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Dossier : Derrière la belle façade du CHM

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Sur les réseaux sociaux ou dans la rue, formellement ou spontanément, les initiatives se multiplient pour répondre à la délinquance qui flambe à nouveau sur l’île aux parfums. Au risque, parfois, de voir l’exaspération prendre le pas sur la loi. 

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{xtypo_dropcap}A{/xtypo_dropcap}u moment où l’on évoque la mise en place du « Parlement de la santé », avec la tenue, il y a quelques jours, de la première Conférence régionale de la santé et de l’autonomie (CRSA), Mayotte Hebdo ouvre le débat en livrant à la société civile quelques éléments d’appréciation.

Un rapport, ignoré par les élus, qui n’en ont pas fait mention dans l’hémicycle alors que les discussions avec le gouvernement achoppent sur les questions financières, montre que la communauté médicale est amenée à se serrer la ceinture, alors même que le principe de développement de l’île repose sur une revendication politique constante : rattraper les retards criants qui font de Mayotte « un territoire oublié » de la République.

Demandée par la patronne de la direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (DHOS), une mission d’appui et de conseil au Centre hospitalier de Mayotte (CHM), qui s’est déroulée il y a peu plus d’un an, du 2 au 9 août 2009, contient des informations inédites sur la gestion et le fonctionnement de l’établissement. Les constats ont porté notamment sur trois segments : un volet médical; social, lié à l’intégration des personnels de santé dans la fonction publique hospitalière (FHP); et immobilier en rapport au développement capacitaire dans le cadre du Plan hôpital 2007 et les nouvelles demandes issues du plan 2012.

Le premier volet touche au fonctionnement médical de l’établissement et à son attractivité. La mission a rencontré les principaux acteurs. Elle fait le constat d’un « turn-over » important des médecins (333 en 2008 pour 160 postes budgétisés), avec seulement 74 postes occupés par des praticiens hospitaliers « permanents ». Les causes du manque d’attractivité du CHM sont multiples : un mode d’exercice difficile auprès d’une population en grande précarité, parlant souvent la langue locale (shimaorais), une insularité plus forte que dans les autres Dom-Com, des conditions de rémunération qui ne sont intéressantes que pour les deux premières années, ce qui ne favorise pas la stabilité des professionnels de santé.

S’agissant du fonctionnement médical, la mission a évalué la rationalisation de la démarche actuelle de l’établissement, au regard de son projet médical et de son plan directeur. Elle a en particulier étudié avec la direction et les représentants syndicaux les difficultés rencontrées dans l’attractivité et la fidélisation du personnel médical et paramédical. En cette matière, le constat dressé par les fonctionnaires du ministère de la Santé mérite débat car, derrière la belle façade du CHM, se profilent des décisions douloureuses pour le futur département de Mayotte qui semble devoir s’installer, se construire et assumer de nouvelles compétences régionales à moyens financiers constants.

{mospagebreak title=Appui et Conseil au CHM}

Un pool coûteux de médecins remplaçants

Un rapport du ministère de la Santé affirme que les organisations du CHM, dans plusieurs secteurs de soins, s’appuient sur un turn-over de professionnels et deviennent de plus en plus fragiles, pouvant parfois mettre en question la qualité et la sécurité des soins délivrés. Ces organisations seraient, de plus, très coûteuses.

 

{xtypo_dropcap}L{/xtypo_dropcap}e Centre hospitalier de Mayotte (CHM) a un turn-over important de médecins. Au 31 juillet 2009, sur les 108 postes de praticiens hospitaliers (PH) autorisés, seuls 74 (68%) étaient occupés. A ces postes fixes s’ajoutent 58,9 équivalent temps plein (ETP) de postes de praticiens attachés, ce qui fait un effectif rémunéré de 166,4 postes.

En 2008, le CHM a payé 161,26 ETP de médecins. En termes d’effectifs, il a rémunéré 333 médecins. Pour combler les postes non occupés et les congés des praticiens en place, l’établissement fait appel à des remplaçants vacataires, chaque pôle ayant un effectif identifié de praticiens remplaçants. En plus des postes déclarés vacants à l’année, l’on constate chaque année le départ de praticiens, soit par fin de mise à disposition, soit par mutation (pour les PH), soit par fin de contrat (pour les praticiens attachés et assistants). En 2009, 16 praticiens hospitaliers et 10 praticiens attachés quittent l’établissement.

