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Syndicat mixte d’eau et d’assainissement de Mayotte : le nouveau président fait déjà jazzer

Après l’élection, jeudi, de Fahardine Ahamada à la tête du Smeam, son prédécesseur, Moussa Mouhamadi Bavi, estime que le scrutin n’a pas respecté certaines dispositions légales et est de fait invalide.

À défaut, parfois, de faire couler l’eau, le Smeam n’en finit plus de faire couler de l’encre. Jeudi, l’élection du maire de Bandraboua, Fahardine Ahamada, à la tête du Syndicat mixte d’eau et d’assainissement de Mayotte (Smeam), n’a pas tardé à faire réagir Moussa Mouhamadi Bavi, le président sortant, qui conteste la légalité du scrutin. « Pour procéder à l’élection du président, l’assemblée délibérante doit être complète », rappelle-t-il, alors que le candidat de la commune de Pamandzi n’avait pas été « désigné valablement ». Aussi, « les représentants de la commune de Chiconi n’ont pu apporter la preuve de [l’élection de ses délégués]. Or la loi exige la proclamation des résultats et leurs publications ». Autrement dit, selon Bavi, les suppléants envoyés par la commune ainsi que par celle de Pamandzi, les maires n’ayant pu assister eux-mêmes à l’élection, n’auraient jamais dû participer aux votes. Un imbroglio qui avait éclaté en pleine séance, que le doyen a fini par suspendre, voyant les esprits s’échauffer. C’est à ce moment que Bavi, suivi par 15 autres délégués a décidé de quitter les lieux. Pourtant, l’élection s’est poursuivie avec les seuls 18 délégués restants, tous issus de l’opposition d’après les dires de l’ancien président, qui entend déposer un recours auprès de la préfecture afin de faire contrôler la légalité du vote.

De son côté, le nouveau chef de la Smeam, lui, balaie ces accusations du revers de la main. Pour Fahardine Ahamada, Bavi ne digérerait simplement pas de ne pas avoir été soutenue par la majorité. Mais les accusations ne s’arrêtent pas là, puisque Moussa Mouhamadi prétend que les sympathisants de son successeur se sont empressés de faire changer les serrures du siège de la structure, à Kawéni, après en avoir cassé les portes. « C’est faux, et ça n’aurait pas été illégal : dès lors que la délibération est prise, elle est exécutoire », se défend le maire de Bandraboua. « D’autant plus que la plupart des portes sont à codes, donc je ne vois pas comment on aurait pu faire… » Puis, renvoie de balle ! « Vous savez, Bavi n’est plus président du syndicat mais il utilise toujours les voitures et les téléphones du Smeam », raille Fahardine Ahamada. « Et 10 à 20 agents qui n’acceptent pas le changement de présidence refusent de venir travailler. »

Mais la population ne tardera pas, à son tour, à entendre le nouveau président au tournant. Première préoccupation : la gestion du budget de la collectivité. Dans le détail, elle accuse un déficit de 9,5 millions d’euros pour 42 millions d’euros de budget concernant le volet de l’eau, et un déficit de 26 millions d’euros pour le budget de l’assainissement, dont les dépenses sont cette fois estimées à 62 millions d’euros. Pourtant, Fahardine Amahada, qui devra rééquilibrer le portefeuille pour les six prochaines années, semble confiant. « Je suis maire de Bandraboua depuis plus de dix ans et chaque commune a plusieurs budgets à gérer, c’est quelque chose que je connais », promet-il. « Je suivrai les préconisations de la chambre régionales des comptes et je ferai en sorte que tout soit appliqué à la lettre. » Premier axe à exploiter selon lui, les 140 millions d’euros versés par l’État au Smeam pour l’année en cours, et dont aucun centime n’aurait été dépensé.

Les pompiers de Kahani repartent en grève

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Dialogue de sourds. Après avoir suspendu leur grève en juillet, les sapeurs-pompiers de Kahani ont ravivé le mouvement depuis plusieurs jours. Ils accusent leur direction de leur faire courir « un risque sanitaire », dans ces locaux qui devraient bientôt être refaits à neuf.

Le torchon brûle entre les sapeurs-pompiers et leur direction. Depuis lundi, les soldats du feu de Kahani ont repris, comme promis, la grève qu’ils avaient entamée en juin pour demander plus de sécurité et d’hygiène dans leur caserne qu’ils estiment à la limite de la vétusté. Après plusieurs semaines, le conseil administratif du Sdis émettait finalement un avis favorable à la plupart des revendications, parmi lesquelles la réfection du plancher et l’installation d’un chauffe-eau. Les grévistes avaient alors suspendu leur mouvement, en assurant que si les travaux les plus urgents n’avaient pas été réalisés au 31 juillet, le service minimum reprendrait pour une durée indéterminée. Et ils ont tenu parole.

 

« Notre direction fait de la langue de bois ! », martèle, exaspéré, le président du syndicat SNSPP-PATS, Abdoul Karim Ahmed Allaoui. « Nous logeons dans des anciens containers du lycée. On n’a pas d’eau chaude, nos lits sont endommagés, et il n’y a qu’une seule toilette qui fonctionne ! On ne peut pas vivre tranquillement dans ces conditions. » Des conditions que la direction du Sdis reconnaît. « Le site de Kahani sera en chantier l’année prochaine et reconstruit avec un niveau de sécurité supérieur. Malgré ça, nous avons accepté toutes leurs demandes, sauf une, à savoir l’installation d’un portail électrique », commente le colonel Fabrice Terrien, directeur du service. Un portail qui a, depuis, pris des airs de pomme de discorde.

« Ce n’est pas ce que nous avions demandé »

« Le portail électrique est prévu dans le chantier, c’est pour ça que la présidente du conseil d’administration a estimé qu’en installer un aujourd’hui reviendrait à jeter l’argent public par les fenêtres, d’autant plus que le portail devra être enlevé au début du chantier », commente encore le Sdis, pendant que les sapeurs-pompiers de Kahani doivent avant chaque intervention, ouvrir et fermer manuellement la grille qui protège les lieux, vandalisée et pillée en mai dernier par une bande d’individus qui s’étaient introduits dans la caserne. « La priorité, c’est la sécurité des sapeur-pompiers », insiste Fabrice Terrien. « Nous avons pris des mesures immédiates pour pouvoir verrouiller le portail actuel, et avons proposé à court terme et en attendant les travaux, l’installation d’un nouveau portail, manuel, mais avec un dispositif anti-escalade. »

Mais lorsque celui-ci est livré à la caserne par l’entreprise chargée de l’installer, les sapeurs-pompiers s’y opposent, estimant y voir une provocation de la part de la direction. « Ce n’est pas ce que nous avions demandé. Les points les plus urgents pour nous concernent nos conditions sanitaires, nos conditions de vie ! », défend de son côté le SNSPP-PATS. Le Sdis quant à lui explique avoir commandé les premiers devis dès le lendemain de sa rencontre avec les représentants du personnel. Un rendez-vous au cours duquel le conseil d’administration avait donc accepté la quasi-totalité des requêtes – à l’exception du tant controversé portail – et avait également proposé d’autres mesures sécuritaires, comme l’amélioration de l’éclairage de la caserne, la consolidation de la clôture et le déploiement d’un système de vidéosurveillance. « Puis cinq jours plus tard, nous avons reçu un préavis de grève », s’étonne le directeur du Sdis. « La situation est aujourd’hui totalement bloquée, un vrai rapport de force s’est installé, pourtant, négocier, c’est concéder, et nous leur avons accordé 99 % de leurs demandes. » Un discours qui ne passe pas du côté de la trentaine de sapeurs-pompiers de Kahani. « On est en train de faire courir un risque sanitaire aux agents, mais la direction elle, y reste sourde », s’inquiète leur représentant syndical. « Notre nouvelle caserne, on se doute qu’elle ne sera jamais construite d’ici l’année prochaine, puisque rien n’a encore été lancé. » En signe de soutien, les sapeurs-pompiers de Longoni ont accroché une banderole devant leur caserne, et ceux de Chirongui, à l’instar des agents du centre de traitement de l’alerte/centre opérationnel de la direction incendie et secours (CTA-Codis) ont cessé le travail ce mardi. Le préavis de grève, lui, ne concerne que Kahani.

Des pompiers attaqués à Combani

Trois mois après les actes de vandalismes qui ont secoué la caserne de Kahani, ce sont cette fois les pompiers de Combani qui ont été attaqués ce week-end, au cours d’une intervention conjointement menée avec les services de gendarmerie et le SMUR. Il est entre minuit et une heure du matin dans la nuit de samedi à dimanche, lorsque 15 à 20 jeunes font irruption dans un restaurant de la commune, et, machette au poing, blessent grièvement le propriétaire des lieux et un client. Mais lorsqu’ils arrivent sur place, les secours sont reçus par une pluie de pierres, lancée par une bande cachée dans l’obscurité. Les tirs explosent le pare-brise d’une ambulance et froissent la tôle de plusieurs véhicules, à tel point que pompiers, gendarmes et soignants doivent à leur tour se réfugier dans le restaurant pour les uns, ou sous le toit du RSMA, à quelques pas de là, pour les autres. Pendant ce temps, les véhicules abandonnés sont saccagés. « C’est un miracle qu’il n’y ait eu aucun blessé parmi nos rangs, les dégâts matériels sont considérables », déplore le Sdis. Une ambulance et un 4×4 du SMUR sont ainsi hors-service, et du matériel médical et de transmission a été dérobé. Alors qu’une plainte a été déposé pour violences, dégradation de biens publics et vol, le service mobile d’urgence et de réanimation a expliqué ne plus pouvoir intervenir, faute de véhicule adapté disponible, dans les endroits les plus difficiles d’accès. « Nous avons mené un retour d’expérience avec tous les effectifs impliqués dans cet évènement afin de définir de nouveaux modes opératoires en collaboration avec la police et la gendarmerie », a fait savoir le Sdis. Une cellule d’écoute a été activée pour les professionnels attaqués. « Psychologiquement, nous sommes tous bouleversés. Les pompiers et les équipes médicales ont été agressés parce qu’ils tentaient de sauver des vies », déplore le SNSPP-PATS.

Jour J pour le jeune talent du FCM Isaack Ahamadi

Isaack Ahamadi, jeune joueur formé au Football Club M’tsapéré et évoluant jusqu’alors en U13, s’envole ce mercredi pour La Réunion, où il passera les deux prochaines années au sein du pôle Espoirs football de Saint-Denis. Il est l’un des nouveaux bénéficiaires du dispositif « Jeunes Talents Mahorais » lancé en 2013 par la DJSCS État. Celui-ci permet aux jeunes Mahorais d’effectuer des détections sur l’île, sous la supervision de cadres du Creps de La Réunion, et, si les tests sont concluants, d’intégrer la structure sportive de développement vers le haut niveau. C’est le deuxième joueur du FCM retenu pour le Pôle réunionnais. Vendredi soir, le club m’tsapérois a organisé un pot en son honneur, en présence de plusieurs personnalités, dont le maire de Mamoudzou Ambdilwahedou Soumaïla, l’emblématique entraîneur de la sélection de Mayotte Massoundi Abidi, ou encore le capitaine de l’équipe senior du FCM et Sportif de l’année 2019, Mouhtar Madi Ali « Johnny ». Isaack fait la fierté des Diables Rouges, comme l’explique le trésorier du club Hyoudhacar Mohamed. « Nous avons réalisé tout un travail de restructuration autour de nos équipes jeunes pour leur réussite. La sélection d’un de nos jeunes pour le CREPS est le fruit de ce travail. C’est une belle récompense pour nous. » Isaack – qui vivra avec sa mère à La Réunion – pourra compter sur le soutien de son club formateur et ses différents partenaires, bien décidés à l’accompagner pour la suite de son parcours sportif et scolaire.

Affaire du rapt en Petite-Terre : l’un des hommes placé en détention provisoire à la surprise générale

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Nouvel épisode dans l’affaire très médiatisée d’enlèvement de Petite-Terre. L’apparition du corps du jeune enlevé complique davantage la situation des quatre hommes inculpés. Le juge des libertés et de la détention a décidé de placer l’un d’entre eux en détention provisoire, et cette décision reste incomprise par la population.

