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Crise sanitaire : 5,9 millions d’euros pour la reprise économique à Mayotte

Le conseil départemental et l’ADIM ont signé officiellement les conventions avec les partenaires pour la reprise des activités dans le 101ème département. L’occasion d’annoncer de nouvelles mesures en faveur des entreprises locales pour les aider à faire face aux conséquences de la crise du Covid-19.

Une matinée pour signer officiellement la relance. Le conseil départemental et l’ADIM avait donné rendez-vous ce mardi aux élus, aux chefs d’entreprises et aux partenaires du monde économique, pour présenter les plans de continuité et de reprise des activités économiques. En tout, ce sont 5,9 millions d’euros qui devront permettre aux entrepreneurs, frappés de plein fouet par la crise sanitaire, de rebondir. “Il s’agit aujourd’hui de présenter les mesures nouvelles prises le 15 octobre par le conseil départemental pour faciliter la reprise des activités économiques afin d’encourager le développement et de sauvegarder l’emploi sur le territoire”, a introduit Ben Issa Ousseni, président de l’ADIM.

Ces mesures, qui s’inscrivent dans la lignée du fameux plan de relance de 100 milliards d’euros annoncé par le gouvernement, s’ajoutent aux aides d’urgence octroyées par l’État et le conseil départemental depuis l’annonce du confinement en mars dernier. À ce jour, 1.500 paiements ont été réalisés au titre du fonds de soutien régional et 345 paiements pour le fonds de solidarité complémentaire financé par le Département. Entre les différents fonds et prêts d’honneur, la collectivité a engagé quelque 8 millions d’euros depuis avril 2020.

Six secteurs identifiés

“L’évolution économique mondiale n’a jamais été aussi incertaine. Pour autant, nous devons nous relever et avancer : dès le début de l’été, le Département nous a réuni pour préparer la reprise économique”, a déroulé Mohamed Ali Hamid, le président de la chambre de commerce et d’industrie (CCI), qui a travaillé en partenariat avec le Département pour apporter des solutions à trois secteurs, le tourisme, le commerce et le BTP. Avec l’ESS, les transports et le commerce, ils font partie des six domaines d’activité particulièrement touchés par la crise qui ont été identifiés par les différents partenaires.

Un tour d’horizon auprès des entreprises locales a alors permis de faire émerger les problématiques auxquelles elles doivent faire face, pour leur apporter des réponses adaptées : révision du quota carburant pour les pêcheurs, plateforme recensant les travaux en ligne pour le BTP, prise en charge des surcoûts liés aux précautions sanitaires ou encore des chèques consommation pour les entreprises du tourisme et les petits commerçants font par exemple partie des solutions envisagées.

Relancer la consommation locale

Parmi les mesures phares, le projet Douka 2.0 doit permettre de relancer la consommation locale et de moderniser les petits commerces en entamant leur virage vers le numérique. En plus des enveloppes attribuées aux différents secteurs, des formations pourront aussi être proposées aux dirigeants d’entreprise et à leurs employés autour de la gestion comptable, administrative et commerciale de l’entreprise. L’autre volet essentiel : la communication, pour les aider à roder leur discours et à redorer l’image de Mayotte auprès des consommateurs.

La bonne nouvelle ? La clientèle de ces entreprises ne sera pas en reste ! La CCI travaille ainsi d’ores et déjà sur la distribution de 15.000 chèques de 100 euros à destination des salariés du privé, à dépenser dans les entreprises du coin. “L’objectif est de relancer ces entreprises du tourisme et de faire découvrir les offres locales, avec des effets leviers attendus, comme le fait de venir avec sa famille et la fidélisation des consommateurs”, a expliqué Serge Rochepeau, directeur du développement économique à la CCI. L’arrivée de ces petits bonus sur les bureaux est à prévoir dans le courant de l’année prochaine, le temps d’embarquer les entreprises partantes et de quantifier les bénéficiaires.

Des crédits pour faire face au Covid-19

Autant de coups de pouce qui doivent permettre d’accompagner le rebond des entreprises mahoraises… Tout en évitant au maximum les conséquences économiques mais aussi sanitaires de la crise du Covid-19. “Nous avons su résister à un nouveau confinement, et nous avons fait appel à des secteurs, je pense aux débits de boisson, aux bars, aux restaurants, qui se sont mobilisés et ont fait un travail exemplaire qui leur permet aujourd’hui de continuer à travailler”, a salué le préfet Jean-François Colombet. “Nous continuerons à fournir les efforts nécessaires pour que l’activité économique demeure tout en nous protégeant de la circulation du virus.”

À noter que ces mesures s’ajoutent aux crédits déjà annoncés au niveau de l’État et de l’Union européenne. Entre les 134 millions d’euros disponibles dans le cadre de l’initiative européenne REACT-EU, les 90 millions d’euros de la programmation FEDER 2014-2020 encore à engager et le contrat de convergence, où 500 millions d’euros ont déjà été engagés, Mayotte a les cartes en main. Reste à parier sur les bons chevaux !

12 lauréats pour l’appel à projets Innovation Mayotte 2020

En plus du plan de continuité et de reprise des activités économiques, cette journée organisée était aussi l’occasion d’annoncer les lauréats de l’appel à projet Innovation Mayotte 2020, lancé en septembre dernier à la faveur de la crise du Covid-19. Douze projets ont été retenus sur cinq volets clés pour l’avenir du territoire : le développement des talents, le digital, l’agriculture, le développement durable et le tourisme. Ils pourront bénéficier d’une subvention allant jusqu’à 100.000 euros ainsi que d’un accompagnement de 6 à 18 mois pour finaliser leur preuve de concept. Parmi les heureux élus : une plateforme pour les annonces d’emplois et de stages ; des projets basés sur l’énergie solaire ; un projet basé sur la blockchain ; un parc numérique de Mayotte ; des projets en faveur de l’agriculture connectée, comme “Zébu connecté 976”, ou encore une application mobile pour le tourisme…

 

Les jeunes en situation de handicap à Mayotte filmés durant leur stage en entreprise

L’insertion scolaire et professionnelle des jeunes en situation de handicap est particulièrement compliquée à Mayotte. Deux chercheurs du CUFR de Dembeni se penchent sur le sujet depuis le mois de septembre de cette année. Pendant 2 ans, les collégiens et lycéens handicapés se filmeront durant leurs stages respectifs afin d’analyser leur prise en charge et valoriser leur travail en milieu professionnel.

Valoriser le travail des jeunes en situation de handicap en en entreprise est le premier objectif de cette étude qui vient de voir le jour à Mayotte. À l’origine, Gaëlle Lefer Sauvage, maîtresse de conférence en sciences de l’éducation et chercheuse au CUFR de Dembeni, rattachée au laboratoire Icare basé à l’université de La Réunion. Avec la collaboration de 3 unités localisées d’inclusion scolaire (ULIS) au collège et 1 au lycée, ainsi que les associations Mlézi Maoré et Messo, elle étudiera pendant deux ans le comportement des jeunes handicapés lors de leurs stages professionnels de troisième, CAP et bac professionnel.

L’idée consiste à ce que ces jeunes se filment lorsqu’ils sont en train d’effectuer leurs tâches pour ensuite visualiser les vidéos. “Nous les analyserons pour comprendre comment ils se construisent professionnellement en se voyant en film”, précise la chercheuse. Ces vidéos serviront de CV numérique aux jeunes, qui pourront les présenter lors d’éventuels entretiens d’embauche. Elles seront également utiles aux enseignants qui suivent leurs parcours. “Les professeurs ont très peu de temps pour aller visiter l’ensemble de leurs élèves en stage et ils ne savent absolument pas ce que les élèves font en terme de tâches professionnelles”, rappelle Gaëlle Lefer Sauvage. Par ce biais, ils pourront juger si la théorie apprise à l’école est appliquée convenablement en entreprise. Mais les enseignants ont déjà une idée sur le contenu de ces vidéos. “Nous sommes avec des jeunes qui apprennent les bonnes manières et le savoir-faire, mais quand ils sont en stage, ils ne les appliquent pas car ils sont dans des milieux de stages non adaptés à eux” indique Christophe Alvergnat, coordonnateur ULIS du lycée professionnel de Bandrélé. Selon ce dernier, le milieu le plus concerné est celui de la restauration où les mesures d’hygiène strictes apprises à l’école sont difficilement applicables en entreprise.

La vidéo, une façon plus ludique d’impliquer les élèves

C’est un fait indéniable, le numérique prend le dessus sur l’écrit pour la jeune génération. Ceux qui participent à cette étude ne font pas exception malgré leurs divers handicaps. “Nous avons une population pour laquelle l’écrit n’est pas toujours le premier réflexe. Nous n’avons pas voulu leur imposer un outil qui ne leur servira à rien parce que s’ils font un rapport de stage à l’écrit, ils le jetteront par la suite. Alors que la vidéo pourra être présentée dans leurs CV”, selon la maîtresse de conférence en sciences de l’éducation. Et à en croire les enseignants, les jeunes sont très investis dans le projet. “Ils m’ont bluffé. Autant ils peuvent être en situation de handicap, autant pour se filmer ils ont une longueur d’avance sur moi. Ils n’ont pas peur de toucher à tout et à manipuler tous les boutons”, se réjouit Christophe Alvergnat. Cela étant, les vidéos ne sont pas toujours de bonne qualité. Toute l’équipe pédagogique et de recherche est chargée de leur apprendre les techniques de base.

Tout ce travail permettra aux jeunes de se valoriser en tant que personne, de se valoriser dans le milieu professionnel mais aussi auprès de leurs familles. “Certaines ont encore du mal à accepter le handicap de leurs enfants. À partir de l’instant où nous leur montrerons  ce qu’ils peuvent accomplir en milieu professionnel, ils les valoriseront davantage”, espère le coordonnateur ULIS du lycée professionnel de Bandrélé. Les équipes pourront observer les premiers résultats de cette étude à la fin de cette année scolaire.

Mayotte : Les élèves du second degré sensibilisés à l’égalité des sexes

À l’occasion de la journée internationale des droits de l’enfant le 20 novembre, le rectorat s’engage dans l’égalité des sexes auprès des élèves du second degré. Pour se faire, des professionnels iront dans quatre établissements scolaires du 17 au 26 novembre pour en parler. L’idée est de casser les clichés, afin que les jeunes aient un nouveau regard sur les inégalités qu’ils peuvent rencontrer.

À Mayotte, plusieurs générations se côtoient et le poids des traditions a parfois du mal à cohabiter avec le principe d’égalité des sexes. C’est dans cette optique que le rectorat cherche à sensibiliser les adolescents des collèges et lycées à travers des ateliers consacrés à l’égalité des genres mais aussi à l’éducation de la vie affective et sexuelle. Il ne s’agit pas d’une première puisque les élèves ont pu évoquer ces sujets à plusieurs reprises lors de débats à l‘école. Mais cette fois-ci, une exposition de l’association Adéquations, intitulée « L’égalité filles garçons c’est bon pour les droits de l’enfant. Et le respect aussi ! », viendra appuyer le travail des infirmiers et des assistantes sociales chargés de parler aux élèves. L’exposition est louée par le CDAD (conseil départemental de l’accès aux droits) au rectorat. Au total, 10 droits fondamentaux, inscrits dans la Convention internationale des droits de l’enfant sont abordés dans cette exposition. Le droit à l’éducation, le droit à la protection contre les violences, la responsabilité commune des parents, le droit à l’identité, etc. “L’idée est de partir des panneaux d’exposition pour développer un sujet en particulier en fonction de la classe et des difficultés que rencontrent les jeunes. Les infirmiers scolaires et les assistantes sociales seront les intervenants car ils sont sur le terrain et connaissent les problématiques des élèves”, explique Laure Durand, stagiaire au rectorat chargée de projet éducation à la vie affective et sexuelle en milieu scolaire.

Pour l’heure, seulement 4 établissements sont concernés par cette initiative. Le lycée polyvalent de Dembéni, le collège de Chiconi et celui de Sada, ainsi que le lycée Younoussa Bamana. Mais l’objectif est de répéter cette action tout au long de l’année dans différents établissements scolaires de l’île. Les écoles du premier degré ne pourront en bénéficier par manque d’effectifs. “La charge de travail est très importante pour les professionnels qui sont affectés dans les établissements du second degré. Cela ne nous permet pas d’aller faire des missions dans les écoles primaires”, indique Véronique Sejalon, conseillère technique du service sociale au rectorat et responsable du service sociale en faveur des élèves et du personnel.