Au 1er tour de publication du 10 avril 2009 des postes vacants, 39 étaient publiés au JO. Dix-sept candidats se sont déclarés, dont deux désistements. Neuf des 15 candidats étaient déjà en place par contrat ou remplacement. Le deuxième tour de publication déclarait 30 postes vacants classés comme « prioritaires », certains parce qu’ils étaient inoccupés depuis 2002. C’est donc sur ce fond chronique de postes disponibles que l’on recrute des remplaçants. Ainsi, en 2008, pour un effectif rémunéré (dans le cadre d’un financement par la dotation globale) de 161,28 ETP, il a été recruté temporairement 139 praticiens qui ont assuré 20% du temps médical, la plupart des médecins venant de Métropole.

 

Le coût d’un médecin remplaçant est de 20.000 €/mois

 

Pour chacun de ces remplaçants, le billet d’avion aller-retour est pris en charge, le logement à l’hôtel pendant une semaine (le praticien doit ensuite trouver un logement dans le parc immobilier important du CHM ou ailleurs, location 1.000 €/mois), une voiture de location pendant toute la durée du remplacement. La rémunération se fait au 8ème échelon des attachés pour un médecin non spécialiste, au 11ème échelon pour les spécialistes (psychiatre, pédiatre), au niveau du 10ème échelon pour un réanimateur qui s’engage à assurer une garde par semaine.

Précision utile : la charge est de 20.000€/mois maximum, contre 10.000€/mois pour un praticien en poste. Pour assurer ces remplacements, l’on dépense le double du salaire normal, soit un coût annuel évalué entre 7 et 8 millions d’euros. La mission s’interroge sur l’intérêt médical de remplacements d’une durée de deux à trois semaines, eu égard à la dépense engagée (10.000 € pour deux semaines, 15.000 € pour 3 semaines).

Environ un tiers des remplacements sur les 139 est survenu très souvent au moment des congés de noël et du nouvel an. Elle s’interroge également sur les moyens médicaux exacts dont a besoin le CHM pour assurer son activité à l’avenir. En effet, il semble qu’il existe en fait un « pool de remplaçants » pour les praticiens en place lorsqu’ils s’absentent pour congés annuels ou périodes de formation.

Au regard du constat, la mission tire une première conclusion : la communauté médicale à Mayotte connaît une réalité bien difficile, attestée par un mémoire du Syndicat des praticiens hospitaliers, qui décrit différents facteurs de non attractivité : une insularité plus marquée que dans l’ensemble des Dom-Com, la difficulté d’occupation du conjoint due à des structures industrielle et commerciale restreintes, un environnement culturel et éducatif limité, un environnement professionnel qui ne permet pas la confrontation ou l’émulation (pas d’hospitalisation privée, pas de structure universitaire), une formation par internet très restreinte (bas débit également), un environnement sécuritaire qui se dégrade avec une augmentation du nombre des agressions verbales, des agressions physiques, créant une réelle problématique pour les médecins de garde qui laissent femmes et enfants seuls la nuit, un gardien étant devenu obligatoire, une population mahoraise fragilisée et pauvre qui ne permet pas le développement de la médecine libérale.

 

1 médecin pour 1.500 habitants, contre 1 pour 350 en Métropole

 

Bref, l’exercice médical est jugé particulièrement lourd à Mayotte : 1 médecin pour 1.500 habitants, toutes disciplines confondues, contre 1 médecin pour 350 habitants en Métropole. Par exemple, un médecin généraliste de dispensaire consulte en moyenne une soixantaine de patients par jour avec un temps de traduction nécessaire pendant la consultation (300.000 consultations/an pour 40 médecins).