L’angoisse était palpable dans la salle d’audience B du tribunal judiciaire de Kaweni jeudi dernier. Les quatre habitants de Petite-Terre accusés d’enlèvement et séquestration d’un jeune homme au mois de mai ont à nouveau été entendus par la juge d’instruction durant 6 heures. Ils sont ensuite passés une nouvelle fois devant le juge des libertés et de la détention afin de déterminer s’ils restent en contrôle judiciaire ou s’ils doivent être en détention provisoire. Ce rebondissement est dû à la découverte du corps sans vie du jeune homme en question, aux Badamiers en Petite-Terre fin juin. Cette découverte a mené la procureur à réclamer la détention provisoire des quatre hommes au vu de la gravité de l’affaire. Elle avance plusieurs arguments qui entraveraient l’avancement de l’enquête. “Ce que je viens défendre, c’est la recherche de la vérité. Il faut assurer la sérénité du débat par l’absence de concertation entre eux, l’absence de pression sur les victimes parce que suite à ces premiers éléments, une autre personne a été enlevée et séquestrée, la famille de la victime a été approchée. Et il ne faut pas qu’il y ait d’influence sur les témoins”, déclare-t-elle devant les accusés, leur avocat, le président de la cour et toute la population qui s’est déplacée pour assister à l’audience.

Des déclarations que réfute l’avocat des prévenus, Me Nadjim Ahamada. Selon lui, ses clients sont parfaitement conscients des risques qu’ils encourent et ont coopéré dès le début de l’enquête. “Pour mettre quelqu’un en détention provisoire, il faut un risque de pression sur les victimes et ils ne l’ont pas fait. Il faut un risque de fuite, ils n’ont pas fui. Il faudrait que la personne n’ait pas collaboré, ils ont tous collaboré. Donc juridiquement, le juge n’a aucune raison de les mettre en détention.” En effet, les quatre hommes se sont montrés coopératifs, l’un d’eux s’est même présenté volontairement au commissariat. Ils ont également respecté les conditions de leur contrôle judiciaire. Tous sont des pères de familles qui habitent sur l’île et ont une activité professionnelle. Cependant, leur avocat est parfaitement conscient qu’il s’agit d’une affaire très médiatisée et suivie par les Mahorais. “Des milices se forment sur le territoire et je pense qu’il y a une volonté pédagogique de les placer en détention provisoire, même si le dossier ne le mérite pas, afin de calmer la population”, nous indique Me Ahamada. La procureur ne s’en cache pas, elle veut donner l’exemple. “On voit des milices naître un peu partout sans aucune autorisation et on ne peut pas laisser faire ça. Il faut traiter cette affaire à sa juste mesure parce que sinon, c’est ouvrir la voie à des comportements de type lynchage en toute impunité”, défend-elle. Après plus d’une heure d’audience et presque 2 heures de délibération, le suspens prend fin. Le juge des libertés et de la détention maintient la liberté sous contrôle judiciaire pour trois des accusés et place celui qui est considéré comme la tête pensante en détention provisoire. Une décision qui laisse sans voix l’assemblée, et le principal concerné.

“C’est un acharnement du ministère public”

Les membres du collectif des citoyens de Mayotte, les familles et les amis des prévenus ont tous assisté à l’audience dans un silence oppressant. Lorsque la décision tombe, une partie de la salle d’audience se vide instantanément. À l’extérieur, on retrouve des femmes en pleurs. Le porte-parole du collectif des citoyens de Mayotte, Said Mouhoudhoiri, témoigne son incompréhension. “Je pense que c’est un acharnement du ministère public. Ils voulaient absolument envoyer quelqu’un derrière les barreaux, alors ils ont visé cet homme. Le verdict n’est pas à la hauteur, il a été préfabriqué. On a fait le pré-procès d’un homme tranquille qui n’a jamais eu d’histoires.” Selon lui, cette décision risque d’envoyer un mauvais signal aux délinquants qui sévissent sur l’île. “Ils peuvent nous harceler, nous assassiner, les autorités les regarderont en tant que simples spectateurs, passifs. Ils leur disent qu’ils n’ont rien à craindre, la prison de Mayotte n’est pas faite pour les bandits et les criminels.” La détention provisoire est renouvelable tous les ans, jusqu’au procès qui déterminera si les quatre accusés sont coupables ou non des faits qui leur sont reprochés, c’est-à-dire séquestration suivie de la mort de la personne enlevée. Leur avocat indique qu’ils feront appel de la décision. La procureur de son côté a d’ores et déjà fait appel. Elle souhaite que les trois autres soient également placés en détention provisoire.

Laboratoire privé à Mayotte : pour le docteur Didier Troalen, « on ne veut pas être pris en otage »

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Depuis le 15 juillet, 14 des 28 salariés du laboratoire privé de Mayotte sont en grève. Ce mouvement social entraîne un certain nombre de perturbations au sein du fonctionnement de l’établissement puisque la plupart des patients subissent les foudres des employés en colère. La direction, les grévistes et la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Dieccte) se sont réunis ce mardi pour tenter de trouver un accord dans le but de reprendre un rythme de travail normal.

Flash Infos : Dans une note à l’attention de l’ensemble du personnel de la société Mayo Bio, vous revenez sur le mouvement social auquel le laboratoire est confronté depuis maintenant plusieurs semaines. Le ton employé démontre une certaine exaspération à l’égard de vos employés grévistes…

Didier Troalen : Tout d’abord, je tiens à préciser que laboratoire peut assurer ses différentes missions. Toute la chaîne de production et d’actes médicaux est possible. Le seul problème est que le personnel non-gréviste se fait malmené et insultés quand il vient travailler. Nous avons par exemple recensé un certain nombre de propos racistes à son égard ainsi que des pneus crevés. Nos préleveurs qui se rendent à l’extérieur sont également suivis et menacés… Nous sommes obligés de donner rendez-vous aux libéraux en ville pour récupérer leurs prélèvements. Mais le plus grave dans cette histoire est que nous faisons face à un blocage systématique des patients, qui ne peuvent pas accéder à nos locaux. C’est tout simplement inadmissible ! La santé devrait être un sanctuaire… Nous avons une mission vis-à-vis de la population qui est d’assurer les soins. Que ces employés refusent de travailler, c’est leur droit, mais actuellement, ils entrepassent leur droit de grève !

FI : Les employés grévistes, par la voix de leur représentant Ben Housman Abdallah, dénoncent le non-respect du protocole signé lors du dernier mouvement social qui s’est déroulé en avril 2019.

D. T. : L’ensemble du protocole a été respecté ! Il y a des points qu’ils veulent à nouveau remettre en cause. Dans notre entreprise, au cours des dernières années, pleins d’avantages ont été négociés, comme le passage au 35h payé 39h, l’instauration du 13ème mois, la prime de fin d’année d’intéressement, la prise en compte de l’ancienneté tous les 3 ans, ou encore l’application volontaire de la convention collective qui n’est pas obligatoire à Mayotte. Tout cela était dans le protocole d’accord. Là où ça bloque, c’est sur une question salariale. Ils voudraient que nous appliquions d’emblée des salaires sur lesquels nous avons 25% de charges contre 7% à Mayotte.

FI : Par ailleurs, cette partie du personnel évoque un climat pesant depuis plus d’un an et met en lumière le non-remplacement de trois des huit techniciens qui ont quitté leurs fonctions.

D. T. : Tout cela, c’est pour appuyer leurs propos ! Les recrutements à Mayotte sont très difficiles. Les gens ne restent pas. Je ne vous apprends rien en disant que le turnover est très important et que les temps de présence sont très courts sur le territoire. À condition égale, les personnels qualifiés préfèrent aller à La Réunion ou rester en métropole. Les départs sont liés à ces difficultés alors que les conditions de travail sont meilleures depuis le dernier conflit. Ce n’est pas le laboratoire qui ne les attire pas, puisque quand nous annonçons les conditions salariales, ils viennent.

FI : Ce mardi, vous avez rencontré les grévistes en compagnie de la Dieccte. Qu’en est-il ressorti ? Sommes-nous proches d’une levée du piquet de grève ?

D. T. : Rien n’est encore statué au niveau de la réunion avec la Dieccte et les salariés. Nous sommes encore en phase de discussion. Tout ce que je peux vous dire, c’est que nous reprenons toutes leurs revendications et que nous travaillons dessus. Le but est de trouver un accord et de ramener les grévistes à la raison pour qu’ils arrêtent de procéder à des actes délictueux. Nous allons faire des propositions concrètes dans l’espoir d’avancer, mais nous n’irons pas plus loin qu’un certain niveau. Nous ne voulons pas être pris en otage, comme cela a pu être le cas au cours des dernières semaines. Nous espérons tout simplement que la situation se débloque pour reprendre un rythme normal, notamment pour les patients chroniques et ceux qui doivent être pris en urgence. Si ce n’est pas le cas très prochainement, nous risquons de faire face à de graves problèmes sanitaires.

 

Légende 1 : Le lundi 20 juillet, les salariés grévistes ont sillonné les rues de Mamoudzou, depuis le laboratoire jusqu’aux locaux de l’agence régionale de santé où ils ont été reçus par une délégation, en l’absence de Dominique Voynet.

Légende 2 : En avril 2019, une partie des employés avait déjà manifesté leur mécontentement à l’égard de la direction. Selon le docteur Troalen, le protocole d’accord signé à cette période a été respecté.

La situation financière de Tsingoni s’est encore détériorée

Manque de transparence des recrutements, avantages en nature « sans base légale », non-respect de la concurrence… Dans son dernier rapport, la chambre régionale des comptes pointe du doigts de sévères irrégularités dans la gestion de la commune de Tsingoni, dont le déficit ne cesse de se creuser.

La chambre régionale des comptes épingle la gestion de Tsingoni. Dans un rapport dévoilé lundi, la juridiction fait état d’un déficit actuel s’élevant à trois millions d’euros. « La situation financière et budgétaire, déjà fragile, s’est détériorée alors même que la collectivité fait l’objet d’un plan de redressement depuis 2016 et que son budget est réglé chaque année par le préfet », explique le document d’une trentaine de pages.

Entre 2015 et 2018, « les charges de fonctionnement ont considérablement augmenté », à tel point qu’elles dépassent aujourd’hui les produits de gestion. Mais alors que la commune de Tsingoni ne dégage plus d’épargne depuis quatre ans, celle-ci « n’est plus en mesure de financer ses investissements autrement qu’en creusant son déficit ».

Dans le détail, les charges de personnel représentent l’augmentation la plus forte, puisqu’elles sont passées de 4,7 millions à 7,3 millions d’euros, « sous l’effet de l’instauration de la sur-rémunération, de recrutements importants et de la consolidation des emplois aidés ». Or, selon la chambre régionale des comptes, les procédures de recrutement manquent de transparence, le temps de travail n’est pas respecté et l’absentéisme est important. Pire, « des avantages en nature, tels que l’attribution de véhicules de fonction ou de téléphones sont par ailleurs octroyés à certains agents ou élus sans base légale ».

En conséquence, « la commune doit mettre en place un véritable plan d’économies et rechercher des ressources complémentaires afin de redresser durablement sa situation déficitaire et retrouver rapidement les marges d’autofinancement nécessaires pour conduire les projets d’équipements indispensables ». Ainsi, seule la réduction de la masse salariale permettra de « contenir la pression fiscale à un niveau supportable pour la population ». La minoration de la sur-rémunération, le non-renouvellement des contrats et l’instauration d’une comptabilité d’engagement rigoureuse sont les meilleures options envisagées pour redresser le déficit.

La solution auprès des non imposés ?

Malgré sa situation très fragilisée, « la commune continue de procéder à la réalisation d’équipements non subventionnés ou d’engager des constructions avant d’avoir finalisé ses plans de financement », alors même que les investissements sont déficitaires et qu’elle n’est pas en capacité de s’auto-financer. « Les ressources correspondant aux opérations d’équipement ne sont pas mobilisées de manière optimale faute d’un suivi rigoureux des subventions, notamment des procédures de déblocage des fonds. La commune se prive de recettes importantes du fonds de compensation de la TVA en ne passant pas toutes les écritures comptables nécessaires à leur éligibilité. » Aussi, la mise en concurrence n’aurait pas été respectée dans le cadre de plusieurs marchés, comme le terrain de Mroalé. D’autres irrégularités ont également été soulevées dans les modalités de publicités et l’archivage des procédures.

