant où se rendre. Et ce ne sera qu'un aperçu, en attendant que Hamaha soit définitivement achevé.

Ichirac Mahafidhou
 

Trois questions à Christophe Limousin, concepteur du projet
"Il faut regarder le projet dans son ensemble"

Ancien de la Sim, l'architecte concepteur de ce gigantesque projet a depuis longtemps une vision précise de ce que doit devenir le quartier de Hamaha, quartier qu'il souhaite vivement voir pleinement intégré au village de Majicavo. Mixité sociale est le maître mot de cette ville nouvelle, pour laquelle chaque détail a été prévu à l'avance.

Mayotte Hebdo : En huit ans, votre projet a considérablement avancé. Aujourd'hui une bonne partie des logements sont occupés, l'évolution du quartier correspond-elle à ce que vous imaginiez ?
Christophe Limousin : Le quartier n'est absolument pas fini, il est impossible de tirer des conclusions maintenant, cependant l'évolution correspond à ce que je voulais en faire. L'important pour moi est de relier tous les quartiers pour favoriser l'échange, les voiries ont été conçues dans ce sens. Evidemment il y a des éléments en retard, comme le rond-point qui a été voté par le conseil général il y a quatre ans et que nous attendons toujours, ou les logements de la Sim… Il faut regarder le projet dans son ensemble, pas simplement ce qui existe actuellement, sinon ça ne colle pas. La zone va se remplir peu à peu, il faut toujours penser aux nouveaux éléments qui arrivent : il va y avoir du logement social, des administrations avec prochainement la CSSM, 6.000m² de bureaux, avec un rez-de-chaussée à vocation commerciale, un Shopi face au M'biwi café, un vendeur de fruits et légumes… Sans tout cela le quartier parait évidemment déséquilibré, avec trop de logements, mais c'est loin d'être fini, les voiries sont faites pour accueillir tous ces projets. Il faut voir plus loin dans le temps. J'ai également prévu un immeuble de commerces qui contiendra des locaux d'archivage, à disposition des privés comme les banques, cela manque cruellement pour l'heure. Bien sûr, j'aurai aimé que tout cela soit moins dense, mais la logique économique va à l'encontre de cette vision, c'est normal.

 

"Les espaces verts arriveront en temps voulu"

MH : Il y a eu des ratés, le parc de loisirs, le cinéma, plusieurs projets ont été annulés. On reproche aussi au quartier son manque d'espaces verts et son manque de vie…
Ch. L. : Je ne sais pas ce qu'il en est du projet de parc de loisirs, ni si un autre projet l'a remplacé. Mais si vous voulez des loisirs, il faut rappeler qu'un hôtel va naître sur la plage du pendu, à 5mn du lotissement, il n'y aura qu'à traverser la route. Cet hôtel va développer des terrains de sports, peut-être des activités nautiques, etc. Ces activités profiteront aux habitants de Hamaha. Le cinéma est une affaire compliquée. A l'époque du début des Trois Vallées, vers 2001, j'avais moi-même essayé de faire venir un cinéma. J'étais en contact avec un groupe de la Réunion pour cela. C'était l'époque ou le service culturel montait le cinéma de Mamoudzou, il a fait en sorte de décourager l'installation de ce cinéma privé. C'est bien dommage il y a largement la place pour plusieurs salles. Un projet beaucoup plus récent s'est cassé les dents pendant un an et demi sur le montage financier, il a abandonné. A la place, nous allons faire des logements avec une partie commerciale. Je ne sais pas ce qu'il en est du centre commercial prévu, mais quoi qu'il arrive cette zone est à vocation commerciale, il n'y aura pas de logements.
Les espaces verts arriveront en temps voulu. Si vous regardez bien, Mamoudzou n'en est pas particulièrement pourvue… Le logement est plus urgent. Dans les maisons les arbres vont pousser. Les arbres des premiers jardins commencent à sortir aux Trois Vallées. Il y a 5 hectares d'espaces verts prévus sur les terrains de la Sim, ce sera à eux ou à la mairie de s'en occuper. Il faut penser à l'entretien : si on fait des espaces verts dans les lotissements, il faut un syndic pour s'en occuper, il en faudra un de toute façon pour l'entretien de la voirie et l'éclairage public.

MH : Les logements sociaux de la mairie de Mamoudzou ne sont toujours pas sortis de terre, croyez-vous toujours à cette mixité sociale que vous promouviez en lançant le projet Hamaha ?
Ch. L. : Bien sûr, tout est prévu pour, le problème actuel c'est que personne ne se bouge. Le projet de la mairie a changé tellement de fois que je ne sais pas à quoi il va ressembler, mais il sortira un jour. Avec il y a aura des écoles, un plateau sportif, une mosquée… tout cela intégrera la population de Majicavo Lamir au quartier, le village aura une cohérence. La mixité, c'est créer des lieux de convergence entre les quartiers, toutes ces installations, de même que les commerces, vont organiser la vie du quartier. Les gens se croiseront aux mêmes endroits. Pour l'instant le M'biwi est le seul endroit où il y a de l'animation en extérieur, le bar est d'ailleurs très actif dans l'activité du quartier. La grande place qui est devant m'appartient toujours, elle a été titrée à part. J'attends que l'association des commerçants se monte, pour élaborer un cahier des charges avec eux pour l'organisation d'un marché hebdomadaire et d'autres animations, et ensuite je cèderai à l'association la place pour un euro symbolique.
Autre chose importante, les bâtiments de la Sim (mandatée par la mairie de Mamoudzou) doivent être en cohérence avec les immeubles alentours, être aux mêmes dimensions pour se fondre dans la zone. Les bâtiments doivent rester hauts du M'biwi au terrain de la mairie, pour la cohérence du paysage, plus loin on dilue vers des maisons à un ou deux étages, puis encore plus loin sur du plein pied et du plus grand standing. Si les logements de la Sim se fondent dans le décor il n'y aura pas de barrière sociale, tout le monde sera mélangé.