L’exercice de la médecine est polyvalent faute de spécialistes en ville. Le syndicat s’interroge sur la manière d’attirer sur des postes de moyenne ou de longue durée de jeunes praticiens apportant dynamisme et actualisation des références ou recommandations de la faculté. Contrairement à d’autres Dom-Com, rares sont les médecins qui s’installent définitivement.

Le syndicat propose des solutions pour attirer ces jeunes médecins : un plateau technique de qualité et performant (un minimum de spécialités et pour les chirurgiens des espaces opératoires suffisants) afin qu’il n’y ait pas de pertes de chances, le transfert par Evasan dans une structure plus adaptée aux cas graves (la Réunion) étant dépendant de l’avion (1/24h), une formation médicale continue en partenariat avec des CHU permettant de conserver et de développer des compétences, des postes partagés pour ceux dont les contraintes familiales ne s’y opposent pas…

Le syndicat propose d’améliorer l’accueil de ces jeunes médecins qui arrivent à Mayotte sans avoir eu une information loyale sur les conditions de vie, de sécurité, de fiscalité, etc. Il est vrai que de nombreux médecins repartent au bout d’un an pour inadaptation du couple ou du conjoint.

Au terme de l’audit, le financement d’effectifs supplémentaires, contractualisés pour accompagner le programme capacitaire, ne peut servir qu’à « amplifier la part des remplaçants médicaux et paramédicaux » dans l’effectif du CHM. Pour assurer son plan de croissance, la direction chercherait à développer des activités qui reposent de plus en plus sur la venue temporaire de professionnels de santé, dont l’efficience pendant leurs séjours, surtout lorsqu’ils sont de brève durée, mérite d’être évaluée.

La mission s’interroge donc sur une stratégie d’offre de soins « qui se traduit davantage par des transformations structurelles importantes que par de réelles évolutions organisationnelles de l’offre de soins ». Les organisations du CHM, dans plusieurs secteurs de soins, s’appuient ainsi sur une rotation de professionnels et deviennent de plus en plus fragiles, pouvant parfois « mettre en question la qualité et la sécurité des soins délivrés ». Elles sont, de plus, très coûteuses.

 

Des problèmes financiers dus à la faible attractivité de Mayotte

 

En un mot, le CHM et Mayotte doivent impérativement améliorer leur image auprès des personnels de santé métropolitains, car les problèmes financiers interviennent pour une bonne part dans la faible attractivité de Mayotte. Ces problèmes ont été rappelés, tant par les médecins que par des professionnels de santé non médecins : la vie est plus chère à Mayotte qu’en Métropole alors que les salaires sont pratiquement équivalents pour un grand nombre de professionnels, l’évolution du Smig mahorais progresse et ce fait réduit, voire supprime, les possibilités pour un jeune couple d’avoir une gardienne d’enfant à la journée (en l’absence de crèche à l’hôpital) et/ou d’avoir un gardien de maison compte tenu du développement de l’insécurité.

Le coût des voyages aériens très élevé rend difficile le déplacement en famille vers la Métropole ou la venue régulière d’enfants qui font leurs études en Métropole. La priorité donnée à la qualité de la vie familiale constatée dans l’Hexagone depuis une dizaine d’années s’exprime encore davantage dans des îles comme Mayotte où les effets négatifs de l’insularité sont plus prononcés que dans d’autres Dom, notamment à la Réunion. Toutes ces raisons, parmi d’autres, rendent de moins en moins captivante la venue à Mayotte de personnels de santé et contribuent au départ de praticiens dans des Dom-Com qui bénéficient de conditions financières d’exercice plus favorables qu’à Mayotte.

La mission recommande que les conditions financières d’exercice des professionnels de santé hospitaliers à Mayotte soient alignées sur celles qui prévalent aujourd’hui à l’île de la Réunion. Cet alignement serait d’autant plus important qu’il favoriserait le rattachement fonctionnel du CH de Mayotte au CHR de la Réunion. Cette stratégie est demandée par le corps médical permanent, qui estime que l’attractivité doit passer par la réalisation d’un hôpital moderne comparable à un CH de Métropole ou de la Réunion.

