Aéroport de Mayotte : Un flou artistique qui inquiète les compagnies aériennes

Une conférence de presse conjointe entre Air Austral et Ewa Air a eu lieu ce mardi matin à l’aéroport de Pamandzi. Les deux compagnies aériennes sœurs s’interrogent sur le futur immédiat de la desserte de Mayotte suite aux différentes déclarations gouvernementales au sujet de la construction d’une piste longue en Grande-Terre.

C’est en présence du Président de la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Mayotte et du directeur général de Mayotte Air Services, MM. Mohamed Al Hamidi et Moïse Issouf Ali, que les deux dirigeants des principales compagnies utilisatrices de la plateforme aéroportuaire de Mayotte, Air Austral et Ewa, ont tenu une conférence de presse mardi matin. « En tant qu’opérateurs, nous sommes très attentifs aux conditions d’opération sur la piste et, évidemment, sur les infrastructures aéroportuaires existantes. Chido a eu un gros impact et a limité nos opérations. Là où avant il n’y avait pas de limitation de mouvements, aujourd’hui nous sommes limités, sur nos appareils 777 que je ne peux pas, à priori, faire voler à plus de trois rotations. Autrement dit, six mouvements par mois ». Hugues Marchesseaux, Président du directoire d’Air Austral explique que cette contrainte ne lui était pas imposée avant le passage du cyclone Chido le 14 décembre 2024. Il pouvait faire autant de vols qu’il souhaitait en Boeing 777. Une contrainte d’autant plus sérieuse étant donné qu’un autre appareil, un 787, se trouve immobilisé en Europe. « Avant je pouvais mettre un 787 en substitution, ce qui est maintenant impossible », s’alarme t-il.

Aéroport de Mayotte : Un flou artistique qui inquiète les compagnies aériennes
Hugues Marchesseaux, président du directoire d’Air Austral et Ewa Air, (au centre) s’inquiète du manque d’informations quant à la réfection annoncée de la piste d’avion de Pamandzi.

 

Autre conséquence post Chido, le fret aérien qui est important, notamment les acheminements cargo par moyen courrier entre La Réunion et Mayotte. Actuellement, l’A 220 d’Air Austral n’a pas la capacité cargo. Habituellement, un Boeing 777 suffisait pour résorber le surcroît de fret. « Aujourd’hui si je faisais cela je puiserai sur mon quota qui est déjà très restreint de vols que je pourrai opérer avec ce type d’aéronefs. Autre souci pour nous, nous entendons parler de revêtement de piste qui se dégrade rapidement. À priori, des études auraient été fait par la DGAC, je crois même qu’EDIS l’opérateur aéroportuaire a fait ses propres études, nous attendons avec impatience qu’on nous partage les résultats de ces études que je n’ai pas à l’heure où je vous parle, pour qu’on nous dise vers quoi on tend », fait remarquer le Président du directoire d’Air Austral. Il insiste sur l’importance pour sa compagnie de connaître l’état de la piste dans le futur, quels sont les travaux qu’EDIS, le concessionnaire actuel (et ou futur) sera amené à faire pour que cette piste soit remise en état. « C’est notre question numéro 1 », a martelé l’opérateur aéronautique.

Les compagnies sont dans le flou

Les compagnies attendent également de savoir comment l’État pourrait les aider à s’organiser si la piste se construit à Bouyouni. Continuer à opérer sur l’aéroport Marcel Henry est essentiel pour Air Austral et Ewa Air. Elles considèrent être des acteurs essentiels du développement économique de notre territoire et elles entendent se battre pour continuer à le faire. Pour se faire, il leur importe de disposer d’un minimum d’infrastructures, ce qui devient compliqué par les temps qui courent faute de visibilité, à moyen terme, de ce que deviendra de l’aéroport de Pamandzi.

Trois commandants de bord mahorais en fin d’année

Hugues Marchesseaux  relève qu’il est très souvent question de la piste et très peu des infrastructures qui permettent d’accueillir la clientèle. « Nous devons les accueillir dans les meilleures conditions possibles, y compris en matière de sécurité. Là dessus nous manquons vraiment de lisibilité aujourd’hui et il y a également le long terme qui nous impose de savoir ce qui sera décidéau final et quelles sont les contraintes auxquelles nous devrons faire face ». Pour illustrer son propos, le Président du directoire d’Air Austral a pris le cas de deux avions long courrier qu’il possède actuellement, qui sont de deux types différents (B 787 et B 777), en sachant que dans les prochaines années sa compagnie sera amenée à faire des choix dans sa flotte long courrier. Cela suppose que celle-ci connaisse au préalable les contraintes avec lesquelles elle doit opérer. « En d’autres termes, aujourd’hui un Airbus plus gros que le B 330 ne peut pas se poser à Mayotte, et le B 350 ne se pose pas non plus. Nous supposons qu’il pourrait se poser demain sur la nouvelle piste. Encore faut-il que tout cela nous soit confirmé car si nous devions acheter des avions demain, il nous est nécessaire de savoir lesquels peuvent opérer sur l’aéroport actuel, et le futur, afin de faire le meilleur choix de flotte possible. Nous ne sommes pas encore dans cette position là « . De Réunion Air Services (RAS) à Air Austral, le trafic aérien a considérablement évolué à Mayotte depuis 1977 pour atteindre presque 400.000 passagers en 2025, toutes compagnies confondues. La construction récente d’un lycée dédié aux métiers de l’aéronautique aux abords de l’aéroport de Pamandzi constitue un atout supplémentaire pour les compagnies Ewa Air et Air Austral. Il leur permettra de disposer, dans un futur proche, de commandants de bord mahorais et d’une main d’œuvre locale qualifiée dans des secteurs pointus comme la maintenance aéronautique. De jeunes pilotes sont actuellement en cours de formation hors territoire et des co-pilotes (sur Ewa Air) dont 3 qui passeront commandant de bord à la fin de cette année. Pour Drissa SAMAKE, directeur général d’Ewa Air, il ne fait pas l’ombre d’un doute sur la volonté de sa compagnie de s’appuyer sur cet établissement scolaire professionnel dans un futur proche pour embaucher une main d’oeuvre locale dans des profils qui sont très spécifiques.

Journaliste politique & économique

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