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Un exercice grandeur nature d’une tuerie de masse

L’aéroport de Pamandzi a été hier mercredi de 14h30 à 16h30 le théâtre d’une simulation de tuerie de masse.

Pour préparer cet exercice attentat en condition réelle, le Service Interministériel de Défense et de Protection Civile (SIDPC) a travaillé de concert avec : la Police aux frontières, la Gendarmerie, le DLEM, l’aéroport de Mayotte, les Douanes, la Délégation de l’Aviation Civile de Mayotte, le Service de Navigation Aérienne de Mayotte, le Procureur de la République, la Croix Rouge Française, la Mairie de Pamandzi, le SDIS, le SAMU, le CHM, le STM et les pompes funèbres. Ces derniers ont travaillé main dans la main, afin de parvenir à une coordination optimale, assurant d’une part une gestion sécurisée de l’intervention et une prise en compte aussi rapide que possible des blessés d’autre part. « Cette expérience a permis de jauger la capacité opérationnelle des personnels présents et de repérer les points d’amélioration possible, en vue d’accroître leur efficacité et leur réactivité, lors d’une éventuelle intervention pour une tuerie de masse » a déclaré le sous-préfet Etienne Guillet aux côtés du procureur de la république Camille Miansoni. Le scénario était celui-ci : trois individus vêtus de tee-shirt orange, armés et cagoulés tirent à plusieurs reprises sur les personnes présentes au sein de l’aéroport. On compte une dizaine de morts et plusieurs blessés. La police intervient. Un assaillant est abattu, un autre est blessé tandis que le troisième se retranche dans le boxe de la compagnie Air Austral avec une otage. Un commandement opérationnel se met en place. Le groupement d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) encercle l’aéroport et négocie durant plusieurs heures avec le preneur d’otage qui finira par relâcher sa « prisonnière » avant de se rendre. Les pompiers interviendront à la fin sous protection policière pour porter secours aux blessés avant d’évacuer les morts.

 

Accident : une avance de 80.000 € pour Nafouanti

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La décision concernant le violent accident de la route au cours duquel une jeune femme avait eu la jambe sectionnée cet été a été rendue, ce mardi. Le prévenu a été relaxé des blessures involontaires qui lui étaient reprochées, mais condamné pour sa conduite en état d’ivresse. La jeune femme s’est vu octroyer une première indemnité, à titre provisionnel, dans l’attente de l’évaluation de son préjudice total. 

Les images de la jeune Nafouanti, 21 ans, la jambe amputée, quelques jours après son violent accident de la route survenu sur le boulevard des crabes, à Dzaoudzi, le 30 juillet dernier, avaient provoqué un vif émoi dans la population. Les circonstances de l’accident – alors qu’un délit de fuite avait d’abord été évoqué avant d’être écarté – avaient encore ajouté au choc la colère et l’incompréhension. L’homme dont la Renault Mégane a percuté, ce soir de la fin juillet, le scooter de Nafouanti et de son époux, vient d’être relaxé de la prévention de « blessures involontaires » et de « défaut de maîtrise » – pour excès de vitesse – de son véhicule par le tribunal correctionnel de Mamoudzou. En l’absence d’erreur de conduite avérée, sa responsabilité pénale n’a pas été établie dans cette affaire. Ce légionnaire du DLEM a en revanche bel et bien été condamné pour conduite sous l’empire d’un état alcoolique, alors que des tests d’alcoolémie ont démontré qu’il avait 0,61 mg/L de sang ce soir-là. Il a écopé ce mardi de trois mois de prison avec sursis et de huit mois de suspension de permis. À l’audience, le procureur de la République Camille Miansoni avait requis à son encontre une  peine de douze mois d’emprisonnement avec sursis, un an de suspension de permis, 300 euros d’amende pour « défaut de maîtrise » et un stage de sensibilisation à la sécurité routière. Certains commentateurs, sur les réseaux sociaux, évoquaient à la suite de notre article relatant l’audience (voir Flash Infos du 22 novembre) une « justice à deux vitesses », et s’empressaient de dénoncer l’injustice du traitement réservé à la victime, confondant pour certains d’entre eux la peine requise à l’encontre du conducteur et les indemnités demandées pour la victime. C’était oublier qu’intérêts civils et sanctions pénales sont deux choses distinctes et que l’évaluation des dommages – en discussion avec les compagnies d’assurance des uns et des autres –   fera l’objet d’une autre audience, dont la date n’a pas encore été fixée. En d’autres termes, la sanction de l’un est sans effet sur les indemnités de l’autre.  

« Ce n’est qu’une avance ! » 

Pour la jeune Nafouanti, dont les conditions de vie déjà précaires ont été drastiquement dégradées par l’accident, la reconstruction commence à peine. « Aujourd’hui, je ne peux plus rien faire toute seule », avait-elle lâché, debout à la barre, se soutenant de ses seules béquilles en l’absence de prothèse, lors de l’audience du 21 novembre. Son avocate venue de métropole et spécialisée dans la réparation des dommages corporels, Me Élise Marchand, avait dénoncé le « no man’s land médical » dans lequel se trouvait sa cliente et détaillé les divers préjudices subis par la jeune femme, son époux et, par ricochet, leur enfant de deux ans. Elle avait formulé d’importantes demandes d’indemnités et il semble qu’elle ait été entendue, alors que la jeune femme vient de se voir octroyer ce mardi une provision de 80.000 euros ce mardi. « Ce n’est qu’une avance en attendant les expertises (permettant d’évaluer complètement le préjudice) et l’audience sur intérêts civils », précise le procureur Miansoni. C’est seulement lors de cette audience que les magistrats pourront fixer le montant total des indemnités à la famille de Nafouanti, en ayant pris soin de vérifier qu’il n’y a « pas de conséquences supplémentaires » à l’accident. Lors de l’audience, l’avocate de Nafouanti avait salué la décision du procureur de lancer des poursuites, et pas une information judiciaire, à l’encontre du conducteur, permettant d’accélérer le traitement du dossier, et l’évaluation des préjudices. L’avocate avait également demandé l’intervention d’un expert spécialisé exerçant à Bordeaux, afin d’évaluer au plus juste les besoins de sa cliente. 

La somme de 80.000 euros dégagée ce mardi ne sera pas de trop pour patienter jusque-là et assurer les soins et aménagements dont les victimes vont avoir besoin. À plus forte raison compte tenu du contexte médical du territoire, de l’état de santé mental et physique de la jeune femme, qui vit dans un logement précaire du quartier de la Vigie, à Labattoir, et souffre des « douleurs du membre fantôme », récurrentes chez les personnes amputées, ainsi que d’importantes séquelles psychologiques. 

 

 

Un festival de la Cimade annulé en raison de « menaces »

Le groupe local de l’association de défense des droits des étrangers La Cimade organisait samedi dernier une exposition dans le cadre de son festival national Migrant’Scène au collège de Passamaïnty. Mais cet événement a dû être annulé en raison de « menaces réelles et certaines » de troubles à l’ordre public. L’association a tout de même affiché samedi témoignages et photos sur les murs de l’enceinte scolaire. 

L’événement devait se tenir samedi. Le groupe local de l’association La Cimade à Mayotte avait prévu d’organiser le week-end dernier, à Passamaïnty, une exposition de portraits et de témoignages dans le cadre du festival national Migrant’Scène. Ayant pour thème le vivre-ensemble, le festival dure trois semaines et se déroule en métropole et au sein des différents territoires ultramarins. « Les autorités administratives viennent d’empêcher la tenue de cet événement qui était accueilli par le collège de Passamaïnty : prévenu au dernier moment, le groupe local a tenu à être présent afin d’en informer le public », dénoncent les responsables de La Cimade samedi par voie de communiqué. « La situation sur place est tendue sur les questions migratoires », affirment-ils encore. La Cimade s’inquiète également « des obstacles auxquels elle est trop souvent confrontée pour organiser des évènements pacifiques et fraternels ». 

Contactée, la préfecture de Mayotte a indiqué avoir été informée de « menaces réelles et certaines » pour l’ordre public et de manifestations visant ce festival. Elle a donc alerté le vice-rectorat qui a décidé d’annuler l’évènement. « Nous avions pris des dispositions » pour sécuriser l’extérieur du bâtiment, a affirmé la préfecture, qui a toutefois précisé « ne pas pouvoir contrôler l’intérieur » de l’établissement scolaire au sein duquel seuls quelques bénévoles de la Cimade auraient été présents. La préfecture de Mayotte a assuré qu’il y avait, de sa part, une réelle « volonté de les accompagner » dans ce projet de festival mais qu’il fallait prendre en compte le contexte particulier. Elle a, en outre, précisé qu’un report de l’événement était envisagé.

« On essaie de voir mais c’est compliqué » de reporter le festival, estime l’antenne locale de la Cimade. En effet, des intervenants devaient se déplacer pour l’occasion mais difficile de fixer de nouveau une date commune pour l’ensemble de ces participants. Cependant, l’association a tout de même tenu, samedi dernier, à afficher des portraits et des témoignages sur les murs du collège de Passamaïnty. En outre, elle a organisé un « pique-nique géant » avec les visiteurs qui s’étaient tout de même déplacés, n’ayant pas eu vent de l’annulation tardive de l’événement (de la veille au lendemain). Ces rencontres se sont tenues sans heurts. 

 

VIH : objectif éradication en 2030

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Samedi avait lieu la 30ème journée mondiale de lutte contre le VIH Sida. À cette occasion, les maires des communes mahoraises ont entériné la Déclaration de Mayotte, qui émane de la Déclaration de Paris visant à l’éradication de l’épidémie en 2030, près d’un demi-siècle après sa découverte. Un objectif très ambitieux, notamment à Mayotte.

« 2030 ? Un objectif difficile à atteindre », selon Moncef Mouhoudhoire, directeur de l’association Narike M’sada. Avec plus de 35 millions de morts à ce jour, le VIH continue de représenter un problème mondial majeur de santé publique. Pour parvenir à y mettre un terme, chaque année, au 1er décembre, est organisée la journée mondiale contre le Sida,sur le thème « Connais ton statut », pour informer la population sur le risques encourus. Samedi, c’était également l’occasion de célébrer le 30ème anniversaire de cet évènement lancé en 1988 par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Dans le cadre de cette journée, les maires des communes de Mayotte se sont rassemblés vendredidans les locaux de l’association Narike M’Sada à Mamoudzou, afin de signer la Déclaration de Mayotte inspirée de la Déclaration de Paris qui vise à éradiquer l’épidémie à horizon 2030, notamment en atteignant la cible de traitement « 90-90-90 » avant 2020, définie par un programme commun des Nations Unies sur le VIH (Onusida). 