Propos recueillis par Hélène Ferkatadji
 
 

Visite guidée de la ville nouvelle de Hamaha

Les Trois Vallées

C'est le premier projet. La base de la future ville est sortie de terre en 2000. Les 6 hectares des Trois Vallées sont dédiés aux logements et à une zone de commerces de proximité avec une école. Cela correspond à l'avenue qui dépasse l'emplacement des supermarchés le long de l'avenue.

Les Hauts Vallons

Sorti de terre en avril 2005, le lotissement de 7 hectares des Hauts Vallons est le relais des Trois Vallées. "A partir du projet des Hauts Vallons on sort du simple lotissement pour concevoir une idée d'aménagement plus vaste", expliquait M. Limousin au lancement du projet. 7.000m² de bureaux, de commerces de proximité et d'activités périphériques aux grandes villes sont prévus en plus du locatif, des villas et du logement social. Au début du projet, la Sim devait acheter trois parcelles de terrains en plein cœur de la zone afin d'établir du locatif social. Des esquisses sont même réalisées mais plusieurs problèmes mettent fin au projet, c'est le secteur privé qui achète l'emplacement. La mairie de Mamoudzou possède 11 hectares, entre les châteaux d'eau et les Hauts Vallons, un espace qui doit être réservé à 300/350 logements sociaux et à des équipements publics.

Zone commerciale des Hauts Vallons

Cet espace referme les Trois Vallées et les Hauts Vallons jusqu'a la route nationale. Ils 'agit d'un aménagement de deux hectares à vocation de bureaux et de commerces de moyenne surface. La Sodifram compte s'y installer, peut-être en liaison avec le projet des trois B de Baobab Invest déjà évoqué dans nos colonnes. La Caisse de sécurité sociale de Mayotte y établit ses locaux. Une bonne chose que cet établissement montre l'exemple en se délocalisant du centre; le début du désengorgement de Mamoudzou.

Le Val fleuri

La seule vocation de ces 2,6 hectares est le logement. Villas, immeubles en location ou en accession à la propriété alimenteront les zones d'activités en amont. Les promoteurs habituels, locaux, ont réservé une bonne partie des terrains : Austral développement, Mayotte Immobilier, Baobab Invest…

 


Témoignages d'habitants

"Je fais tout à pied"

Sophie Boudigues est arrivée à Mayotte depuis bientôt deux ans. Elle ne s'attendait pas à voir autant d'immeubles, mais elle s'est vite adaptée à son lotissement des Trois Vallées. Elle apprécie au plus haut point le fait de se déplacer à pied et d'avoir quasiment tout à portée de main.

En débarquant à Mayotte au mois d'août 2006, Sophie Boudigues a été surprise de se retrouver dans un grand bâtiment à Majicavo. Elle n'a pas vraiment choisi son logement puisqu'il a été assigné par l'employeur de son mari, la Gendarmerie nationale. "J'ai vécu en Afrique noire. J'ai été étonnée de retrouver ces grands bâtiments, des constructions énormes. Je pensais retrouver des bâtiments coloniaux avec terrasse. Il y a une urbanisation massive qui ressemble aux nouveaux quartiers en France. Je n'imaginais pas ça à Mayotte", admet-elle.
Pourtant cette jeune maman qui travaille à l'école des Flamboyants en tant qu'animatrice du centre de loisirs s'est rapidement faite à ce quartier encore en construction. "C'est très très bien tombé. Je travaille à côté, l'école pour ma fille est à côté, pour une maman c'est le rêve ! Mes amis sont dans le quartier, je fais mes courses ici, on a tout sur place", dit-elle ravie. Preuve qu'elle se sent bien aux Trois Vallées, elle avoue ne pas utiliser sa voiture sur des périodes qui peuvent atteindre deux semaines ! Un véritable exploit pour les détenteurs d’automobile à Mayotte, sachant que d'habitude s'ils en arrivent à cette extrémité c'est que leur bolide est au garage.
"Si j'ai envie d'aller manger dehors, je vais au M'biwi Café. Habiter ici nous donne un réel gain de temps par rapport à certaines familles dont les enfants se lèvent très tôt. Pour nous, c'est un confort exceptionnel, un gros plus", concède-t-elle.

 

École et travail proche du domicile : le rêve pour une maman

Quand elle s'est installée aux Trois Vallées, il n'y avait pas de boulangerie, ni de M'biwi Café et seulement quelques commerces. Selon elle, le centre-ville s'est déplacé de Mamoudzou vers Majicavo. "Il ne manque que le docteur. Nous avons la pharmacie, Jumbo, le vidéo club où passent beaucoup de personnes. C'est un quartier très sympa, on peut faire des promenades à pied, ça ne roule pas vite, c'est très calme et pas bruyant en dehors de la période des travaux", affirme-t-elle.
Sophie Boudigues croise beaucoup ses voisins à l'école les Flamboyants. Rencontrer les parents des camarades de sa fille permet de faire connaissance. Quant au contact avec les Mahorais, il se fait surtout grâce à ses collègues mahoraises de l'école. "Aux Flamboyants on croise de tout et tout le monde. Beaucoup de Blancs, des Mahorais, des Malgaches, des Indiens, etc. Je n'ai pas le sentiment de vivre dans une bulle réservée aux Muzungu", exprime-t-elle avec conviction.
Toutes ces conditions font qu'elle se sent privilégiée. "Je fais tout à pied. Les commerces et les services sont à proximité. À Mayotte, les déplacements ne sont pas longs en distance, mais cela peut prendre beaucoup de temps pour se rendre d'ici à Mamoudzou. Quand on a la chance d'éviter ça, c'est vraiment du confort, ce n'est que du bonheur", conclut-elle.