Au chapitre des nouvelles peu réjouissantes, notons enfin que la prime d’éloignement par les conditions d’attribution qui la caractérisent serait plus « un obstacle qu’un avantage pour fidéliser les médecins ». L’application strictement réglementaire de l’article 81-21a du code des impôts obligerait plusieurs praticiens installés à Mayotte depuis plus de 4 ans à payer des arriérés d’impôts conséquents. A ce sujet, un compromis a été trouvé avec les autorités locales – conseil général et préfecture -, ce qui a permis de suspendre une grève qui a fait couler beaucoup d’encre, les médecins ayant été qualifiés, à tort ou à raison, de « chasseurs de primes ».

En conclusion du rapport ministériel, il s’avère que le système de remplacement mis en place depuis plusieurs années « contribue certainement à grossir l’effectif budgétisé ». Cette situation devra évoluer à l’avenir et la mission recommande la mise en place progressive d’une tarification à l’activité pour former progressivement le corps médical du CHM à la maîtrise du juste soin au juste coût. Cette démarche est également nécessaire pour favoriser le rapprochement préconisé avec les établissements de la Réunion qui sont déjà soumis à ce mode de tarification.

 

Zaïdou Bamana

 


 

Un mouvement de personnel important

 

36% des praticiens à temps plein

Le bilan social 2008 montre clairement la situation de « turn-over » que subit le CHM. 63% des agents ont moins de 5 ans dans l’établissement. La moyenne de l’ancienneté dans l’affectation n’est que de 3,41 ans pour seulement 2 ans pour les catégories A. Le CHM a connu 382 départs, dont la filière soignante représente 50% (190 agents) et 38% les praticiens. A l’inverse, il a recruté 518 agents en 2008, dont 51% de la filière soignante (265 agents) et 33% de praticiens (169).

En terme d’effectifs rémunérés, l’établissement a payé 333 médecins pour un TER à 153. Le pourcentage annoncé de « turn-over » est de 21%, largement au-dessus des moyennes connues en Métropole, même en Ile-de-France qui est au-dessus de 12%. La proportion des titulaires dans l’effectif global n’est que de 50%. Cette augmentation s’explique en partie par le nombre important de médecins réalisant des remplacements, quelle qu’en soit la durée. Ainsi, seulement 36% des praticiens sont à temps plein. A l’inverse, en 2008, il y a eu 30% de praticiens remplaçants rémunérés et 29% de praticiens attachés. A ce coût, il faut ajouter les frais annexes que représentent les billets d’avion aller-retour, le logement mis à disposition et le prêt d’un véhicule.

L’augmentation de la masse salariale du personnel non médical est de 13,34% (+5.303.147 €). On peut noter le taux important de contractuels qui représentent 50% de l’effectif. Ce coût n’intègre pas les dépenses liées à la prime d’éloignement et pour les contractuels expatriés, les 30% supplémentaires de salaire.

{mospagebreak title=Attractivité et fidélisation du personnel}

Plusieurs points pénalisants

Handicaps : foisonnement des statuts, diversité des rémunérations, même la prime d’éloignement devient en fait un obstacle pour la fidélisation du personnel.

 

{xtypo_dropcap}L{/xtypo_dropcap}es clichés, les stéréotypes, les préjugés ont la vie dure. Particulièrement à Mayotte où Radio cocotier a bonne presse. Ainsi, s’agissant des fonctionnaires, ils sont catalogués sans distinction, en des termes globalisants du genre : c’est une caste, une corporation, une communauté, bref un monde à part qui fonctionne avec ses propres codes de comportements et de revendications.

La généralité n’est pourtant pas de mise. En mettant tout le monde dans le même sac, les polémistes se trompent sans doute de débat. Et stigmatisent souvent à tort. En effet, le corps des fonctionnaires est marqué par la diversité et faire la distinction entre les uns et les autres permet de mieux comprendre les enjeux catégoriels. Comme dit l’adage, comparaison n’est pas raison !

