Six mois après le passage du cyclone Chido, la végétation mahoraise donne des signes de reprise. Mais cette renaissance reste inégale et menacée par les espèces exotiques envahissantes (EEE) et l’appropriation illégale des terres.
« Il y a eu de la repousse », constate Michel Charpentier, président de l’association Les Naturalistes. Mais cette renaissance de la végétation mahoraise six mois après le passage de Chido est assombrie par différentes problématiques. Les premières observations montrent en effet des repousses, mais surtout une prolifération d’espèces exotiques envahissantes (EEE), comme le Lantana camara, la liane avocat marron ou encore le tabac boeuf. Ces espèces pionnières prolifèrent vite et leur expansion met en danger les plantes endémiques de l’archipel.
Du côté du Groupe d’étude et de protection des oiseaux de Mayotte (Gepomay), on s’est dores et déjà attaqué au tabac boeuf par exemple, présent aux abords du Lac Karihani, à Tsingoni. Son directeur, Émilien Dautrey, détaille une stratégie en deux temps : « On arrache ce qui peut l’être, et on aide les repousses naturelles à s’implanter. L’idée, c’est de sauver les espèces endémiques. » Mais il s’agit d’un travail colossal qui ne peut être répété à grande échelle sur l’ensemble de l’île dans l’immédiat. Le Gepomay recherche d’ailleurs des bénévoles pour l’aider dans ses missions de terrain.
Espèces et occupations envahissantes
L’urgence ne concerne pas que les espèces envahissantes : des enjeux humains et fonciers pèsent sur les zones forestières dégagées par le cyclone. « Le déboisement a libéré des terrains convoités par des agriculteurs, souvent illégaux », alerte Michel Charpentier. Le manque de moyens humains complique les contrôles et pour l’heure, le président des Naturalistes confie que le gouvernement n’a pas apporté de réponses satisfaisantes jusque là. Et l’absence de l’environnement dans le texte du projet de loi de refondation pour Mayotte lui fait craindre que ces questions ne seront pas prises au sérieux.
Selon lui, trois options s’offrent à l’île : « Soit on ne fait rien et on observe l’évolution naturelle. Soit on lutte contre les EEE déjà bien implantées. Soit, dans certains cas, on replantera, mais ce n’est pas l’option prioritaire. » En effet, dans certains cas, l’arrachage d’EEE à ce stade pourrait porter préjudice aux espèces endémiques en pleine repousse. Par exemple, certaines lianes crééent de l’ombrage, nécessaire depuis la chute des arbres.
Un diagnostic approfondi est en cours et doit être fait pour chaque zone, afin de trouver la réponse adaptée. Une attente nécessaire d’autant plus que la saison sèche sera décisive pour connaître ce qui a repoussé durablement ou non.
Journaliste à Mayotte depuis septembre 2023. Passionnée par les sujets environnementaux et sociétaux. Aime autant raconter Mayotte par écrit et que par vidéo. Quand je ne suis pas en train d’écrire ou de filmer la nature, vous me trouverez dedans.