Faïd Souhaïli
 

 


Témoignages

"On croise les voisins dans les escaliers, mais c'est tout"

Haïra* habite dans le lotissement des Hauts Vallons depuis bientôt un an. Si cela lui apporte beaucoup de confort, elle avoue que l'ambiance villageoise mahoraise lui manque un peu.

La galère des embouteillages aux entrées nord et sud de Mamoudzou avant et après le boulot, c'est fini pour Haïra. Cette jeune mahoraise qui travaille aux Trois Vallées a décidé d'habiter à cinq minutes à pied de son lieu de travail, dans le quartier des Hauts Vallons.
"Si nous avons décidé avec mon mari de s'installer ici, c'est pour nous rapprocher du boulot. Il travaille à Kawéni et cela lui fait gagner beaucoup de temps. Avant, on partait tous les matins du centre de l'île, on avait les bouchons entre Passamaïnty et Mamoudzou et à Kawéni. Cela nous permet aussi de venir manger à la maison entre midi et deux", confie-t-elle.
Propriétaire de son logement, elle a bénéficié comme tant d'autres des mesures de défiscalisation permettant à son ménage de payer moins d'impôts. Autre avantage d'habiter dans ce nouveau quartier : la consommation de carburant est en chute libre et elle s'en réjouit ! "Maintenant, je fais un plein toutes les trois semaines, alors qu'avant c'était toutes les semaines. Pour les courses, on a Jumbo tout près et je peux y aller après le boulot. Pour l'instant, les enfants vont à l'école à Mamoudzou et le trajet est moins fatigant pour eux, mais bientôt ils auront aux Flamboyants une école qui est toute proche. On ressent la différence et le gain de temps qui en découle", avoue-t-elle.
Bien sûr, toute chose a son revers de la médaille. Elle regrette l'éloignement de sa famille. Dans son village, sa mère était sa voisine et pouvait garder ses petits-enfants lorsque Haïra s'absentait. Désormais, une employée de maison s'en occupe. Haïra déplore également la distance la séparant de ses champs.

 

L'éloignement du village pèse pendant la semaine

"Ici, nous n'avons pas les bananes, le manioc, les fruits à portée de main. Dans notre village, il suffisait d'aller dans nos champs situés à proximité. Ou sinon, on pouvait demander à la famille ou aux amis. Ici, il faut acheter", reconnaît-elle.
Au début, les parents de Haïra ne comprenaient pas trop pourquoi leur fille allait s'installer à Mamoudzou alors qu'elle n'y avait aucune famille. Mais petit à petit, ils s'y sont fait et n'hésitent pas à venir lui rendre visite quand ils font le déplacement à Mamoudzou. "Ma sœur vient systématiquement quand elle est à Mamoudzou. De toutes façons, tous les week-ends on rentre dans notre village, pour nous on n'est pas si loin que ça, ce n'est pas comme si nous habitions en France", rappelle-t-elle.
Cette ambiance familiale mahoraise n'est pas ressentie aux Hauts Vallons. Tout d'abord, Haïra n'y connaît quasiment aucun Mahorais qui y habite. Ensuite, chacun fait sa vie dans son appartement ou sa villa. "On croise les voisins dans les escaliers, on se dit bonjour et c'est tout. On se rencontre oui, mais sympathiser, je ne sais pas. En tout cas, je n'ai pas d'amis qui habite ici", avoue-t-elle.
Haïra apprécie ce nouveau quartier, notamment la sécurité qui règne au sein de son grand bâtiment. Mais elle déplore le manque d'aires de jeux pour les enfants et aussi le chantier permanent depuis son installation. "La poussière s'élève jusqu'ici, le bruit ne s'arrête jamais. Quand un bâtiment ou une maison est finie, la construction reprend ailleurs. Mais une fois que le quartier sera définitivement construit, ça devrait être bien", espère-t-elle

Faïd Souhaïli

*Prénom d'emprunt


Témoignages commerçants

M'biwi café
"Les gens sont demandeurs d'animations"

Ouvert le 17 septembre dernier, le bar restaurant M'biwi café est le plus actif dans l'animation du nouveau quartier. Sa dernière création : le marché aux légumes du samedi matin. Pour l'instant un seul agriculteur y vient – il vend tout son stock à chaque fois – mais d'autres devraient suivre rapidement. "Dans le quartier il y a beaucoup de gens qui aimeraient que ça bouge plus. Du coup, à chaque fois qu'il se passe quelque chose tout le monde s'y précipite", explique Franck, le gérant du M'biwi. Venu une première fois en vacances deux ans auparavant, il a entendu parler de l'ouverture de ce bar par un ami sur place et est revenu en assurer la direction d'exploitation avec une équipe de métropole qui a déjà travaillé avec lui. Même la conception du bar et la déco sont l'œuvre d'amis.
Le bar organise de temps en temps des concerts, le dernier en date était celui du Bacar, qui a connu un fort succès. "Il y a du monde qui habite l'immeuble au dessus du bar, on fait très attention à la nuisance sonore. Pour les concerts je choisis l'option apéro-concert, de 19h à 22h en terrasse, ça ne dérange personne." Le M'biwi a autorisation d'ouverture jusqu'à 2h du matin, pour l'instant il ferme à minuit en semaine et 1 heure le week-end. A l'exception d'une bagarre entre deux clients trop alcoolisés un soir, il n'y a eu aucun problème, aucune plainte.