La différence des sexes encore trop présente sur le territoire

L’idée de sensibiliser les adolescents aux questions d’égalité des sexes est partie d’un malheureux constat. La différence de traitement fille-garçon à Mayotte est importante. On voit bien par exemple qu’on demande souvent aux filles de faire les tâches ménagères, alors que les garçons ne sont pas ou peu sollicités”, selon Véronique Sejalon. Les professionnels contribuent également à l’éducation sexuelle des adolescents, en faisant participer les parents. “Qu’il s’agisse de sexualité de leurs enfants, de violences physiques ou autres, les parents qui participent sont volontaires, ils sont donc prêts à comprendre les changements”, affirme la conseillère technique du service sociale au rectorat.

Discuter avec les jeunes de ces problématiques permet de faire évoluer leurs mentalités. Tous les clichés qu’ils ont emmagasinés pendant des années, toutes les représentations qu’ils ont des femmes et des hommes depuis leur enfance sont mis à mal. “L’idée n’est pas de leur dire ce qui est bien et mal. On essaye plutôt d’établir une réflexion à ces jeunes, et d’aller vers une remise en question de ce qu’on leur a appris. Cela leur permettra ensuite d’agir et faire les choix en fonction de leurs envies”, explique Laure Durand. Un travail essentiel pour cette jeune génération qui est en train de se construire et qui essaye de trouver sa place dans la société mahoraise.

Après le président, l’opposition dénonce l’élection des vice-présidents du SMEAM

Malgré l’échec des recours en justice de Mouhamadi Moussa Bavi contre l’élection de Fahardine Ahamada à la tête du syndicat des eaux, les délégués en faveur de l’ancien président continuent de taper du poing. Dans leur viseur : deux délibérations qui avaient porté à 12 le nombre de vice-présidents.

Décidément, l’élection de la nouvelle équipe du syndicat mixte d’eau et d’assainissement de Mayotte leur est restée en travers de la gorge. Le 30 juillet dernier, Fahardine Ahamada succédait à Moussa Mouhamadi Bavi à la tête du stratégique SMEAM, alors qu’une partie des 34 délégués avaient quitté la séance, sur fond de contestations de la procédure. Mais malgré de mutliples recours en justice, l’ex-président a fait choux blanc. Dernier en date : sa plainte au tribunal administratif, déboutée en octobre.

S’il a depuis lâché du lest, les autres délégués opposés au nouveau président n’ont, eux, pas dit leur dernier mot. “Le tribunal administratif a donné raison à l’élection, nous ne pouvons pas contester cela”, reconnaît leur nouveau chef de file, Ahmed Rama. “Mais deux délibérations ont été depuis retoquées par le contrôle de légalité. Cela fait plus de deux mois que le préfet en a notifié le président, sans qu’une nouvelle réunion du conseil syndical ne soit convoquée !”, tempête le délégué de Tsingoni, courroucé.

Maximum 10 vice-présidents

Il fait référence à la composition du bureau du SMEAM et à l’élection des vice-présidents. Le syndicat avait fixé le 30 juillet dernier à douze le nombre de ses vice-présidents. Or, le code des collectivités territoriales prévoit que “le nombre de vice-présidents est librement déterminé par l’organe délibérant, sans que ce nombre puisse excéder 30% de l’effectif de celui-ci”… Soit un maximum de dix pour le syndicat des eaux, qui comprend 34 membres. Si deux vice-présidents auraient depuis démissionné, le délégué de l’opposition n’approuve pas les méthodes de la nouvelle majorité et entend bien le faire savoir. “Il faut convoquer les délégués pour annuler ces délibérations, or cela fait plus de trois mois que le conseil syndical n’a pas été réuni ! J’attends du préfet qu’il saisisse le tribunal administratif », abonde-t-il.

Un manquement d’autant plus inacceptable selon lui, alors que “nous sommes aussi membres et nous devons rendre des comptes à la population, surtout au vu de l’actuelle crise de l’eau que nous traversons à Mayotte”. Et que le syndicat doit faire face à une situation financière catastrophique, héritée en partie, il faut le dire, de l’ancienne équipe… La chambre régionale des comptes elle-même, dans son avis du 3 septembre 2020, pointe du doigt les délibérations litigieuses, alors même que “compte tenu de la situation financière (…), il est attendu que l’effort demandé aux élus du syndicat sur leurs indemnités soit maintenu”. “En désignant 12 vice-présidents, alors que le comité syndical ne pouvait en désigner au plus que 10, dans la limite de 30 % maximum du nombre de membres de l’assemblée délibérante, le syndicat ne s’inscrit pas dans une logique de rigueur”, souligne la CRC.

Des délégués exclus des décisions ?

L’élu de Tsingoni déplore le manque d’informations sur les investissements et les travaux en cours. Voire même les coupures d’eau : “nous sommes passés de 12h à 24h sans être tenus au courant des raisons à cela”, dénonce-t-il. Dans un courrier adressé au président, que nous avons pu consulter, signé par 18 délégués, Ahmed Rama a donc demandé la convocation d’un nouveau conseil syndical avec à l’ordre du jour des points d’information sur le niveau des retenues et l’avancement des travaux de forage d’eau, et les délibérations relatives aux élections des vice-présidents. Sans retour, le doyen entend bien convoquer lui-même cette réunion. Mais il lui faudra pour cela convaincre les deux tiers des membres.

 

M. Moussa, directrice de la Cress de Mayotte : “Quand nous faisons des économies, c’est souvent au détriment de l’être humain”

Le mois de l’ESS célèbre sa quatrième édition mahoraise. Pour l’occasion, Maymounati Moussa, directrice de la chambre régionale de l’économie sociale et solidaire de Mayotte revient sur les principes de cette façon d’entreprendre, qui permet de développer l’employabilité en même temps que le territoire, et qui se révèle particulièrement efficace en pleine crise sanitaire et économique.

Flash Infos : Comment définiriez-vous l’économie sociale et solidaire ? Quels types de structure peut-elle concerner ?

Maymounati Moussa : C’est d’abord une loi, celle du 31 juillet 2014, qui définit l’ESS comme un mode d’entreprendre et de développement économique adapté à tous les domaines de l’activité humaine, donc à tous les secteurs d’activité. En une phrase, c’est faire de l’argent en tenant compte de l’humain et de l’environnement qui l’entoure. C’est une économie créatrice de richesses et d’emplois mais qui vise surtout à l’intérêt collectif. Nous retrouvons dans l’ESS toutes les typologies d’entreprises : des coopératives, des mutuelles, des fondations, des associations, des structures d’insertion, des sociétés commerciales, etc. La différence est dans la façon d’entreprendre, qui doit respecter des principes éthiques extrêmement forts pour la société, l’environnement ou un territoire. Le but n’est pas uniquement de partager des bénéfices mais de le faire de façon responsable et d’en réserver la plupart pour le maintien ou le développement de l’activité, le tout sous une gouvernance démocratique puisque dans l’ESS, chaque actionnaire a le même poids, qu’il ait investi un ou mille euros dans l’entreprise.

FI : Le mois de l’ESS met aussi en avant l’intérêt de cette façon d’entreprendre face à des crises comme celles que nous traversons actuellement. Quelles solutions l’économie sociale et solidaire peut-elle apporter ?

M. : Pour nous, surtout en ce moment, l’ESS c’est la solution : nous n’avons pas perdu beaucoup d’entreprises du fait de la crise sanitaire et nous n’avons eu aucune vague de licenciements. Tout ce que nous faisons, c’est pour maintenir l’emploi. Depuis le début de l’année, la Chambre régionale de l’économie sociale et solidaire ainsi que ses entrepreneurs ont consolidé ou créé 168 emplois et une centaine d’autres sont en cours, malgré la crise sanitaire et le chômage partiel, parce que nous nous concentrons sur l’humain, quelles que soient les situations. D’ici le 31 décembre prochain, nous devrions donc arriver à 270 emplois créés ou préservés, et qui répondent aux besoins du territoire et de toute sa population. C’est pour cela que ce mois de l’ESS est particulièrement intéressant : il nous permet, à Mayotte et partout ailleurs, de dire aux gens “réveillez vous !”. Quand le Covid-19 est arrivé, Sanofi est revenu au made in France. Ils ont arrêté de chercher la solution la moins chère pour trouver la plus pérenne. Parce que quand nous faisons des économies, c’est souvent au détriment de l’être humain.

FI : Les prochains Jeux Olympiques et Paralympiques, en 2024, devraient mettre l’accent sur des investissements qui profitent à l’ESS, donc à l’économie locale, et pour lesquels Mayotte occupe déjà une place toute particulière…

M. : En effet. Au sein de la Chambre régionale de l’économie sociale et solidaire, nous disposons d’un dispositif, le Fanya Lab, qui est un accélérateur de l’ESS et de l’innovation sociale, et qui accompagne tous les acteurs, même informels, qui voudraient se lancer ou se développer dans l’ESS. Ce dispositif a reçu le label Territoire French Impact, qui permet à Mayotte (premier territoire ultramarin labellisé, ndlr) d’être prioritaire sur une enveloppe de 370 millions d’euros qui, dans le cadre des prochains Jeux Olympiques, permettront de développer des projets qui doivent répondre à trois défis : le zéro déchet, et l’intercommunalité du Sud nous accompagne là-dessus en mettant son territoire à disposition des porteurs de projet, la formalisation des activités non déclarées pour favoriser une meilleure alimentation notamment dans le milieu scolaire et le développement d’un hub de l’ESS à grande échelle, que nous mettons déjà en place actuellement à travers plusieurs clusters dans le monde, comme à Ayuba ou au Groenland !

Retrouvez l’intégralité de cet entretien dans le dernier numéro de Mayotte Hebdo : Economie sociale et solidaire, l’humain avant l’argent. À lire gratuitement sur mayottehebdo.com.

Trafic aérien à Mayotte : La base arrière pour le projet gazier déploie ses ailes

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Vendredi matin, le comité de pilotage sur le projet d’évolution du trafic aérien à Mayotte s’est réuni à l’hémicycle du Département. Trois études de faisabilité ont rythmé ce rendez-vous : les freins et axes d’amélioration de la desserte aérienne, la création d’un hub aérien en relation avec le projet gazier au Mozambique et l’opportunité d’une nouvelle compagnie aérienne. Focus sur la présentation de ce deuxième lot qui doit permettre à l’île aux parfums d’accueillir des aéronefs d’affaires et de construire un hangar d’un montant de 8 millions d’euros.

 Faire de Mayotte un hub aérien. Farfelue à l’origine, cette idée semble bel et bien se concrétiser, grâce ou à cause, selon les avis de chacun, du projet gazier au Mozambique. Le rapport présenté vendredi dernier à l’hémicycle Younoussa Bamana par Airflex Ingénierie, un cabinet d’expertise aéronautique sous forme de bureau d’étude de compagnie aérienne, est en tout cas motif d’espoir ! L’objectif pour l’île aux parfums ? « Montrer que nous pouvons acheminer le gros contingent d’ingénieurs et autres travailleurs qui viendraient de l’Europe », défend bec et ongles Zoubair Alonzo, le directeur de la chambre de commerce et d’industrie. Pour cela, le territoire a une carte magique dans sa manche puisqu’une autorisation spéciale lui permet d’atterrir à Pemba et Nacala, où se trouvent des aéroports régionaux, plutôt qu’à Maputo, située à environ 3.000 kilomètres du bassin de Rovuma, la zone tant convoitée dans cette partie de l’Afrique de l’Est. « Dzaoudzi est même plus proche que Nairobi », ajoute-t-il, avant de rappeler que le centre hospitalier peut également tirer son épingle du jeu avec son service d’évacuations sanitaires.

Un bon point donc pour le 101ème département, qui ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. « Des géants comme Total et ExxonMobil ont aussi des avions ou des hélicoptères d’affaires que les grands patrons utilisent pour se rendre directement sur les plateformes offshore », explique Zoubair Alonzo, qui souhaite attirer des opérateurs tels que Amelia pour assouvir ces « caprices » de riches. Toujours sur ce même principe, Zoubair Alonzo insiste sur la fluidité des démarches administratives. En d’autres termes, il apparaît inconcevable que les dirigeants de ces multinationales attendent indéfiniment derrière des grilles dans le cadre d’une simple escale. « Il faudrait des politiques douanières pour faciliter ce type de transferts vers le pays », concède le directeur de la CCI, bien conscient que Mayotte ne doit être en aucun cas un boulet aux pieds de ces grosses pointures.