En octobre dernier, la commune signait avec la préfecture un contrat de redressement des finances communales, qui, selon la chambre des comptes, « pourrait permettre à Tsingoni de s’inscrire dans une trajectoire de redressement, sous réserve d’en respecter strictement les termes ». Dans une lettre de réponse, la direction générale des services de la commune a par ailleurs expliqué avoir mené des travaux d’identification des locaux dans le cadre de l’optimisation des recettes fiscales. Une enquête qui a permis le recensement de 444 locaux à usage d’habitation, soit une valeur cadastrale de trois millions d’euros. « Cette démarche nous a permis de recenser les potentiels contribuables qui ne sont pas imposés », s’est défendu l’ancienne municipalité qui explique également avoir reçu une réponse favorable de la DRFIP à sa demande de dégrèvement de la taxe foncière, « imposée à tort depuis 2013 ».

“L’afflux considérable d’immigrés à Mayotte ralentit le traitement des procédures”

Mayotte compte actuellement 2.500 demandeurs d’asile. Un chiffre multiplié par 8 en l’espace de 6 ans. Cette augmentation complique considérablement leur prise en charge par l’État. Jérôme Millet, sous-préfet, directeur de cabinet du délégué du gouvernement de Mayotte, fait le point sur la politique de gestion qui est pointée du doigt par les demandeurs d’asile.

Flash Infos : Comment réagissez-vous face aux revendications des demandeurs d’asile qui manifestent dans la rue ?

Jérôme Millet : Nous sommes dans une logique de compréhension puisque nous n’igno-rons en rien les difficultés auxquelles ils sont confrontés. Cependant, nous connaissons tous la situation de Mayotte et ces difficultés touchent également certains Mahorais qui n’ont pas de logements décents, ou de travail.

FI : Vous avez reçu le collectif des demandeurs d’asile africains, quelles solutions leur proposez-vous ?

J. M. : Nous proposons la solution du droit. Le collectif voulait que l’on fasse un certain nombre d’exceptions à leur situation, mais la seule solution est celle du droit. Nous sommes confrontés à une situation exceptionnelle à Mayotte car en 6 ans le nombre de demandeurs d’asile a été multiplié par 8. Actuellement, ils sont environ 2.500 en file active. L’afflux considérable d’immigrés ralentit le traitement des procédures. Ce qui pouvait se faire hier en 15 jours se fait désormais en plusieurs semaines. Pour autant, les deman-deurs d’asile voient leurs dossiers traités. On a multiplié le nombre de bornes permettant de traiter leurs dossiers, mais il est vrai que cela prend beaucoup de temps.

FI : Cet afflux massif d’immigrés donne l’impression que l’État est dépassé par la si-tuation à Mayotte et qu’il y a une faille dans le contrôle des frontières…

J. M. : Non, nous ne sommes pas dépassés. Je réfute cette thèse. Mayotte protège très bien ses frontières. C’est le seul département de France qui bénéficie d’une couverture 24h/24 d’à minima 2 intercepteurs à n’importe quel moment de la journée. Parfois, nous montons même jusqu’à 4. Le nombre de refoulement des kwassas qui viennent des Co-mores témoigne du fait que la protection des frontières est bien assurée. Je rappelle le chiffre de quasiment 30.000 éloignements réalisés en 2019. C’est un chiffre totalement inédit dans l’histoire de Mayotte, et il représente plus de la moitié des éloignements de l’ensemble de la France. Donc nos frontières sont bien protégées.

FI : Concernant les demandeurs d’asile, en France ils sont censés être protégés et bénéficient des aides telles que l’Ada* et le Cada**. Pourquoi n’existent-elles pas à Mayotte ?

J. M. : La protection s’applique surtout aux réfugiés, mais tous les demandeurs d’asile ne sont pas reconnus comme réfugiés statutaires. À Mayotte, plus de 80% des demandes sont abusives, c’est-à-dire qu’elles ne donnent pas lieu à une reconnaissance du statut de réfugié. Il existe cependant un certain nombre d’aides qui s’appliquent aux demandeurs d’asile qui sont à Mayotte, et l’alignement sur le standard métropolitain est en train de s’ef-fectuer.

FI : De quelles aides bénéficient-ils actuellement ?

J. M. : Des aides liées au logement. Nous travaillons avec des associations, notamment avec Solidarité Mayotte qui met à disposition des logements pour les demandeurs d’asile qui sont dans des situations vraiment compliquées. Il y a également une indemnité finan-cière qui leur est versée. Ceci-dit, même la plus belle fille du monde ne peut donner que ce qu’elle a.

FI : Que se passe-t-il pour eux dès lors que leur dossier est traité et que leur de-mande d’asile est refusée ?

J. M. : S’ils ne se font pas reconnaître le statut de demandeurs d’asile, ils basculent dans le droit commun au même titre que les autres étrangers. Ensuite, nous examinons à nou-veau leurs situations au regard du droit français. Ce qui est l’immense cas de ceux qui de-mandent une reconnaissance des demandeurs d’asile. Seulement 18% d’entre eux sont reconnus comme tels à Mayotte. C’est un taux très faible, mais tout à fait conforme au reste du territoire national, parce que la plupart d’entre eux ne sont pas des gens qui en-courent un danger dans leur pays d’origine.

* Allocation des demandeurs d’asile

** Centre d’accueil pour demandeurs d’asile

Michel Henry quitte la Croix-Rouge de Mayotte, le sentiment du devoir accompli

En poste depuis 8 ans comme directeur territorial de la Croix-Rouge, Michel Henry s’est envolé ce mercredi pour la Polynésie où il compte profiter de sa retraite. L’occasion pour Flash Infos de dresser son bilan, d’évoquer les projets à venir mais aussi de revenir sur l’importance d’une telle association dans un territoire comme Mayotte.

Flash Infos : Quel bilan tirez-vous de ces 8 années à la tête de la direction territoriale de la Croix-Rouge ?

Michel Henry : C’était riche en expérience professionnelle ! Je suis arrivé presque par hasard à Mayotte puisque j’ai suivi mon épouse et je ne savais pas que j’allais rencontrer la Croix-Rouge sur ma route et en devenir le directeur. Nous sommes partis sur une petite équipe de 7 salariés, avec deux ou trois dispositifs que nous avons réussi à stabiliser et à élargir. Et petit à petit, nous avons montré que nous avions des savoir-faire et que nous étions en capacité de monter d’autres dispositifs. Aujourd’hui, nous avons une dizaine d’activités : le médico-social avec le SIAD (soins infirmiers à domicile), la prévention spécialisée, le logement à travers le SIAO (service intégré d’accueil et d’orientation), l’aide alimentaire et la santé communautaire, l’accès au droit… Au bout de 8 ans, nous comptons plus de 80 salariés dans nos rangs. J’ai le sentiment que la Croix-Rouge a enfin trouvé sa place sur un territoire où il y avait encore peu d’associations de ce type qui pouvaient répondre aux besoins des personnes vivant dans la plus grande précarité. Et il y a encore d’autres projets qui sont en cours d’élaboration et qui vont être mis en place dans un avenir proche, comme les situations d’urgence et le Samu social. J’ai l’impression d’avoir apporté ma pierre à l’édifice et d’avoir contribué à faire avancer Mayotte !

FI : Qu’est-ce que votre successeur devra encore développer dans les prochaines années ?

M. H. : Il y a encore plein de dispositifs dans le médico-social, pour lesquels nous avons des projets avec l’agence régionale de santé, comme l’hospitalisation à domicile. Dans le social, nous avons d’autres plans, à l’instar de la maison des familles. Mais il reste encore beaucoup de chemins à parcourir à Mayotte et j’espère que la Croix-Rouge pourra être le porteur de nouveaux projets à l’avenir.

FI : À Mayotte, encore plus qu’ailleurs, les associations comme la Croix-Rouge jouent un rôle prépondérant dans le quotidien de la population.

M. H. : Je voudrais insister sur un point : la Croix-Rouge s’adresse à toutes les personnes, quel que soit leur nationalité, leur religion, leur sexe, leurs habitudes et leurs cultures. Nous ne faisons aucune distinction entre elles, qu’elles soient en situation irrégulière ou non. Les circonstances de la vie les ont amenées ici. Nous sommes là pour leur apporter notre aide qu’il s’agisse d’habitants français ou ceux issus de Madagascar ou des Comores. Il ne faut pas oublier les grands principes de la Croix-Rouge, à savoir l’humanité et la neutralité. Après, certains dispositifs sont spécifiques à Mayotte, qui est un territoire avec encore d’énormes besoins, tels que l’aide alimentaire, les bornes fontaines, la santé communautaire qui n’est pas une pratique qui se fait en métropole. Ici, nous sentons très bien qu’il faut aller vers les gens pour les faire soigner et éviter que leur situation s’aggrave.

FI : Vous quittez l’île aux parfums alors que le territoire connaît une crise sanitaire de grande ampleur. Comment analyseriez-vous l’apport de la Croix-Rouge au cours de celle-ci ?

M. H. : Le but de la Croix-Rouge est d’aller à la rencontre des personnes qui ont besoin de nous. Avec les autres crises que nous avons connues précédemment (les décasés, les intempéries, les glissements de terrain), nous avons toujours répondu présent, avec les salariés mais aussi et surtout avec les 200 bénévoles qui nous entourent et qui ont toujours assuré, peu importe les circonstances. La crise Covid a simplement démontré que nous étions capables, en lien avec l’État et le conseil départemental, d’apporter les besoins élémentaires, comme l’accès à l’eau. La Croix-Rouge est une grande maison qui dégage des valeurs et qui essaie tant bien que mal de répondre aux attentes de la population !

La préfecture de Mayotte reçoit les demandeurs d’asile africains

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Mayotte était pour eux synonyme d’un monde meilleur. Une fois sur place, les demandeurs d’asile africains ne trouvent que désillusion et précarité. Depuis une semaine, ils lancent un cri d’alarme dans les rues du chef-lieu. Ils ont finalement été reçus par la préfecture ce mardi 28 juillet, mais la rencontre leur laisse un goût amer.

“Nous voulons l’égalité !” C’est le slogan qu’ont clamé haut et fort la centaine de demandeurs d’asile qui ont manifesté dans les rues de Mamoudzou ce mardi. Leur itinéraire avait une destination bien précise : la préfecture. Après avoir été reçus par la mairie de Mamoudzou il y a une semaine, c’est dans les bureaux du directeur de cabinet du préfet de Mayotte qu’ils ont fait part de leurs revendications. “C’est la première fois que les hauts cadres de Mayotte nous reçoivent et nous écoutent. C’est déjà un point positif”, déclare Junior Botomo, l’un des représentants du collectif des demandeurs d’asile africains. Leurs demandes sont les mêmes : la scolarisation de leurs enfants, la mise en place à Mayotte des aides qui existent sur le territoire national, le droit à la sécurité sociale, le droit de travailler et la mise à disposition de logements. Ce dernier point leur tient particulièrement à cœur, car aujourd’hui, les demandeurs d’asile ne se sentent plus en sécurité. “Ma fille a été violée en février et c’est arrivé parce que nous sommes sans abri. J’étais obligée de laisser les enfants dehors pour aller chercher à manger. Maintenant, elle est perturbée mentalement”, dénonce une mère très en colère. “Nous avons fui notre pays parce que nous étions menacés. On nous a dit qu’à Mayotte, les demandeurs d’asile sont protégés, mais aujourd’hui, on se rend compte que ce n’est pas le cas”, constate avec regret un ressortissant.

“Les réponses n’ont pas été satisfaisantes”

La rencontre entre le collectif des demandeurs d’asile africains et la délégation préfectorale a duré plus d’une heure, mais les membres du collectif en sont ressortis avec un demi-sourire. “Les réponses n’ont pas été satisfaisantes. Ils nous ont dit que Mayotte a un problème de financement, que le territoire est submergé par l’afflux migratoire. Ils sont vraiment débordés, mais ils travaillent sur les questions de logements et aides financières”, indique Junior Botomo. Selon ce dernier, la préfecture leur a promis d’apporter des réponses assez rapidement. Parmi lesquelles, la simplification ainsi que la transparence des démarches administratives. “Ils vont installer un nouveau dispositif qui nous permettra de suivre l’évolution en temps réel de notre dossier sur Internet”, explique le représentant du collectif. La préfecture a également proposé une aide alimentaire accrue, par le biais de l’association Solidarité Mayotte. Cette rencontre n’a pas été concluante pour les demandeurs d’asile, mais ils gardent espoir car c’est dans l’espoir d’un monde meilleur qu’ils ont traversé la mer pour vivre sur l’île aux parfums.