 

Un vide grenier le 24 mai avec animations et concerts

Petit à petit Franck parvient à animer la vie du quartier : un vide grenier est prévu pour le 24 mai, avec concerts de Daddy Happy, Family Skank, LTO, Eliasse et Dynamic. Une animation paintball et château gonflable pour les enfants, un accordéoniste qui se promènera dans les stands… La journée, organisée en raison de l'approche du départ de beaucoup de fonctionnaires, devrait être animée. Pour l'instant un peu plus de trente exposants sont prévus, la vente est ouverte à tous, résidents ou non de Hamaha.
Autre animation récente, un concours le mercredi 23 avril de …ski alpin, sur console Wii bien sûr. Franck envisage d'en organiser un par mois, avec à chaque fois un sport différent. Après un premier défilé de mode réussi, un deuxième devrait suivre en mai. "Quand il y a des concerts les gens sont tous à leurs terrasses, ces animations marchent bien. On pense aussi faire quelque chose pour la Fête de la musique. Les gens sont demandeurs de nouvelles choses, pour l'instant le quartier est un peu mort la semaine. J'espère voir bientôt l'ouverture de nouvelles boutiques, ça fera circuler les gens, le monde attire le monde."
Des contacts se sont noués avec le kinésithérapeute du quartier, pour l'instant il n'y a pas grand monde mais Franck entend bien monter une association de commerçants, comme souhaité par Christophe Limousin, pour organiser des choses à plusieurs sur la place devant le bar. "Il y aura bientôt une pizzeria, un Shopi, un centre commercial… Je pense qu'il faut attendre encore deux ans et le quartier ressemblera vraiment à quelque chose, il faut être patient."
La clientèle, en plus des gens du quartier, est composée des ouvriers et responsables des chantiers alentours, et d'autres "hommes d'affaires" qui viennent y prendre leur petit-déjeuner. Les familles mahoraises de Hamaha y viennent de plus en plus, se fondent parfaitement dans la clientèle. Jusqu'il y a peu de temps assez inconnu en dehors de la zone, le M'biwi acquiert une réputation et commence à voir du monde de toute l'île.

Hélène Ferkatadji
 

 


Témoignages de commerçants

Asie Mobilier
"C'est autre chose que la rue du Commerce"

"Les habitants du quartier nous ont apporté un surplus de clientèle, même si nous avions déjà une réputation un peu partout. Le développement du quartier est intéressant pour nous." Elle-même habitante de Hamaha, Floriane Gherardi gérante du magasin attend de le voir terminé pour juger.
"C'est un bon quartier, il se développe, on va voir d'autres commerçants arriver. Quand ça sera terminé ça sera bien. En attendant il est vrai qu'il manque de la vie, des restaurants, un cinéma, ce genre de choses. Et quand les travaux seront finis on vivra enfin sans poussière…" Le magasin, autrefois installé à Kawéni, a déménagé en septembre 2007 après son rachat. "Nous avons senti qu'il serait intéressant d'être implantés ici, c'est quand même autre chose que la rue du Commerce ! Avec les nouvelles construction nous allons gagner de la clientèle qui voudra se meubler."

Hodi vin
"Il faudrait faire un bar à vin"

Fournisseur d'une grande partie des restaurants de l'île et de beaucoup de particuliers, la cave à vin installée précédemment zone Nel a emménagé il y a tout juste quelques semaines aux Hauts Vallons. "D'ici un ou deux ans il y aura 6.000 personnes ici, ça fera encore plus de clientèle, même si nous n'en manquons pas. Nous avons déjà beaucoup de fidèles. Depuis que nous sommes installés ici on a vu pas mal d'habitants du quartier curieux entrer dans le magasin et nous avons fait une inauguration officielle avant-hier."
Pour Carlos, le gérant du magasin, la zone de Hamaha "c'est plus mélangé que les m'zunguland, d'ailleurs certaines familles mahoraises du quartier viennent acheter nos produits, le plus souvent ceux qui ont vécu en métropole. Mais tout de même il n'y a ni plage ni verdure, ça ne ressemble pas à Mayotte." Pour sa collègue résidente du quartier qu'elle qualifie pour le moment de "cité dortoir", il faut attendre un peu. "Le quartier va se développer et devenir vivant. Il manque encore des lieux de vie : des bars, des restaurants, un marché…" Le local à côté de la boutique leur appartient aussi, une pizzeria devrait s'y installer. "Moi je voyais bien un petit bar à tapas et à vin, regrette Carlos. Je suis sûr que ça marcherait bien ici, c'est justement ce qui manque."

Edily les Indes
"C'est l'école qui amène la clientèle"

La boutique de meubles, bijoux et vêtements venus de la région est une des plus anciennes ici. Elle s'y est installée il y a 4 ans, à l'époque il n'y avait presque rien. "Nous étions au courant de ce qui allait se passer ici, explique la patronne, Christophe Limousin nous a expliqué tout le projet de quartier, nous savions qu'il y aurait du monde un jour. En plus, à l'époque, le prix du terrain était bien plus bas qu'ailleurs."
Le magasin a une clientèle qui vient de toute l'île, mais elle constate quand même une petite différence maintenant que la zone est habitée. "C'est surtout l'école d'à côté qui amène de la clientèle. Les mamans viennent jeter un œil en allant chercher leurs enfants." Habitante de Majikavo-Koropa, elle s'installe bientôt à Hamaha. "Ce sont des endroits très différents ! Il y a le bruit des travaux, les gens sont un peu les uns sur les autres… Il manque encore beaucoup de choses pour que ce soit bien, comme un jardin pour les enfants par exemple. Mais quand tout sera construit, il y aura encore moins de place."