En 2020, l’objectif est que 90% des personnes vivant avec le VIH connaissentleur statut, que 90% d’entre elles reçoivent un traitement antirétroviral durable et que 90% de ces personnes sous traitement aient une charge virale – quantité de VIH qu’il y a dans le sang d’une personne séropositive – supprimée. Pour l’heure, l’épidémie perdure en France avec environ 6.000 nouvelles personnes séropositives chaque année depuis plus de dix ans. 

Un objectif trop ambitieux ?

« Je pense que le terme « éradication » est peut être un peu trop fort mais reste une ambition. Seulement, l’objectif actuel est de freiner l’épidémie », explique de son côté Moncef Mouhoudhoire. Et d’ajouter que « nous avons déjà atteint deux objectifs sur trois à Mayotte, c’est-à-dire l’accès aux traitements et la charge virale indétectable. Il nous manque encore le dépistage. C’est dans ce but que nous avons fait vendredi une journée dépistage en Petite-Terre ». L’objectif pourrait donc se réaliser mais il demeure complexe au regard de la précarité sociale à Mayotte. Sur 260.000 habitants recensés, seulement 30.000 travaillent, faisant de l’île le département le plus pauvre de France, avec plus de 80% de la population vivant en-dessous du seuil de pauvreté. 

« Quand une personne n’a rien à se mettre sous la dent, il est difficile pour elle de payer et d’ingurgiter des traitements », souligne le directeur de l’association. Le territoire est aussi à la troisième place des départements les plus touchés par le VIH juste derrière l’Ile-de-France et la Guyane. Une réalité due notamment aux migrations, à l’accès aux préservatifsrendu difficile par le manque de points de vente (et seulement 20 pharmacies) ou encore à la prostitution, toujours selon le directeur.  

Autre élément à prendre en compte : la polygamie. En août dernier, 273 personnes atteintes du Sida étaient connues et suivies au CHM de Mamoudzou. Près de 62% d’entre elles étaient des femmes dépistées à l’occasion de leur grossesse. « Qui dit femme enceinte dit automatiquement qu’il y a un homme. Si la femme en question est séropositive, il y a de fortes chances que l’homme le soit également sauf qu’il n’apparaît pas dans les chiffres connus », déplore Moncef Mouhoudhoire.

Les maires et communes en première ligne

En outre, le territoire mahorais est le département le plus jeune de France.Une jeunesse qui favorise les relations multi-partenariales occasionnelles, qui sont en constante augmentation, d’après le directeur de l’association. »Tout est fait pour multiplier les chances de la transmission du VIH. C’est pour cela qu’il faut évidement améliorer les points d’accès, l’information et le volet social ». En effet, mettre l’accent sur l’amélioration des conditions de vie  apparaît d’autant plus essentiel que des études de l’ARS ont démontré qu’une population exposée à de nombreux problèmes sociaux est plus susceptibled’adopter des comportements à risque. 

« Il appartient aux maires signataires de la Déclaration d’appliquer leurs engagements et d’imaginer des solutions. Nous nous allons nous positionner en temps qu’acteur et opérateur s’ils le souhaitent. Pour les aider, ils auront des outils comme les CCAS (Centre communal d’action sociale, ndlr) », affirme Moncef Mouhoudhoire avant d’ajouter : »pour le moment, le nombre de campagnes de sensibilisation à Mayotte peut se compter sur les doigts d’une main. À partir de là, nous ne pouvons pas dire que nous avons tout fait pour sensibiliser la population mahoraise. Pour autant, si les maires des communes tiennent leurs engagements, cela permettra la mutualisation de nos forces et nous pourrons toucher un plus large public. Nous pourrions arriver à diminuer significativement le nombre de séropositifs et peut être, qui sait, en finir avec cette épidémie d’ici 2030″. 

 

Une récompense pour les communes assidues

Chaque année, l’association Narike M’sada valorisera les communes qui auront déployé des moyens pour informer, accompagner et inciter les habitants à se faire dépister. « Nous allons essayer de créer un comité composé de l’ARS, du département et de l’association pour imaginer une récompense afin que chaque commune qui s’engage dans la lutte contre le sida soit reconnue », assure Moncef Mouhoudhoire. 

 

 

 

 

Un an ferme pour le marchand de sommeil de Pamandzi

L’homme d’une cinquantaine d’années qui, résidant à Pamandzi, était accusé d’aide au séjour d’étrangers en situation irrégulière et d’hébergement dans des conditions contraires à la dignité humaine a été reconnu coupable mercredi par le tribunal correctionnel et condamné à un an de prison ferme et 30.000 euros d’amende. 

Il hébergeait des clandestins dans des conditions contraires à la dignité humaine : rats, cafards, toits de tôle troués laissant passer la pluie dans les chambres, sanitaires insalubres et insuffisants, douche servant également de toilettes, risques d’incendie, d’électrocution et d’intoxication au monoxyde de carbone… Hier, l’homme d’une cinquantaine d’années accusé de tels faits a été reconnu coupable d’aide au séjour d’étrangers en situation irrégulière et a écopé d’un an de prison ferme et de 30.000 euros d’amende – ce montant correspondant aux sommes qu’il a perçues durant les quatre ans de cette activité illégale. Sur deux terrains lui appartenant ainsi qu’à sa famille, le prévenu (qui réside à Pamandzi) disposait d’une maison en dur et louait plusieurs cases en tôle et chambres à sept familles soit à une trentaine de personnes au total dont plusieurs en situation irrégulière. En juillet dernier, le prévenu, membre du collectif des citoyens de Petite-Terre et agent de sécurité au conseil départemental, affirmait devant les caméras de Mayotte La 1ère avoir enjoint ses locataires en situation irrégulière de quitter les lieux et avoir pris part à une campagne « demandant à tous ceux qui logent des irréguliers de s’en défaire parce qu’il va se passer des choses et que la justice va se mêler de tout ça ». Il avait lui-même été placé en garde à vue dans les locaux de la police aux frontières puis déféré devant un juge pour de tels faits. Il avait également prétendu lors de l’audience ne toucher que 450 euros mensuels pour les différents loyers alors que le président estimait plutôt cette somme aux alentours de 700 euros. En effet, d’après des témoignages entendus lors de l’audience, certains locataires payaient jusqu’à 150 euros de loyer, auxquels il fallait ajouter 150 euros de caution et 100 euros de charges (eau et électricité, par mois). 

Alors que le parquet avait requis 15 mois de prison ferme et la confiscation du terrain saisi lors de la procédure, le tribunal correctionnel a estimé hier que la confiscation constituait « une peine financière injustifiée ». D’autre part, il a informé le condamné que la peine d’un an d’emprisonnement pourrait être transformée en une autre peine (type travaux d’intérêt général) par le juge de l’application des peines « en fonction de [sa] situation personnelle ».  Le condamné et le parquet ont dix jours pour faire appel.

 

 

Affaire Nafouanti | Douze mois avec sursis requis contre le conducteur

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Le violent accident du boulevard des crabes au cours duquel une jeune femme avait eu la jambe sectionnée cet été a été jugé ce mardi au tribunal correctionnel de Mamoudzou. L’affaire avait fait grand bruit et suscité de nombreuses interrogations, alors qu’un délit de fuite avait d’abord été envisagé par les enquêteurs, avant d’être écarté. À l’encontre du conducteur, le parquet a requis une peine de douze mois d’emprisonnement avec sursis, un an de suspension de permis,  300 euros d’amende pour « défaut de maîtrise » et un stage de sensibilisation à la sécurité routière. 

L’émotion était vive et le public nombreux ce mardi dans la salle d’audience. Nafouanti, la jeune victime, était présente avec son époux et sa famille sur le banc des parties civiles. En béquilles, puisque l’accident dont il était question ce mardi lui a coûté une partie de sa jambe gauche, amputée au dessus du genou cet été. L’homme qui s’avance à la barre pour entendre les faits qui lui sont reprochés – car il s’agit bien d’un homme, et non pas d’une femme, comme cela a pu être dit – est âgé de 35 ans. Né en Côte d’Ivoire, il ne s’agit pas non plus d’un mzungu, comme certains témoignages, relayés dans la presse, l’avaient d’abord laissé accroire. L’homme est en revanche bien militaire, affecté au détachement de la légion étrangère (DLEM) de Dzaoudzi. 

Il comparaît pour avoir percuté, au volant de sa Renault Mégane, une jeune femme de 21 ans et son mari qui rentraient à leur domicile de Petite-Terre, à scooter et en sens inverse, le soir du 30 juillet, sur le boulevard des crabes à Dzaoudzi. L’homme est poursuivi pour « défaut de maîtrise » de sa voiture et « blessures involontaires par conducteur de véhicule terrestre à moteur », la jeune femme ayant écopé d’une Interruption Totale de Travail (ITT) de plus de trois mois et son époux, d’une ITT d’un jour, à cause d’une entorse au doigt. De lourdes préventions, aggravées par la présence d’alcool dans le sang du conducteur au moment de l’accident – 0,61 mg/L de sang – et d’une vitesse jugée « excessive eu égard aux circonstances ». Les circonstances ? Une sortie de barge agitée avec de nombreux véhicules déboulant en tous sens et une route accidentée : « déformée », « déplorable », « défoncée », énumère le président Pascal Bouvard à l’audience. Une route qui a d’ailleurs été rénovée depuis. Vers 22h30, ce 30 juillet, les gendarmes sont avisés qu’un grave accident vient de se produire. Le choc est d’une violence extrême, à tel point que la jambe de la jeune femme sera retrouvée à 20 mètres du point de collision. Deux versions s’affrontent ensuite. Le couple à scooter affirme qu’ils roulaient lentement, « peut-être 35, 45 km/h », parce que Madame ne se sentait pas bien. L’époux indique que la voiture est arrivée face à eux à vive allure, et en zigzaguant. Il assure également avoir toujours roulé bien dans sa voie, à droite, contrairement aux dires du conducteur de la Renault Mégane.

