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Hugues Makengo, directeur territorial de la protection judiciaire de la jeunesse à Mayotte : “L’insertion est le meilleur moyen de prévenir la délinquance”

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Tous les mineurs sous-main de justice sont suivis par la protection judiciaire de la jeunesse, ou PJJ. Entre les unités éducatives de milieu ouvert, l’accueil de jour, le placement judiciaire ou en détention, en centre renforcé ou en famille d’accueil, les dispositifs mêlant éducation et répression sont variés, mais poursuivent tous le même objectif : remettre les jeunes délinquants dans le droit chemin et éviter à tout prix la récidive.

Flash Infos : Comment se déclinent les missions de la PJJ à Mayotte ?

hugues-makengo-directeur-territorial-protection-judiciaire-jeunesse-mayotteHugues Makengo : Tout d’abord, nos missions sont nationales. La PJJ encadre exclusivement les mineurs délinquants confiés par l’autorité judiciaire et très accessoirement des mineurs au civil dans le cadre des mesures d’investigations bien que cette dernière part soit assez importante à Mayotte. Cet encadrement se déroule sur trois grands axes. Il y a d’abord le milieu ouvert, donc les services accueillent les jeunes “libres”. Ces équipes pluridisciplinaires (éducateurs, psychologues et assistantes sociales) sont le socle de l’action éducative. Ils préconisent aux magistrats les orientations des mineurs vers l’accès aux activités de jour par exemple. Ensuite, nous avons une mission d’insertion, qui priorise les jeunes déscolarisés et en rupture notamment, pour les moins de 18 ans et plus de 16 ans. Ce dispositif nous permet de ramener ces mineurs vers le droit commun, afin qu’ils accèdent à ce que propose par exemple la Mission locale pour les jeunes de 16 à 25 ans. Notre dernière mission concerne le placement judiciaire. Il peut se faire en famille d’accueil – ce que l’on appelle “UEHD, pour unité éducative d’hébergement diversifié« . À Mayotte, cela concerne environ 30 jeunes pour une vingtaine de familles à travers l’île. Dans ce cadre-là, nous travaillons aussi avec Mlezi Maoré à travers deux structures : le centre éducatif renforcé, qui se trouve à Bandrélé, où les jeunes sont placés pendant quatre mois dans une idée de rupture, de remobilisation et de réinsertion. À côté, nous avons l’hébergement classique dans un établissement de placement éducatif, cette fois à Tsoundzou, qui compte aujourd’hui 12 places et devrait prochainement passer à 15. L’ordonnance de placement est de six mois renouvelables.

FI : Comment est prise la décision d’envoyer un jeune vers une structure plutôt qu’une autre ?

H. M. : Tout ces dispositifs sont à la disposition des magistrats, et prioritairement du juge des enfants, ainsi que des juges d’instruction qui traitent les dossiers impliquant des mineurs. En s’appuyant sur la personnalité et le profil des jeunes qu’ils suivent, les éducateurs peuvent faire des propositions d’alternative à l’incarcération, comme le placement ou l’insertion. Chaque mineur passe par le milieu ouvert, et selon sa situation, il est renvoyé vers le dispositif le plus adapté. Aujourd’hui, 30% de jeunes sont dans d’autres dispositifs en plus du milieu ouvert. Certains jeunes primo-délinquants font aussi l’objet de mesures spécifiques sur un laps de temps assez court, de quatre à six mois (stages de citoyenneté, réparations ou compositions pénales). D’autres vont être suivis en insertion, notamment sur la mesure éducative d’activité de jour (MEAJ) de 24 places entre la PJJ et le dispositif Daradja des Apprentis d’Auteuil. Les faits graves amènent d’autres mineurs directement en détention à Majicavo, dont le quartier des mineurs compte 30 places. Nous disposons aussi de places dans les établissements de La Réunion, lorsque nous n’avons plus de places ou encore quand l’éloignement s’avère nécessaire, notamment en cas de faits délictueux commis en bande.

En 2019, nous avons suivi environ 950 jeunes, contre 900 l’année d’avant. En 2020, nous en comptions 830, sans doute du fait du confinement. En flux continu, c’est entre 400 et 450 mineurs qui sont accompagnés quotidiennement par nos différents services, en sachant que certains vont rentrer et d’autres sortir en cours d’année.