Propos recueillis par Hélène Ferkatadji
 

 


"À peine acheté, c'est loué"

Pierre Rey-Millet est le gérant de la société Mayotte Immobilier. Créée en 2001, cette société a pour objet principal la construction de bâtiments, la location et la vente des appartements et locaux commerciaux qui les composent. Depuis 2003, Mayotte Immobilier a construit 4 résidences et une 5e est en cours au Val Fleuri.

Tout le monde le sait, trouver un logement quand on arrive à Mayotte relève de la chasse au trésor. Il faut déjà repérer les habitations disponibles. Ensuite, seulement, on cherche à savoir si elles conviennent à la taille de la famille, au poids du porte-monnaie et à la qualité de vie recherchée. Depuis quelques années, la ville nouvelle de Majicavo voit des bâtiments tous neuf s'ériger au fil des mois et de nombreux habitants y résident désormais.
Pour Pierre Rey-Millet, promoteur immobilier et gérant de Mayotte Immobilier, le succès de la zone flambant neuve s'explique pour plusieurs raisons. Ces appartements et locaux commerciaux partent comme des petits pains. "Je construis des résidences selon des règles compliquées (par exemple la hauteur des constructions qui dépendent de l'altitude à laquelle se trouve le sol) définies par le lotisseur M. Limousin à qui j'ai acheté les différentes parcelles. Je respecte ces règles, cela coûte cher alors une partie du prix est répercutée sur les appartements. Mais comme je ne suis pas seul à faire ce métier, il faut proposer le meilleur produit au meilleur prix. La résidence Ravénéa qui est en cours de construction dans le lotissement du Val Fleuri est sur un magnifique terrain, tous les appartements auront vue sur la mer, les logements sont variés, avec parking individuel sécurisé", argumente le gérant de Mayotte Immobilier.
La plupart de ses clients sont des personnes à gros revenus imposables et qui souhaitent payer moins d'impôts en bénéficiant de la défiscalisation sur les constructions neuves. L'argent de leurs impôts est ainsi investi à Mayotte, ce qui permet de renouveler le parc immobilier de l'île et génère une importante activité pour le secteur du BTP qui serait autrement en grande difficulté.

"Tous les nouveaux arrivants veulent habiter ici"

"Ceux qui achètent sont des gens aisés, des avocats, des médecins, des chefs d'entreprise. Il y a beaucoup de Métropolitains, de Réunionnais et de plus en plus de Mahorais. Pour la résidence de l'Horloge, un tiers des propriétaires sont nés à Mayotte, un tiers sont des résidents et un tiers sont des gens habitant à l'extérieur", confie-t-il. Il rajoute que les propriétaires basés en dehors de Mayotte voient en ces appartements plus un produit défiscalisé leur permettant de payer moins d'impôt que de véritables biens immobiliers.
"Un seul sur dix fera le déplacement à Mayotte pour voir son appartement", confirme Pierre Rey-Millet. Selon le gérant de Mayotte Immobilier, 90% des logements sont loués. "Très peu de propriétaires vivant à Mayotte y résident", explique-t-il. La plupart des locataires sont de passage sur notre île. Et d'après Pierre Rey-Millet, ils ne tiennent pas vraiment à changer leurs habitudes acquises dans l'Hexagone ou dans les Dom.
"Tous les nouveaux arrivants veulent habiter ici. À peine acheté, c'est loué. J'ai déjà eu des appels pour la résidence Ravénéa qui sera terminée l'an prochain. Des gens m'appellent pour savoir si des logements sont libres et ils insistent même pour que je leur donne le nom des propriétaires afin qu'ils puissent réserver pour l'année prochaine. Les locataires sont à proximité de tout, notamment le centre commercial et ils souhaitent être dans quelque chose qui ressemble à ce qu'ils avaient en Métropole", reconnaît le promoteur immobilier.

Encore plus de demandes de logements depuis le 27 mars

Le phénomène a été accentué par les événements du 27 mars dernier. En effet, les immeubles de Majicavo donnent un sentiment de sécurité à leurs habitants. Avec des digicodes, des interphones, des parkings sécurisés, les habitations sont moins accessibles aux passants et aux éventuels cambrioleurs. Pour Pierre Rey-Millet, ces mesures ne semblent pas de trop puisque ce sont les clients qui les demandent. Et comme tout prestataire de services marchands, il accorde de l'importance à l'adage "Le client est roi".
"Je dois m'adapter aux besoins, à l'environnement et à la qualité de ce qui entoure mes constructions. Il faut que les locataires de mes clients soient heureux." Calme, sécurité, vue imprenable sur le lagon, tels sont les arguments qu'il développe pour vendre les 41 logements de sa future résidence. Nul doute qu'ils feront mouche.

Faïd Souhaïli
 

 


Les Flamboyants, pionniers du quartier

L'école laïque privée les Flamboyants est pour l'instant le seul établissement scolaire basé dans le nouveau quartier de Majicavo. Ce fut la première implantation dans ce qui est devenu une véritable ville nouvelle et l'école est désormais un des lieux de rencontre incontournable du coin.