« Aujourd’hui je ne peux plus rien faire toute seule »

Ce dernier prétend en effet que le deux-roues circulait au milieu de la route, pour éviter les nombreux nids de poule sur la chaussée. S’il reconnaît avoir consommé de l’alcool pendant le repas du soir – environ un litre de bière – le prévenu assure que cela n’a « à aucun moment altéré (son) jugement ou (sa) conduite ». Il nie aussi avoir jamais eu l’intention de fuir les lieux, comme cela avait été dans un premier temps envisagé par les enquêteurs, avant d’être écarté, suscitant de nombreuses conjectures sur de possibles connivences avec le prévenu, de par son statut de militaire. S’il a quitté la scène de l’accident, pendant quelques minutes, celui-ci affirme que ce n’était que pour éloigner sa fille de onze ans qui se trouvait à bord avec lui. Pas blessée, mais « paniquée ». Il serait ensuite revenu sur le boulevard, mais sans se dénoncer directement à la « quinzaine de jeunes » témoins rassemblés-là, et qui le recherchaient. Là encore, deux versions se font face : le mari de Nafouanti répète qu’il n’a pas vu le militaire revenir ce soir-là, l’autre maintient ses propos : « Lui ne m’a pas vu, mais moi, si ».

Ce n’est qu’une fois installé, à sa demande, dans une voiture de gendarmes, que le légionnaire se serait désigné auprès d’eux comme étant le conducteur impliqué, explique-t-il à la cour. Cette version avait d’ailleurs été confirmée quelques jours après les faits par le procureur de la République Camille Miansoni – qui requiert ce mardi – pour expliquer l’abandon des poursuites pour le délit de fuite. 

Debout à la barre, avec aplomb, la jeune Nafouanti accepte à son tour de livrer son témoignage. »Pourquoi est-ce qu’il n’est pas venu me voir ? », demande-t-elle à propos du prévenu. Une question à laquelle Me Hesler, l’avocat de la défense, répondra en expliquant que dans le « contexte post-accident », la question s’était posée et qu’il était apparu préférable d’attendre. »Ce n’était pas du tout un manque de considération », défend-il.

« Aujourd’hui, j’ai un enfant de deux ans qui vient me voir pour me demander où est ma jambe et qui vient essayer de me mettre une chaussure », lâche la jeune femme, dont la voix finit par se briser. »Aujourd’hui, je ne peux pas faire la cuisine toute seule, je ne peux pas m’occuper de mon fils, je ne peux rien faire toute seule ». Et la jeune femme de raconter qu’elle revit quotidiennement la scène de ce soir où elle a eu l’impression d’être un « animal blessé sur le bord de la route ». 

L’avocate des parties civiles, Me Marchand, demande d’importants dommages et intérêts en réparation des nombreux préjudices de sa cliente, qui, en raison du « no man’s land médical » dans lequel elle se trouve et de ses conditions de vie précaires, n’a pas pu avoir accès ni à une prothèse provisoire, ni à une rééducation adaptée. La décision sera rendue le 4 décembre. Les intérêts civils seront fixés lors d’une audience distincte. 

 

 

 

 

 

 

Sécurité routière | De nombreux accidents au cours du week-end

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La gendarmerie a recensé pas moins d’une dizaine d’accidents entre samedi et lundi matin, causant un seul blessé grave. Une tendance a priori normale en cette période de l’année, où les premières averses commencent à s’abattre sur Mayotte. Le bilan officiel de ce mois de novembre devrait être publié la semaine prochaine par la préfecture. 

C’est l’accident le plus grave de ce week-end. Un enfant de 5 ans s’est fait traîner sur une dizaine de mètres sur la route nationale à l’entrée de la ville de Koungou, samedi en fin d’après-midi. Une voiture qui circulait en direction de Mamoudzou l’a percuté alors qu’il traversait la chaussée. Dans un état grave, la jeune victime a été transportée en soins intensifs au centre hospitalier (CHM). Son pronostic vital n’est toutefois pas engagé, fait savoir la gendarmerie. 

Le même jour, à 21h15, une auto a percuté un scooter sur la commune de Mamoudzou. Le conducteur du deux -roues, légèrement blessé, a immédiatement été pris en charge par les urgences. Le chauffeur de la voiture, quant à lui, a pris la fuite sans être identifié. 

Dimanche, en auto, une femme enceinte de huit mois a fait une sortie de route à Sada, avant de terminer sa course quelques mètres en contrebas d’un ravin. Lors de son transfert vers le CHM, la jeune femme de 21 ans était consciente, sans blessures graves constatées, mais en état de choc. 

Plusieurs accidents du même genre ont eu lieu dans la journée : à Dembeni, une voiture s’est encastrée dans un arbre après avoir quitté la chaussée. À son bord, une seule personne, immédiatement prise en charge par deux infirmières présentes sur les lieux. Par précaution, la victime légèrement blessée a été transférée au CHM. 

Redoublez de prudence pendant la saison des pluies

À Bambo Est, un autre véhicule transportant 3 personnes a également quitté la route, ne causant qu’un blessé léger. À proximité, quelques minutes plus tard, un scooter a chuté, supposément en voulant éviter la première voiture accidentée. Mais à l’arrivée des pompiers, le deux roues et son conducteur semblaient avoir déjà repris leur chemin. Deux autres sorties de route sans dégâts déclarés ont eu lieu à Sada.  

Enfin, à Bandraboua, dimanche après-midi, un arbre s’est abattu sur une voiture en train de rouler, ne faisant aucun blessé. La circulation a pu être rétablie une heure et demie plus tard, le temps que les sapeurs-pompiers découpent le tronc à la tronçonneuse. 

Concernant les accidents signalés sur Facebook à Kahani, Combani et Chiconi, où un véhicule aurait été remorqué, la gendarmerie ne dispose à ce jour d’aucune information. Selon les forces de l’ordre interrogées par Flash Infos, ce mois de novembre n’est pas « particulièrement plus accidenté » qu’à l’accoutumée. Les chiffres de la préfecture seront dévoilés début décembre. 

Si la saison des pluies n’a pas encore gagné Mayotte, les premières et brèves ondées, comme celles de ce week-end, doivent toutefois faire l’objet d’une attention toute particulière.  « Ces averses lavent le bitume et  font ressortir les huiles et matières grasses sur la chaussée, la rendant plus glissante », prévient le chef d’escadron François Bisquert. « C’est trompeur, car cela peut provoquer des glissades, des dérapages voire des pertes de contrôle du véhicule ». Et ce même quand la route paraît sèche. 

 

Violences contre les femmes | « À Mayotte, les violences faites aux femmes touchent toutes les populations »

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La journée internationale de l’élimination de la violence à l’égard des femmes se déroule tous les 25 novembre. Pour l’occasion, l’Association pour la Condition Féminine et Aide aux Victimes (ACFAV) de Mayotte organise chaque année un colloque sur cette thématique. Au programme de cette édition 2018 : les violences sexuelles, un problème ancré sur le territoire où la sensibilisation devient une priorité. 

Elles vivent dans des bangas ou dans des quartiers résidentiels. Elles sont mères de famille ou jeunes mineures. À Mayotte comme ailleurs, la violence touche toutes les femmes, sans distinction sociale ou ethnique. Beaucoup n’en parleront jamais, particulièrement sur un territoire où la tradition religieuse pousse à la discrétion. C’est pourquoi l’Association pour la Condition Féminine et Aide aux Victimes organisait, vendredi à Mamoudzou, un colloque adressé aux associations et aux professionnels  du milieu social et médico-juridique. « Nous devons leur fournir tous les outils pour qu’ils facilitent la prise en charge des femmes victimes de violences », défend Djamael Djalalane, directeur général de l’ACFAV. 

Ancrée sur le territoire mahorais depuis 1986, l’association propose quatre services d’accompagnement : un bureau d’aide aux victimes ; un accueil de jour ; un point info pour les familles et un hébergement provisoire. Depuis le mois d’octobre, 48 femmes, victimes de violences conjugales, ont sollicité l’accompagnement de la structure. Car c’est bien au sein du foyer qu’occurrent la majorité des agressions, qu’elles soient psychologiques, physiques ou sexuelles. 

Contre ce phénomène, « nous étudions la mise en place du Téléphone Grave Danger (TGV) à Mayotte », explique le procureur de la République Camille Miansoni. Ce dispositif, déjà appliqué en métropole, met à disposition des conjointes violentées un appareil géolocalisé qui, en actionnant un simple bouton, permet l’intervention rapide des forces de l’ordre. Autre mesure, déjà en vigueur dans le 101ème département, l’exclusion du mari violent du domicile conjugal, sur ordre du procureur. À ce jour à Mayotte, aucun suivi, médical notamment, des auteurs de violences n’est mis en place.   

Pour autant, « Les violences faites aux femmes touchent toutes les populations », déplore Noera Mohamed,  déléguée régionale aux droits des femmes. « Il y a eu même un cas, en école primaire, où une jeune mahoraise a subi une agression sexuelle de la part de ses camarades ». Contre cette banalisation de la violence, la brigade de prévention de la délinquance juvénile a mené des campagnes de prévention dans tous les établissements scolaires de l’île.  

Puis, il y a ces femmes en situation irrégulière, particulièrement vulnérables. Elles représentent à elles seules près de 10 % des victimes prises en charge par l’ACFAV. « Ici, on ne regarde pas la situation administrative », commente Djamael Djalalane, alors que beaucoup de clandestines refusent de porter plainte par peur d’être chassées du territoire. Alors, au sein de l’association où neutralité et confidentialité sont de mise, ces femmes, ainsi que les autres, peuvent prétendre à un logement provisoire pour une durée de deux semaines. 

Les travailleuses du sexe, elles aussi, prennent rarement la parole contre les violences qu’elles subissent, en dépit des opérations de sensibilisation menées par le planning familial. « Il s’agit de leur gagne-pain, et nous n’avons pas assez d’alternatives à leur proposer », regrette la déléguée régionale aux droits des femmes. Pis, « On observe de plus en plus un phénomène de prostitution juvénile ».  À ce sujet, Noera Mohamed entend mener rapidement une réflexion avec le vice-rectorat. En attendant, toute mineur victime de violence peut bénéficier de l’accueil de jour de l’ACFAV. 

Pour signaler toute forme de violence, appelez au 3919 Violences Femmes Info, un service gratuit et anonyme. 