La gestion de la fonction publique défaillante à Mayotte ?

Pour la chambre régionale des comptes, le centre de gestion de la fonction publique de Mayotte ne remplit pas pleinement ses missions. Des anomalies dans les factures, dans l’organisation des concours et dans les cotisations perçues sont pointées du doigt.

Le rapport définitif a été délibéré il y a plus d’un an, mais vient seulement d’être dévoilé. La cour régionale des comptes estime, à travers une série d’observations, que les missions de gestion de l’emploi public territoriales sont « partiellement remplies ». « L’organisation des concours, dont la validité est nationale, a donné lieu à des irrégularités notamment dans l’établissement des listes d’aptitude », juge la juridiction qui a passé au peigne fin les finances du centre de gestion de la fonction publique de Mayotte depuis 2014. Ainsi, la double correction des copies conformément aux décrets fixant les modalités d’organisations propres à chaque concours n’a jamais été mise en place.

La mission générale d’information du centre n’a elle pas non plus été assurée, alors que celui-ci est tenu d’établir un bilan de la situation de l’emploi public territorial et de la gestion des ressources humaines. Il permet également d’élaborer des perspectives d’évolution de l’emploi, des compétences et des besoins en recrutement. « Faute d’objectifs chiffrés, d’indicateurs de performance, de budgets et comptes fiables, le centre de gestion ne dispose pas de référentiels lui permettant d’avoir une vision de l’évolution de son activité. La gestion des recettes s’avère défaillante s’agissant par exemple des cotisations obligatoires. Ni leur assiette, ni leur liquidation ne font l’objet d’un contrôle fiable », commente même la chambre.

Autre point contesté : des anomalies dans les factures. « Par exemple, 15.000 euros de visites médicales ont été facturées aux collectivités pour des consultations réalisées entre juillet et octobre 2016, alors que le centre ne disposait pas de médecin à cette période », met encore en lumière le rapport. « D’autres visites ont été facturées deux fois ou ont fait l’objet de factures quasiment identiques, portant le même numéro, mais des montants différents. L’état des restes à recouvrer fait ressortir, au 13 novembre 2018, plus de 88.000 euros de créances se rapportant aux visites médicales non soldées, soit plus d’une année de recettes. » Retoqué, le centre de gestion s’est toutefois engagé à assurer « une meilleure traçabilité des consultations réalisées et un contrôle plus rigoureux de la facturation ».

Quant à elle, l’assurance statutaire, qui vise à couvrir les risques liés au décès, à la longue maladie ou à la maternité des agents titulaires a généré, en 2017, 165.000 euros, soit 70 % des recettes liées aux missions facultatives sans rapport avec le service rendu aux collectivités souscriptrices. Problème : « L’application du régime général de sécurité sociale aux fonctionnaires territoriaux de Mayotte fait doublon avec l’assurance statutaire mise en place (…). L’assiette des cotisations recèle des fragilités qui pourraient remettre en cause 40 % du montant perçu par l’établissement, soit 0,6 million d’euros. L’absence d’application du régime spécial de sécurité sociale des fonctionnaires territoriaux abonde les ressources de l’établissement et remet en cause celles reçues au titre de l’assurance statutaire. »

Commission d’enquête : D. Voynet dézingue « les décisions brutales et imposées » à Mayotte

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Auditionnée ce mercredi 22 juillet par la commission d’enquête pour l’évaluation des politiques publiques face aux grandes pandémies à la lumière de la crise sanitaire de la Covid-19 et de sa gestion, Dominique Voynet, la directrice de l’agence régionale de santé, n’a pas mâché ses mots au moment d’évoquer les principales difficultés rencontrées sur le territoire. Florilège de ses déclarations croustillantes qui risquent de faire jaser à Paris. 

« Quand on a été professionnelle de santé, ministre, sénatrice, directrice de l’ARS, on a une liberté de langage que l’on ne rencontre pas souvent. » À elle-seule, cette phrase du sénateur Alain Milon, président de la commission d’enquête pour l’évaluation des politiques publiques face aux grandes pandémies à la lumière de la crise sanitaire de la Covid-19 et de sa gestion, résume parfaitement l’audition de Dominique Voynet, la directrice de l’agence régionale de santé. Et pour ainsi dire, cette dernière n’a pas mâché ses mots au moment de dresser un bilan, sous serment, ce mercredi 22 juillet. 

Parmi les difficultés rencontrées sur le territoire, la principale est la suspension « immédiate et sans préavis » de tous les vols à partir du 20 mars. Pour l’ancienne maire de Montreuil, cette décision, « prise du jour au lendemain » a mis en péril l’acheminement des personnels de renfort et de relève et surtout le fret sanitaire. Une hérésie en cette période critique selon elle ! Puisque le pont aérien « sous-dimensionné et complexe » n’a fait que renforcer la concurrence avec l’île de La Réunion. Et surtout une alternative coûteuse, par le biais d’une délégation de service public, qui a empêché une garantie de ressource non négligeable pour la compagnie Air Austral, qui aurait pu empocher une enveloppe de 25.000 euros par voyage entre Dzaoudzi et Saint-Denis. « Ce n’est pas exagéré de dire que cette situation, qui a généré la mise en place de lourdes cellules logistiques, nous a bien plus pénalisée que la prise en charge des cas de Covid », a-t-elle tancé. Évoquant au passage les tensions existantes sur des biens de consommation courante, tels que le papier toilette ou le riz. « C’est une fierté d’avoir réussi dans la quasi-totalité des cas la continuité des approvisionnements. Nous sommes devenus très pro sur la chaîne civile et militaire, aérienne et maritime, sur le rôle des transitaires et des lettres de transport aérien, sur les procédures de dédouanement, sur les contraintes techniques. Nous avons harcelé les cellules de crise des différents ministères, justifié chaque demande plus ou moins urgente, plus ou moins sensible au chaud. Nous nous sommes arraché les cheveux quand un colis urgent n’était pas chargé suite aux caprices d’un pilote ou d’un gestionnaire d’entrepôt. » Dominique Voynet a également pris l’exemple du rapatriement des Français coincés à Madagascar et aux Comores pour dénoncer, une fois de plus, « les décisions brutales et imposées sans discussion par le ministère des Outre-mer ». Des retours de voyageurs sur l’île aux parfums dont elle n’avait connaissance que quelques heures avant leur arrivée à l’aéroport alors qu’il fallait organiser l’accueil sanitaire, l’hébergement, le suivi des quatorzaines… D’où son « impression permanente d’interférences avec la décision sanitaire », mais aussi « d’amateurisme ». 

Des réunions ministérielles bien trop souvent inutiles ? 

Et sur ce point, la directrice de l’ARS n’y est pas allée par quatre chemins pour relater « le rythme de production des instructions et la lourdeur de l’affaire ministérielle ». Ainsi, elle a fait référence aux multitudes de directives nationales, « des dizaines et des dizaines », « parfois redondantes, parfois contradictoires et inadaptées à notre territoire ». Pour étayer ses propos, Dominique Voynet a insisté sur « une multiplicité de canaux de remontées d’informations, très consummatrices en temps à un moment où nous étions sous l’eau ». Notamment des visioconférences à la pelle, « parfois concrètes et productives, parfois bavardes et inutiles ». Sans oublier « l’arbitrage interministériel » qui a provoqué des reports successifs, à l’instar de l’application du dispositif « tester, tracer, isoler », ou encore du feuilleton des tests obligatoire ou non qui « n’est encore que très provisoirement réglé ». En résumé, elle a regretté, semble-t-il, que Paris ne prenne pas assez en considération les réalités du terrain. Or, elle n’a cessé de rappeler que, non seulement, Mayotte avait un décalage de sept semaines avec la métropole, mais qu’en plus, le territoire avait subi un confinement bien plus long, alors qu’un tiers de la population n’a pas accès à l’eau. 

Dominique Voynet en a profité pour mettre en exergue les faiblesses structurelles, comme les « modestes » capacités hotellières, dont la totalité est utilisée par les renforts de gendarmes et de polices, par la réserve sanitaire et par le service de santé des armées, et l’absence de lieu d’hébergement et d’isolement (l’internat de Tsararano a finalement été réquisitionné). L’occasion aussi de rappeler « le turnover habituel des personnels de santé et la modestie des équipes dans certaines spécialités ». « Quand on dit qu’il y a deux fois moins de biologistes à Mayotte qu’à Saint-Denis pour le même volume d’activité, ça veut dire quelque chose », s’est-elle interrogée au moment de son intervention. Autre problématique pointé du doigt : les tensions sur les matériels. « Je pense à la préemption jamais expliqué de respirateurs Hamilton commandés avant la crise au CHM et jamais livrés. À l’annonce de la livraison de respirateurs Monal T60, reportée de semaine en semaine, et de respirateurs Osiris arrivés après la bataille. » 

Un franc-parler qui n’est pas souvent entendu à un tel poste. Et qui a visiblement convaincu les sénateurs Catherine Deroche et Bernard Jomier, qui ont tour à tour qualifié Dominique Voynet de « franche » dans son exposé. D’ailleurs, la directrice de l’ARS a considéré que le Covid avait offert une opportunité à Mayotte, à savoir une mobilisation sans faille des associations et de ses bénévoles, qui « ont permis en lien avec les équipes mobiles de l’ARS d’ébaucher un véritable réseau de santé communautaire espéré depuis longtemps ». « Je suis pleine d’admiration pour cette population qui a affronté cette épidémie dans des conditions très dures, avec beaucoup de courage et de sagesse », a-t-elle conclu. De quoi reconquérir le cœur des Mahorais, qui n’ont pas hésité à la lyncher durant cette crise ? Peut-être. Un peu moins celui des responsables basés à Paris en tout cas !

Un comité de villageois mise sur les fundi et les cadis pour combattre la délinquance à Mayotte

Face à la délinquance qui règne dans les rues de Mamoudzou, plusieurs dizaines d’habitants du chef-lieu se sont réunis mercredi pour évoquer la constitution d’un comité villageois. Le but ? Remettre l’éducation religieuse et le rôle des cadis et des fundis au cœur de la vie des quartiers. Et par la même, inciter la population à signaler à ces sages toutes les situations susceptibles de dégénérer. 

Le projet est apparu il y a trois ans, mais il commence seulement à se concrétiser. Mercredi, une cinquantaine d’habitants de Mamoudzou se sont réunis sous le toit de la maison de quartier de Cavani pour évoquer la création d’un comité villageois de lutte contre la délinquance. Un projet défendu à Paris par Youssouf Thany, ancien conseiller pédagogique mahorais lors de sa visite à l’Élysée à l’occasion du 14 juillet. Mais alors que l’actualité récente a été marquée par le meurtre d’un père de famille à M’Tsapéré et, entre autres, une série de cambriolages à Cavani, il est devenu d’autant plus urgent d’agir. 

« Le but, ce n’est pas de créer une milice ! », corrige d’emblée Nouridine Hakim, créateur du label Green Fish, et l’un des porteurs du comité en train de se structurer. « L’idée serait de rassembler des habitants qui pourraient signaler aux fundis et aux cadis les gamins qui traînent tous les jours dans la rue, ou les familles qui ne parviennent pas à s’occuper de leurs enfants. Ces informations-là, la préfecture ne peut pas les recueillir elle-même, mais si on lui fait tout remonter par cet intermédiaire, des mesures plus adaptées seront prises. C’est aussi une façon de responsabiliser l’ensemble de la population, puisqu’elle serait au cœur des décisions prises par les services de l’État. » Mais aussi au cœur des traditions sociales mahoraises. 