Une idée préconçue qui colle à la peau du fonctionnaire est celle, par exemple, qui le désigne négativement par des représentations formulées en cascade : ce sont des nantis, des privilégiés, des chasseurs de primes qui font au travail le minimum syndical, attendent fébrilement les vacances, se dorent la pilule au soleil. L’image, évidemment, est fausse, caricaturale, exagérée. Fausse et potentiellement dangereuse pour le progrès et pour la paix sociale car en condamnant a priori, on enlève d’emblée à la discussion l’élément essentiel d’un accord : la possibilité du dialogue, donc la compréhension de l’autre.

 

Hétérogénéité des statuts et des rémunérations

 

Que n’a-t-on par exemple entendu au sujet des médecins : « des fonctionnaires comme les autres », disent les mauvaises langues. Sait-on, cependant, que le CHM connaît des difficultés pour recruter et fidéliser ses personnels, surtout ceux venus de Métropole et ceux porteurs de compétences particulières.

L’établissement subit ainsi « un turn-over préjudiciable à la mise en place de projets de pôle ou de service ainsi qu’à la pérennité de la qualité de la prise en charge », note la mission Simon. Plusieurs points pénalisent l’attractivité et la fidélisation du personnel, notamment l’hétérogénéité des statuts et des rémunérations pour un même métier et des missions identiques.

Aujourd’hui, au sein même d’une équipe de travail, différents statuts et bien évidemment des rémunérations différentes pour des missions identiques peuvent cohabiter :

– un statut FPH pour les personnels recrutés localement, Mahorais ou conjoints d’expatriés ;

– un statut d’agent contractuel expatrié bénéficiant de 30% de plus de salaire ;

– un statut de titulaire de la fonction publique bénéficiant de l’indemnité d’éloignement suite à leur mutation.

Ceci est préjudiciable à un bon climat social. De même, dire des médecins qu’ils sont des « chasseurs de primes » c’est tirer sur l’ambulance, par simple ignorance.

 

Le paradoxe de la prime d’éloignement

 

La prime d’éloignement est régie par l’article 4 du décret n°96-1028 du 27 novembre 1996 relatif à l’attribution de l’indemnité d’éloignement aux fonctionnaires titulaires modifié par le décret n°2005-580 du 27 mai 2005. Il précise que le droit à cette indemnité n’est ouvert que pour deux périodes de deux ans. Elle est conditionnée à la possession de son centre des intérêts matériels et moraux en dehors de Mayotte et à avoir effectué un déplacement effectif vers Mayotte pour rejoindre sa nouvelle affectation.

Le budget accordé à ce titre par l’ARH pour l’exercice 2009 est de 2.781.818 €. Suite à la notification budgétaire, la direction du CHM a arrêté toute nouvelle mutation. Et après une rencontre de médiation, la Dass a réaffirmé l’intention de l’ARH d’allouer 4.500.000 € en base pour permettre environ 50 mutations par an. Au vu de cette affirmation, la direction a décidé de relancer les mutations, arrêtées à 31 au 15 mars 2009. Une décision modificative devait intervenir à hauteur de 1.718.182€.

« Cette prime qui pourrait être un atout dans l’attractivité du CHM devient en fait un obstacle pour la fidélisation du personnel », constate la mission. En effet, au plus tard au bout de quatre ans, mais bien souvent avant, les personnels qui ont bénéficié de cette indemnité quittent Mayotte.

Aujourd’hui, dans les Dom et les Com, un coefficient multiplicateur est appliqué au traitement de tous les fonctionnaires titulaires de l’Etat et des collectivités locales sans limitation de durée. Ceci est étendu à la FPH en application de l’article 77 de la loi 8-33 du 9 janvier 1986. A la Réunion, il est appliqué un coefficient de +38% du salaire brut à tous les agents, quels que soient leurs grades et quels que soient leurs statuts (titulaire ou stagiaire).

La mission a préconisé la mise en place du même coefficient multiplicateur pour les agents du CHM, pour limiter la diversité des rémunérations. Il existe toutefois deux difficultés à la mise en place d’une telle mesure : son application aux agents des trois fonctions publiques de Mayotte; son impact financier.

Le gouvernement mettra-t-il en application les préconisations de la mission ministérielle ? Il est permis d’en douter, à quelques mois d’une départementalisation qui, selon les élus, est obérée par la dette publique colossale de l’Etat, qui impose des économies tous azimuts, y compris au détriment de la pauvre communauté médicale de Mayotte.