 

 

Insalubrité : “Ce n’est pas digne d’une école de la République”

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Les parents des écoliers de Cavani Sud montent au créneau pour dénoncer l’état lamentable des établissements 1 & 2. La sécurité des enfants y serait menacée, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’enceinte. Malgré les avertissements, la municipalité ne souhaite pas s’étendre sur la question.

Entre les plaques de béton bancales et les caniveaux à ciel ouvert, mieux vaut regarder où l’on met les pieds lorsque l’on se promène dans la cour de récréation de l’école de Cavani Sud. “Après deux heures de cours, on ne peut pas empêcher des enfants de se défouler et de courir partout”, lâche Hachim Mbaraka, père de deux garçons scolarisés en CP et en CE2. Pourtant, vu le champ de mines qui se dresse face à eux, la vigilance reste de bon conseil. “Il y a déjà eu quelques petites blessures, qui n’ont, heureusement, pas nécessité de déplacements jusqu’à l’hôpital”, repense-t-il, soulagé qu’un drame ne se soit jamais produit.

Papier à l’appui, Hachim énumère une liste non exhaustive de tous les soucis recensés dans l’enceinte : absence d’électricité dans la salle 13 depuis la rentrée 2017/2018, court-circuit et coupure de courant en cas de forte pluie, fuite d’eau dans la salle 5, porte de la salle 2 cassée depuis un mois, manque de protection à travers les barreaux, système d’alarme et extincteurs hors service, etc. Sans oublier l’insalubrité des sanitaires, ou encore la prolifération des chenilles dans les arbres. “Et quand on voit certains mobiliers, ce n’est pas digne d’une école de la République française. On est en 2018 tout de même” s’emporte le papa. “Dans certaines classes, les ventilateurs sont à deux doigts de tomber sur la tête de nos enfants.”

Attendre sur la route

Si les problématiques de l’intérieur de l’établissement irritent, celles de l’extérieur font bondir. En effet, ce n’est autre que le président des parents d’élèves, Abdou Ali, qui se charge bénévolement depuis sept ans de la sécurisation de l’entrée de l’école. Car les centaines d’enfants de Cavani 1 n’ont pas d’autre choix que de poireauter sur la route jusque 6h50 le matin et 12h20 le midi avant que la grille n’ouvre. “Les voitures descendent à toute vitesse du lotissement”, s’insurge-t-il. Pour ne rien arranger, le seul endroit un tant soit peu sécurisé à proximité vient d’être pris d’assaut par des poubelles. Alors pour faire entendre leurs revendications et exprimer leur indignation, les vingt délégués des parents d’élèves ont décidé de boycotter le dernier conseil d’école qui s’est tenu au début du mois. “Il n’y avait aucun représentant de la mairie. La municipalité ne se rend vraiment pas compte de la réalité” s’emporte Hachim. En cas de non réaction de la part des élus durant les vacances scolaires, le comité se laisse le droit d’aller manifester devant l’Hôtel de ville. Malheureusement, les précédents cris de colère ne jouent pas en leur faveur, puisque rien n’a bougé depuis plus de deux ans. “Est-ce un manque de moyens ou est-ce tout simplement de la mauvaise volonté ?”, s’interrogent les deux pères. Pourtant, ils se disent prêts à réaliser les travaux eux-mêmes, si les finances le permettent.”Certains d’entre nous travaillent dans le bâtiment. Si l’on nous donne du sable et du ciment, on peut très bien se débrouiller.” Surtout qu’ils ont déjà mis la main à la pâte en début d’année, en coupant les mauvaises herbes dans les caniveaux pour prévenir les risques de chute… Contacté, le service communication de la mairie de Mamoudzou ne souhaite pas s’exprimer sur la question.

 

Politique | Nos élus sont-ils démissionnaires ?

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« Mais où sont nos élus ? » La question se pose souvent au sein de la population. Il faut dire que face à toutes les problématiques que rencontre Mayotte, bien peu nombreux sont ceux qui semblent se mobiliser et vouloir prendre les dossiers à bras le corps. Alors, désintérêt, paresse, travail à l’abri des regards, manque de pouvoir sur le développement local, ou manque de moyens pour mettre en place une véritable évolution de l’île ? Éléments de réponse avec quelques-uns d’entre eux.

« Le problème de Mayotte, ce sont ses élus » : cette phrase si souvent entendue traduit, plus qu’ailleurs encore, l’apparent désamour qui existe entre la population d’un côté, et ses élus de l’autre. Il faut dire que sur un territoire en plein développement, les priorités sont nombreuses, les urgences aussi, et les attentes, de fait, sont énormes. 

Un exemple ? On s’en souvient encore : aux débuts de la crise sociale traversée par Mayotte en début d’année, nombreux étaient ceux à regretter que les élus ne s’expriment ou ne se positionnent dès le début du mouvement. Pis : il aura fallu attendre que la grogne dégénère en blocage permanent pour que quelques-uns d’entre eux entrent en scène et jouent un rôle d’un côté ou de l’autre de la barrière. « Mais où sont donc nos élus », se demandaient alors beaucoup de Mahorais, constatant que les revendications sociétales d’alors n’étaient portées que par les collectifs de citoyens et les syndicats. Un exemple parmi d’autres des reproches qui, souvent, sont faits aux élus du territoire, accusés au choix de palabrer, de toucher des indemnités et de se montrer, au lieu d’œuvrer au développement d’un territoire où l’urgence et les priorités règnent en maître. Mais est-ce légitime ? La conclusion du « tous pourris » est-elle si évidente que cela ? 

Il y a quelques mois, le député Mansour Kamardine était un des premiers à prendre position dans le mouvement social de lutte contre l’insécurité qui allait, durant sept semaines, paralyser la vie de l’île. Il remarque les reproches récurrents faits aux élus, notamment lors des mouvements sociaux et manifestations qui ponctuent régulièrement le développement du 101ème département. « Il y a depuis toujours, et cela sera toujours le cas, une relation singulière entre l’élu et l’opinion, remarque-t-il. On veut son élu sans le vouloir. Quand il n’est pas là, on crie au scandale, et quand il est là, on lui reproche de capter une manifestation, de faire de la récupération politique. »

Une sorte de bipolarité populaire classique doublée, selon le parlementaire, d’un manque de sensibilisation aux enjeux d’une grève. « Mayotte n’a pas encore de véritable culture de la manifestation, poursuit-il. Tout peut dérailler pour un point ou pour un autre. Il y a des gens qui décident d’organiser une manifestation sans solliciter l’avis des élus. C’est une liberté tout à normale en République, mais il ne faut pas ensuite reprocher à ces mêmes élus de ne pas participer au mouvement alors qu’ils n’ont ni été sollicités ni tenus au courant. » 

Un manque de connaissance du rôle de l’élu ?

Un manque de connaissance des tenants et des aboutissants qui se retrouverait également dans le rôle même attendu d’un élu, selon Mansour Kamardine. Le député continue : « Nous [la population de Mayotte] n’avons pas encore non plus une bonne connaissance du fonctionnement des institutions de la République. Prenons l’exemple de la grève chez Total ou de celle chez Colas. Il s’agit là de grèves organisées par des syndicats au sein d’entreprises privées, même si Total a une mission de service public. Il est difficile d’imaginer qu’un élu intervienne dans une entreprise pour lui dire ce qu’elle doit faire ou pas en son sein. Oui, nous sommes en droit d’exiger de Total, par exemple, le fonctionnement normal d’un service pour la population, mais nous n’avons pas à demander une augmentation pour les salariés. Ce sont deux champs d’intervention différents, et [la population] n’a pas toujours le recul nécessaire pour les dissocier. Cela donne ainsi la sensation que les élus sont absents, alors que nombre d’entre eux participent à la vie de la cité quand ils le peuvent, c’est-à-dire quand cela relève de leur domaine d’intervention. » Un autre exemple ? « Lorsque des femmes tentent d’aller bloquer le Conseil départemental pour protester contre le refus de l’Union des Comores de récupérer ses ressortissants renvoyés à la frontière. Cette institution n’a aucune compétence en la matière, aucune compétence pour ouvrir ou fermer le service des étrangers de la préfecture ou pour délivrer ou non des visas. Tenter de bloquer le Département, c’est le désigner coupable alors que l’immigration clandestine n’est pas dans son champ d’action. »

 

« La grève d’avril 2018 m’a marquée, beaucoup d’efforts mobilisés de la part de la population pendant plus d’un mois. Beaucoup de promesses des politiques aussi, mais toujours rien. La politique à  Mayotte n’est que manipulation, beaucoup de paroles qui ne font pas avancer l’île. Le conseil que je peu donner aux élus et à l’État, c’est de mener des actions simples et efficaces auxquelles le  mahorais pourra s’identifier. »

Abou le blanc, 40 ans

 

La structure même de la Cinquième République en rajouterait à une opacité très présente à Mayotte en ce qui concerne le rôle de l’élu parlementaire qu’il est : « Elle a voulu que la force appartienne à l’exécutif, et non à l’élu. Celui-ci a le ministère de la parole, de l’explication, du compte rendu à la population, mais pas celui de la décision. » C’est ce qui ne serait pas toujours compris ici, « mais il faut accepter les critiques en laissant le temps à chacun. Avec lui, les perceptions s’affineront et chacun fera peu à peu la part des responsabilités. »

Même constat pour le sénateur Thani Mohamed Soilihi. « Contrairement à ce que certains peuvent penser, les élus ne peuvent pas tout faire. » Il relève également des spécificités sociétales expliquant la responsabilité systématiquement rejetée sur les élus du territoire. « Il y a à Mayotte un cocktail explosif. Dans cette société orale ou règnent parfois les fake-news, le populisme et la manipulation, les citoyens accusent facilement les dirigeants d’incompétence. Mis bout à bout avec le désamour général des Français envers leurs élus, on en arrive là », déplore-t-il. 