Un hangar pour des réparations et des formations

Et pour définitivement devenir incontournable dans la zone géographique, Mayotte a l’ambition de développer ses infrastructures aéroportuaires. Avec en tête de liste, la construction d’un hangar en lieu et place de celui utilisé auparavant par Int’Air Îles, annoncée lors des vœux du président de la chambre consulaire, Mohamed Ali Hamid. « C’est un espace qu’il faut livrer directement pour pouvoir procéder à de la maintenance lourde en cas de panne d’un hélicoptère ou d’un jet. Nous ne pouvons pas nous permettre d’aller chercher des mécaniciens à l’autre bout du monde », insiste Zoubair Alonzo. Coût de l’opération : 8 millions d’euros. Un chiffre qui paraît astronomique sur le papier mais qui permettrait de redonner un second souffle à des ATR et des Boeing 737 volant du côté du Mozambique. Mais aussi pour accueillir des gros porteurs de fret de grandes valeurs, car l’équipement est actuellement calibré a minima, puisqu’il ne dispose que d’un chariot-élévateur 2.5 tonnes, d’une balance, d’un appareil à rayons X hors format et d’une fosse à palettes.

Ce futur bâtiment est d’autant plus indispensable qu’il permettra l’implantation d’un centre de formation technique. « Depuis vendredi, l’ensemble des acteurs mahorais – la CCI, le Département, Edeis, la communauté de communes de Petite-Terre et Ewa – sont rentrés dans l’association Aérotech-OI. » dont le but est de développer les métiers de l’aérien pour rayonner dans la région. Une ambition qui colle à celle du rectorat, qui assure des formations de maintenance aéronautiques, d’accueil et de sécurité au sein du lycée de Pamandzi. La création d’une nouvelle extension de l’établissement scolaire sur un terrain proche de l’aéroport est d’ailleurs prévue à horizon 2023-2024, dans le but d’accueillir 200 élèves sur les trois champs précités. D’où l’affirmation de Zoubair Alonzo : « Nous avons le potentiel pour être un hub sur le canal du Mozambique. » Ne reste plus qu’à le prouver par des actes !

 

Trafic aérien à Mayotte : Cinq nouvelles destinations envisagées d’ici 2030 à condition que…

Vendredi matin, le comité de pilotage sur le projet d’évolution du trafic aérien à Mayotte s’est réuni à l’hémicycle du Département. Trois études de faisabilité ont rythmé ce rendez-vous : les freins et axes d’amélioration de la desserte aérienne, la création d’un hub aérien en relation avec le projet gazier au Mozambique et l’opportunité d’une nouvelle compagnie aérienne. Focus sur la présentation de ce premier lot qui doit permettre d’évaluer ces problématiques et d’envisager cinq destinations supplémentaires d’ici 2030.

Mayotte, un petit caillou de 376km2, passée au crible par l’association internationale du transport aérien, basée au Canada. L’idée peut faire sourire et pourtant, il s’agit bel et bien d’une réalité. Pour mieux comprendre les freins et axes d’amélioration de la dessert aérienne du 101ème département, IATA a développé une approche en quatre étapes afin de traiter la problématique de cette étude.

Première information, l’étude de marché a mis en lumière les forces et les faiblesses de l’île aux parfums. Et à ce sujet-là, rien de bien nouveau ! Le territoire a en sa possession des « attraits touristiques exceptionnels », avec l’un des plus beaux lagons du monde, une faune et flore terrestre abondante mais aussi une culture traditionnelle unique et préservée. Sa situation géographique dans l’océan Indien lui permet de se situer à trois heures à vol d’oiseau de pays voisins tels que la Namibie, l’Afrique du Sud et le Kenya. Autre motif d’espoir ? 95% des touristes se disent comblés par leur séjour. A contrario, plusieurs éléments jouent en défaveur de Mayotte : pauvreté et taux de chômage très élevé, insécurité ambiante, manque d’offre hôtelière, rapport qualité/prix insatisfaisant, qualité d’accuel insuffisante, destination franco-française, manque d’organisation et de structuration de l’offre touristique, infrastructures aéroportuaires contraignantes et problèmes opérationnels… Un tableau plus que noirci sur le papier.

Des opportunités mais aussi des menaces en raison du Covid

Deuxième information, les entretiens menés et le travail de recherche ont permis d’identifier de solides opportunités sur lesquelles baser la définition d’un plan de développement des services aérien. L’idée ? Structurer l’offre touristique autour de la terre, de la mer et de la culture et viser un profil cible de voyageurs, à savoir des touristes de qualité. En mettant un coup d’accélérateur sur le projet de doublement de la capacité hôtelière prévu pour 2030. Un objectif répété lors du 3ème Forum économique. L’accès à des sources accrues de financement, comme le plan de convergence et de transformation, le projet de piste longue et la jeunesse de la population sont des signaux plutôt positifs. Pour autant, plusieurs inconnues demeurent, notamment en raison de la crise du Covid-19. Quels seront les impacts de la pandémie sur le pouvoir d’achat des visiteurs, sur les hébergements à venir, sur les compagnies desservant Mayotte ? Mystère ! Et d’autres menaces planent au-dessus du dernier département français, comme la politique menée concernant l’immigration clandestine, les restrictions en matière de politique de visa et la limitation des droits de trafic vers certains marchés. Conséquence, la situation actuelle risque de se prolonger à court terme. Les premiers changements majeurs ne se matérialiseront qu’à partir de fin 2023, début 2024, synonyme de l’augmentation tant attendue du nombre de lits touristiques.

Maurice, Addis Abada, Johannesburg, Marseille, Dubaï…

Toute une série de mesures et de réflexions qui doivent porter leurs fruits en termes d’évolution des destinations, puisque l’association internationale du transport aérien a tablé sur plusieurs mises en service au cours de la prochaine décennie : île Maurice (2022), Addis Ababa (2024), Johannesburg (2026), Marseille (2028) et Dubaï (2030). « Ces cinq routes ont donc été soumises à une analyse de profitabilité financière sur base des caractéristiques de marché et des contraintes opérationnelles anticipées. » Et pour agrémenter son étude, IATA a estimé pour les cinq premières années d’exploitation, un volume de trafic annuel total et une fréquence de vols hebdomadaires. Mais aussi le tarif moyen et les coûts tels que le prix du carburant au litre par direction, les redevances passager moyennes et les charges aéroportuaires par vol, et les charges salariales pilotes et personnel naviguant par heure de vol. Sans grande surprise, le trajet jusqu’à Marseille semble être le moins avantageux, à l’inverse de Dubaï qui apparaît comme une petite mine d’or… « Les analyses effectuées démontrent que certaines routes nécessiteront de bénéficier de mesures incitatives afin de permettre aux compagnies aériennes d’atteindre le seul de rentabilité minimum. » Autrement dit, pour que ces rêves deviennent réalité dans un futur proche, il faudra que le Département mette la main à la poche et accorde des subventions. Banco ?

Lancement de la PPRAP : “Le handicap est resté trop longtemps tabou à Mayotte”

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La plateforme de parcours renforcé d’accès à la professionnalisation (PPRAP), un dispositif expérimental sur trois ans en faveur de l’insertion des personnes en situation de handicap, se lance à Mayotte. La structure, affiliée à la fédération APAJH (l’association pour adultes et jeunes handicapés), s’inscrit dans le cadre du pacte ultramarin d’investissement dans les compétences (PUIC) signé entre l’État et le Département. Une nouvelle offre de formation déterminante pour le territoire, où plus d’un quart des demandeurs d’emplois bénéficiaires de l’obligation d’emploi de travailleur handicapé (BOETH) est inscrit au chômage depuis plus d’un an. Faiza Said Omar, adjointe de direction à la PPRAP, présente le dispositif.

Flash Infos : Pouvez-vous présenter la PPRAP ? Comment est-elle née et pourquoi ?

Faiza Said Omar : Ce dispositif a été mis en place par les différentes institutions à Mayotte – Dieccte, préfecture, ARS, Agefiph, conseil départemental, mission locale et Pôle emploi – pour répondre aux exigences du pacte ultramarin d’investissement dans les compétences (PUIC) signé entre l’État et le Département  en faveur des personnes en situation de handicap. Cette plateforme propose un accompagnement global sur les plans éducatif, social, médico-social et socioprofessionnel tant sur le parcours de vie que sur le parcours professionnel. Pour l’instant, c’est un dispositif expérimental sur trois ans, spécifique à Mayotte. Mais en fonction du bilan – que nous espérons très positif ! – il sera déployé au niveau national.

FI : Pourquoi Mayotte fait-elle justement l’objet de cette expérimentation ?

S. O. : Il existe en métropole des cadres emplois et des ESAT (établissement et service d’aide par le travail), des structures réservées aux personnes en situation de handicap qui visent justement à favoriser leur insertion sociale et professionnelle. Ce genre d’établissements se trouve dans l’Hexagone et dans les Outre-mer mais pas à Mayotte. Or les besoins ne manquent pas ! La prise en charge du public en situation de handicap à Mayotte n’est pas suffisante, d’où cette volonté d’instaurer un dispositif pour les propulser vers des emplois durables et aussi d’avoir accès à la professionnalisation au niveau du droit commun. Je parle là de certaines formations qui pourraient ne pas être ouvertes aux personnes en situation de handicap mais qui sont appelées à le devenir, sous l’impulsion de l’État, du conseil départemental et de l’Agefiph. Cela fait justement partie de nos missions : nous allons proposer pour les personnes qui ne peuvent pas avoir une formation classique une reconnaissance des acquis d’expérience.

FI : Concrètement, comment cela fonctionne-t-il ? À partir de quand peut-on s’inscrire ? Que contient la formation ?

S. O. : Nous avons réuni une équipe pluridisciplinaire composée de moniteurs, d’éducateurs spécialisés, d’une conseillère en insertion professionnelle, d’une psychologue clinicienne et d’un médecin. En tout, une dizaine de personnes se chargent de l’accompagnement des gens qui passeront par notre structure. Toutes les personnes en situation de handicap de 16 à 65 ans peuvent s’y inscrire, avec une priorité pour les 16-25 ans, en passant par Pôle emploi ou par une mission locale. Une fois inscrit, nous leur présentons le dispositif dans son intégralité et nous pouvons commencer l’accompagnement. C’est un parcours qui court sur 18 mois pendant lesquels nos équipes vont travailler avec la personne sur son environnement, sur ses occupations, sa vie, et bien sûr sur son projet professionnel. Une fois tous les freins levés, nous allons décider avec elle de son orientation, soit en formation qualifiante, soit directement en entreprise via un contrat d’apprentissage, un contrat pro, voire même un CDD ou un CDI. Pour la première session, nous comptons accompagner 40 stagiaires, puis nous poursuivrons ensuite les inscriptions au fil de l’eau, chaque fois qu’une personne aura quitté le dispositif. Il faut savoir que nous continuons le suivi pendant au moins six mois pour s’assurer que la situation s’est stabilisée pour le stagiaire. Pour l’instant, nous avons déjà reçu une quinzaine de personnes depuis notre ouverture le 1er septembre, mais les inscriptions vont bon train, avec le travail de nos différents partenaires. Nous avons aussi mené des actions dans les différentes communes de l’île pour présenter le projet, et peu à peu nous gagnons en confiance et en notoriété. J’insiste sur le fait que souvent, nos publics peuvent avoir le sentiment d’avoir été baladé de dispositifs en dispositifs, mais là, nous parlons vraiment d’une structure créée par des institutions reconnues, pour leur apporter des réponses concrètes et leur permettre de trouver un emploi durable et stable.

FI : Cette nouvelle structure s’inscrit dans le cadre du pacte ultramarin d’investissement dans les compétences, un contrat de 68,3 millions d’euros financés par l’État et le Département qui a pour but de lancer une nouvelle dynamique sur le territoire en matière d’orientation et de formation professionnelle, et de se rapprocher des publics les plus fragiles et les plus éloignés de l’emploi. Quel a été le budget octroyé à la PPRAP ? Pourquoi est-elle déterminante pour le territoire ?

S. O. : Tout ce que je peux vous dire, c’est que le premier appel à projet pour la PPRAP partait d’un budget à trois millions d’euros. Mais depuis, avec la crise sanitaire, et le nouvel appel à projets, les choses ont un peu évolué. Quoi qu’il en soit, une telle structure a sa place à Mayotte, et dans le cadre du PUIC. Comme je vous le disais, il y a déjà chez nos voisins beaucoup de structures qui peuvent accompagner les personnes en situation handicap, et ce, de zéro an jusqu’à leur fin de vie ! À Mayotte, le handicap est resté pendant longtemps un sujet tabou. Pour des raisons culturelles, il a fait l’objet d’un manque d’acceptation, voire d’une honte envers la société et le regard d’autrui. Aujourd’hui, le territoire se réveille, et il est plus que temps de se munir des solutions que les autres ont déjà en leur possession. C’est essentiel pour Mayotte car la plupart des personnes en situation de handicap sont aussi en situation de précarité… Souvent, ils ne savent pas où aller, qui voir, comment trouver un emploi. Ce dispositif vient leur donner les clés pour réussir.