Mon action consiste à donner les moyens aux services de la PJJ du territoire, des moyens humains et matériels, les moyens de s’inscrire dans la déclinaison des politiques publiques (culture, sport, insertion) et de la politique de la ville pour mieux prévenir la délinquance et la récidive. Nous mettons aussi en œuvre une politique de promotion de la santé qui nécessite une collaboration avec l’ARS et les acteurs de santé au bénéfice des mineurs sous-main de justice.

FI : Plusieurs politiques mahorais demandent depuis plusieurs années la création d’un centre éducatif fermé, une autre alternative à l’incarcération. L’absence de ce dispositif signifie-t-elle que la PJJ manque de moyens à Mayotte ?

H. M. : Les dispositifs qui fonctionnent aujourd’hui permettent de prendre en charge les mineurs qui en ont besoin, à La Réunion ou à Mayotte. Pour l’instant, j’estime que nous disposons d’assez de moyens. Ils ont d’ailleurs beaucoup évolué entre 2013 et 2020, comme en témoigne l’ouverture du centre éducatif renforcé il y a deux ans et demi. Nous avons aussi mis en place début 2019 des mesures éducatives d’activité, et suivront bientôt dans le cadre de la justice de proximité des stages de peine ou d’alternatives aux poursuites ou à l’incarcération sur plusieurs thématiques, comme les violences sexuelles, la citoyenneté et les valeurs républicaines, la place de la victime. Cela concernera 150 jeunes sur 30 semaines, et nous proposerons un stage d’insertion maritime en collaboration avec l’école maritime, l’école de voile et d’autres partenaires.

La démographie de Mayotte montre bien la part importante de la jeunesse. En amont de la PJJ, il y a sans doute à faire du côté de la Protection de l’enfance et de la prévention spécialisée pour l’aide aux familles et le repérage des enfants errants. Je crois qu’il faut investir davantage les dispositifs de la Loi du 5 mars 2007 (qui réforme la protection de l’enfance afin de renforcer la prévention notamment, ndlr) et la PJJ a un rôle à jouer aux cotés des municipalités. Les différentes collectivités municipales peuvent organiser des rencontres pour des jeunes qui ne sont pas encore en délinquance, mais qui sont signalés par l’Éducation nationale ou par les quartiers, de manière à agir assez tôt dans les Conseils pour les droits et devoirs des familles et l’accompagnement parental.

Je pense qu’il ne faut pas attendre que les mineurs passent une première fois devant le juge pour réagir. Mais il faut absolument qu’à Mayotte d’autres dispositifs soient développés avant l’étape PJJ pour faire de la prévention spécialisée, qui consiste à faire aller des éducateurs dans la rue pour qu’ils puissent approcher les jeunes, les groupes qui sont dans l’errance. Certains jeunes sont en grande précarité affective ou sociale et passent à l’acte dès l’enfance, parce qu’ils n’ont pas de présence parentale, ou quelqu’un qui montre le chemin, comme le font les éducateurs. C’est un volet qu’il faut vraiment travailler, d’autant plus ici.

Le plus compliqué, en général, sont les 16-18 ans, puisqu’ils n’ont plus l’obligation de scolarité et c’est parfois là que les problèmes deviennent plus sérieux. Mais certains jeunes, d’autant plus ici, sont déjà dans une violence extrême avant cet âge. Et c’est là qu’il devient urgent d’agir, pour que les plus jeunes n’intègrent pas ces nouveaux groupes que l’on voit se former notamment sur Petite-Terre, qui caillassent, y compris les forces de l’ordre, ou qui commettent des violences devant les établissements scolaires. Ils ne sont pas représentatifs de la majorité des jeunes suivis par la PJJ, mais nous ne devons pas pour autant nier leur existence et surtout travailler tous ensembles – services de l’État, associations, municipalités et collectivités – pour développer les dispositifs d’accompagnement et d’encadrement de ces jeunes. L’État met les moyens nécessaires, et cette année encore nous profitons de 200.000 euros supplémentaires pour mettre en place les actions de la justice de proximité. Si nous trouvons des acteurs volontaires pour travailler avec ces jeunes, les familles d’accueil prêtes à les recevoir, je pense que nous pourrons trouver des solutions. Mais la délinquance est d’abord une affaire de société : il n’y a pas de société sans délinquance malheureusement.