L'école est l'un des derniers bastions républicains auquel on prête la croyance que tout est possible, quelle que soit son origine sociale. Toutefois à Mayotte, l'école élémentaire publique suscite beaucoup de méfiance de la part de parents d'élèves venant de l'Hexagone et des autres Dom, mais aussi des Mahorais. Réputé d'un niveau faible, ils lui préfèrent les écoles privées. C'est dans cette perspective que Dominique Arnold Baille a décidé de créer toute seule l'école laïque privée les Flamboyants aux Trois Vallées en 2001.
"Il y avait une très forte demande des parents pour une école privée. De plus, nous avons été les premiers à offrir la possibilité d'un repas à midi préparé par un traiteur et celle d'un centre de loisirs pour l'après-midi. Nous avons également des enseignants professionnels formés en Métropole, qui sont professeurs des écoles et c'est ce que demandent les parents. Pour ceux qui sont de passage, ils souhaitent que leurs enfants ne perdent pas leur niveau une fois rentrés en France", explique-t-elle. Mais les Flamboyants n'attirent pas seulement des gens de passage.
De plus en plus de personnes nées ou installées à Mayotte sur le long terme y mettent aussi leurs enfants. Évidemment, tout le monde ne peut pas payer 2040 € par an et par enfant (soit 170 € par mois et par enfant), mais les demandes affluent et Mme Arnold Baille est même obligée de refuser de nouvelles d'inscriptions.

 

La grève dans le public incite les parents à se diriger vers le privé

"Cette école ressemble à une école de centre-ville métropolitaine. Les parents s'arrêtent pour y déposer leurs enfants, puis viennent les reprendre à midi ou à la fin de la journée. Cet emplacement est idéal pour les gens du Nord qui viennent travailler à Mamoudzou. Toutes les autres écoles privées étaient situées au sud de Mamoudzou ou au centre-ville", affirme-t-elle.
Aujourd'hui, 300 élèves de la maternelle petite section au CM2 sont scolarisés aux Flamboyants. Des parents commencent à faire part de leur mécontentement quant à la difficulté d'y mettre leurs enfants. Beaucoup d'entre eux avaient mis leurs enfants à l'école publique, mais la longue grève des instituteurs les a incités à se diriger vers le privé. La directrice se refuse pourtant à vouloir augmenter les effectifs et donc à construire de nouvelles salles de classe.
"J'ai dû faire beaucoup de sacrifices dont la vente de ma maison en métropole pour faire fonctionner cette école. Contrairement aux autres écoles privées, les Flamboyants ne sont pas une école associative", concède-t-elle. Mme Arnold Baille reconnaît que la mixité sociale dans son école se fait moins ressentir qu'ailleurs puisque les parents sont aisés. En revanche, leur provenance géographique est très variée.

 

Des élèves en provenance de tous les secteurs géographiques

"La moitié provient de l'océan indien et le reste d'ailleurs. Beaucoup habitent le quartier et viennent à pied ou dans l'agglomération de Mamoudzou. Mais nous avons des élèves qui viennent de Sada, Iloni, Dzoumogné également", précise la directrice.
Au départ, l'école était au milieu de la brousse et beaucoup d'activités s'effectuaient sous les manguiers et autres arbres environnants. Désormais, c'est plutôt le béton qui entoure l'école et Dominique Arnold Baille se bat pour garder les deux manguiers de son établissement. De nombreuses activités parascolaires sont également organisées pour créer une convivialité et une atmosphère de découverte pour tous ces enfants, mais aussi pour leurs parents. Ce sont souvent grâce aux Flamboyants qu'ils apprennent à se connaître, puis à arranger des rencontres entre eux et animer leur quartier.

Faïd Souhaïli
 

 


"On a l'impression qu'on est chez les nantis"

Stéphane Groléas aime Mayotte. Après avoir quitté difficilement notre île il y a 8 ans, il y est revenu avec plaisir en septembre dernier. Il a emménagé sans le vouloir aux Trois Vallées, mais ne regrette pas du tout son choix par défaut.

La famille Groléas ne s'est pas installée en terrain inconnu à Mayotte il y a 8 mois. Du moins, c'est ce qu'elle croyait après avoir effectué un séjour de 4 ans jusqu'en 2000. Mais en arrivant aux Trois Vallées, Stéphane Groléas a découvert un nouveau quartier.
"Ici il n'y avait rien, c'était la brousse. Nous n'avons pas choisi de venir ici, nous avions demandé à la Sim (Société immobilière de Mayotte) un logement aux Jardins du Collège, comme lors de notre premier séjour. Toutefois nous n'avons pas obtenu de réponse cette fois-ci et nous avons demandé à une amie de nous trouver une maison et une école toute proche", explique ce papa au foyer. Résultat, il se retrouve dans une villa aux Trois Vallées, à 30 mètres de l'école laïque privée les Flamboyants.
"Mes enfants vont à l'école à pied. Aujourd'hui, Majicavo-Mamoudzou en voiture, c'est l'enfer, c'est quelque chose que l'on ne connaissait pas. Nous n'avons qu'une seule voiture et nous apprécions le fait de ne pas aller quotidiennement en ville", se réjouit Stéphane Groléas. Il avoue que le centre commercial n'est pas sa tasse de thé, mais qu'il en profite comme tous les habitants du quartier pour y faire quelques courses. Pour échapper aux bouchons, il utilise un scooter. La boulangerie, le bar à proximité amènent un peu de vie dans ce quartier qui apparaît très calme et sans animation.
"On a découvert que nous étions dans un Muzunguland. Finalement, ça ne change pas trop des Jardins du Collège. Là-bas, il y avait aussi beaucoup de fonctionnaires. En revanche, j'ai l'impression qu'il y a beaucoup plus de gens installés à Mayotte qui y font leur vie", concède-t-il.