FI : À Mayotte, une des difficultés réside dans le tissu économique, composé majoritairement de petites entreprises qui n’ont pas toujours les moyens matériels ou humains d’intégrer une personne handicapée. Côté entreprises, comment la PPRAP entend-elle répondre à cette réalité de terrain ?

S. O. : Nous avons souvent tendance à dire que les employeurs n’ont pas les moyens de recruter ou ne veulent pas. Mais en discutant avec eux, nous nous rendons compte qu’il s’agit bien davantage d’un manque de connaissances. Ils se disent que cela peut être une charge, qu’ils ne savent pas comment faire. Au niveau de la PPRAP, nous proposons un accompagnement assidu auprès des employeurs, par exemple en leur expliquant les aides auxquelles ils ont droit, en accompagnant le stagiaire dans l’entreprise, et en accompagnant aussi son tuteur au sein de sa structure d’accueil. C’est aussi le rôle du suivi de six mois que nous maintenons après l’intégration de la personne dans l’entreprise.

FI : Les entreprises ont une obligation d’emploi de travailleurs handicapés qui passe de 2% de l’effectif salarié à 6% en 2022. Pensez-vous que les entreprises mahoraises ont cette échéance en tête ?

S. O. : Nul n’est censé ignorer la loi ! Mais notre objectif est aussi de le rappeler aux entreprises et d’expliquer qu’il serait dommage de payer des amendes pour n’avoir pas recruté les bonnes personnes, alors que le public est là. Ils ont leur part de responsabilité, mais nous aussi. Notre rôle, c’est de leur apporter des salariés que nous aurons préparé en amont pour leur donner toutes les compétences, la formation, le savoir-être professionnel.

Dénutrition, un mal qui ronge les enfants à Mayotte

La semaine nationale de la dénutrition a débuté le 12 novembre et s’achèvera le 19 novembre. L’occasion de se pencher sur le dispositif “malnutrition infantile” mis en place à Mayotte par la Croix Rouge, le CHM, l’ARS, et la PMI. Depuis sa création il y a presque 3 ans, 500 familles ont été prises en charge. Malgré cela, la dénutrition des enfants reste un fléau à Mayotte.

Du haut de ses deux ans, Réhéma est une petite fille timide qui ne lâche pas sa mère d’une semelle. Sa silhouette frêle laisse deviner une santé fragile. Il y a encore quelques mois, Réhéma ne marchait pas. Trop fragile, trop mince, son corps n’avait pas assez de force car elle souffrait de dénutrition. La petite fille habite avec ses parents, et ses 7 frères et soeurs dans les hauteurs de Kaweni. Leur foyer est encerclé de toutes sortes de déchets, d’eau de pluie ou de puits stockée par n’importe quel moyen. “Je vous avais dit de jeter tout cela et de ne pas stocker de l’eau. C’est ce qui entraîne les maladies”, rappelle Riziki, référante à la Croix Rouge. Elle suit le cas de Réhéma depuis maintenant 6 mois. La petite a été envoyée d’urgence par la PMI qui a constaté un poids en deçà de la normale à son âge, suite à une diarrhée aigüe. Elle a immédiatement été intégrée dans le dispositif “malnutrition infantile” de la Croix Rouge qui existe à Mayotte depuis bientôt 3 ans.

Le programme consiste à prendre en charge des enfants âgés de 6 mois à 5 ans atteints d’une dénutrition aiguë par manque d’apport. Les 3 agents de la Croix Rouge chargés de cette mission doivent s’assurer de leur bien-être. Ils éduquent les parents aux bonnes pratiques d’hygiène et d’alimentation pour qu’à leur tour, ils puissent prendre soin de leur progéniture dans les meilleures conditions. “Certaines familles sont très réticentes, elles ne veulent pas que nous entrions dans leur intimité. Dans un premier temps, nous essayons de faire comprendre aux familles pourquoi leurs enfants perdent du poids afin qu’ils prennent conscience de la gravité de la situation”, explique Riziki. Le cas de Réhéma était assez grave. Sa mère, Anrafa, s’en souvient encore. “Nous n’avons pas d’eau courante à la maison alors je donnais à mon bébé de l’eau non potable sans la faire bouillir. C’est ce qui a déclenché la diarrhée. Elle ne mangeait plus rien, elle a même refusé mon sein.” Anrafa révèle qu’avant d’être prise en charge par la Croix Rouge, sa fille ne mangeait que deux fois par jour et son alimentation n’était pas très variée. La petite était donc en carence de certaines vitamines et nutriments essentiels à sa croissance.

Après 6 mois de suivi, Réhéma a retrouvé la forme, elle peut même marcher et courir. “Maintenant, j’ai compris l’importance d’une hygiène propre et d’une bonne alimentation pour l’enfant. Elle mange toujours la même chose que nous, mais c’est plus diversifié. Je lui donne aussi des produits laitiers et des fruits”, précise Anrafa. Tout cela a également été rendu possible grâce aux bons alimentaires donnés par la Croix Rouge à la famille.

Un travail qui dure sur le long terme

À Koungou, au milieu des bidonvilles, une famille a pu bénéficier du dispositif “malnutrition infantile” il y a deux ans. Dasmi 3 ans et Haïda 8 ans souffraient aussi de dénutrition lorsqu’elles ont été prises en charge par la Croix Rouge. “La plus petite ne mangeait pas du tout, je la voyais maigrir à vu d’oeil. C’est la PMI qui m’a fait comprendre qu’il fallait y remédier rapidement”, se rappelle Mamazelle, leur mère. Leur habitat insalubre a accéléré cette perte de poids qui a également touché Haïda, l’aînée d’une fratrie de 5 enfants. Les parents élèvent des poules et des chèvres dans la cour et les animaux se mélangeaient avec les enfants. À cela s’ajoute une maison en tôles qui n’est pas adaptée à des enfants. “Le sol était en terre et poussiéreux. Il y avait des réchauds remplis de pétrole dans la pièce où jouaient les gamins”, se souvient Riziki, la référante Croix Rouge. Aujourd’hui, le sol de la maison n’a pas changé, mais les réchauds ont été mis hors portée des enfants suite aux recommandations de Riziki. Et les deux petites filles ont bien grandi.

“Beaucoup nous avouent ne pas avoir les moyens d’acheter à manger à leurs enfants. Alors nous leur disons de privilégier les produits locaux qui sont très bons pour la santé et qui sont moins chers. Nous élaborons avec eux des paniers variés”, explique Riziki. Mamazelle applique les conseils qu’elle a reçus il y a des années avec son nouveau nourrisson, âgé de 3 mois. “Avant, j’ignorais tout, je ne savais pas comment m’occuper d’un enfant. Maintenant, grâce à ce programme j’ai appris plein de choses”, se réjouit la mère. Cette dernière s’est même improvisée conseillère auprès de son entourage. “Je leur donne des astuces pour que leurs enfants ne soient pas dans le même cas que les miens. Et je les envoie vers Riziki pour un suivi plus approfondi.” Réhéma, Dasmi et Haïda font partie de ceux qui ont eu la chance d’être pris en charge par la Croix Rouge. Mais combien continuent à souffrir de dénutrition en silence dans le 101ème département français ? Riziki et ses collègues le savent, ils ne pourront pas sauver tous les enfants de ce fléau.

Coupe régionale de France : Choc M’tsapéré/Pamandzi pour le huitième tour

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Après les incertitudes sur le maintien de la compétition, la Coupe régionale de France devrait bien aller à son terme. La finale, samedi prochain à Kavani, opposera le FC M’tsapéré, tenant du titre, au Pamandzi SC.

La Ligue mahoraise de football a trouvé une solution au problème de possibles clusters autour des rencontres de Coupe régionale de France. Jeudi dernier, au lendemain des quarts de finale qui a vu la foule s’amasser autour des terrains, la LMF a décidé d’organiser elle-même les derniers tours régionaux au stade de Kavani. Et ainsi, de décharger les clubs de la gestion du public pour favoriser le respect du huis clos : condition sine qua non à la poursuite de la compétition. Se jouaient donc, ce dimanche, les demi-finales entre le FC M’tsapéré et l’US Ouangani dans un premier temps, puis entre le Pamandzi Sporting Club et l’USC Poroani Antéou.

À 14h, M’tsapérois et Ouanganiens ouvraient le bal dans un stade départemental effectivement déserté. Une rencontre qui a permis à Mouhtar Madi Ali alias Johnny de s’illustrer une nouvelle fois. En première période, le capitaine du FCM et Sportif de l’année 2019 a converti un penalty provoqué par l’un de ses compères d’attaque, l’ailier Dailane Ali Nokowa, dit « Schneider ». Le seul but de la rencontre (1-0), qui qualifie les Diables Rouges pour une nouvelle finale de Coupe régionale de France ! Ils rencontreront le PSC, qui s’est imposé dans l’autre match de l’après-midi. Dominateurs une majeure partie de la rencontre, les Pamandziens ont cruellement manqué d’efficacité, trouvant notamment la barre transversale à deux reprises. Le temps réglementaire écoulé, il leur a fallu attendre les dernières secondes du temps additionnel pour exulter, sur un tir excentré de Karim Abdouroihim qui a trompé la vigilance du gardien poroanien (1-0).

Le PSC aime les gros

Le Pamandzi Sporting Club retrouve une finale de Coupe régionale de France pour la première fois depuis 17 ans ! Lui qui l’a gagné deux fois au début des années 2000 (2002, 2003). Pour fêter cette qualification historique, leàs Pamandziens se sont d’ailleurs précipités, ce dimanche soir, à l’embarcadère de Dzaoudzi pour offrir à leurs héros un accueil et un cortège de champions. Un exploit d’autant plus appréciable pour les Petits-Terriens qu’ils évoluent en troisième division et viennent d’éliminer  trois clubs de l’élite lors des quatre derniers tours(Combani en seizième de finale, Kawéni en huitième de finale, et donc Poroani en demi-finale).

C’est un autre pensionnaire de R1 qui se profile pour l’équipe de Raoui, Pelé et Aboul Dhoihir, mais pas n’importe lequel… Le FC M’tsapéré est ni plus ni moins que le tenant de la Coupe régionale de France. Face à Pamandzi, le champion de Mayotte disputera sa cinquième finale de CRF consécutive ! Vainqueur en 2001, 2004, 2010, 2012, 2016, 2018 et 2019, le FCM est le spécialiste mahorais de la compétition et le favori tout désigné cette année encore. Les deux clubs ont rendez-vous samedi prochain pour valider leur billet pour le huitième tour de la Coupe de France, prévu au mois de décembre en métropole. Comme les demies, la finale sera organisée par la LMF et diffusée en direct sur Mayotte La 1ère télé et radio, ceci pour permettre aux supporters et spectateurs de suivre la rencontre malgré le huis clos.

 Covid-19 : le trompe l’œil de la CRF

La Ligue mahoraise de football a pris la main sur l’organisation de la Coupe régionale de France, et solutionné le problème posé par la crise sanitaire ayant conduit à l’arrêté préfectoral réclamant le huis clos pour les manifestations sportives. Malgré la présence de spectateurs sur les murs du stade de Kavani ce dimanche, la LMF a globalement contrôlé le public, ou plutôt l’absence de public, lors des demi-finales de la CRF. Il devrait en être de même samedi prochain à l’occasion de la finale qui opposera le FC M’tsapéré au Pamandzi Sporting Club. Cela pourrait néanmoins ne pas suffire à satisfaire la requête de Jean-François Colombet, le préfet de Mayotte. Car ce week-end, hormis les deux matchs médiatisés de la Coupe régionale de France, s’est disputé les premiers tours de la Coupe de Mayotte masculine, de la Coupe de Mayotte féminine et de la Coupe de Mayotte entreprise. Soit une trentaine de rencontres et, avec elles, une gestion hypothétique du public de la part des clubs… De nombreuses rencontres de Coupes de Mayotte sont programmées ces prochaines semaines, sur les terrains de football inadaptés au huis clos de l’île. La nouvelle organisation proposée par la LMF pour la Coupe régionale de France a beau jouir d’une bonne visibilité médiatique, cela ne résout le fond du problème. La ligue trouvera-t-elle une nouvelle solution pour sortir de l’impasse ?

Tout comprendre au nouveau test antigénique arrivé à Mayotte

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Censé désengorger les laboratoires, les nouveaux kits pour dépister les cas de Covid-19 en moins de trente minutes ont fait leur entrée dans le 101ème département. Mais où, quand, comment et qui peut en bénéficier ?