« La départementalisation de Mayotte s’est faite sans aucune préparation et explication des conditions à remplir pour être un département français. Je n’ai pas aimé la manière brusque de ce référendum de 2009. La population doit faire bouger les élus, car c’est elle qui les ont élus. »

Moina, 30 ans  

« Ce qui est fait sans vous est fait contre vous »

Pour Issa Issa Abdou, quatrième vice-président du Conseil départemental en charge de l’Action sociale, de la Solidarité et de la Santé, le constat est également dur. « Il y a des élus dévoués au territoire et qui travaillent beaucoup pour lui. Ils ne sont pas des personnes qui ne sont là que pour prendre leurs indemnités », répond-il en citant son propre exemple d’élu du Département, de président du conseil de surveillance du CHM, et de membre du conseil d’administration de la Société immobilière de Mayotte (Sim), qui « ne perçoit que ses indemnités d’élus du Conseil départemental. » Et de poursuivre : « Comme d’autres élus, je me lève chaque jour à quatre heures du matin et je rentre tard chaque soir à mon domicile par engagement. L’idée selon laquelle les élus ne sont pas à la tâche est erronée. Cette perception des gens n’est pas justifiée. » 

Pour autant, le vice-président n’exclut pas la responsabilité des responsables politiques dans ce ressenti. En cause ? Un manque de communication qui rendrait opaque l’action des élus locaux : « Nous ne sommes sans doute pas bons sur ce point, il faut le dire. Nous ne communiquons pas assez vraisemblablement, alors que le savoir-faire est aussi important que le « faire savoir ». » Une vitrine pour l’action publique telle que des réunions publiques d’information ou des comptes rendus de mandat réguliers permettraient donc de limiter ce sentiment d’inactivité ? « Oui, mais aussi en trouvant une façon de mieux inclure la population dans les décisions prises, car les gens pensent que ce qui est fait sans eux est fait contre eux. C’est classique. La démocratie participative est à inventer. » Cette démarche inclusive est une des volontés de l’actuel président du Conseil départemental, Soibahadine Ibrahim Ramadani, qui défend un toilettage institutionnel de la collectivité : « Une nécessité pour ne pas être déconnecté de la population, soutient son vice-président. Avec cette réforme, il serait possible d’organiser des mini-référendums pour connaître précisément la volonté des habitants sur telle ou telle question, par exemple. »

« Face à l’immobilisme des élus, le peuple reprend le pouvoir par l’intermédiaire des collectifs et des associations. C’est pour le bien-être de Mayotte. Les élus manquent d’anticipation, ils doivent se bouger. Ils ne sont pas capables d’assumer leurs responsabilités par manque de compétences, ou  parce qu’ils ne mesurent pas l’ampleur du travail qu’ils ont à faire. »

Sarah, 50 ans

Zaïdou Bamana, journaliste et écrivain, auteur notamment d’ouvrages sur l’histoire politique de Mayotte, regrette lui aussi la généralisation parfois faite au sujet de l’incompétence des élus. « Certains sont manifestement déconnectés et incapables de manager des équipes et de mettre en place des projets concrets et réalisables, c’est vrai. Mais d’autres sont très actifs et compétents. Dire que tous nos élus sont mauvais, c’est faire une généralité peu objective. » D’autant qu’élus des collectivités ou parlementaires, les responsabilités ne sont pas les mêmes. Et, en termes de gestion et de réalisation, ce sont les collectivités qui sont souvent pointées du doigt. C’est vrai notamment pour le Conseil départemental, régulièrement accusé d’être inactif. Un problème de gestion qui tiendrait également à une dichotomie entre son statut de département et son champ d’action réel, selon l’observateur. « À l’heure actuelle, sa compétence emblématique est celle du social, détaille Zaïdou Bamana, mais il en a d’autres. Le problème est que le Conseil départemental n’est pas assez mûr institutionnellement pour les assurer. Cela renforce son incapacité à mener des projets à bien. Pour cela, il faut des hommes qualifiés, mais aussi des institutions bien établies. Or, ce n’est pas le cas, notre Conseil départemental demeure comme le Conseil général de l’époque.  Tant qu’il n’aura pas intégré pleinement les compétences qui font de Mayotte un département et une région, il connaîtra des problèmes de fonctionnement. D’où la nécessité d’achever ce que certains appellent le « toilettage institutionnel. » Sinon, nous resterons dans un contexte d’instabilité institutionnelle qui ne permet pas de mettre en œuvre le travail du Département. Dans les textes sur la départementalisation, les compétences sont réparties entre l’État et le département. Ce n’est pas encore le cas ici, faute à un statut encore en devenir. » 

Des compétences, mais un manque de moyens

Et puis demeure la vaste question des moyens. Sur ce point, les avis convergent. Zaïdou Bamana poursuit : « En 2004, dans le cadre de la décentralisation, il y a eu transfert de compétences du préfet vers le président du Conseil général. Il aurait dû s’accompagner d’un transfert de moyens, mais ce ne fût pas le cas. Quand c’est ainsi, une collectivité se retrouve forcément en difficulté. Aujourd’hui, le Conseil départemental assume des compétences sans disposer des ressources pour. C’est alors très facile d’accuser les élus d’être mauvais si l’État ne met pas les moyens nécessaires. « 

« Les politiques de Mayotte et les syndicalistes sont les premiers responsables de tous nos maux, ils nous manipulent pour arriver à leurs fins. Les élus de Mayotte savent pourquoi ils ne bougent pas, ils pensent beaucoup à leurs intérêts personnels. Je trouve regrettable que le Président Emmanuel Macron ne vienne pas à Mayotte nous dire franchement qu’il est avec nous, sa venue aurait rassuré les Mahorais. »

Maï, 35 ans

Cette question du financement est cruciale au point d’avoir fait l’objet d’un rapport de la délégation sénatoriale à l’outre-mer, à laquelle participe le sénateur Thani. Plus que de moyens donnés par l’État aux collectivités, il y s’agissait d’accès aux fonds nationaux et européens, un des leviers pour financer des infrastructures et projets. De quoi rendre visible l’action des élus sur le territoire. Conclusion : cet accès doit être facilité. « La difficulté pour bénéficier des ces fonds est réel, commente le parlementaire. On continue de construire notre île, en se rendant compte que par rapport aux besoins, l’ingénierie doit être complétée pour y accéder. Dans cette configuration, soit l’État et l’Europe nous fournissent leur concours, soit les normes pour avoir ces fonds doivent être simplifiées. » Au final, la problématique demeure : Mayotte et ses collectivités peinent à jouir de ces sources de financement qui permettraient de rendre visible l’action des élus.

Cette question d’accès aux fonds, en particulier les fonds européens, Issa Issa Abdou la soulève aussi. Selon lui, elle explique en partie que les élus passent pour inactifs aux yeux des citoyens. « L’autorité de gestion des fonds européens est gérée par l’État. C’est lui qui décide. Or, ses priorités ne sont pas les mêmes que celles des élus locaux, qui connaissent les besoins du territoire et les attentes de la population. » Quelles sont-elles ? « L’amélioration des conditions de circulation, la piste longue, des réalisations concrètes. Les résultats de la consultation des Assises de l’Outre-mer le montrent d’ailleurs très bien. »  Et, prenant un exemple : « La préservation des abeilles sur le mont-Choungi, c’est très bien, mais ce n’est pas pour l’heure ce qu’attend la population. » 

 

« Les élus ne se bougent pas en ce moment, car ils n’ont rien à gagner. Nous les reverrons dès qu’une opportunité politique se présentera ».

Adidja, 32 ans

 

C’est donc faute de moyens que bien peu d’infrastructures visibles par tous sortiraient de terre, laissant penser que nos élus sont endormis. « Regardez l’exemple de La Réunion, conclut le vice-président : elle a la main sur ces fonds, et construit la route du Littoral. Nous nous battons pour y avoir accès nous-mêmes, et lorsque ça sera le cas, alors il y a aura des actions. »

D’un État trop présent à un État pas assez présent…

Il n’en demeure pas moins qu’au-delà du manque de moyens accordés aux collectivités locales pour mettre en place des projets nécessaires à la population et ainsi rendre visible l’action des élus, la gestion des communes, du Département et d’autres établissements publics locaux révèle nombre de dysfonctionnements. Des abus régulièrement épinglés par la Cour des comptes (CDC). Systématiquement aux sommaires de ses rapports : des embauches trop nombreuses, des fonds mal employés, ou un manque de contrôle dans leur attribution. De quoi douter sérieusement de la compétence de nos décideurs politiques, mais aussi parfois de leur intégrité. C’est un des combats du sénateur Thani. « On peut penser ce que l’on veut, mais il est difficile de taxer les rapports de  la CDC de partialité, reconnaît-il. Ses constats sont justes. Mais là où le commun des citoyens attend que des suites soient données à ces erreurs de gestion, il n’y a rien de contraignant. Par ailleurs, il faut rappeler que l’on s’arrête souvent sur les conclusions de la CDC, alors que ses publications font aussi connaître des pistes d’amélioration, tout comme le pourquoi du comment de cette mauvaise gestion. »

Pour Mansour Kamardine, si ces mauvaises gestions sont réelles, il faut toutefois savoir faire la différence entre la responsabilité de l’élu, et celle de son administration. Il le concède : « Il y a des erreurs, c’est vrai, et elles coûtent parfois chères en argent public, mais là encore Mayotte a besoin de temps pour s’éveiller. Dans une collectivité, quelle qu’elle soit, il y a deux parties : le volet politique, avec le président et le cabinet, et le volet administratif avec le directeur général des services (DGS) et ses services. Il est vrai que l’opinion ne fait pas toujours ce distinguo, pourtant bien défini dans le Code des collectivités. » L’exemple le plus récent est celui du supplément familial de traitement, dont le versement à des agents de trois fonctions publiques locales s’est révélé abusif, faute de contrôles rigoureux (voir Mayotte Hebdo n°856). Des indus coûteux qui font que Mayotte a consommé 19 % de ce fonds national auquel cotisent 16 000 collectivités, alors qu’elle ne représente que 0,2 % des structures bénéficiaires.  » Vous pensez vraiment que le président du Conseil départemental ou d’une autre collectivité sait qu’untel n’a pas cinq enfants, mais qu’un seul? Non, il l’a appris comme tout le monde. Il y a des dysfonctionnements, il en est responsable et doit les faire corriger, mais n’est pas à l’origine du problème. On lui mettra la faute sur lui, mais factuellement, il ne peut pas être  au courant de tout », défend le parlementaire.