{mospagebreak title=Pôles de gynécologie obstétrique et pédiatrie}

« La plus grande maternité de France »

Contre l’avis des praticiens et contre le vœu des élus, la mission ministérielle indique que si le taux actuel d’occupation des lits de néonatologie nécessite une augmentation capacitaire, son doublement est peut-être prématuré.

 

{xtypo_dropcap}M{/xtypo_drocap}ayotte abrite « la plus grande maternité de France ». La formule a fait le tour de l’Europe, avec en point de mire une polémique tonitruante sur les difficultés de prise en charge médicale des immigrés clandestins. A cette querelle s’ajoute une forte inquiétude : le secteur de néonatologie connaît aussi un important « turn-over ». La part du budget alloué aux remplacements est en progression depuis 2007, notamment en 2008 où 1 million d’euros supplémentaires ont été alloués aux remplacements.

La situation de la ressource médicale déficitaire des pôles de gynécologie obstétrique et de pédiatrie renvoie à la question de l’attractivité des postes médicaux à Mayotte. « La réalité de cette difficile situation que connaît la communauté médicale ne semble pas être prise en compte à sa juste mesure, puisque les seules solutions qui sont apportées sont celles de créations de postes qui ne serviront en fait qu’à augmenter les moyens financiers de remplacements médicaux déjà très couteux », explique la mission Simon.

Le CHM se fixerait également des objectifs de qualité et de sécurité qui ne peuvent être atteints en l’état actuel du fonctionnement médical. Par exemple, le développement de l’analgésie péridurale à l’accouchement est irréalisable à Mayotte. Les praticiens se sont exprimés sur le manque d’attractivité des postes médicaux et sur les solutions qui, selon eux, devraient être apportées par les pouvoirs publics. La mission a étudié ce document et partage en grande partie le diagnostic fait par ces praticiens.

 

Des objectifs totalement irréalistes

 

Toutefois, l’insuffisance de la ressource médicale et paramédicale en néonatalogie conduit à s’interroger sur les conséquences d’une volonté affichée de « mise aux normes et d’un dédoublement des capacités » de l’unité de néonatalogie, ainsi que de la pédiatrie. Les responsables de ces unités ont clairement décrit la grande fragilité des organisations du fait du « turnover » important des personnels soignants, dont certaines raisons rejoignent celles des médecins : inadaptation à l’insularité plus prononcée à Mayotte qu’ailleurs, coût de la vie élevé, difficulté de se payer des loisirs en dehors de Mayotte dont on sait qu’ils sont très limités en dehors des activités maritimes, épuisement professionnel…

L’augmentation capacitaire ne va-t-elle pas créer des conditions d’exercice professionnel encore plus pénibles, risquant d’accentuer ce turn-over ? « Si le taux actuel d’occupation des lits de néonatologie nécessite certainement plus de moyens humains, son doublement est peut-être prématuré », tranche la mission d’audit. La même réflexion peut être faite pour la pédiatrie qui doit doubler ses capacités.

Quant à l’objectif de réaliser des gardes sur place distinctes en pédiatrie/néonatologie, il serait « totalement irréaliste » eu égard à la ressource médicale actuelle. Par ailleurs, le caractère opportun d’appliquer dès maintenant à Mayotte des normes établies en Métropole est remis en cause par la mission, au prétexte que les normes sont déjà difficiles à mettre en place dans certains établissements où la ressource est pourtant supérieure à celle de Mayotte.

Les élus savent-ils seulement ce qu’il se trame derrière cette prise de position qui va à l’encontre de leurs vœux ?

Source :

Ministère de la Santé et des Sports

Rapport de la Direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (DHOS)

Mission d’appui et de conseil au Centre hospitalier de Mayotte (CHM)

Etabli par : Pierre Simon, conseiller général des établissements de santé

Frédéric Limouzy, directeur d’hôpital

Patrick Heissat, ingénieur général

Novembre 2009

Mayotte Hebdo de la semaine

Mayotte Hebdo n°1086

Le journal des jeunes

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