La professionnalisation des fundis 

Pour apporter un meilleur cadre aux jeunes, le comité villageois entend composer avec les madrassa. « On y apprend des valeurs de civisme, de respect mais aussi de travail en allant cultiver le champ », rappelle Nouridine Hakim. « Nous, c’est à l’école coranique qu’on nous a inculqué le respect des aînés. Mais Mayotte est entrée dans une phase de mondialisation et on a oublié certaines traditions, et plus personne ne s’y identifie. » Parmi les pistes envisagées par le comité villageois, la professionnalisation des fundis. « Certains sont d’une autre génération, ils sont un peu dépassés. Alors on se dit qu’en plus d’éducateurs spécialisés, on pourrait avoir des fundis diplômés. » L’un des chantiers pour lequel le groupe a sollicité l’appui d’un juriste, en plus de profiter du soutien de la nouvelle municipalité en place à Mamoudzou. 

« Pourquoi vouloir créer de nouveaux systèmes et nous les imposer, alors que nous avons, dans notre culture, des personnalités qui jouaient un rôle important de médiateurs sociaux. Il faut leur redonner une place centrale dans la société », défend encore l’entrepreneur mahorais, en faisant référence à l’action des Gilets jaunes en 2018. « Il faut que les villages soient inclus dans les initiatives prises pour lutter contre la délinquance. Car si la préfecture peut agir, ce n’est pas le mzungu qui y travaille qui va permettre de signaler la situation de tel ou tel jeune ou telle ou telle famille dans tel ou tel quartier. » La veille, Jean-François Colombet rencontrait les quatre associations qui constituent le dispositif de médiation citoyenne. Le délégué du gouvernement avait alors reconnu que les acteurs de terrain sont plus à même de détecter les situations à risque. Le comité villageois, lui, programme une réunion la semaine prochaine pour échanger avec le maire de Mamoudzou et son équipe. Une autre rencontre, ouverte à tous, devrait être organisée dans les prochaines semaines sur le terrain de basket de Cavani.

Mayotte : “On veut que l’État nous prenne en charge comme tous les demandeurs d’asile qui vivent en France”

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C’est un ras-le-bol qui a poussé les demandeurs d’asile africains à manifester ce lundi 20 juillet devant la mairie de Mamoudzou. Ils réclament de meilleures conditions de vie et une meilleure prise en charge de la part des associations et de l’État, mais les moyens mis à disposition à Mayotte ne sont pas suffisants. 

Pancartes à la mains, visages fermés, les demandeurs d’asile africains étaient réunis devant la mairie de Mamoudzou lundi dernier. Leurs revendications se résument en une seule phrase “On veut que l’État nous prenne en charge comme tous les demandeurs d’asile qui vivent en France”, déclare Bakidi Massamba, leur porte-parole. Plus concrètement, ils souhaitent que les autorités mettent à leur disposition des logements. Une très grande partie d’entre eux vivent dans des habitats précaires. Ils réclament également un local afin de pouvoir vendre leurs marchandises “légalement”. Enfin, ils veulent que leurs enfants soient scolarisés. “Cela fait trois ans qu’on est à Mayotte et mon fils n’est jamais allé à l’école. J’ai fait tout mon possible pour l’inscrire à la mairie mais c’est impossible parce qu’on me demande une facture à mon nom. Comment puis-je trouver cela ?”, se demande Nana Aloko. La scolarisation est l’unique domaine où la mairie de Mamoudzou a pu apporter une réponse, même si elle reste évasive. “Nous sommes à l’écoute, nous allons essayer de travailler avec eux dans la mesure du possible. Tous les enfants doivent être scolarisés et nous allons travailler pour que tous les enfants de la commune de Mamoudzou puissent aller à l’école”, déclare Malidi Mlimi, conseiller délégué qui a reçu les demandeurs d’asile lundi. Les questions de logements, de régularisation administrative ou d’aides financières ne font pas partie des compétences du maire. 

Un eldorado qui n’existe pas à Mayotte 

En théorie, les demandeurs d’asile se trouvant sur le sol français sont protégés jusqu’à la fin de leurs démarches administratives. Ils sont en premier lieu hébergés dans un centre d’accueil pour demandeurs d’asile (Cada). Cependant, à Mayotte, la réalité est toute autre. “Les solutions d’hébergements sont quasi inexistantes, voire nulles. Il n’y a pas de Cada, les demandeurs d’asile se retrouvent donc à la rue. Certains arrivent à se loger dans des habitats précaires avec toutes les difficultés qui s’en suivent”, indique Solène Dia, chargée de projet régional à La Cimade (association qui s’occupe de réfugiés). Le manque de logement n’est pas le seul problème que rencontre les associations. Les demandeurs d’asile sont censés percevoir l’Ada (allocation des demandeurs d’asile) mais là encore, les aides financières sont bien en deçà. Ils reçoivent un forfait de 30 euros par mois pendant 6 mois. “Est-ce qu’en France on peut vivre avec seulement 30 euros par mois, soit 1 euro par jour ?”, s’indigne leur porte-parole. À la fin des 6 mois, ils n’en bénéficient plus et ne sont toujours pas autorisés à travailler. “Normalement, ces personnes devraient avoir une autorisation pour travailler, mais dans la réalité c’est quasi impossible. Donc elles se retrouvent dans des procédures qui peuvent durer 2 ans, voire plus, complètement livrées à elles-mêmes”, dénonce Solène Dia. 

À cela s’ajoute le problème de scolarisation qui est un vrai casse-tête pour les associations qui accompagnent les demandeurs d’asile. Selon la chargée de projet régional de La Cimade, certaines mairies de l’île refusent systématiquement l’inscription des enfants dont les parents sont étrangers ou rendent impossible leur scolarisation. “L’Éducation nationale vient de sortir un décret qui liste les pièces que les mairies peuvent exiger des parents. Sauf qu’ici, les mairies ne le respectent pas et continuent à exiger des pièces abusives que les parents ne peuvent avoir.” Toutes ces doléances seront transmises à la préfecture par les demandeurs d’asile africains. Ils seront reçus par le directeur de cabinet de la préfecture de Mayotte mardi prochain. Mais ils ne se font plus d’illusion. Tous ont réalisé que l’eldorado mahorais n’est finalement qu’un mythe.

Le préfet de Mayotte « compte » sur les médiateurs pour remettre les jeunes dans le droit chemin

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Ce mardi, le préfet Jean-François Colombet a entamé une après-midi marathon pour aller à la rencontre des quatre associations – Famhamou Maecha, Action coup de pouce, Messo et Mlezi Maoré – qui font partie du groupe de la médiation citoyenne. L’idée ? Montrer que ce dispositif n’est pas un simple coup de communication et qu’il se met progressivement en œuvre sur le terrain. 

17h30. La vingtaine de médiateurs d’Action coup de pouce se place en rang d’oignon, du plus petit au plus grand, à l’entrée du collège K1 pour accueillir le préfet, en tournée toute la journée de mardi pour rencontrer les structures qui ont rejoint le groupe de médiation citoyenne. Un lieu de rencontre hautement symbolique qui fait bien trop souvent l’objet d’intrusions comme en témoigne la fondatrice de l’association créée en 2013, Dhoirfia Saindou. En l’espace de quelques minutes, le délégué du gouvernement ressasse inlassablement le même discours auprès de ses interlocuteurs. « En étant sur le terrain, vous avez des signaux faibles qui ne parviennent pas auprès des autorités. Si vous faites remonter les informations, cela apaise la situation », lâche-t-il d’emblée, prenant l’exemple d’un souci d’assainissement qui peut potentiellement embraser tout un quartier en un claquement de doigts. Et c’est bien là l’essence même du groupe de médiation citoyenne, une action annoncée à la fin de l’année 2019 et pilotée par la préfecture et le Département. 

La tentation de la délinquance 

Si les associations commencent à peine à prendre leur marque, Jean-François Colombet voulait « marquer cette étape » d’une pierre blanche sur l’ensemble du territoire et ainsi démontrer que « nous ne sommes pas seulement dans la communication mais aussi et surtout dans la mise en œuvre ». Avant de dresser un premier bilan à la fin du mois de septembre pour s’assurer que le dispositif apporte réellement une plus-value. « Nous l’évaluerons ensuite en fin d’année pour décider s’il faut le renforcer, l’adapter ou bien le remplacer par une autre idée. » Conscient que ces médiateurs ne résoudront pas à eux-seuls la recrudescence de la criminalité sur l’île aux parfums, le préfet de Mayotte se montre tout de même optimiste concernant leur intérêt. « Nous n’attendons pas que tous les problèmes soient réglés bien sûr, mais il apparaît indispensable d’installer de la médiation lorsque des gamins de 12, 13, 14, 15 ans ou plus sont exposés à la tentation de la délinquance. Il faut que quelqu’un puisse leur dire qu’ils font fausse route et qu’ils se trouvent dans une voie sans issue », argumente-t-il, en précisant bien que les délinquants notoires restent bien évidemment dans le viseur des services de police et de la gendarmerie et qu’ils doivent être présentés aux juges pour être « punis ». À contrario, ceux qui ne sont pas des « voyous » doivent être orientés vers les emplois aidés. « Plutôt que de traîner dans la rue, nous pouvons leur proposer des formations », martèle-t-il. 

Un échange bref dans le simple but de rappeler aux associations le rôle considérable qu’elles peuvent jouer, à savoir « apaiser la société » et « redonner de la qualité de vie aux Mahorais ». Suffisant pour convaincre ceux qui se trouvent désormais en première ligne ? « Nous comptons sur vous », répète Jean-François Colombet au moment de se diriger vers le siège d’Action coup de pouce. Profitant par la même occasion pour saluer les quelques bandes de jeunes qui errent à proximité du stade et qu’il espère remettre dans le droit chemin… « Je reviendrais vous voir », glisse-t-il malicieusement en guise de conclusion. Effet de com’ ou réelle volonté politique ? Rendez-vous dans deux mois !

Pris en flagrant délit, des braconniers attaquent un garde tortue à Mayotte

Nuit d’angoisse à Saziley. Lors d’un bivouac organisé par les Naturalistes vendredi soir, deux braconniers qui venaient d’abattre une tortue s’en sont pris à Mohamed Ali, l’un des agents de dissuasion du conseil départemental alors en patrouille. Après avoir permis de découvrir une vingtaine de kilos de viande fraîche, l’homme a perdu connaissance. Pris en charge au CHM, ses possibles séquelles sont encore inconnues. 

La soirée a commencé au chevet des tortues, et s’est finie aux trousses des braconniers. Comme chaque semaine, les Naturalistes organisaient ce week-end un bivouac de suivi de ponte sur la pointe Saziley. Mais vendredi, sur la plage de Majicavo 4, rien ne s’est passé comme prévu. À tel point que l’un des gardes tortue du conseil départemental a dû être conduit à l’hôpital, inconscient. 

Quelques heures plus tôt, l’homme, par ailleurs bénévole expérimenté de l’association, décidait d’aller patrouiller sur la plage près de laquelle l’équipe avait installé son campement, en attendant que la mer ne monte. À marée basse, rares sont les tortues à s’aventurer hors de l’eau pour venir pondre dans le sable. C’est pourtant à ce moment-là que Mohamed Ali aperçoit dans la nuit deux individus charger de lourds sacs près du cadavre frais d’une large tortue verte, gisant sur les rochers, la carapace évidée. Lorsqu’il les interpelle, l’un d’entre eux le prend en chasse en lui jetant des pierres, avant de disparaître dans la malavoune. Ali est touché au visage, à la main et dans le dos. 

Alerté par les cris, tout le camp se réveille. Spontanément, deux groupes se forment : l’un reste veiller sur le lieu du bivouac, l’autre se rend sur la plage. Au cours de leur ronde, les six veilleurs découvriront, abandonné près d’un chemin, un sac poubelle plein, bien ficelé, et dont le contenu ne fait aucun doute. « Il ne faut pas qu’ils viennent le récupérer ! », laisse échapper l’un des membres de la petite expédition. Mais alors que Paul, Naturaliste aguerri resté près des tentes, vient de recevoir la visite de l’un des braconniers, qui a pris la fuite immédiatement en le voyant, il devient urgent d’aller prévenir l’autre groupe, installé sur la grande plage de Saziley. Faute de réseau à Majicavo 4, trois personnes, dont Ali, se mettent en route. 30 minutes plus tard, arrivé à bon port, l’homme perd connaissance et s’écroule. 