« Il faut que nous prenions conscience que pour occuper des fonctions politiques, il faut avoir les compétences, avoir la tête sur les épaules et avoir un réel sens des responsabilités. Si certains de nos élus ne sont pas à la hauteur, ils doivent se retirer et laisser la place à ceux qui sont capables et ont l’envie de faire avancer Mayotte. Les pots-de-vin et les intérêts personnels ont pris le dessus sur les politiciens mahorais. »

Anamika, 24 ans

Un argument qui en rejoint un autre, mis en avant par Zaïdou Bamana. Les déficiences mises sur le dos des élus seraient en partie dues à un manque de formation au sein des collectivités. En somme, comment attendre d’élus et de cadres gérant les collectivités qui, pour certains, ont un manque de connaissance de leur fonction, une gestion saine et pertinente ? D’autant que les transferts de compétence l’accompagnant n’ont pas été suivis d’un travail de formation. Un manque qui conduirait aujourd’hui, de fait, à des erreurs récurrentes. « Il était pourtant acté, au moment de la départementalisation, un plan de formation des cadres mahorais, rappelle l’écrivain. Mais il a été abandonné. Près de 1 000 Mahorais devaient être formés pour accompagner le développement social et économique du territoire. Il faut donc aujourd’hui relancer ce plan, car il est impossible de gérer une institution correctement s’il n’y a pas de cadres formés pour. » Ce plan de formation, d’autres en bénéficient pourtant : « La Nouvelle-Calédonie, qui envisage une sortie de la République, dispose d’un tel plan. Et Mayotte, qui a tout fait pour y rester, elle, n’en a pas. » Las.

« C’est maintenant que nous allons voir quels sont les bons et les mauvais élus »

« Le Département est âgé une dizaine d’années seulement, rappelle également l’écrivain. Comment peut-on faire autant que ceux des Antilles ou que La Réunion alors que cela fait 70 ans qu’ils ont accédé à ce statut ? (…) Depuis 1841, cette île a connu 10 ou 20 années de développement avec l’État au tout début de la présence française, puis un siècle sans rien, jusqu’à 1976 où son développement a pu vraiment commencer. »

 Une situation qui serait en voie de changement. Avec des comptes épurés, et une gestion améliorée,  d’autres sources de financement sont désormais disponibles pour faire émerger des projets. L’agence française de développement (AFD), signe ainsi régulièrement des conventions avec certaines communes à la gestion rigoureuse pour leur permettre de répondre aux besoins. Sada pour sa mini déchetterie expérimentale, Kani-Kéli pour des infrastructures durables, Acoua pour divers investissements, ou encore Dembéni. Des projets apparaissent, rendant ainsi visible l’action du monde politique local. « La ministre des Outre-mer, Annick Girardin, disait qu’il n’y avait pas de projets à Mayotte, mais on se rend désormais compte que si. Il y a des projets, et ils se réalisent lorsqu’ils trouvent les financements », se réjouit Zaïdou Bamana, avant de conclure « C’est maintenant qu’on va pouvoir distinguer les bons des mauvais élus. »

En attendant des résultats concrets, tous prônent la pédagogie. Soit en incluant plus la population dans les processus de décisions, soit en communiquant plus sur les actions menées. Et Mansour Kamardine de conclure, relativisant la rupture entre le citoyen et son représentant politique : « En pleine crise, au mois de mars et avril, il y a eu une élection partielle. Les Mahorais se sont malgré tout déplacés en masse dans des conditions difficiles. Je n’ai alors pas ressenti de désamour, mais un grand amour, au contraire. » Et surtout de fortes attentes.

Favoritisme : Majani condamné à 12 mois de prison avec sursis

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Le tribunal correctionnel a condamné hier le maire de Mamoudzou à douze mois d’emprisonnement avec sursis et à 10.000 euros d’amende pour délit de « favoritisme » dans l’attribution de marchés publics. Trois cadres de la Ville ainsi que la gérante d’un cabinet d’architectes ont également écopé de peines allant de deux à dix mois d’emprisonnement avec sursis. En revanche, aucune sanction d’inéligibilité n’a été retenue par le tribunal. Le parquet a dix jours pour faire appel de la décision.

« Il résulte des éléments du dossier que les faits reprochés à Majani Mohamed sont suffisamment établis, étant rappelé que la jurisprudence a déjà considéré : +que ne saurait se réfugier derrière une méconnaissance de la procédure d’appel d’offres le maire d’une commune depuis plus de deux ans+ ». Les mots sont sans ambages, dans le jugement rendu mercredi par le tribunal correctionnel à l’encontre du maire de Mamoudzou, condamné pour délit de « favoritisme » dans l’attribution de marchés publics. Le tribunal poursuit : « l’incompétence du prévenu n’est nullement exclusive de sa mauvaise foi dans la gestion des deniers publics ». La juridiction déboulonne ainsi sans aucun état d’âme la défense bancale du maire de Mamoudzou, Mohamed Majani, qui, comparaissant devant le tribunal le 7 novembre, avait admis peu connaître les règles de procédure des marchés publics avant cette affaire. Une défense qui n’a pas convaincu la cour, qui a prononcé à son encontre douze mois d’emprisonnement avec sursis et 10.000 euros d’amende. Sans retenir toutefois l’inéligibilité de trois ans requise par le parquet.

Pour rappel, sept prévenus, dont la commune et le maire de Mamoudzou, étaient accusés « d’atteinte à la liberté d’accès ou à l’égalité des candidats dans les marchés publics », autrement dit, de délit de  « favoritisme » pour des faits remontant à 2017. Le marché public incriminé concernait le réaménagement de la mairie annexe de Kawéni pour un montant d’1.5 million d’euros. 

Sept prévenus, cinq condamnations

Mohamed Majani a été reconnu coupable mercredi d’avoir notamment validé des candidatures non conformes et ce, alors que la préfecture l’avait alerté par courrier en septembre 2017 sur des « illégalités » et lui avait demandé de retirer le marché. En outre, l’élu n’a pas respecté, lors de l’attribution du marché, le délai minimum de onze jours à l’issue de la publication de l’avis d’intention de conclure au Journal officiel et n’a pas non plus daté certains actes d’engagement signés « au mépris du principe de transparence des procédures », déplore la cour. 

Si la mairie de Mamoudzou ainsi qu’un des chargés du service Aménagement de la Ville, Ahmed C.A., n’ont pas été reconnus coupables, les cinq autres prévenus – dont le maire – ont écopé de peines d’emprisonnement avec sursis ainsi que d’amendes. Le directeur Infrastructures de la mairie, Roger S., a été condamné à deux mois d’emprisonnement avec sursis, notamment pour avoir validé des rapports d’analyse d’offres comportant des anomalies. 

Le directeur général adjoint des services techniques de la Ville, Mohamadi Boina Hamissi, a été condamné à six mois avec sursis et 4.000 euros d’amende pour ne pas avoir pris de « mesures propres à sécuriser la procédure ». Sa demande de dispense d’inscription au bulletin n°2 du casier judiciaire (B2) a été rejetée. Le directeur général des services (DGS), Thoihir Youssouffa, a écopé de dix mois d’emprisonnement avec sursis et de 5.000 euros d’amende ainsi que d’une inscription au B2 pour les mêmes griefs que Mohamadi Boina Hamissi. Enfin, Fatima Z.A., la gérante du cabinet d’architectes chargé d’analyser les candidatures des entreprises, a été condamnée à huit mois avec sursis, 4.000 euros d’amende et l’inscription de cette peine au B2, pour avoir attribué des observations et notations « sans tenir compte de la réalité des offres des candidats ». 

Suite au délibéré, le procureur de la République, Camille Miansoni, s’est déclaré satisfait qu’il y ait « reconnaissance de la culpabilité ». Les « lourdes peines » prononcées constituent selon lui « une mise en garde à l’endroit de tous de la nécessité de respecter les règles en matière de marchés publics ». Cependant, il a rappelé que « cette décision n’est pas définitive à ce jour. Moi-même, j’apprécierais en fonction de la motivation de la décision la nécessité ou non de faire appel ». Le parquet et les condamnés ont dix jours à compter du délibéré pour faire appel des décisions rendues.

 

 

 

 

Décharges sauvages : « On en découvre tous les jours »

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À l’occasion de la Semaine européenne de la réduction des déchets, l’association environnementale des Gardiens du Littoral H.A.R organisait, lundi, une session de formation sur les filières REP (responsabilité élargie du producteur). L’occasion pour les bénévoles de l’association de s’informer sur les différentes méthodes de recyclage et de valorisation des déchets, afin de mieux sensibiliser la population à leur tour. 

Emballages, lampes, textiles, mobiliers, déchets électroménagers ou médicaux… À chaque déchet sa catégorie et ses méthodes de recyclage. Au menu de la première session de formation organisée par –  et pour – l’association des Gardiens H.A.R, lundi après-midi à la mairie de Mamoudzou : les filières REP (responsabilité élargie du producteur). Concernant les détritus électriques et électroniques, « ici à Mayotte, tous ceux qui vendent de l’électroménager, Kalo, Digital ou Ballou par exemple, importent leurs produits. La REP, ça signifie que celui qui fabrique ou s’occupe d’un produit est également celui qui doit gérer la collecte et la valorisation des déchets » générés par son activité, explique Franck Toy, responsable de la formation du jour. Elle s’inscrit dans le cadre de la Semaine européenne de la  réduction des déchets, pour laquelle plus de 12.000 actions sont prévues au cours de cette semaine, dans plus de 27 pays. Ce lundi, la petite vingtaine de « Gardiens », encadrés par leur président Antonio Tripicchio, étaient là pour s’informer, afin de mieux sensibiliser la population à leur tour. « Le message que vous allez faire passer, il est important, pour vous, mais aussi pour votre entourage, pour toute l’île », insiste le formateur. Les différentes filières, complexes, ne seront pas abordées en une seule fois par les bénévoles. Ce lundi, seules trois catégories de déchets ont ainsi été passées en revue : les DASTRI (déchets d’activités de soins et à risques infectieux et assimilés, en auto-traitement), les DEEE (déchets électriques et électroniques) et la filièredeslampes.Chaque filière a ses propres règles, ses propres lieux de collecte et de traitement, ainsi que ses acteurs dédiés. À cet égard, les déchets électroniques et électroménagers, en plus de la pollution visuelle qu’ils imposent aux riverains, constitueraient la catégorie la plus « dangereuse »,dans la mesure où ils peuvent occasionner des blessures, libèrent diverses substances toxiques comme le gaz et le mercure, et forment, une fois abandonnés dans la nature, autant de « nids à moustiques ».  