Finies les 24 à 48 heures d’attente ! Avec les nouveaux tests antigéniques débarqués cette semaine sur le territoire, il sera désormais beaucoup plus rapide de savoir si une personne est positive ou non à la Covid-19 : seules 15 à 30 minutes sont nécessaires pour obtenir un résultat, peut-on lire sur le site de l’Assurance maladie. Un outil indispensable donc, pour faciliter le dépistage des cas alors que le 101ème département, pour l’instant épargné par les mesures de confinement, se prépare malgré tout à une deuxième vague. Ce jeudi, l’Agence régionale de santé recensait 277 nouveaux cas entre le 4 et 10 novembre, contre 174 deux semaines plus tôt.

Mais concrètement, comment fonctionne ce test ? Comme un test PCR classique, nous explique le docteur Maxime Jean, infectiologue du CHM détaché à l’ARS en charge du Covid. Le professionnel de santé réalise un prélèvement nasopharyngé en insérant un écouvillon dans la narine du patient, pour détecter la présence ou non des antigènes produits par le virus Sars-CoV-2. Mais à la différence du Polymerase Chain Reaction, qui, comme son nom l’indique, amplifie le génome jusqu’à déterminer la positivité du patient, le test antigénique se contente de donner un résultat à l’instant t. “C’est ce qu’on appelle des TRODS, des tests rapides d’orientation diagnostic, qui peuvent être réalisés sans aucun plateau technique, juste avec paire de mains et un petit kit”, décrit-il.

Isoler sans attendre

L’avantage ? Les cas positifs sont automatiquement détectés, ce qui permet de casser plus efficacement les chaînes de transmission. “Et d’éviter que le patient asymptomatique aille crachouiller le virus un peu partout pendant deux jours en attendant son résultat”, résume le docteur Jean. Si la personne testée se révèle positive, le professionnel de santé est en mesure de prescrire sans attendre l’isolement strict de sept jours, de délivrer éventuellement un arrêt de travail et aussi d’identifier d’ores et déjà les proches qui sont potentiellement des cas contacts. Non seulement, il peut en avertir directement la plateforme de contact tracing, mais il peut aussi exiger que ces personnes restent elles aussi confinées le temps d’être testées.

Maximum à J-4

Le hic, c’est que cette instantanéité suggère aussi un risque sur la fiabilité du dispositif. “Il n’est pas moins fiable s’il est utilisé correctement”, nuance toutefois le médecin. En effet, l’utilisation de ce nouveau gadget par des professionnels de santé autres que le CHM et le laboratoire privé est assortie de son lot de préconisations, formulées par la Haute autorité de santé dans son avis du 8 octobre 2020.

Des indications qui permettent aussi de mieux cerner le public visé. Ainsi, pour les cas symptomatiques, le professionnel de santé – votre médecin, infirmier libéral ou pharmacien – peut réaliser le test jusqu’à quatre jours inclus après apparition des symptômes. Pour les personnes de plus de 65 ans et présentant le risque de développer une forme grave ou sévère, le PCR restera de mise. D’une manière générale, un médecin en présence des symptômes pourra réaliser le test pour confirmer ou infirmer son diagnostic.

Pour les clusters identifiés, le PCR reste de mise

Concernant les cas asymptomatiques, sont pour l’instant exclus de ce nouveau mode de dépistage les clusters et les cas contacts. Le test antigénique servira davantage à réaliser des campagnes à grande échelle au sein de populations ciblées, comme à l’université, ou auprès des personnels des hébergements collectifs. “Nous avons par exemple déjà eu recours à ce dispositif à Ouangani, à Barakani. Il s’agit d’opérations de grande envergure dans une zone, lorsque nous avons un doute sur un risque de propagation”, précise l’infectiologue. Quid des voyageurs ? Ceux à destination des îles voisines devront encore prendre leur mal en patience. “À l’avenir, je pense qu’un test antigénique sera suffisant pour voyager de France à France, mais au niveau international, cela dépendra de l’acceptation de l’autorité du pays de destination, ce qui n’est pas le cas en ce qui nous concerne, pour les Comores ou Madagascar.” Les voyages vers la Grande Île, déjà limités à la seule Nosy Bé, dépendent toujours de la présentation d’un test PCR négatif.

Mais peut-on déjà se ruer à la pharmacie du coin ? Pas tout de suite ! Certes, les tests, gratuits, sont bien arrivés sur le territoire, mais il faut encore attendre quelques jours avant que tous les professionnels de santé volontaires en soient pourvus. “Toutes les pharmacies ne voudront d’ailleurs pas forcément le pratiquer, car il faut quand même mettre une salle à disposition. Le mieux à l’heure actuelle reste d’appeler au préalable son médecin traitant, son infirmier ou son pharmacien”, déroule encore le spécialiste. Un nouveau centre dédié au coronavirus devrait aussi bientôt ouvrir ses portes à Kawéni, qui proposera les deux tests nasopharyngés. Mais, “pour l’instant, ce n’est pas pour les curieux !”

 

 

Après les Assises de la sécurité, un nouveau degré de violence en Petite-Terre

Le soir-même de la clôture des Assises de la sécurité et de la citoyenneté, une vingtaine de jeunes armés ont caillassé le restaurant Star Pizza en Petite-Terre, avec des cailloux et des cocktails Molotov. Une scène d’horreur qui aurait pu finir en drame si les employés ne s’étaient pas interposés pour faire fuir la bande. Ce nouveau fait divers fait encore une fois bondir l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie de Mayotte qui appelle le préfet à l’ordre républicain. 

Mardi, 20h20. Une armada d’une vingtaine d’individus se présente devant le restaurant Star Pizza, armés jusqu’aux dents et prêts à en découdre. « Ils nous ont pillonés de gros cailloux et ont voulu rentrer dans l’établissement », se remémore Frank Ibanez, le propriétaire. Avec l’un de ses deux employés, présents sur place sur ce soir-là, les deux hommes rendent coup pour coup pour les dissuader de pénétrer à l’intérieur. Visiblement vexée et agacée par cette résistance pour le moins inhabituelle, la bande décide de sortir l’artillerie lourde en envoyant deux cocktails Molotov, dont l’un d’eux explose devant le comptoir et déclenche un feu… Un acte qui aurait pu se terminer en véritable bain de sang si le personnel, imbibé d’essence, n’avait pas immédiatement circonscrit le début d’incendie. « Au moment des fait, nous avions plusieurs clients. Certains ont fui tandis que d’autres ont cru bon de se réfugier dans le local. Une femme a été blessée dans le dos par le jet d’une pierre », déroule le restaurateur, qui adresse son soutien à ses confrères du Mékong et du brochetti malgache qui auraient subi de nombreux dégâts matériels quelques minutes plus tard.

« Des acteurs du grand banditisme »

Cette brutalité sans nom, Frank Ibanez la côtoie régulièrement depuis des années, mais il n’en avait jamais fait l’objet personnellement depuis son installation en 2013. « Nous ne parlons pas d’une simple agression pour dérober la caisse », poursuit-il. « Il s’agit ni plus ni moins d’une tentative d’homicide. Ces jeunes, la plupart des mineurs, se comportent comme des acteurs du grand banditisme. Ils préparent des armes, donc il y a préméditation. » Et à ses yeux, le problème ne vient pas de l’incapacité d’intervention des forces de l’ordre, « qui font leur travail sur le terrain », mais bien de la réponse judiciaire, « qui est complètement inadaptée » pour un territoire comme le 101ème département. « Il n’existe aucune infrastructure pour les multirécidivistes et ceux qui sont en situation irrégulière. Nous n’avons pas de dispositif pour les écarter alors que nous savons où ils vivent sur Petite-Terre. »

Un ras-le-bol général appuyé par le président de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie de Mayotte, Charles-Henri Mandallaz, qui s’est empressé d’envoyer un courrier au préfet, Jean-François Colombet, pour partager son désarroi. « Nous franchissons encore un cap de violence et nous sommes tout simplement dans la folie furieuse. Nous n’avons plus de répit sur cette île. N’importe où et n’importe quand, la criminalité peut frapper », relate-t-il en introduction. Avant de rappeler la temporalité : « Ces événements prennent une résonance particulière alors que viennent de se terminer les Assises de la sécurité. » Un rendez-vous sur deux jours durant lequel les institutions et la société civile ont échangé sur plusieurs thématiques, dans l’espoir de trouver des solutions pérennes à cette délinquance qui gangrène l’île aux parfums.

« Tout perdre sur un claquement de doigts »

L’UMIH976 se demande alors si l’ordre républicain, « l’un des piliers de notre République », peut être encore rétabli et surtout si les moyens sont en adéquation avec l’environnement qui sévit sur le territoire. « Nous sommes des entrepreneurs, des bâtisseurs, des gens courageux, investis pour la construction de cette île. Des personnes qui ont leur vie et leur patrimoine ici, qui peuvent tout perdre sur un claquement de doigts. L’inquiétude est donc inéluctable, mais elle ne peut ni ne doit devenir notre quotidien. » Complétement déboussolé, Charles-Henri Mandallaz en appelle au bon sens du délégué du gouvernement et l’implore de remonter les difficultés locales à Paris. « Nous ne pouvons plus accepter de continuer à descendre vers cette ultra violence qui nous touche aujourd’hui. Nous avons besoin de pacifier ce territoire en urgence. Il en va de son avenir, de notre avenir. […] Rien ne peut se contruire sur le terreau de la violence. Mayotte doit être apaisée, pour nos familles, pour notre économie. Notre énergie, notre cœur à l’ouvrage sont déjà fortement entamés par une année plus que catastrophique. L’insécurité, en plus du reste, pourrait être le coup de grâce pour certains d’entre nous. »

Une vérité qui fait froid dans le dos… Pourtant, Frank Ibanez s’est vite remis en ordre de marche et a décidé de rouvrir son restaurant dès le lendemain. « Il n’y a pas de psychose, mais il y a un sentiment d’impunité », résume-t-il. Avant d’adresser un message à l’ensemble des commerçants de Mayotte. « Ces voyous ont l’habitude de faire peur. Mais dans la plupart des cas, quand ils font face à de la résistance, ils font demi-tour. Il faut juste veiller à rester dans le cadre de la légitime défense. » Tout le monde est prévenu.

 

 

La continuité pédagogique, un mirage pour les enseignants mahorais

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Le laboratoire Icare de l’université de La Réunion s’est penché sur le sort des enseignants du premier et second degré à Mayotte pendant le premier confinement. Une étude publiée récemment a révélé les impressions et opinions des professeurs lors de cette période. Le suivi pédagogique n’a pas été aussi efficace qu’il devait l’être.

Continuité pédagogique. C’était le mot d’ordre pendant le confinement qui a obligé les élèves et les professeurs à travailler depuis leur domicile. Depuis, les cours en présentiel ont repris, mais les professeurs ont comme un goût amer lorsqu’on leur parle de cette période. C’est dans ce contexte qu’est sorti un rapport d’enquête sur les enseignants mahorais, élaboré par des chercheurs du CUFR de Mayotte. 219 professeurs ont été interrogés sur leur ressenti et méthode de travail. “L’objectif était d’appréhender leur vécu d’enseignant en période de confinement et la manière dont ils avaient adapté leur enseignement à distance pour assurer la continuité pédagogique”, peut-on lire dans ce rapport. Cette continuité avait été rendue possible selon l’Éducation nationale à travers des outils numériques tels que l’ENT, Pronote, ou la plateforme “ma classe à la maison”.  Mais selon l’enquête, les enseignants ont plus privilégiés leur messagerie électronique. 89% des sondés l’utilisaient au moins une fois par jour. “Il y a eu des essais, mais il y avait des outils sous dimensionnés et qui ne fonctionnaient plus. Je pense notamment à l’ENT au début. Par conséquent, je communiquais avec mes élèves par e-mail. Ils étaient plus réceptifs”, confirme Guillaume, professeur au lycée. 

Si Guillaume a eu la chance de n’avoir affaire qu’à des élèves de terminale qui sont assez connectés, cela n’a pas été le cas des enseignants du premier degré. “Toutes les options technologiques, dont on nous parlait, n’étaient pas accessibles pour les parents d’élèves. Sur mes 12 élèves, seulement une famille avait un ordinateur. C’était frustrant de ne rien pouvoir faire, car on nous avait interdit les devoirs en papier”, raconte Staniza, enseignante à l’école primaire. Certains établissements scolaires ont cependant opté pour les devoirs imprimés, mais là encore, il a été difficile pour les professeurs de suivre leurs élèves. “Dans mon établissement, on devait fournir des livrets chaque semaine aux enfants avec les exercices et les corrigés. Mais le système était mal rodé, car nous n’avions pas de retour de la part des élèves ou de leurs parents”, indique Farah*, professeur au collège. 