Une évacuation périlleuse 

Les pompiers, les gendarmes, les policiers sont appelés. Mais un kwassa vient de chavirer, personne ne peut intervenir immédiatement, d’autant plus que la houle complique l’accès au site, particulièrement isolé. Ce sont finalement les proches d’Ali qui viendront le chercher sur les coups de 2 heures du matin, avec leur propre barque, pour l’évacuer. « Un bateau de la gendarmerie maritime est bel et bien arrivé, mais la mer était trop agitée pour que le semi-rigide puisse accoster », raconte alors Victoria, animatrice pour les Naturalistes, chargée d’encadrer le bivouac. « Lorsqu’ils ont croisé la barque, ils leur ont demandé de s’occuper eux-mêmes du blessé, puisque leur bateau était plus maniable. » 

Toujours inconscient, le garde tortue est ramené au village de M’tsamoudou. Les pompiers l’y attendent pour le conduire au CHM, où il reprendra connaissance quelques heures plus tard. Mais pour écarter tout soupçon de commotion cérébrale, Ali doit passer plusieurs scanners, dont le dernier était prévu ce mardi. Selon les résultats, son évacuation vers La Réunion pourrait être décidée dans les prochaines heures. 

Samedi, au petit matin, une brigade de gendarmerie arrive à Majicavo 4, et procède au prélèvement de la viande de tortue renfermée dans le sac découvert la veille et sur lequel le groupe a veillé toute la nuit durant. Un lourd butin d’une vingtaine de kilos, et dont la valeur sur le marché noir avoisine les 1.500 euros. L’emballage et le lien qui le scellaient sont eux-aussi récupérés par les forces de l’ordre, espérant y trouver de potentielles empreintes. 

« Ça aurait fini par arriver tôt au tard » 

« On n’est déjà pas assez nombreux en temps normal », laisse échapper un gradé. « Ce qu’il faudrait faire, c’est déployer des militaires du DLEM ou du RSMA lors des bivouacs. Ils pourraient interpeller des braconniers si nécessaire ou partir à leur recherche dans la brousse. C’est pour ça qu’ils sont formés. Nous, en pleine nuit, on ne peut pas faire grand-chose. » 

À quelques pas de là, sur la grande plage de Saziley, Jean-Pierre Cadières, chef de l’unique police environnementale de l’île, installée dans l’intercommunalité du Sud, hoche la tête, le regard rivé sur l’horizon. « C’est difficile à dire, mais l’événement de cette nuit était prévisible. » Silence. « Ça aurait finit par arriver tôt au tard. » En cause selon lui, le manque de mobilisation de certains élus, comme en témoigne le retard pris pour armer la brigade verte, qui enclenche, chaque mois, une vingtaine de procédures pour atteinte délictuelle à l’environnement. « Heureusement, le sous-préfet Jérôme Millet et la cheffe de cabinet Catherine David ont appuyé notre demande d’équipement et nous ont permis d’avoir tous les documents nécessaires. On leur doit beaucoup. Mais on a vraiment besoin de plus de soutien de l’ensemble des acteurs. C’est grâce à la volonté de chacun que nous arriverons à faire quelque chose. » 

 

Déjà la veille, Ali évoquait au coin du feu les difficultés rencontrées par son association, l’ASVM, qu’il a lui-même montée pour assurer plus de sécurité dans le village de M’tsamoudou. Par extension, la petite structure avait, au fil des années, fini par assurer des missions de surveillance des plages de Saziley, et y organisait régulièrement des ramassages de déchets. « On n’arrête pas de se battre, mais on ne nous a jamais accordé la moindre subvention », déplorait alors Ali, engagé dans la lutte contre le braconnage depuis 2017. « On ne nous donne pas les moyens d’agir. » 

Sea Shepherd réagit 

L’ONG mondiale de défense des océans a tenu, ce week-end, à saluer l’engagement de Mohamed Ali, dont l’association, l’ASVM, est l’un des partenaires de Sea Shepherd : « En plus de ses heures de travail en tant que gardien, Ali est aussi bénévole et patrouille en tant que tel sur ses jours de congés, à nos côtés et avec d’autres bénévoles de l’ASVM. Tous prennent les mêmes risques pour protéger les tortues du braconnage face à la défaillance de l’État et au peu d’intérêt du préfet de Mayotte pour le sujet. » Sea Shepherd a par ailleurs expliqué étudier les possibilités d’un retour rapide sur l’île, malgré la situation sanitaire, pour y poursuivre ses actions de lutte contre le braconnage. L’association a annoncé que son avocat représenterait gracieusement Ali « pour faire défendre ses droits face à ceux qui l’ont agressé ».

Un blessé, et des déchets

Si ce week-end a été particulièrement mouvementé, il était initialement l’occasion de célébrer la fête de la mer et des littoraux, en collaboration avec le parc naturel marin et le Remmat, réseau mahorais d’échouage des mammifères marins et des tortues marines. Pour l’événement, les Naturalistes ont dévoilé les déchets récoltés sur la seule plage de grande Saziley en seulement quatre week-ends : un lourd volume de cordages et de filets de pêche, dans lesquels les tortues – entre autres – se retrouvent fréquemment prisonnières, mais aussi 482 tongs et 2.088 bouchons de bouteille en plastique, le tout ramassé en une dizaine de jours, sur 875 mètres de plage. Si les premiers déchets sont « impossibles à revaloriser » selon Michel Charpentier, président des Naturalistes, les deux autres catégories permettront aux scolaires, dès la rentrée prochaine, de mener un travail de sensibilisation sur la pollution des océans. « Il est temps que tout le monde comprenne que ce que nous jetons dans la rue ou dans la nature finira, un jour ou l’autre, dans nos océans, puis dans les poissons que nous mangeons. » Une étude de l’association WWF, publiée le mois dernier, révélait en effet qu’un individu moyen ingérait jusqu’à cinq grammes de plastique par semaine.

Bras de fer entre les salariés du laboratoire privé de Mayotte et leur direction

Cela fait maintenant une semaine qu’une large partie du personnel du laboratoire privé de Mayotte est en grève illimitée. Une situation qui ne va pas en s’améliorant puisque le dialogue avec la direction est complètement rompu. Les salariés ont l’intention de se faire entendre coûte que coûte et qu’importe le temps qu’ils passeront dans les rues. 

Les salariés du laboratoire privé de Mayotte sont tous les jours dans la rue depuis le mercredi 15 juillet, et ce malgré le silence assourdissant de leur direction. “Nous avons décidé de nous mettre en grève illimitée car en avril 2019 nous étions déjà en grève et avons signé un protocole qui n’est pas respecté aujourd’hui”, indique Ben Housman Abdallah, représentant du personnel et co-secrétaire général du syndicat Sud santé sociaux Mayotte. Selon ce dernier, le protocole garantissait l’application intégrale des grilles des salaires de la convention nationale des laboratoires. Mais après plus d’un an, rien n’a changé, les salaires sont les mêmes. Les grévistes demandent également des locaux pour installer leur CSE, une augmentation de la primé d’activité et surtout de meilleures conditions de travail. Ce dernier point est très délicat car le climat qui règne au sein de l’entreprise serait très pesant depuis la grève de 2019, selon les employés. “Au lieu d’apaiser les tensions, la direction a procédé à des représailles. Il y a un gros malaise, le lien est rompu. Des agents ont été rétrogradés, d’autres ont été poussés vers la sortie”, dénonce Ben Housman Abdallah. Des propos confirmés par une ancienne salariée du laboratoire qui manifeste également dans la rue pour soutenir ses anciens collègues. Elle a travaillé au laboratoire privé de 2015 à 2019 et a préféré démissionner après la grève de 2019. “Une prime de déménagement m’a été versée au début de l’année 2019, et suite à ma participation à la grève d’avril de l’année dernière, le directeur a retiré la prime précédemment versée de mes paies d’avril et mai, sans préavis et en plus j’étais enceinte et j’allais partir en congé de maternité. Et comme explication de sa part: « je vous rends la monnaie de votre pièce. J’ai tellement subi que j’ai fini par accoucher prématurément et j’ai dû démissionner par crainte de subir encore plus.
” Elle fait partie des trois techniciens qui ont quitté leurs fonctions en l’espace d’un an. Aujourd’hui, ils ne sont plus que cinq au lieu de huit, car les démissionnaires n’ont pas été remplacés. “La charge de travail a augmenté puisqu’ils refusent de remplacer les démissions et les congés maternités. Cette situation fait des dégâts, les gens sont usés psychologiquement”, alerte le représentant du personnel. 

Mettre fin à la situation de monopole 

Ce lundi, les grévistes ont sillonné les rues de Mamoudzou jusqu’aux locaux de l’ARS à Kaweni où ils ont été reçus par une délégation, en l’absence de Dominique Voynet. Ils ont fait part de toutes leurs revendications mais la réunion était motivée par un point crucial : la situation de monopole dont bénéficie l’unique laboratoire privé de l’île. “Si notre direction se permet tout cela et ne cherche pas à entamer des discussions avec nous c’est tout simplement parce qu’elle a le monopole à Mayotte. Ils n’ont pas de concurrents et donc rien à perdre”, affirme Ben Housman Abdallah. Les salariés souhaitent que l’ARS mette fin à cette situation et favorise l’installation de d’autres laboratoires privés sur le territoire. “Il est vrai que la concurrence aide à la qualité de service et à se remettre en cause. Mais pour l’instant, aucun investisseur ne s’est manifesté pour ouvrir un deuxième laboratoire privé à Mayotte”, indique Christophe Leikine, directeur de cabinet de l’ARS Mayotte. L’agence serait favorable à l’installation d’un nouveau laboratoire, mais s’agissant d’un domaine privé, elle ne peut être à l’initiative. “Il faut que des investisseurs se lancent d’eux-mêmes, ce n’est pas à l’ARS de le faire”, rappelle Christophe Leikine. 

Une chose est sûre, les salariés grévistes sont soutenus par les patients et par les infirmiers libéraux de l’île qui ont pris part à la manifestation de lundi. “Nous sommes solidaires car nous souhaitons qu’il y ait une issue rapide à ce conflit. Installons un nouveau laboratoire ou alors que le laboratoire actuel développe mieux ses prestations pour que tout le monde soit satisfait”, souhaite Éric Roussel, secrétaire général du syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (SNIIL) de Mayotte. Cette grève ralentit le travail des libéraux car il est impossible d’établir certains diagnostics. Elle a également un impact sur les tests Covid-19. Suite à cela, le directeur du cabinet de l’ARS affirme que la capacité de tests au CHM “a considérablement été augmentée, mais on a besoin du laboratoire privé”. La direction du laboratoire n’a pas souhaité communiquer sur le conflit social au sein de l’entreprise, mais elle signale avoir repris son activité. “Nous nous sommes organisés en interne, nous accueillons le public, il n’y a aucun souci.” Un comportement qui agace d’avantage les grévistes. Ces derniers ont décidé de bloquer l’entrée principale du laboratoire tant que les directeurs ne les écouteront pas.

Mayotte : Erasmus +, 6 mois pour changer de vie

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Pour la première fois, des Mahorais ont pu bénéficier du programme Erasmus + en partant directement de Mayotte. Entre 2018 et 2020, 22 stagiaires sont partis par petits groupes en Angleterre et à Malte pour une durée de 6 mois. Les derniers sont rentrés il y a quelques jours, les yeux remplis d’étoiles. 

C’est un projet inédit pour Mayotte qu’a mis en place Tafara Houssaini Assani. Le centre de formation Daésa, en collaboration avec le conseil départemental et l’agence Erasmus France ont pu faire bénéficier à quelques Mahorais le programme Erasmus +. Cela consiste à envoyer les candidats dans différents pays d’Europe pour vivre une expérience professionnelle et linguistique unique. En 2018, 5 stagiaires mahorais partent à Londres pour 6 mois, en 2019, 7 sont envoyés dans la même ville mais également à Malte, et le dernier contingent s’envolent au mois de janvier de cette année. “On s’est rendu compte que ceux qui bénéficient d’une mobilité internationale comprennent et grandissent beaucoup plus vite ”, affirme Tafara Houssaini Assani, à l’origine du projet et directeur commercial de la Daésa. 