« Insister sur l’éducation des plus jeunes »

Quant à la filière des déchets textiles – thème de cette dixième édition de la Semaine européenne  –, elle cumule de nombreuses difficultés techniques et de gestion qui rendent d’autant plus nécessaire l’action de relais des partenaires associatifs comme les Gardiens. Ainsi, « les responsables de certaines filières ne bougent pas tant qu’il n’y a pas de porteur de projet, avance Franck Toy. Vous, en tant qu’agents de sensibilisation, vous ne savez jamais sur qui vous allez tomber. En allant parler d’une de ces filières dans votre secteur, vous allez peut-être rencontrer un porteur de projet », espère-t-il. Parmi les nombreuses questions et observations des jeunes bénévoles, ce lundi, celle de savoir si « les déchets sont en augmentation à Mayotte ». Réponse, sans concession, du formateur : « Oui, et c’est plutôt normal dans la mesure où le niveau de vie augmente et la consommation avec. »Dans la continuité de cette évolution, les décharges sauvages se multiplient : « On en découvre tous les jours à Mayotte », déplore-t-il. « Des déchetteries sont en construction (…) Les gens savent que le tri existe, mais allez dire à quelqu’un qui habite les hauts de Kawéni qu’il va falloir descendre et marcher un kilomètre pour jeter ses déchets, ça peut se comprendre aussi que ce soit compliqué. Parfois, on a la flemme aussi, tout simplement », rappelle-t-il, réaliste. « Par rapport aux déchets, il faut dire aussi que les citoyens mahorais n’aiment pas trier, ils veulent juste se débarrasser », renchérit l’un des participants. Et le formateur de lui faire remarquer que « c’est pour ça qu’il faut insister sur l’éducation des plus jeunes ». 

 

 

 

Gilets jaunes : des renforts à La Réunion

À l’occasion du 101ème Congrès des maires et des présidents d’intercommunalités de France qui s’est tenu lundi, la ministre des Outre-mer, Annick Girardin, est revenue sur le mouvement national des Gilets Jaunes qui fait de nombreux dégâts à La Réunion : « Près de 2.000 manifestants ont tenu 400 barrages sur le territoire. Ces manifestations ont laissé la place à des scènes de violences intolérables, notamment la nuit dernière (le dimanche 18 novembre, ndlr). Si je suis très attachée au droit de manifester, je le suis également en ce qui concerne la liberté de circuler et le respect de l’ordre public. Je suis en lien permanent avec le préfet de La Réunion qui a demandé des renforts qui devraient arriver de Mayotte dans la journée afin que nous rétablissions l’ordre rapidement. » Un choix dont s’est insurgé l’ancien président du conseil général de l’île aux parfums, Daniel Zaïdani. « Cette décision du gouvernement peut surprendre dans un contexte où Mayotte est déjà le département le moins bien loti en matière de forces de l’ordre. Aussi, je dénonce cette politique consistant à déshabiller Paul pour habiller Jacques. » En effet, un escadron de gendarmes mobiles est arrivé ce lundi en début de soirée de Mayotte, suivi par d’autres renforts envoyés depuis la métropole. Preuve que la situation est devenue critique sur place, Amaury de Saint-Quentin, le Préfet de La Réunion, a déclenché le volet ressources hydrocarbures du dispositif ORSEC dès 18h00 le jour-même afin de garantir la permanence des soins, le bon fonctionnement des secours et le maintien de l’ordre public. Mardi, les crèches, établissements scolaires (maternelles, primaires, collèges et lycées) publics et privés sous contrat ont également été fermés par mesure de sécurité.  

 

Visite ministérielle | À Pôle Emploi, Muriel Pénicaud mise sur la jeunesse

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La ministre du Travail est en visite officielle dans le 101ème département depuis samedi. Régionalisation de Pôle emploi, lutte contre le travail clandestin, installation du Comité Régional de l’Emploi, de la Formation professionnelle et de l’Orientation professionnelle (CREFOP)… De nombreux chantiers doivent être passés en revue alors que vient d’être publié, le 6 novembre, le décret d’application du code du travail de droit commun. 

Samedi, la ministre du Travail Muriel Pénicaud s’est rendue vers 18h00 dans les nouveaux locaux de Pôle Emploi à Kawéni, ouverts au public depuis le 18 octobre. Elle y a été accueillie par David Baes, le directeur territorial, et Ibizat Mohamed Chaher, la directrice de l’agence, avant de procéder à une table ronde. Au cours de celle-ci, plusieurs intervenants des sociétés Dagoni Services et Sodifram, de l’Agence de l’Outre-mer pour la mobilité et de la crèche Les Mini-Explorateurs ont fait part de leurs expériences. Muriel Pénicaud en a alors profité pour évoquer « les besoins en services de proximité » dans le 101ème département et a estimé que « les formations professionnelles et les filières d’apprentissage (étaient) l’un des grands chantiers de Mayotte ». Emmanuel Legras, le directeur de l’Association pour le droit à l’initiative économique (ADIE), l’a néanmoins interpellée sur l’absence du statut de micro-social (auto-entrepreneur) sur l’île, faisant obstacle à la création d’entreprises. « Il faut travailler sur l’accompagnement des jeunes pour que ce soit une voie de réussite », a-t-elle renchéri. En effet, selon les chiffres de Pôle Emploi de septembre 2018, 17% des demandeurs d’emplois ont moins de 25 ans. La ministre du Travail a également insisté sur le lien entre formation et recherche d’emplois mais aussi sur l’importance des partenariats, louant les bienfaits du Plan d’investissement compétences. Présent lors de cette rencontre, le sénateur Thani Mohamed Soilihi a de son côté dénoncé les carences statistiques à Mayotte. Une problématique qui pourrait vite évoluer avec la régionalisation de Pôle Emploi, à partir du premier trimestre 2019. Nommé le 12 novembre, Jean-Christophe Baklouti sera à la tête de cette révolution administrative. « Ce sera un gage d’efficacité et une puissance de feu, aussi bien en termes d’outils que de méthodologie », a conclu la ministre. 

Mayotte, laboratoire de la lutte contre l’immigration 

« Je retiens de Mayotte l’extraordinaire travail d’équipe de l’ensemble des services de l’État contre l’immigration », saluait dimanche Muriel Pénicaud, au deuxième jour de sa visite dans le 101ème département. En visite dans les locaux du Groupe d’Enquête sur la Lutte contre l’Immigration Clandestine (GELIC) à Cavani, la ministre a pu échanger pour la première fois avec ses membres. Structure inédite en France, le groupe d’enquête co-présidé par le procureur de la République Camille Miansoni et le préfet Dominique Sorain, rassemble onze enquêteurs de la Police aux Frontières (PAF), de la Police nationale, de la Gendarmerie et de la Douane, ainsi que des inspecteurs du travail et des finances publiques. « Cette transversalité est le seul moyen de faire aboutir les procédures pour démanteler les filières clandestines », a-t-elle défendu, avant d’annoncer que « Mayotte pourrait être un pilote pour la métropole » à cet égard. Au cœur des discussions : la lutte contre le travail illégal, que mènent conjointement le GELIC et le Comité Opérationnel Départemental Anti-Fraude. Car à Mayotte, « les petites infractions sont souvent le point de départ permettant de mettre à jour tout un réseau clandestin », a relevé le commandant de police Jean-François Cocheril, à la tête du groupe d’enquête. Pour autant, les sanctions pénales peuvent s’avérer peu dissuasives, certains accusés y échappant purement et simplement, d’autres n’écopant que de peines de sursis. C’est l’une des raisons pour lesquelles le GELIC est habilité à saisir temporairement les avoirs criminels (véhicules, terrains, cartes bancaires, etc.) dès le placement en garde-à-vue d’un suspect. En permettant d’éviter la fuite ou le maintien d’activités potentiellement frauduleuses, cette mesure permet d’accélérer considérablement la durée d’une enquête. Un dispositif jugé particulièrement « efficace » à Mayotte, selon la ministre du Travail, qui salue « la capacité de prévention et de répression » des enquêteurs locaux. Pour poursuivre ces efforts, « nous allons rediscuter du renforcement d’effectifs en conseil des ministres », a-t-elle assuré, sans toutefois donner, à ce stade, de chiffres. Le GELIC mène actuellement une dizaine d’enquêtes contre le travail clandestin, particulièrement dans les domaines du BTP, de l’agriculture et des taxis. Les premiers résultats devraient être publiés en 2019. 

Table ronde autour de l’économie sociale et solidaire

La ministre s’est également rendue à la Chambre régionale d’économie sociale et solidaire, (Cress) dimanche matin. Quarante-cinq minutes d’entretien avec les acteurs de la Cress pour évaluer et débattre des opportunités de cette économie qui se veut basée sur le respect des valeurs humaines et une égale répartition des richesses créées. « Il y a une belle dynamique qui rend confiant. Nous allons les soutenir », a déclaré Muriel Pénicaud à propos de la Cress, soulignant que l’accent serait mis en particulier sur les clauses d’insertion. Celles-ci permettent de réserver une proportion d’heures de main-d’œuvre à des personnes en situation d’exclusion professionnelle lors de l’attribution de marchés publics. Un échange qualifié de « franc et direct » par le directeur de l’organisme, Ben Amar Zeghadi, qui s’est réjoui que Muriel Pénicaud « nous (ait) accordé beaucoup de crédibilité » et qu’elle ait « reconnu nos résultats ». Le sénateur Thani Mohamed Soilihi, ancien président fondateur de la Cress de Mayotte, ainsi que Roukia Lahadji, trésorière de la structure, étaient également présents.

 

Le cratère du lac Dziani « ravagé » par les brûlis

« Dans l’après-midi du 16 novembre une partie du site du cratère du Dziani Dzaha est parti en fumée : des feux de brûlis non maîtrisés en sont la cause », dénonce l’association des Naturalistes de Mayotte par voie de communiqué. La préfecture, l’Office national des forêts (ONF ) et le Département avaient, dans un communiqué conjoint, alerté récemment la population sur les conséquences désastreuses des feux de forêts non réglementaires et dévastateurs. « Les terrains brûlés appartiennent au Conservatoire du littoral et relèvent des espaces protégés », s’indigne encore l’association qui rappelle réclamer « depuis longtemps l’interdiction complète des brûlis, qui chaque année font disparaître plusieurs dizaines ou centaines d’hectares de végétation, y compris dans les zones forestières. En outre, en laissant les sols à nu avant les grandes pluies, cette pratique favorise l’érosion des sols et la sédimentation des récifs coralliens. » Les Naturalistes pointent aussi l’inaction de l’administration : « Nous réclamons des pouvoirs publics autre chose que des textes inappliqués », ainsi que le renfort des moyens de la police de l’environnement et la poursuite des auteurs des infractions. L’association intentera pour sa part une action en justice.