Le plus gros problème s’est posé pour les élèves en maternelle, qui apprennent les bases et qui ont besoin d’un suivi pédagogique de tous les instants. “En maternelle, on travaille beaucoup la pratique. Et soudainement, les élèves se sont trouvés dans une situation où il n’y avait que de l’abstrait, alors qu’ils sont besoin de concret”, regrette Moustoifa*, enseignant en maternelle. Tous remettent en doute l’efficacité des outils numériques à Mayotte qui n’ont pas favorisé la continuité pédagogique tant souhaitée par l’Éducation nationale. “La continuité pédagogiques n’a pas été assurée. On a fait notre travail en tant que professeur, mais il ne faut pas se leurrer, une grande partie des élèves n’a pas réussi à suivre les cours à distance”, déplore Farah. Même son de cloche pour les enseignants du premier degré. “Pour ma part, au bout de 3 semaines, la continuité pédagogique était inexistante. On n’avait pas les moyens face à un public comme le nôtre”, affirme Staniza.

Des professeurs livrés leur sort

L’enquête du laboratoire Icare indique que 34,7% des professeurs questionnés étaient désorientés, mais 35,2% se sentaient plutôt en sécurité. Le premier chiffre reflète la réalité sur le terrain. “Je me suis senti très seul parce qu’on nous demande de faire quelque chose qui est assez flou et on n’a pas d’informations, pas de retour”, déplore Guillaume. Selon les témoignages, les chefs d’établissement étaient livrés à eux-mêmes et devaient bricoler avec le peu d’informations qu’ils avaient. “La communication entre l’administration du collège et les professeurs était efficace. Je pense que notre principal a fait du mieux qu’il pouvait avec le peu qu’il avait. On n’avait pas réellement de directives de la part du rectorat”, dénonce Farah. Et à Moustoifa d’ajouter : “Le dispositif de mon école a été élaboré par notre directeur. On s’est débrouillés seuls et même avec nos efforts, le niveau des élèves a baissé.” 

Les enseignants redoutent un second confinement à Mayotte et le retour des cours à distance. “Cela creuse les inégalités entre les élèves. Le premier confinement a été un suicide intellectuel pour les enfants, il ne faudrait pas recommencer”, selon Moustoifa. Il faudrait plutôt adapter les outils proposés par l’Éducation nationale à la réalité du territoire. Les professeurs se disent prêts à s’investir davantage et à changer de méthode de travail pour la réussite de leurs élèves. Désormais, ils essayent tous de rattraper le retard accumulé par les enfants.

  • Le prénom a été changé

 

Assises de la sécurité à Mayotte : les habitants motivés à faire entendre leurs voix

La MJC de M’gombani accueillait une quarantaine de personnes mardi dernier à l’occasion des Assises de la sécurité et de la citoyenneté de Mayotte. L’atelier 5 dédié à la participation citoyenne et médiation a suscité beaucoup d’intérêt. Les participants ont proposé des solutions afin que la société mahoraise retrouve sa sérénité.

C’est dans une ambiance studieuse que s’est déroulé l’atelier sur la participation citoyenne et médiation des Assises de la sécurité. Chaque participant a voulu présenter son idée dans l’espoir qu’elle soit entendue jusqu’au plus haut sommet de l’État. Un groupe de mères a particulièrement attiré l’attention. Elles ont soulevé un point que personne n’ignore à Mayotte mais qui est encore tabou. “Les enfants sont déboussolés parce qu’ils n’ont pas de repères familiaux. Ils sont abandonnés par leurs pères et leurs mères ne disent rien parce qu’elles reçoivent un carton de mabawa et un sac de riz”, dénonce Djazmati. Selon ces femmes, il est temps de pousser les pères à participer activement à l’éducation de leurs progénitures. “Ceux qui refusent de s’impliquer davantage devraient se soumettre à un test ADN. S’il est positif, alors la loi les obligerait à être présent dans la vie de leurs enfants.” Une solution applaudie par toute l’assemblée.

D’autres ont regretté l’organisation villageoise d’antan et veulent que les aînés soient les garants du bon fonctionnement des quartiers et villages. Les participants ont donc proposé la création d’un “comité de sages dans les quartiers”. Son objectif serait d’assurer la sérénité et le respect de tous par tous. Dans le même sens, la place de la religion a également été soulevée. “On nous inculquait des principes et des valeurs dans les écoles coraniques. Malheureusement aujourd’hui, elles perdent leur place au sein de notre société”, affirme Mouhoutar Salim, l’animateur de l’atelier. C’est donc naturellement que les participants ont souhaité que les madrassas soient plus valorisés afin “d’éduquer les enfants au respect et à la citoyenneté”. D’autres idées ont émergé lors de cet atelier pour que ce climat d’insécurité ne soit qu’un mauvais souvenir. Les habitants aimeraient que la police soit plus présente dans les villages en dehors de Mamoudzou. L’idée de créer des postes de polices annexes dans les autres communes a fortement été appréciée par les participants.

“Ça doit marcher, nous ne pouvons pas échouer”

Tous ceux qui ont participé à l’événement disent être conscients de la gravité de la situation à Mayotte. Ils sont persuadés que les Assises de la sécurité feront évoluer les choses. “J’ai espoir en cet atelier et en ces Assises. On prie pour que ça marche, ça doit marcher, nous ne pouvons pas échouer”, déclare Djazmati. Même s’ils y croient, ils savent que l’initiative du maire de Mamoudzou, Ambdilwahedou Soumaïla, ne fait pas l’unanimité. “Les gens qui sont là aujourd’hui sont vraiment motivés à faire changer les choses. Mais malheureusement dans mon entourage je suis la seule. Ma famille pense qu’on ne fait que parler depuis longtemps, mais il n’y a rien qui change”, raconte Fatima Saïdi, une étudiante.

Certaines personnalités de la vie publique, de la police et du monde économique ont également répondu à l’appel et sont venus proposer leurs idées. Marcel Rinaldy, à la tête du groupe 3M, a tenu à apporter sa contribution car “le monde économique subit une part des problèmes à Mayotte”. « Mais on a aussi une part des solutions, parce que c’est en développant l’aspect économique que le département va se développer”, selon lui. L’atelier sur la participation citoyenne et la médiation a duré deux heures, mais certains en sont ressortis frustrés. Les sujets abordés étaient si importants qu’ils auraient aimé bénéficier d’un peu plus de temps pour développer toutes leurs idées.

Bilan de deux jours d’Assises “réussies”, salue le préfet

Faire en sorte que “notre jeunesse reste notre richesse”. C’est par ces mots que le préfet Jean-François Colombet a clôturé les deux jours des Assises de la sécurité et de la citoyenneté qui se sont tenus lundi et mardi. En tout, ces deux journées auront mobilisé près de 2000 personnes à Mayotte, tant sur la participation à l’enquête en ligne que lors des ateliers. Le délégué du gouvernement a salué les “choses extrêmement intéressantes qui ont été entendues” pour cette première édition et dont il a transmis le rapport aux ministères de l’Intérieur, des Outre-mer et à l’Élysée. Avant sa prise de parole ce mardi après-midi, de nombreuses propositions ont été présentées par les rapporteurs des six ateliers, sur l’éducation et la prévention, sur la répression et l’exécution de sanctions, sur la maîtrise des frontières et la lutte contre l’immigration illégale, sur la responsabilité parentale, sur la participation citoyenne et la médiation, et enfin sur la lutte contre la pauvreté et l’insertion sociale. “Il manque une thématique, c’est la dimension de la santé”, a relevé le préfet, en appelant à ce que cette catégorie figure au programme des prochaines Assises en 2021. D’ici là, Jean-François Colombet a proposé d’ores-et-déjà de planifier une réunion avec les institutions et élus présents – Département, association des maires, mairie de Mamoudzou, préfecture – à la fin du mois d’avril, après les élections du nouveau conseil départemental, pour “que nous puissions regarder parmi les propositions énoncées celles qui ont pu avancer, celles qui n’ont pas avancé du tout et celles qu’il faut abandonner”. Au fil de son intervention, le locataire de la Case Rocher a toutefois souhaité remettre les points sur les “i” dès maintenant au sujet de certains propos qui avaient pu être tenus au cours de ces Assises. Il a ainsi rappelé quelques chiffres sur l’action de l’État en matière de lutte contre l’immigraiton clandestine, comme le taux d’interception des kwassas, passé de moins de 40% en 2019 à 70% fin juin 2020. “Faut-il que je vous emmène à trois heures du matin sur les intercepteurs de mes camarades gendarmes ou policiers, à 40 noeuds sur les récifs, mettre leur vie en danger, pour vous montrer où est la volonté de l’État ?”, a-t-il clamé haut et fort pour défendre l’engagement du gouvernement. Et de préciser également les actions menées en matière de lutte contre l’habitat insalubre, et sur le refus de délivrer des titres de séjour pour ceux qui enfreindraient la loi. D’ici quelques semaines, une centaine de bangas doivent d’ailleurs être détruits dans la commune de Kahani, soit le délogement d’environ 400 personnes.

 

 

Anlia Charifa : une miss Mayotte déterminée en route pour la couronne

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Cette passionnée d’audiovisuel et fervente avocate de l’île aux parfums est prête à tout pour décrocher le podium lors de la finale nationale, qui se tiendra le 12 décembre prochain. Portrait d’une femme mahoraise pleine d’ambition.

C’est un moment qu’Anlia Charifa ne risque pas d’oublier. Ce samedi, la candidate au concours Miss France était choisie pour représenter Mayotte à la finale nationale, le 12 décembre prochain, au Puy du Fou. Mais alors que cette cérémonie particulière se déroulait à huis clos, crise sanitaire oblige, une image reste particulièrement gravée dans sa mémoire : les yeux de sa belle-mère, seule proche autorisée dans l’audience pour la soutenir en ce jour si spécial. “Voir la fierté dans le regard de celle qui m’a accompagnée depuis le début de mon aventure, et qui a toujours cru en moi, m’a vraiment émue”, revit-elle aujourd’hui, passée l’ivresse des premiers instants. Deux autres pensées vont alors simultanément traverser l’esprit de la jeune femme, pour son père mahorais décédé deux ans plus tôt, “qui me voit de là haut”, et pour sa mère malgache restée bloquée sur la Grande Île à cause des restrictions sanitaires, mais qu’elle savait branchée sur son poste télévision.

Ces origines et cette histoire familiale, Anlia a su en faire une force. Celle-là même qui l’a amenée à concourir avec succès ce samedi et qui lui permet aujourd’hui de représenter les couleurs de Mayotte jusqu’en métropole. “Je suis issue de deux cultures différentes, c’est un métissage que j’assume totalement et que je veux porter au plus haut. Concourir pour Miss Mayotte, c’était aussi une façon de représenter cette diversité qui fait toute la richesse de notre île”, martèle celle qui est née à Madagascar mais revendique son attachement au département, et plus particulièrement à Labattoir, où elle vit aujourd’hui avec sa famille. “Mes frères et ma petite sœur ont cru en mes capacités, ils m’ont poussé à réaliser ce rêve et à devenir une meilleure version de moi-même”, sourit-elle.

“La page de Miss n’était pas tournée”

Un vrai challenge pour la candidate qui avait fini première dauphine en 2019. “L’année dernière, je n’étais pas allée au bout de mes capacités, mais je suis du genre persévérante : je savais que la page de Miss n’était pas tournée”, se souvient-elle. Alors Anlia Charifa a mis les bouchées doubles pour réaliser son rêve. En année de césure, elle a profité de son temps libre pour faire un travail sur soi, pour gagner en confiance grâce au développement personnel. Et aussi pour se documenter sur des femmes inspirantes en épluchant les livres d’une Amy Cuddy ou encore de Michèle Obama. Pour couronner le tout, l’étudiante passée par un master en marketing digital, a aussi livré la bataille sur les réseaux sociaux. Campagne en ligne, vidéo sur la femme mahoraise, la miss est désormais une influenceuse assidue qui compte plus de 5.000 abonnés sur son compte Instagram.

Inspirer la jeunesse

Passionnée en audiovisuel, Anlia Charifa entend bien se spécialiser dans le domaine pour la suite de ses études, et espère pouvoir revenir dans quelques années sur son île pour aider des entreprises locales à promouvoir leurs produits. “J’ai un esprit créatif, j’aime mettre en avant les belles choses et créer des histoires autour des marques”, souligne-t-elle. D’ici là, la nouvelle Miss Mayotte aura déjà à cœur de porter la voix des Mahorais jusqu’en métropole, pour le concours national qui se tiendra dans un peu plus d’un mois. “C’est le seul concours où nous sommes représentés au niveau national, et j’ai conscience de l’importance de mettre en valeur notre île. Surtout aujourd’hui, avec tout ce qu’il se passe, je veux pouvoir inspirer la jeunesse”, relève-t-elle avec humilité. Sa première disciple ? Assurément sa petite sœur, qui regarde avec une fierté teintée d’envie le parcours de son aînée. “Je pense qu’en 2029, vous aurez une nouvelle miss qui prendra la relève !”, glisse-t-elle, avec un clin d’œil.