Tous ont été préparés intensivement pendant deux mois. “Avant de partir, ils font une remise à niveau de la langue parlée dans leur pays d’accueil. On travaille aussi sur le patrimoine culturel du pays, le savoir-être, etc. On leur apprend à gérer un budget, en bref on leur donne toutes les clés pour qu’ils ne soient pas perdus une fois partis”, explique Tafara Houssaini Assani. Cependant, tout le monde ne peut prétendre à Erasmus +. Il faut être prêt psychologiquement à être complètement dépaysé et pour s’assurer de cela, les candidats passent un entretien avant d’être sélectionnés. 

Un programme bénéfique pour Mayotte 

“On fait des formations à Mayotte, mais on a un tissu économique très faible, donc il est très compliqué d’avoir des stages de qualités”, regrette le directeur commercial de la Daésa. C’est la principale raison qui l’a poussé à mettre en place ce projet pour les Mahorais. Grâce à Erasmus +, Mayotte a désormais plus de visibilité à l’échelle européenne. “Les gens veulent travailler avec nous, ils sont en demande”, selon lui. De ce fait, lors de la prochaine session, les stagiaires pourront également partir en Pologne, au Pays-Bas et peut-être même en Norvège. Le succès est tel que Tafara Houssaini Assani souhaite en faire bénéficier aux Mahorais qui habitent à La Réunion. Ces derniers, ainsi que les Réunionnais, pourront aussi partir grâce à la Daésa de Mayotte. 

Le taux de réussite qui s’élève à 100% en motivera peut-être quelques-uns. Jusqu’alors, aucun stagiaire n’a abandonné. Et le taux d’insertion est tout aussi satisfaisant. Ceux qui sont rentrés il y a quelques mois ont tous trouvé un travail, certains sont même restés dans leurs pays d’accueil car des opportunités se sont présentées. “Ceux qui reviennent arrivent à s’insérer plus facilement parce qu’ils ont une expérience professionnelle plus importante”, affirme l’initiateur du projet. La deuxième édition du programme Erasmus + à Mayotte doublera le nombre d’effectifs. 40 stagiaires de Mayotte et de La Réunion pourront en bénéficier et l’appel à candidature est déjà lancée. Ceux qui souhaitent tenter leur chance doivent s’adresser directement à la Daésa. 

Soilhata, 26 ans, passionnée d’anglais 

Soilhata est enseignante dans le primaire à Mayotte. Sa passion ? La langue anglaise qu’elle essaye de transmettre à ses élèves mais elle ne dispose pas des ressources nécessaires pour dispenser des vrais cours d’anglais. Elle avait besoin de formation mais elle indique que le rectorat n’était pas en capacité de la lui offrir. Le programme Erasmus+ est donc tombé à point nommé pour elle. Soilhata a passé 6 mois à Londres en tant qu’assistante de professeur dans une école primaire. “La première semaine a été un peu compliquée parce qu’ils parlent très vite. Je n’ai fait qu’observer les premiers jours. Ensuite, je m’occupais de élèves dans différentes matières et principalement des élèves en difficulté.” Ce séjour lui a permis de bénéficier d’une formation linguistique accélérée, mais son poste en tant qu’assistante n’a duré que trois mois à cause de la Covid-19 qui a coupé court à toute activité. Malgré cela, Soilhata ne regrette pas un seul jour. “Les gens là-bas sont très serviables et accueillants. Je suis contente d’être partie parce que j’ai pu améliorer mon niveau en anglais et c’est le plus important pour moi”, dit-elle. Ces 6 mois en Angleterre lui ont donné envie d’aller encore plus loin. L’enseignante a postulé pour une licence d’anglais à Tours. En parallèle, elle va également passer le TOIC, et si elle l’obtient, elle continuera à enseigner en primaire. Une chose est sûre, désormais l’anglais prendra une place plus importante dans ses cours. 

Sharize, 35 ans, à la recherche de nouvelles aventures 

Sharize est un informaticien qui avait soif de découvertes. Erasmus + était une opportunité qu’il ne pouvait laisser s’échapper. “Mon objectif était de partir découvrir une autre culture, peu importe la formation que l’on me proposait”, admet-il. Il raconte avoir demandé en premier lieu un poste dans l’informatique mais n’a pas obtenu de réponse. C’est donc en tant que réceptionniste dans un hôtel à Malte qu’il part pour 6 mois. Il a pu renforcer son anglais et même apprendre les bases du maltais. “Ce que j’ai apprécié étaient mes horaires de travail qui m’ont permis de découvrir l’île et ses habitants comme je le souhaitais.” Sharize est rentré tout sourire et grandi de cette expérience. Cependant, il ne souhaite en aucun cas travailler dans l’hôtellerie. “Je vais retourner à mon métier d’informatique. Cette expérience permettra surtout d’enrichir mon CV”, conclut-il. 

Antoinette, 39 ans, plus ouverte d’esprit 

Les démarches administratives n’ont plus aucun secret pour Antoinette. Elle travaille en tant qu’assistante administrative et a voulu se performer en exerçant son métier à Londres. Antoinette a travaillé pendant trois mois au sein de l’administration d’une école privée jusqu’au début du confinement. “J’ai voulu partir à Londres car je voulais élargir mes compétences pour mon travail. Pour cela, je devais améliorer mon niveau en anglais car même les logiciels que j’utilise au travail sont en anglais”, explique-t-elle. Elle reconnaît que les 6 mois passés loin de chez elle lui ont permis d’avoir un esprit plus ouvert et de changer de mentalité. Elle ne serait cependant pas partie si ce n’était pas avec Erasmus +. “Je me serais contentée des cours en ligne si j’avais dû me débrouiller seule.” La prise en charge dont elle a bénéficié l’a donc rassurée dans sa décision, même si elle admet que tout n’a pas été facile pour elle. Antoinette a dû faire preuve de beaucoup de détermination notamment lors de la recherche de logement.

Relation sexuelle à 14 ans : une mineure de plus victime des failles de la justice mahoraise

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Une simple affaire d’atteinte sexuelle sur une mineure de moins de quinze ans a fini par prendre de l’ampleur au tribunal correctionnel mercredi dernier. Rappelant que le débat sur le consentement, en particulier des mineurs, est toujours cruellement d’actualité, deux ans après l’adoption de la loi sur les violences sexistes et sexuelles. 

“Je suis là aujourd’hui pour qu’il ne fasse pas ça à une autre fille.” Lorsqu’elle prononce ces mots, tout à coup, son timbre est plus clair, ses épaules tremblent un peu moins sous sa robe rose en voile de coton, sa tête se redresse. Rien à voir avec ses premiers murmures en début d’audience, qu’elle peinait à énoncer tant sa voix se brisait face aux robes noires. Et pourtant, le juge Pascal Bouvard balaie cette réponse d’un revers de la main : “Ce sont des mots valises ça, je n’y crois pas, et vous non plus : vous êtes là pour vous, et pas pour l’humanité, n’est-ce pas ?” Il lui arrache un “oui”. Tremblant, celui-là. 

Et c’est à peu près la même partie de ping-pong qui va se jouer, des heures durant, dans cette salle climatisée du tribunal correctionnel, ce mercredi 15 juillet. Pas tant pour entendre le prévenu, qui grimace à l’arrière, mais bien plus la victime, seule à la barre face aux travers d’une justice encore trop patriarcale. Pourtant, l’affaire devait être “jugée rapidement”, car les faits n’étaient pas d’une “grande difficulté”, supputait le président en début d’audience. Raté. Car l’apparente banalité des faits n’enlève en rien à leur gravité : le prévenu, un homme d’une cinquantaine d’années, est accusé d’atteinte sexuelle sur mineure et de séquestration. Au moment des faits, en 2017, la victime est âgée de 14 ans. Son “petit ami” en a 32 de plus. Aujourd’hui, le prévenu prétend qu’il ignorait l’âge de sa conquête. Mais les circonstances de leur rencontre auraient pu, si ce n’est son apparence physique, lui mettre la puce à l’oreille. 

Rencontrés sur le chemin de l’école 

En effet, un matin, la jeune fille loupe le bus qui doit l’emmener à l’école. Elle fait alors la connaissance de cet homme plus âgé qui la dépose en stop. Très vite, ils sont amenés à se revoir. Et pendant treize mois, entre novembre 2017 et décembre 2018, ils auront une relation amoureuse et plusieurs rapports sexuels. Au début, ce chef de chantier d’une cinquantaine d’années la couvre de présents, l’emmène au restaurant. Puis la situation se dégrade. Parfois, quand il quitte le domicile, l’homme enferme l’adolescente à clé, d’après lui car elle ne veut pas sortir. C’est là que les policiers la retrouveront un jour, sous une chaleur étouffante, au milieu des DVD pornographiques et sans trousseau de clés. Dans les jours qui ont précédé, la victime avait fait plusieurs malaises à l’école, car elle n’avait rien à manger et qu’il l’avait frappé à deux reprises, raconte-t-elle aujourd’hui. “Jamais je n’ai voulu la séquestrer”, niait le prévenu dans sa déclaration. 

Consentement et âge légal 

“Nous sommes d’accord que nous sommes là avec une relation bien ancrée…”, résume le juge Bouvard après avoir entendu la version du prévenu. Nonobstant, la question de savoir si ces rapports étaient consentis ou non est bien au cœur de cette affaire sordide. Surtout, car pendant au moins les premiers mois de leur relation, la victime n’avait que 14 ans. “La notion de consentement, en dessous de 15 ans, n’existe plus”, signe Maître Erick Hesler, le conseil de la victime. Hasard du calendrier, c’est d’ailleurs au même moment que le gouvernement préparait son projet de loi sur les violences sexistes et sexuelles. Et que le débat sur le consentement des mineurs et un âge légal du consentement, de 13 ou de 15 ans, battait son plein… 

Visiblement, pas assez fort pour se faire entendre jusqu’à Mayotte. Et c’est d’ailleurs là-dessus qu’a souhaité insister Maître Zainaliambidina Nizary, l’avocat de la défense : “Le contexte local, territorial et géographique est très important dans cette histoire. Aujourd’hui, aux Comores, les gens sont mariés à 12 ans, et 52% de la population de Mayotte est étrangère”, a-t-il rappelé pour lancer sa plaidoirie. Il faut dire en effet que la rencontre malheureuse de cette Comorienne originaire de Moroni avec ce quadragénaire n’était pas sa première. Quand elle monte dans sa voiture, elle lui raconte qu’elle a déjà été mariée, et qu’elle a un enfant, âgé de cinq mois seulement. Juste avant, elle est déjà tombée entre les mains d’un autre adulte de 50 ans, parti de Mayotte depuis. Et le parcours de vie de cette jeune fille, qui quitte le domicile de sa mère à l’âge de dix ans pour alterner des séjours chez sa grand-mère et d’autres adultes, jusqu’à sa rencontre avec le prévenu, est des plus chaotiques. “C’est une fille têtue, qui aime trop la liberté, et qui veut avoir des moyens alors que moi je n’ai pas les moyens de lui donner”, apprend-t-on dans le témoignage de sa mère, absente à l’audience. D’après l’administrateur ad hoc, la victime subit une pression importante de la part de son entourage familial. 

Le procès des victimes 

Tous ces éléments sont passés au peigne fin pendant les longues heures que dure l’audience. Le problème ? C’est bien la victime qui est appelée à répondre de ses actes. “J’ai l’impression d’assister au procès de ma cliente, qui est passée au grill depuis le début !”, s’agace Maître Hesler. Un coup, c’est au sujet de ses lettres d’amour ou ses SMS alors que le prévenu est sous contrôle judiciaire avec interdiction d’entrer en contact avec elle ; un autre, sur son harcèlement à son égard ; ou encore son “inconséquence”, selon les termes du juge Bouvard, pour avoir eu un enfant à treize ans et l’avoir laissé à sa mère ; et jusqu’à la résolution d’un calcul mental pour vérifier ses capacités scolaires. À certains moments, la pression monte d’un cran. “Elle avait quatorze ans à ce moment-là, elle en a dix-sept aujourd’hui, je ne pense pas que ce soit la meilleure façon d’aborder les faits”, finit par intervenir le substitut du procureur. 