 

"On a découvert que nous étions dans un Muzunguland"

Cette proximité de son domicile et de l'école de ses filles est un gros avantage pour lui. Ses enfants rendent visite à leurs camarades du quartier et inversement. Ce quartier résidentiel ne génère pas trop de circulation et il s'y sent en sécurité. "Aux Jardins du Collège, nous avions fait appel à Sandragon. Ici, il y a peu de gardiens. Par contre il y a beaucoup d'alarmes qui se déclenchent, souvent par erreur, je pense", dit-il avec le sourire.
Selon lui, le fait que des gendarmes habitent dans le secteur pourrait éventuellement être un facteur sécurisant. Mais ce sont surtout leurs patrouilles qui dissuaderaient les éventuels fauteurs de troubles. "Ça patrouille au moins trois fois par jour, surtout depuis le 27 mars. Mais ce jour-là, il ne s'est rien passé ici. Pourtant, les Anjouanais ne sont pas loin, beaucoup habitent à Majicavo-Lamir à quelques mètres de chez nous", nous dit-il visiblement perplexe.
Quand on l'interroge sur les inconvénients de vivre aux Trois Vallées, la réponse fuse spontanément. "Les espaces verts manquent beaucoup. Il n'y a pas de balades pédestres possibles et aller voir des grues, ce n'est pas terrible. Mais en prenant la voiture, nous avons les plages pas trop loin. Il faudrait des endroits où l'on puisse se réunir avec les voisins et les amis sans pour autant être obligé de le faire chez l'un d'entre nous. Aux Jardins du Collège, on le faisait sur les marches d'escalier. On peut comprendre les promoteurs qui rentabilisent à mort le moindre mètre carré de parcelle. Encore, moi j'ai de la verdure dans mon jardin et autour de moi. Mais pour ceux qui sont dans les immeubles, ça doit être dur."

 

Un manque criant d'espaces verts

Les immeubles de plus de 3 étages ne l'enchantent pas, il pense qu'ils dénaturent le paysage malgré leur aspect neuf. En revanche, il apprécie le fait que tous les câbles électriques soient enterrés. "C'est sympa visuellement, c'est un développement intelligent", se félicite-t-il. En revanche, le chantier permanent qui l'entoure est dur à vivre. "C'est ponctuel, c'est le propre des quartiers en construction, mais vivement que ça s'arrête", s'impatiente-t-il.
Stéphane Groléas mesure la chance qu'il a d'habiter aux Trois Vallées. "On a l'impression d'être chez les nantis. En tout cas, c'est comme ça que les autres le ressentent quand je leur dis que j'habite ici. Je n'ai aucune idée des prix des loyers ailleurs, mais à moins de 1000 euros pour un T4, je ne pense pas être au-dessus ni en-dessous de ce qui se fait à Mamoudzou ou dans les autres localités", reconnaît-il.
Entre ses deux séjours mahorais, la famille Groléas a habité à Madagascar dans la ville de Toamasina (Tamatave). Là-bas, elle a vécu en pleine mixité sociale et culturelle. Aux Trois Vallées, ce sentiment n'est pas encore bien présent. La construction de logements sociaux de la Sim est prévue dans le secteur, en amont des Hauts Vallons pour justement apporter cette mixité sociale. Stéphane Groléas n'y est pas opposé, mais à condition que cela soit bien maîtrisé. "Quand je vois ce qu'est devenu M'gombani 8 ans plus tard, aïe, aïe, aïe ! L'idée est bonne, mais encore faut-il maîtriser tout ça !", suggère-t-il.

 

Avec le sport, pas de polémique possible

Pour lui, les maigres défauts qu'il trouve à son nouveau quartier sont loin de l'emporter sur les avantages. "Aujourd'hui, le ramassage des ordures se fait tous les deux jours. C'est super, pour certains ça paraît même évident. Il y a 8 ans, ce n'était pas le cas, ils faisaient ça au camion benne alors qu'aujourd'hui ce sont des compacteurs qui effectuent cette tâche. De même pour l'école. À partir du collège, personne ne se pose la question de savoir où vont les enfants. Mais avant si. À Madagascar, mes filles étaient dans un lycée français, il y avait un ou deux Vazahas (Muzungu, en malgache) par classe. Elles avaient de bonnes notes, mais arrivées aux Flamboyants, elles ont ramé pour être au niveau des autres. Autre chose, il n'y a plus de pannes d'électricité ou de coupures d'eau, sauf exception. Il y a 8 ans, on a connu ça, ainsi qu'à Madagascar. Quand on vient de là-bas, tout est moins difficile à Mayotte", révèle-t-il.
Stéphane Groléas a observé également un changement dans les attitudes des employés de maison. Auparavant, il avait l'habitude d'en recevoir plusieurs qui étaient à la recherche d'emploi. Depuis son arrivée en septembre, il se souvient d'avoir vu sonner seulement deux d'entre eux. En revanche, une chose n'a pas changé : la difficulté pour se faire des connaissances mahoraises. "Il y a des petits contacts sympas, mais qui ne permettent pas d'inviter ou de se faire inviter. Une fois que les enfants seront au collège, ça changera peut-être. Il n'y a qu'à travers le sport que je rencontre les Mahorais. Le sport, c'est neutre. C'est universel, on ne parle pas de Noirs, Blancs, catholiques, musulmans, il n'y a pas de polémique possible. Je ne travaille pas en ce moment, sinon la situation serait différente".

Faïd Souhaïli

 


"Tout le monde est venu d'un coup"

Gilles Baloukjy est l'une des personnes qui comptent dans le lotissement des Trois Vallées. Ce chef d'entreprise est le propriétaire de la boulangerie des Trois Vallées, de l'épicerie fine l'Alibi et de la société SCII, toutes logées dans un même bâtiment. Il nous raconte son implantation réussie dans ce quartier qui devrait devenir une énorme zone commerciale.