FI : Comment prévenir la récidive auprès de mineurs ayant déjà été condamnés par le juge et confiés à la PJJ ?

H. M. : L’activité de jour est très importante et devrait être davantage développée au regard de l’adhésion de nombreux mineurs dont les profils permettent un retour vers le droit chemin via l’insertion et un accompagnement à l’accès aux droits. En revanche, il y a certains profils de mineurs très dangereux, personne ne peut le nier, mais ils ne sont pas majoritaires fort heureusement. Nous travaillons sur la question des phénomènes de bandes et de violences pour mieux les encadrer et les accompagner.

Nous devons continuer à développer plus de partenariats avec le monde de l’insertion, car elle est le meilleur moyen de prévenir la délinquance et sans elle, nous n’aboutirons à rien. L’étape d’après, c’est le droit commun, qui passe obligatoirement par la levée des barrières administratives pour ceux qui sont régularisables.

La plupart des jeunes, quand ils sont suivis, ne récidivent pas, ou très peu. Les deux derniers mois d’un placement sont les plus cruciaux car c’est l’étape de la préparation à la sortie, d’où le relai fondamental avec le monde de l’insertion. Une fois que le mineur n’est plus suivi, s’il revient à son milieu naturel sans insertion, il peut être tenté de récidiver, d’autant plus s’il est laissé seul, qu’un éducateur n’est plus là pour le suivre.

FI : Comment s’organise le suivi des jeunes une fois qu’ils ont quitté les dispositifs de la PJJ ?

H. M. : Tant que nous avons une ordonnance du juge, nous continuons à les suivre. Mais dès lors qu’elle prend fin, nous pouvons pas les suivre ad vitam aeternam. Je rappelle que l’éducation à la PJJ est contrainte, donc dans les respects des principes constitutionnels, seul l’autorité judiciaire peut nous confier un mineur et jeune majeur avec une ordonnance sur une durée déterminée.

Je souligne une fois de plus l’importance du partenariat pour la PJJ, si les relais au niveau du droit commun, les dispositifs de formation ou autres n’intègrent pas ces jeunes-là, nous nous retrouvons avec des jeunes qui rechutent. C’est en cela que cette question de délinquance des mineurs est l’affaire de tous : de l’État, et c’est à travers la PJJ et l’autorité judiciaire qu’il l’exerce, mais il faut des liens avec les autres services de l’État pour ne pas laisser ces jeunes de côté, et nous y travaillons, et c’est aussi avec les collectivités territoriales et avec les associations œuvrant dans les communes.

FI : Une partie de l’opinion publique estime qu’il existe chez les jeunes délinquants un sentiment d’impunité, comme le prouvent régulièrement les ripostes de riverains lors de caillassages…

H. M. : Je pense que ce sentiment est légitime : les personnes qui le disent ont besoin de réponses et les élus sont dans leur rôle lorsqu’ils réclament plus de moyens humains ou matériels. Ce que je sais de la justice des mineurs, c’est qu’elle n’est pas laxiste, mais elle a peut-être pour « défaut » d’être trop lente à l’ère de la révolution numérique. Nous savons aujourd’hui qu’il faut attendre en moyenne 18 mois pour que les mineurs, qui commettent un premier méfait, soient définitivement condamnés. Personnellement, j’en ai rencontrés beaucoup, dans différents territoires et différents services, qui étaient jugés au bout de deux, voire trois ans. Et parfois, sur ce laps de temps, ils vont commettre d’autres faits. Cela peut donner un sentiment d’impunité, mais ce qui est sûr, c’est que les jugements, lorsqu’ils arrivent, sont sévères.

Avec la réforme de la justice des mineurs qui doit entrer en vigueur en septembre (voir Mayotte Hebdo n°945, ndlr), là où nous mettons 18 mois en moyenne, le délai obligatoire passera à neuf mois pour prononcer un jugement définitif. Cela va aussi être un nouveau paradigme pour les professionnels de l’éducation et les magistrats. C’est pour cela que des formations vont être mises en place très rapidement. Je pense et j’espère que l’opinion publique aura un nouveau regard sur la justice des mineurs.

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