Coupe régionale de France à Mayotte : une compétition passionnante mais menacée

Le Pamandzi Sporting Club, après leur qualification en huitième de finale contre Kawéni.

Les affiches du dernier carré de la Coupe régionale de France sont connues : le FC M’tsapéré, tenant du titre jouera Ouangani, tandis que les deux outsiders Poroani et Pamandzi se disputeront l’autre ticket pour la finale. Mais la préfecture de Mayotte menace de stopper la compétition si les clubs ne parviennent pas à faire respecter le huis clos…

Un ogre, deux challengers et un petit poucet : tel que l’on peut résumer le tableau des demi-finales de la Coupe régionale de France. Champion de Mayotte en titre, tenant de la CRF et archi-favori à sa propre succession, le FC M’tsapéré a étrillé ce mercredi après-midi la Racine du Nord d’Acoua (7-1). Les Diables Rouges feront face à l’US Ouangani, club de Régional 4 (quatrième et dernière division mahoraise) : ils tenteront d’accrocher leur cinquième finale en cinq ans ! L’autre demi-finale opposera le Pamandzi Sporting Club (R3) à l’USC Poroani Antéou (R1). Le premier, vainqueur à M’tsahara hier (2-0), sort d’un titre de champion R4 et d’une promotion en R3. Les Poroaniens, qui eux, sont allés battre l’USC Labattoir après les prolongations (3-1), ont enchaîné les montées en championnat et su conserver leur place dans l’élite pour la première saison en R1 de l’histoire du club, en 2019. Ces deux clubs surfent donc sur une bonne dynamique et voudront bonifier leurs dernières belles prestations en atteignant la finale de la CRF.

Problème : la Coupe régionale de France 2020 pourrait ne pas aller à son terme et Mayotte pourrait finalement ne pas être représentée au huitième tour de la Coupe de France, en décembre en métropole… Pour comprendre, il faut remonter à plus d’un mois en arrière. Le 30 septembre dernier, trois jours après la levée de l’état d’urgence sanitaire sur l’île, la Jeunesse et sport État et l’ARS Mayotte recevaient les dirigeants de ligues et comités sportifs mahorais au lycée des Lumières à Kawéni, et leur informaient des conditions de reprise des activités. Les autorités sportives et sanitaires prévenaient ces derniers qu’en cas de reprise, leurs clubs devraient notamment assumer la gestion du public. « En ce qui concerne le football, c’est impossible ! », répliquait alors Ahamada Ibrahima, secrétaire général des Diables Noirs de Combani. « Ce n’est pas connaître le football mahorais de prétendre que les clubs peuvent assumer cette responsabilité. » Pourtant, les compétitions de football ont bien repris et les craintes du dirigeant combanien se sont avérées. La configuration des terrains de football – à quelques exceptions près – rendant la tâche insurmontable, le public est bien au rendez-vous à chacun des matchs organisés par la Ligue mahoraise de football, contrairement aux instructions de la préfecture et au grand dam des clubs.

Huit clos : Quelle issue pour l’impossible requête préfectorale ?

Celle-ci, dans une lettre adressée à la LMF ce mardi, s’agace : « Des procès-verbaux font état d’un total non-respect des règles sanitaires établies par le préfet par arrêté préfectoral du 30 octobre 2020, qui dispose que « la présence du public est interdite lors des compétitions et événements sportifs ». Il n’est pas acceptable que ce type d’écart puisse se produire au regard de la crise sanitaire que nous traversons. » Sur un ton critique, le directeur de la DJSCS poursuit. « Aussi, je vous enjoins à faire respecter et surtout à contrôler avec la plus grande rigueur les mesures sanitaires (…) Dans le cas contraire, le préfet sera dans l’obligation d’interdire purement et simplement les compétitions sportives pour éviter que de nouveaux clusters ne se créent aux abords des sites de compétition. » Des mots visiblement restés lettre morte puisque ce mercredi, les spectateurs étaient aussi nombreux autour des quarts de finale de la compétition.

Les demi-finales programmées ce dimanche arrivent à grands pas et le public devrait, une fois de plus, se présenter en masse autour des terrains ! Les clubs tenteront tant bien que mal de faire respecter le huis clos, à l’instar du Pamandzi Sporting Club, cité en mauvais élève par la préfecture. « De notre côté nous ferons le travail, comme nous l’avions fait contre Kawéni, en bloquant les principales issues et en disposant des bénévoles autour de la surface de jeu. Mais malgré nos bénévoles, malgré la présence de la police municipale, les spectateurs sautent les murs par dizaine et tout autour du stade… Nous sommes de toutes petites associations : nous ne pouvons pas garantir à 100% un huis clos avec les terrains et les moyens que nous avons », déplore l’entraineur du PSC, Mohamed Mahafidhou. À deux tours de la grande aventure Coupe de France pour les Mahorais, mais au regard de la situation incontrôlable de la gestion du public autour des terrains de football mahorais, toute la question est de savoir si la préfecture de Mayotte mettra ses menaces à exécution.

Le parcours des quatre demi-finalistes

2ème tour

ASJ Handréma-US Ouangani : 2-3

USC Kangani-Pamandzi SC : 0-4

3ème tour

ASCJ M’liha-FC M’tsapéré : 0-0 (0-1 après prolongations)

16ème de finale

FC M’tsapéré-UCS Sada : 1-1 (2-1 ap)

USC Poroani Antéou-AS Jumeaux M’zouasia : 1-1 (4-3 aux tirs aux buts)

Pamandzi SC-Diables Noirs Combani : 1-1 (5-2 ap)

US Ouangani-US Kavani : 2-0

8ème de finale

Olympique Miréréni-FC M’tsapéré : 1-2

Ndrema Club-USC Poroani Antéou :  1-1 (3-4 aux tab)

US Ouangani-Tchanga SC : 2-0

Pamandzi SC-ASC Kawéni : 0-0 (5-4 aux tab)

Quarts de finale

FC Dembéni-US Ouangani :

USC Labattoir-USC Poroani Antéou : 0-0 (1-3 ap)

AJ M’tsahara-Pamandzi SC : 0-2

Racine du Nord Acoua-FC M’tsapéré : 1-7

Demi-finales

US Ouangani-FC M’tsapéré

Pamandzi SC-USC Poroani Antéou

« Tant que les consignes de sécurité ne seront pas respectées à la lettre, nous demandons la fermeture du CRA de Mayotte »

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Arrivé à Mayotte en septembre dernier pour officier au centre de rétention administrative, Frédéric Dufourt, délégué départemental à la Vigi Ministère de l’Intérieur, revient pour Flash Infos sur les dysfonctionnements en termes de prise en charge des personnes en situation irrégulière dans le cadre du Covid-19 mais aussi de sécurité publique. Le fonctionnaire compte saisir les instances compétentes d’ici une quinzaine de jours pour alerter publiquement. Entretien.

 Flash Infos : En juillet dernier, l’ancien sous-préfet en charge de la lutte contre l’immigration clandestine, Julien Kerdoncuf, assurait dans nos colonnes que des protections sanitaires maximales avaient été mises en place au sein du centre de rétention administrative. Pour quelles raisons, avez-vous souhaité réagir à ces déclarations ?

 Frédéric Dufourt : Dans cet entretien, Julien Kerdoncuf ne voit pas en quoi il serait pire d’être intégré au CRA que de faire 12 heures en kwassa… Où se situe la dignité humaine dans ces propos ? Depuis ma prise de fonction en septembre dernier, j’ai pu constater comment cela se passait ! Ce qu’il déclare est totalement faux et à la limite de la désinformation. Ce n’est qu’un tissu de mensonges. Par exemple, il ne respecte pas les fonctionnaires de police en disant qu’il y a plus de risques de contracter le virus en faisant ses courses qu’en allant travailler.

 La réalité du terrain est toute autre : l’ensemble de mes collègues ne porte pas de masques. Idem pour les personnes en situation irrégulière qui débarquent dans nos locaux. Ils sont installés sur un banc sans aucune distanciation physique, faute de places, et sont palpés par nos soins. Ils passent ensuite seulement un test Covid. Comme les résultats ne sont pas instantanés, ils sont envoyés par trentaine dans la même zone d’intégration, avant d’être éventuellement isolés en cas de positivité. Dois-je rappeler qu’il y a un risque sanitaire majeur qui peut engendrer la mort ? Si demain, le virus prend de l’ampleur, cela va être une catastrophe ! Tant que les consignes de sécurité ne seront pas respectées à la lettre, nous demandons purement et simplement la fermeture du CRA.

 FI : Dans un courrier que vous allez adresser à la direction territoriale de la police nationale, à la préfecture ou encore au ministre de l’Intérieur, vous évoquez également la gestion de la violence et de l’insécurité sur Mayotte liées à une immigration clandestine non jugulée et l’application de la réglementation concernant les étrangers en situation irrégulière.

 F. D. : Nous nous rendons compte que les règles du gouvernement en termes d’intégration diffèrent dans le 101ème département. Notre syndicat défend aussi bien l’intérêt physique des fonctionnaires que les droits des personnes en situation irrégulière. En l’occurrence, ce n’est pas le cas. Le territoire les laisse se contaminer les uns les autres et les prive de leur liberté fondamentale, c’est un crime !

 L’insécurité est devenue exponentielle et insupportable. Pour les collègues qui ont une conscience professionnelle, c’est inacceptable ! Malheureusement, la majorité d’entre eux deviennent fatalistes de peur de la pression hiérarchique. Tous les jours, c’est de pire en pire. Nous voyons des groupes armés jusqu’aux dents et des habitants se faire agresser en pleine rue. La preuve encore dans la nuit de mardi à mercredi en Petite-Terre où plus d’une centaine de jeunes ont pillé et violenté la population. En 10 ans de poste dans le 93, je n’ai jamais vu cela. C’est inadmissible. La lutte contre l’immigration clandestine ne doit pas se substituer à la sécurité publique.

 FI : Que préconisez-vous pour que les lignes bougent enfin à Mayotte et que l’ordre soit rétabli ?

 F. D. : Il faut poser sur la table la possibilité d’envoyer en mission les compagnies républicaines de sécurité (CRS). Je pense qu’elles seraient nécessaires car ceux qui font office de forces mobiles, c’est-à-dire les gendarmes, sont inexistants. Non seulement, elles pourraient rassurer la population, mais en plus elles pourraient éviter les regroupements de jeunes armés. Après, une question se pose : la violence à Mayotte est-elle attisée ou non ? Ce n’est ni plus ni moins qu’une volonté politique !

 Nous souhaitons également que les militaires en formation puissent patrouiller dans le but de dissuader. Il faut envoyer nos forces de l’ordre dans les quartiers sensibles pour nous faire voir. Et ne pas attendre de les déployer sur des points stratégiques, où personne ne les voit en temps normal, pour les visites de ministres… Quand ils viennent, c’est de la poudre aux yeux ! La sérénité et le développement de Mayotte passeront par la reconquête du territoire. Il nous faut une présence constante avec du personnel qualifié. Ici, tout est fait à l’envers : les hommes de terrain sont mis au placard et ceux dans les bureaux sont envoyés au casse-pipe. Les effectifs sont mal organisés dans le seul but de répondre à une politique du chiffre. Avec mon permis bateau en poche, je pensais intégrer la brigade nautique de la police aux frontières. Et finalement, je me retrouve au CRA… En tant qu’ancien CRS, de la BAC, et de la police judiciaire, je n’ai rien à faire ici ! Mon seul objectif est de pouvoir faire bouger les lignes avant mon départ d’ici quatre ans.

Les urgences de Mayotte se préparent à encaisser des vagues avec des effectifs limités

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Alors que la situation sanitaire se dégrade drastiquement en métropole, le centre hospitalier de Mayotte subit des poussées de cas de Covid-19. Des augmentations ponctuelles qui poussent les urgences et la réanimation à réagir très rapidement sur une période courte… avec des effectifs sensiblement restreints. 