S'installer aux Trois Vallées n'était pas une évidence il y a quelques années. Pourtant aujourd'hui, Gilles Baloukjy a réussi son pari. Arrivé à Mayotte il y a bientôt 10 ans, cet homme d'affaires a vécu avec un œil attentif le développement de son nouveau quartier.
"Nous sommes excentrés de Mamoudzou et c'était un no man's land. Mais quand il n’y a personne, rien ne vous attire. Arriver trop tôt, ce n'était pas bon et il ne fallait pas non plus arriver trop tard", explique Gilles Baloukjy de sa voix grave. Preuve que l'homme a été prudent, il a acquis son terrain en 2002, mais n'a investi les locaux qu'en 2006. Auparavant, sa société informatique SCII était installée à Kawéni, dans les bâtiments occupés aujourd'hui par le service après-vente de SFR.
"Nous y étions vraiment à l'étroit. Ici, nous avons de l'espace pour stocker le matériel, on est content. Il n'y a pas les problèmes de circulation de Kawéni, il y a des places de stationnement. Mais nous craignions au départ que notre clientèle qui est composée de PME et de PMI ne nous suive pas. Ce n'est pas le cas puisqu'ils sont bien là. Mais notre développement n'est pas fini, nous sommes dans des années de transition", avance-t-il.
En effet, son bâtiment fait actuellement face à un terrain vague que les habitants du quartier utilisent pour leurs balades. Mais dans un avenir proche, il fera place à des projets de galerie commerciale. Ceux-ci devraient donc attirer des clients et de l'achalandage. Gilles Baloukjy espère que cette fréquentation aura une incidence positive sur ses différentes enseignes. "Je serai satisfait quand tout sera achevé dans un ou deux ans. Plus il y a de commerces, plus il y a de monde".
Il attend également la livraison de plus de 400 logements dans l'ensemble du quartier qui donnera un supplément de vie à cette ville nouvelle. Sa boulangerie des Trois Vallées est devenue un des passages incontournables de la zone, un véritable lieu de rencontre de l'ensemble des riverains. Toutefois, celui-ci regrette le manque d'espaces verts, de square et de promenades entretenues.
Habitant dans le quartier, il a de bonnes relations avec ses voisins. "Des amitiés se créent avec les voisins. On se rend des services mutuels, on va chez l'un puis on reçoit chez nous. Il y a une bonne ambiance, dans les îles c'est plutôt convivial vous savez", ne manque-t-il pas de nous dire. Et au rythme où marchent ses enseignes, il n'est pas prêt de partir de ce quartier où il se sent très bien.

Faïd Souhaïli

 



La commune de Mamoudzou veut un quartier mixte

Souvent qualifié de muzunguland, le quartier de Hamaha n'a pas vocation à se voir coller cette image. En effet, la mairie de Mamoudzou a pour ambition d'en faire un quartier mixte, aussi bien sur le plan social, économique qu'ethnique.

Actuellement, le secteur occupé par les Hauts Vallons, les Trois Vallées et le Val Fleuri rassemble principalement des Wazungu, d'où l'étiquette de muzunguland qui lui colle à la peau. Mais dans la tête du lotisseur Christophe Limousin et de la municipalité de Mamoudzou, il s'agissait d'éviter de reproduire un ghetto blanc à l'image de ce que sont les 100 Villas sur les hauteurs de Kavani.
Douze hectares coincés entre la route nationale 1 et les Hauts Vallons sont destinés à accueillir 271 logements, dont 80% de logements sociaux. Des commerces sont prévus, tout comme un groupe scolaire, une MJC, un plateau polyvalent, un parc et une mosquée. "Cela permettra de rééquilibrer le quartier et de réaliser une mixité sociale", explique-t-on du côté de la mairie. Une délibération a approuvé le projet de Zac le 5 février dernier, alors que le projet est dans les cartons depuis presque 10 ans. Il reste maintenant à trouver le financement et un éventuel mandataire ou concessionnaire pour faire débuter les travaux avant la fin de l'année.
Ce projet ne plaît pas forcément aux propriétaires privés des Hauts Vallons qui ont peur d'une part que leur appartement ou villa acquise au prix fort perde de la valeur, mais que ce projet social apporte plus de nuisances qu'autre chose. "Je ne suis pas contre une mosquée, mais il ne faudrait pas qu'elle réveille tout le monde à 4 heures du matin. Ce n'est pas ce que sont venus chercher les gens qui s'installent ici. Et le logement social, je veux bien, mais il ne faut pas que ça devienne comme M'gombani où les gens ont étendu leur maison n'importe comment", indique un riverain.

 

Des logements sociaux pas forcément vus d'un bon oeil

Pour la mosquée, la mairie a éloigné son emplacement de sa localisation initiale, qui se trouvait trop proche des Hauts Vallons. Elle n'a pas songé une seule fois à l'éliminer car un quartier mahorais sans mosquée, ça n'existe pas. Pour ce qui concerne les extensions désordonnées des logements sociaux individuels, la commune a trouvé la parade. Le lotissement sera aménagé de telle sorte que l'extension du logement ne dépasse pas la parcelle et que celui-ci soit aéré de deux côtés par des allées piétonnes.
Les urbanistes ont proposé ce concept et la mairie souhaite vraiment que ce quartier ait une qualité environnementale avec des voies larges et plantées. D'ailleurs, contrairement à ce qui se fait dans le secteur privé de Hamaha, des espaces verts seront créés pour que les enfants du quartier puissent s'y dégourdir les jambes et s'amuser en toute sécurité. Pour l'instant le coût et la date de la fin des travaux ne sont pas connus. Pour la viabilisation et les études pré-opérationnelles, dix millions d'euros sont prévus. Ce n'est qu'une fois tous ces logements sociaux destinés aux Mahorais achevés que l'on pourra réellement observer si la mixité sociale se réalise à Hamaha.

Faïd Souhaïli

 

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