Et il ne fait pas si bien dire. D’ailleurs, la qualification d’atteinte sexuelle plutôt que de viol, faisant de l’affaire un délit et non un crime, peut aussi poser question, au regard des rapports sexuels véritables que le prévenu a eu avec une mineure de moins de quinze ans. En effet, si l’atteinte sexuelle réprime les relations sexuelles, entre un mineur et un adulte, même consenties, le viol est défini dans l’article 222-23 du Code pénal comme « tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui ou sur la personne de l’auteur par violence, contrainte, menace ou surprise ». Et la loi de 2018 contre les violences sexistes et sexuelles ajoute que la contrainte ou la surprise « peuvent résulter de la différence d’âge existant entre la victime et l’auteur des faits ». Dans un cas, le prévenu risque sept ans de réclusion criminelle et 100.000 euros d’amende, dans l’autre vingt ans de réclusion criminelle lorsqu’il s’agit d’un mineur de moins de quinze ans. 

Quoi qu’il en soit, ce mercredi, le tribunal correctionnel de Mamoudzou a, une fois de plus, illustré l’insoutenable clémence de la justice à l’égard des “attenteurs” sexuels. Alors même que le parquet ne réclamait que deux ans d’emprisonnement dont six mois de sursis probatoire de deux ans et l’obligation d’indemniser la victime, le prévenu n’écopera que de dix-huit mois de prison avec six mois de sursis probatoire de trois ans, et l’obligation de payer 8.000 euros d’indemnisation à la victime pour le préjudice moral. Étant donné que la peine de prison ferme est inférieure ou égale à deux ans, il pourra même bénéficier d’un aménagement. De son côté, l’adolescente, qui vit maintenant en famille d’accueil, présente toutes les caractéristiques d’une victime de viol : difficulté à dormir, crises de colère, problèmes génitaux… Des séquelles qu’elle gardera sans doute plus longtemps que la condamnation. D’après l’expertise psychiatrique jointe au dossier, le prévenu, lui, est “un homme normal. Mais vous le saviez déjà”, souriait le juge Bouvard.

Entre 440.000 et 760.000 habitants à Mayotte à l’horizon 2050 ?

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Jeudi matin, le conseil économique, social et environnemental de Mayotte (Cesem) et l’institut national de la statistique et des études économiques (Insee) ont conjointement présenté trois scénarii concernant l’évolution de la population sur le territoire à l’horizon 2050. Selon ces hypothèses, l’île aux parfums pourrait compter entre 440.000 et 760.000 habitants d’ici 30 ans. Des chiffres qui n’ont pas manqué de faire réagir l’assemblée présente à l’hémicycle Younoussa Bamana. 

Si l’île aux parfums concentre 256.200 habitants en 2017, quid de 2050 ? Pour y répondre, l’institut national de la statistique et des études économiques (Insee) et le conseil économique, social et environnemental de Mayotte (Cesem) ont réalisé une étude en partenariat. « On a besoin de lire le devenir [du territoire] sur le long terme », a annoncé d’emblée Abdou Dahalani, le président de la structure qui a pour vocation de conseiller les pouvoirs publics. « La méthode du coup par coup a atteint ses limites. » Missionnés pour cet exercice de projection démographique, les deux entités ont dévoilé ce mercredi, dans l’enceinte de l’hémicycle Younoussa Bamana, les résultats tant attendus. Trois scénarii se dégagent quant à l’évolution démographique d’ici 30 ans, qui « dépend des migrations, qui [elles-mêmes] impactent la fécondité future », a souligné Jamel Mekkaoui, le chef du service régional de l’Insee. 

La première hypothèse, « la plus catastrophique », prévoirait un contingent de 760.000 âmes sur le territoire, si l’on se base sur les flux migratoires élevés observés entre 2012 et 2017. Un chiffre qui correspondrait, ni plus ni moins, à un triplement de la population, soit 2.000 habitants au kilomètre carré. « En 2050, 28.000 bébés naîtraient », a ajouté le Monsieur chiffres. Une possibilité complètement délirante alors que Mayotte s’avère déjà être la première maternité de France avec 10.000 naissances par an… Autre donnée édifiante : le territoire resterait le département le plus jeune de France avec 51% de moins de 20 ans, contre 54% en 2017. Avec un solde migratoire nul, 530.000 personnes habiteraient sur l’île, soit un doublement de la population. La fécondité baisserait progressivement pour atteindre 3.1 femmes par femme en 2030, rappelant les grandes heures de la politique de planification familiale « 1, 2, 3, bass » dans les années 90. Concernant l’espérance de vie, celle-ci augmenterait pour atteindre 82 ans, tandis que l’âge moyen des habitants passerait à 30 ans. Les moins de 20 ans seraient moins nombreux que les 20-59 ans à partir de 2030 et la part des séniors dans la population triplerait, de 4 à 12%. Enfin, dans le cas d’un déficit migratoire, le scénario envisagé serait de l’ordre de 440.000 habitants, soit 1.7 fois plus qu’à l’heure actuelle. La population évoluerait alors à un rythme moyen de 1.6% par an sur la période et la part de personnes âgées de 60 ans ou plus serait un peu plus élevée (14% contre 12%). « Ces projections sont fondées sur des hypothèses », a insisté Jamel Mekkaoui. « On n’est pas devin ! ». Des propos confortés par Abdou Dahalani, qui a rappelé l’objectif du Cesem : « Notre but est de susciter la réflexion pour construire de vraies politiques publiques. » Et à ses yeux, il faut que « les élus engagent les réformes dès maintenant ». 

Un jeu de questions-réponses 

Une présentation exhaustive, qui n’a pas manqué de faire réagir l’assemblée. En tête de liste, Marc Dubois, chercheur au CUFR de Dembéni, qui a ouvert le bal. Ce dernier a alors émis quelques doutes sur la réflexion menée, notamment par rapport à l’absence de valeurs absolues. « Le seuil de pauvreté est passé de 84 à 77%. Or, en réalité le nombre de personnes pauvres à Mayotte a augmenté puisque la population a explosé. » En réponse, le chef du service régional de l’Insee a expliqué que « plus on va loin dans le temps, plus la probabilité est faible, mais on a des étapes intermédiaires avec les années 2030 et 2040 ». De son côté, l’auteur Madi Abdou N’Tro a regretté que les élus ne soient pas intégrés à la conférence « pour leur faire savoir dans quel bourbier ils sont ». Avant d’envisager d’exposer ces différentes éventualités « aux lycéens et aux étudiants pour leur faire prendre conscience » de l’avenir qui les attend. D’autres voix dissidentes se sont également élevées dans l’hémicycle. « Il devrait y avoir un quatrième scénario qui prendrait en compte la lutte contre l’immigration clandestine », a-t-on pu entendre. Ou encore, la prise de parole d’un citoyen lambda qui est revenu sur « l’amalgame peuplement et population [qui] peut faire peur ». Par ailleurs, pour un autre invité, « l’évolution des conditions d’éducation et de santé peut avoir comme conséquence un exode massif » tandis que « l’évolution du développement des pays de l’Afrique de l’Est peut entraîner un renversement de l’immigration ». Deux possibilités accueillies par quelques applaudissements de ses pairs assis à ses côtés. Face à tous ces questionnements, Abdou Dahalani a mis les points sur les « i ». « Le champ des réflexions va encore s’ouvrir », « la dimension sociologique n’est pas encore cernée », « une évolution quelconque à Mayotte ou ailleurs peut avoir des répercussions », « si le scénario 1 se produit, ça va être un casse-tête pour nos dirigeants », a-t-il confié aux uns et aux autres. En guise de conclusion, il a surtout martelé que quelle que soit l’hypothèse, le défi serait de taille ! « En 2027, on devra doubler le volume d’eau produit actuellement. Imaginez ces besoins de base. » On n’ose donc pas envisager le pire effectivement…

Le risque de tsunami pris très au sérieux par la préfecture de Mayotte

Le comité de suivi du phénomène sismo-volcanique s’est réuni mercredi autour des risques encourus par la population. L’hypothèse d’un tsunami provoqué par un glissement de terrain dû à la fragilisation des pentes récifales est à ce jour le scénario le plus « menaçant ». 

Devant la petite porte de la salle de conférence du rectorat, une poignée de journalistes attendent le préfet depuis plusieurs dizaines de minutes. « La réunion n’est pas encore terminée… », souffle l’une des collaboratrices de Jean-François Colombet. Signe que de l’autre côté de la cloison, les échanges sont denses, et pour cause : mercredi, le comité de suivi du phénomène sismo-volcanique s’y tenait afin d’élaborer les premiers dispositifs qui permettront de protéger la population insulaire en cas de catastrophe naturelle. 

Au sortir de la réunion entre représentants de l’État et membres de la communauté scientifique – Ifremer, IPGP, BRGM, Revosima, etc. –, le délégué du gouvernement ne tergiverse pas face à la presse venue attendre les premières observations. « Le phénomène sismique que connaît Mayotte depuis deux ans pourrait potentiellement générer un tsunami », annonce d’emblée Jean-François Colombet. Jusque-là, rien de bien nouveau. En revanche, plusieurs scénarios ont été dévoilés. Si le risque d’un effondrement sous-marin provoqué par la vidange de la poche magmatique était jusqu’alors la théorie la plus souvent évoquée, un séisme « plus important que les autres » ou un glissement de terrain dû à l’instabilité des pentes récifales, fragilisée depuis la naissance de l’essaim, constituent aussi des pistes sérieuses, et la dernière d’entre elles seraient, à ce jour, considérée comme « la plus menaçante », selon les mots du préfet. Pour les scientifiques chargés de mesurer les risques, le plan d’eau pourrait ainsi s’élever de 10 à 15 mètres en fonction des endroits, « mais la hauteur du plan d’eau ce n’est pas la hauteur de l’eau que nous aurions sur nos côtes », s’empresse de préciser Jean-François Colombet. En effet, puisque concernant la submersion, celle-ci oscillerait entre 50 centimètres et 2 mètres selon les sites et la bathymétrie. 

Des itinéraires de fuite à l’étude 

« Notre travail, maintenant, ça va consister à éduquer les populations aux bons réflexes et pouvoir les alerter », poursuit le délégué du gouvernement. En ce sens, 21 sirènes seront installées dans toutes les communes de l’île en début d’année prochaine. Un projet prévu initialement bien plus tôt, mais quelque peu perturbé par la crise sanitaire. Aussi, des « itinéraires de fuite » sont en cours d’études en partenariat avec l’université de Montpellier afin d’établir, pour chaque localité, les points où, en cas d’aléas, chacun pourra s’abriter sans risque. Une fois définis, ces sites feront l’objet d’une signalétique toute particulière. En amont, la préfecture souhaite multiplier dès la rentrée les exercices d’évacuation, particulièrement en milieu scolaire, à l’instar de celui auquel s’étaient prêté les jeunes écoliers de Dembéni courant février. Enfin, si la situation sanitaire le permet, un grand colloque devrait être organisé en septembre autour des connaissances scientifiques acquises depuis deux ans concernant le phénomène sismo-volcanique. Un événement inédit à Mayotte qui devrait permettre de vulgariser toutes les données recueillies pour que la population se les approprie. 

 

Un projet d’observatoire mahorais parmi « les plus performants au monde » 

Aux côtés de Jean-François Colombet, un nouveau visage était aussi au rendez-vous mercredi : celui de Charlotte Mucig, fraîchement nommée directrice du bureau de recherche géologique et minière de Mayotte, le BRGM, venue évoquer la prochaine mission scientifique. Si les dernières en date, Mayobs 13-1 et 2, avaient pu se tenir en plein confinement, les résultats de ces campagnes n’ont pas encore été entièrement publiés. En revanche, la prochaine venue du Marion Dufresne, programmée pour le mois d’octobre, est déjà particulièrement attendue, puisqu’elle permettra d’essayer pour la première fois d’utiliser les câbles sous-marins de la fibre optique pour écouter les séismes et autres vibrations sous-marines et terrestres en temps réel. Un projet innovant qui sera d’ailleurs soumis à un jury international pour peut-être capter de précieux financements dans le cadre du programme d’investissements d’avenir. « Je suis très optimiste, et cela permettrait de créer le premier observatoire mahorais », sourit le préfet. « Et il serait l’un des plus performants au monde ! », surenchère la directrice du BRGM.

Mayotte Hebdo de la semaine

Mayotte Hebdo n°1116

Le journal des jeunes