Aux urgences, la situation anxiogène d’il y a encore quelques mois semble être un lointain souvenir. Les bâches de la filière respiratoire installées à l’entrée laissent désormais la place libre aux pompiers et aux ambulanciers qui ont repris leurs bonnes vieilles habitudes. De quoi laisser présager un avenir plus radieux qu’en Hexagone, où la situation sanitaire se dégrade au fil des jours ? Pas vraiment, puisqu’en interne, des réunions de crise se tiennent chaque semaine dans l’enceinte du centre hospitalier de Mayotte pour dresser un état des lieux de l’épidémie (l’agence régionale de santé comptabilise 291 nouveaux cas sur la semaine du 1er au 7 novembre pour 13 hospitalisations, dont 2 réanimations) et finaliser le plan rebond dans le but de répondre à une montée en puissance le moment venu. Aujourd’hui, sur les 182 dossiers traités quotidiennement par le SAMU, entre 5 et 8 concernent le Covid-19.

Et face à cette éventualité, ou plutôt ce risque, se pose aujourd’hui la question des effectifs, notamment chez les infirmiers. Depuis fin juin, certains soignants croquent à pleines dents leurs congés tant mérités. Tandis que d’autres quittent définitivement l’île aux parfums. Et ce sont ces départs sans retour qui créent le plus grand souci à l’heure actuelle. « Tout un tas d’infirmiers, d’origine métropolitaine, en poste depuis un, deux ou trois ans, ont terminé leur contrat. Un certain nombre avait prévu de ne pas rempiler. Et ceux qui hésitaient ont préféré rentrer chez eux pour des raisons diverses », confie Christophe Caralp, le chef de pôle URSEC. « En temps normal, nous les remplaçons, mais la situation actuelle du Covid fait que nous avons plus de mal à recruter à Mayotte parce que nous sommes loins de la métropole, les gens sont plus réticents à se déplacer dans un département d’Outre-mer, et parce qu’il y a une incertitude vis-à-vis du virus. »

Contrat à court terme vs recrutement à long terme

Deux autres facteurs rentrent également en ligne de compte. Le premier est l’impossibilité de voyager convenablement dans la région de l’océan Indien, en raison du flou artistique de l’espace aérien. Les visites dans les pays voisins représentent l’un des atouts majeurs du CHM lorsqu’il s’agit de faire pencher la balance du côté du 101ème département. Le second est l’approche des fêtes de fin d’année. Les personnels préfèrent s’engager après ces échéances pour des raisons familiales. Conséquence : « Nous avons rappelé sur des contrats très courts des anciens de chez nous, qui connaissent très bien la maison, pour nous prêter mains fortes, notamment au SMUR et en réanimation. » À la différence des urgences qui privilégient le recours aux heures supplémentaires. « Pour le recrutement à long terme, nous sommes dans une phase intermédiaire. Nous espérons recruter d’ici début janvier pour retrouver notre roulement habituel », souligne Christophe Caralp, qui jongle avec son personnel à disposition pour faire tourner les évacuations sanitaires et le caisson hyperbare (installation pour le traitement des plaies).

Concernant l’évolution de l’épidémie sur le territoire, les dernières semaines démontrent que l’activité du coronavirus évolue par vagues successives. « Nous en avons connue une il y a à peu près trois semaines », concède Christophe Caralp, qui s’attache alors à renforcer temporairement les services en première ligne pour pouvoir s’adapter aux besoins avant de reprendre un rythme plus classique. Le crédo se résume ainsi : « Être souples et très réactifs ! » Une adaptation de tous les instants qui doit aussi prendre en compte l’épuisement des uns et des autres. « Nous devons trouver le bon dosage », martèle le chef de pôle. Et en cas de durcissement des « poussées », « il faudra monter en puissance sur la durée et installer des filières plus pérennes, comme celle à l’accueil, voire même déprogrammer des activités ».

Le CHM doit donc résoudre une équation à plusieurs inconnues. Si le service réanimation peut se targuer d’avoir accueilli neuf infirmiers la semaine passée, ces derniers ne sont pas encore autonomes. « Il faut deux mois pour qu’ils soient formés, donc nous sommes encore fragiles », précise Christophe Caralp. Cette période de transition demande alors de mixer les plannings des anciens et des nouveaux. En conclusion, il apparaît évident de retarder au maximum l’arrivée de cette « deuxième » vague pour que les effectifs soient en nombre suffisant et opérationnels sur le terrain. En espérant un éventuel renfort de la réserve sanitaire. « Paris nous écoute, mais comme nous ne sommes pas les plus critiques, nous ne sommes pas prioritaires. » Le compte à rebours est lancé…

 

Des lycéens mahorais marqués par l’insécurité aux assises de la sécurité

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Les Assises de la sécurité et de la citoyenneté de Mayotte ont débuté ce lundi matin au lycée des lumières de Mamoudzou Nord. L’événement a rassemblé plus de monde que prévu. Parmi eux, des lycéens qui ont contribué aux échanges et ont proposé des solutions.

Ils étaient six. Six lycéens de trois établissements différents, qui n’ont pas prononcé de discours aseptisés, qui n’ont pas promis monts et merveilles mais qui ont pris la parole pour crier leur désarroi face à l’insécurité grandissante au sein et aux abords des établissements scolaires. Face à eux, des hommes et des femmes politiques qui les écoutent attentivement, et qui n’ignorent en rien le quotidien de ces jeunes marqués par le sentiment d’insécurité. Ils ont apporté leur pierre à l’édifice en proposant des solutions concrètes à l’occasion de cette première journée des Assises de la sécurité et de la citoyenneté. « Il faut sensibiliser les jeunes à la question de la violence dans chaque village. Et en parallèle, donner plus de moyens à la vie scolaire. Il nous faut un lieu d’échange et d’écoute », clame Abdoulyazid Said Assani, élève de terminale au lycée du Nord d’Acoua.

D’autres ont proposé d’élargir l’amplitude horaire des établissements scolaires afin que les élèves ne patientent pas à l’extérieur lorsqu’ils arrivent tôt le matin. Les six délégués représentants des lycéens ont tous évoqué les actes de violence dans les transports scolaires. Et là encore, ils ont énoncé quelques idées pour y remédier. « Une grande partie des élèves vont à l’école en bus. Et on a tous peur pendant le trajet. On vous demande de mettre un médiateur dans chaque bus scolaire », recommande Marissa Iris Combo, élève de terminale au lycée du Nord d’Acoua. Les lycéens sont clairs : il faut plus investir dans la sécurité des élèves parce qu’ils sont l’avenir de Mayotte.

« On a vécu ce qu’on a raconté »

Les jeunes présents à la cérémonie d’ouverture de ce rendez-vous tant attendu ont écouté les longs discours des élus, du préfet, du recteur et bien d’autres durant toute une matinée. Mais leurs paroles n’ont pas atteint le jeune public. « Je n’ai pas trop compris ce qu’ils ont dit. Ils ont beaucoup parlé », souligne Hadjra Ahamadi, élève au lycée professionnel de Kaweni. Et son camarade Yasser Souffou d’ajouter : « Personnellement, tant que je ne verrai pas des actions concrètes, je ne leur ferai pas confiance. J’attends de voir pour y croire. » Ils n’ignorent cependant pas l’importance de cet évènement. Il s’agit d’une occasion rêvée pour eux d’échanger avec les élus et le recteur, et de partager leurs idées.

Les élèves subissent au quotidien tous types de violence, directement ou indirectement. Cette situation a fait naître en eux une certaine colère envers les élus, les adultes qui sont censés les protéger. « Notre discours était plus concret parce qu’on a vécu et on vit tous les jours ce qu’on a raconté pendant qu’eux sont dans leurs bureaux. Ils ne sont pas sur le terrain », critique Marissa Iris Combo. Les lycéens qui ont osé porter les voix de tous leurs camarades ont ramené toute l’assemblée présente à la dure réalité qui les frappe. Leur jeunesse rythmée par l’insécurité a rappelé aux élus et au gouvernement l’intérêt premier des Assises de la sécurité. Il est temps de trouver des solutions efficaces sur le long terme. « Chaque citoyen peut contribuer à l’amélioration de la sécurité sur l’île, alors ne baissons pas les bras et ne cherchons pas de prétexte pour ne pas être plus impliqués », prévient avec fierté Marissa Iris Combo.

Grève des agents du Département de Mayotte : pour le syndicat Force ouvrière, le protocole d’accord n’a pas été respecté

Face à l’absence d’avancées significatives par rapport aux 43 points qui avaient fait l’objet d’une négociation en septembre, les agents de terrain du Département ont reconduit leur grève. Avec peu ou prou les mêmes revendications.

Forte déconvenue pour les passagers de la barge, en ce début de semaine déjà pluvieux. Amassés sur les quais, les centaines d’usagers ont dû faire preuve de patience : une seule barge assurait la traversée ce lundi jusqu’à la mi-journée. La cause de ce service minimum ? Une grève des agents du STM (service des transports maritimes de Mayotte), que beaucoup n’avaient pas vu venir. Sur les réseaux sociaux, ils étaient d’ailleurs plusieurs commentateurs à s’interroger sur l’absence d’un préavis qui aurait pu leur permettre d’anticiper le coup…

En réalité, c’est à l’appel du syndicat Force ouvrière, qui avait déposé un préavis ce vendredi 6 novembre, que plusieurs agents du conseil départemental ont décidé d’entamer une grève illimitée. Parmi eux figurent notamment les personnels en charge du ménage, les gardiens et agents de sécurité, les agents de surveillance des tortues, les jardiniers et les agents de la brigade rivière. Et il semblerait donc que ceux du STM se soient eux aussi greffés au mouvement. Selon le syndicat, le non-respect du dernier protocole d’accord, signé le 1er octobre après un premier mouvement entamé le 28 septembre, a motivé cette nouvelle mobilisation pour enfin faire entendre leurs revendications. “Nous avons le sentiment que la signature du protocole n’a pas de valeur”, déplore Ichaan Madi, secrétaire générale du groupement départemental FO services publics.

43 revendications sur liste d’attente

En tout, 43 points avaient été soulevés pendant les dernières négociations, des conditions de travail des femmes de ménage et agents de sécurité, à l’attribution des primes Covid, en passant par le local des agents de surveillance des tortues à Moya ou la vétusté des locaux au jardin botanique de Coconi. “Sur la cabane de Moya qui est en cours de réhabilitation, il avait été convenu que les agents conservent un abri, or dès la première semaine d’octobre, tout a été cassé”, signale par exemple la représentante syndicale. Des réunions de travail devaient aussi être fixées à l’agenda pour mieux prendre en compte les demandes des femmes de ménage, ainsi qu’une réunion du CHSCT. Sans effet. “Le jour où nous leur annonçons la nouvelle grève, ils trouvent tout à coup des disponibilités, alors qu’une réunion devait avoir lieu la semaine du 14 octobre !”, poursuit-elle, sidérée.

Autre sujet de discorde, commun à tous les agents : la question de la prime Covid. Les grévistes pointent du doigt le manque de transparence dans l’attribution de ce petit bonus destiné à ceux qui avaient continué à charbonner pendant le confinement. “Ils devaient nous transmettre le fichier faisant état de la présence des agents”, rappelle Ichaan Madi. Or, un mois plus tard, force est de constater que leur vœu n’a pas été exaucé. “Toujours à l’heure actuelle seuls les directeurs ont obtenu la liste, et personnellement, je ne l’ai pas en ma possession”, s’agace Mouslimou Ma-Ouard, secrétaire général du syndicat FO conseil départemental.

Des retenues de salaire pour des agents du STM

Le hic, c’est que cette liste est déterminante, car elle permet aussi de savoir quels agents étaient en “autorisation spéciale d’absence” pendant le confinement. À savoir ceux dont l’activité n’était pas indispensable au maintien des services essentiels du Département, comme des assistants techniques du STM par exemple. Or, certains d’entre eux s’estiment aujourd’hui lésés, car ils ont subi des retenues de salaire. “C’était le confinement, et l’administration s’est permis de dire qu’elle avait rappelé des agents, qui ne sont pas revenus. Pour nous au syndicat, la reprise du travail n’était pas claire, j’ai donc demandé des justificatifs”, abonde le gréviste. Interrogés sur la relative discrétion des employés des barges lors de la première grève, les syndicalistes assurent que le sujet était bien sur la table. “Mais les retenues sur leur salaire sont devenues une réalité entre-temps, puisque rien n’a été fait pour interrompre cette décision”, répond Mouslimou Ma-Ouard.

Résultat, la situation ne risque pas de s’améliorer cette semaine pour les habitués de la barge. Sur sa page Facebook, le STM a d’ores et déjà communiqué sur les perturbations à prévoir ce mardi matin, avec un service interrompu de 8h à 12h. Un seul navire pour assurer le service minimum. De son côté, le syndicat Force ouvrière attend une première réunion de concertation pour décider des suites du mouvement. Avec un message clair : “cette grève sera plus dure que la précédente. Sans retour favorable, nous n’hésiterons pas à resserrer les vis”, met en garde Mouslimou Ma-Ouard.

 

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Mayotte Hebdo n°1116

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