Quinze mois de prison ferme requis contre un marchand de sommeil

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Un homme d’une cinquantaine d’années, résidant à Pamandzi, en Petite-Terre, comparaissait devant le tribunal correctionnel de Mamoudzou mercredi pour « aide au séjour » d’étrangers en situation irrégulière et hébergement dans des conditions contraires à la dignité humaine. Depuis plusieurs années, il louait à une trentaine de personnes plusieurs cases en tôle et chambres en dur, sur deux terrains lui appartenant, ainsi qu’à sa famille.

Démarche « humanitaire » ou exploitation de la détresse d’autrui ? Telle est la question que devra trancher d’ici la fin du mois le tribunal correctionnel de Mamoudzou. Ce mercredi, un homme d’une cinquantaine d’années, B. S.A., comparaissait devant le tribunal de grande instance de Mamoudzou pour « aide au séjour » d’étrangers en situation irrégulière et hébergement dans des conditions contraires à la dignité humaine. Rats, cafards, toits de tôle troués laissant passer la pluie dans les chambres, sanitaires insalubres et insuffisants… Sur deux terrains appartenant au prévenu et à sa famille – où ceux-ci disposaient d’une maison en dur – B. S.A. louait plusieurs cases en tôle et chambres à sept familles, au total une trentaine de personnes, dont plusieurs se sont avérées en situation irrégulière. En juillet dernier, le prévenu, membre du collectif des citoyens de Petite-Terre et agent de sécurité au conseil départemental, affirmait devant les caméras de Mayotte La première avoir enjoint à ses locataires en situation irrégulière de quitter les lieux et avoir pris part à une campagne « demandant à tous ceux qui logent des irréguliers de s’en défaire parce qu’il va se passer des choses et que la justice va se mêler de tout ça ». Il ne croyait pas si bien dire. Placé en garde à vue dans les locaux de la PAF (Police aux Frontières) et déféré devant un juge, l’homme encourt désormais une peine de prison. « L’affaire a débuté alors qu’on s’agitait beaucoup autour de la question des décasages », indique en préambule le président Philippe Ballu ce mercredi. « Le Codim est intervenu pour soutenir monsieur (…) Mais je ne suis pas là pour parler du Codim », ajoute-t-il. Ce qui intéresse la cour, ce mercredi, c’est avant tout la situation pécuniaire du prévenu. Ce dernier perçoit un salaire mensuel de 2.400 euros pour des charges fixes estimées à près de 1.700 euros, avec dix enfants à charge, dont certains sont ceux de l’une de ses trois épouses, qui habite avec lui. Il affirme ne toucher que 450 euros des divers loyers qu’il perçoit sur la base d’un simple « contrat verbal » – et sans les déclarer au fisc, admet-il – quand le président estime plutôt la somme aux alentours de 700 euros.

« Tu es étranger, je peux te foutre dehors »

L’autre point qui intéresse la cour, ce sont les dépositions des locataires. « J’ai lu qu’il n’y avait qu’un seul point d’eau dans la cour pour 30 à 35 personnes et que vous y mettiez un cadenas lorsque vous étiez de mauvaise humeur ! », rapporte le président. « Et pour l’électricité c’était pareil, on coupait les branchements sauvages ». Autres points de grief : la douche, qui sert également de toilette à toutes ces personnes, ou encore l’état lamentable des habitations, accrédité par de « nombreuses photos ». En outre, un rapport de l’Agence régionale de santé faisant suite à un contrôle sur place fait état de risques d’incendie, d’électrocution et d’intoxication au monoxyde de carbone… L’une des anciennes locataires du prévenu, arrivée à Mayotte par kwassa en 2015 et installée en juillet 2016 chez B.S.A. a notamment raconté que son loyer, au départ de 100 euros, a été augmenté à 150 euros. Il lui fallait encore régler 150 euros de caution, 50 euros pour l’eau, et 50 euros pour l’électricité, selon ses dires. « Même dans une maison en dur, je ne règle pas de telles factures ! », s’étrangle le président à la lecture de ces déclarations. En plus des loyers qui augmentent, plusieurs locataires rapportent des pressions, notamment de nature sexuelle, sur les femmes qui vivent sur ses terrains. « Il n’arrêtait pas de demander à avoir des rapports sexuels avec les femmes seules », témoigne l’une d’entre elles, citée lors de l’audience. « Cela n’a pas été établi », rappelle toutefois le président. Face à ces accusations, le prévenu nie en bloc : « Tout ce que je peux dire, c’est que tout ça c’est des mensonges », répète-t-il. Idem lorsqu’on lui lit le récit d’un autre des ses anciens locataires : « Il m’a dit : +Tu es étranger je peux te foutre dehors! + Je le savais capable de le faire sans aucune pitié, par contre, il n’a jamais été violent avec moi ». Le prévenu, qui affirme n’avoir pas été au courant de la situation administrative de certains de ses locataires – qui vivaient pourtant sur son propre terrain – dément fermement. La substitute Chloé Chérel, n’y croit pas. Elle requiert à son encontre 15 mois de prison ferme, la confiscation du terrain saisi lors de la procédure, objet de l’infraction, et d’autre biens saisis lors de l’enquête. »Ce ne serait pas une condamnation pour l’exemple, mais tout simplement parce qu’il s’agit d’un délit », estime-t-elle, ajoutant que « ce n’est pas parce que ce n’est pas le seul à le fair (à Mayotte ndlr), que cela doit faire obstacle à une condamnation ». L’avocat de la défense, Me Delamour Maba Dali, demande de son côté la relaxe pure et simple et la restitution des biens de son client, jugeant la peine proposée « complètement disproportionnée ». Il fait le procès de l’État et de sa « négligence » dans la gestion de l’immigration clandestine, et assure que son client n’a fait « qu’utiliser toute son humanité dans cette affaire », en proposant un hébergement à des gens « en état de nécessité ». La décision sera rendue à la fin du mois.

 

 

 

Recensement | Les communes plus impliquées

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L’Insee (Institut national de la statistique et des études économiques) se prépare pour 2021 à la mise en place du recensement annuel de la population à Mayotte, tel qu’il est appliqué en métropole. Jusqu’alors, les enquêtes étaient menées tous les cinq ans dans le 101ème département. Effectuées chaque année, les prochaines enquêtes ne prendront en compte qu’une partie du territoire. Ainsi, les premiers résultats exhaustifs de population ne seront disponibles qu’en 2026. Autre changement, les communes auront désormais la responsabilité juridique des enquêtes, et ce, dès 2021.

Jusqu’à présent, comme en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie, l’Insee effectuait à Mayotte un recensement exhaustif de la population tous les cinq ans. Avec l’adoption de la loi du 28 février 2017 relative à l’égalité réelle en Outre-mer, les règles changent et s’alignent sur celles de la métropole. Désormais, les enquêtes se feront chaque année, mais par tranche de territoire et non plus de manière exhaustive. Ces enquêtes, dites « tournantes », s’effectuent tous les ans, mais par cycle de cinq ans. La première collecte sur le terrain est prévue pour 2021, avec des premiers résultats authentifiés et définitifs en… 2026. À noter que les modalités d’enquête varient selon les communes. Celles de moins de 10.000 habitants doivent être recensées exhaustivement tous les cinq ans, tandis que celles de plus de 10.000 habitants seront recensées tous les ans sur un échantillon de 8% de leurs logements. Au bout du premier cycle de cinq ans, 40% de la population sera ainsi recensée, et c’est sur cet échantillon que se baseront les enquêteurs pour extrapoler les résultats définitifs. « Les chiffres de la population sont très attendus parce qu’ils entrent en corrélation avec les dotations des communes, car les textes de loi prévoient d’adosser les budgets des communes aux populations des territoires », explique Jamel Mekkaoui, chef du service régional de l’Insee à Mayotte. Aussi, cet alignement sur la métropole était-elle « une demande forte des élus », indique le responsable, qui ajoute que « de notre côté, d’un point de vue technique, nous avions un avis réservé ». En effet, il faudra encore attendre huit ans avant d’obtenir les prochains chiffres de population. « L’application de la méthode métropolitaine conduit à n’avoir une possibilité de réactualiser les populations qu’au 1er janvier 2026. Huit ans, c’est beaucoup, le changement de trajectoire nous a fait perdre trois ans », estime Jamel Mekkaoui. 

Une méthode à adapter 

Autre problème, la méthode métropolitaine, avec son système d’échantillonnage sur des années glissantes, apparaît complexe à mettre en œuvre, en l’état, à Mayotte. Selon le responsable régional, elle serait plus adaptée à des territoires plus stables que le 101ème département, « très mouvant » et qui connaît d’importants « problèmes de bâti, avec ses nombreuses cases en tôles ». Il faudrait notamment y « introduire la question de la précarité du bâti ». Elle présente néanmoins plusieurs avantages : « faire entrer Mayotte dans un système national », ce qui facilite les « process » et permet « d’avoir une opération en continu », « monter en compétence » et « lisser nos charges », ou encore constituer une équipe stable, nuance Jamel Mekkaoui. L’Insee réfléchit donc à des pistes pour mieux l’adapter aux spécificités du territoire d’ici la première collecte en 2021. « Nous menons une réflexion sur ce point, nous n’avancerons pas seuls là-dessus, nous aurons besoin du soutien des communes, qui sont désormais juridiquement responsable de l’enquête », indique-t-il. En effet, jusqu’ici, l’organisation et la réalisation des recensements relevaient exclusivement de la compétence de l’Insee, les communes n’étant qu’associées aux opérations, pour des questions logistiques et de recrutement notamment. Ces dernières seront désormais pleinement impliquées : elles se chargeront seules du recrutement et de l’encadrement des agents de recensement, devront veiller au respect du protocole d’enquête, au repérage des adresses recensées, à l’exhaustivité de la collecte ou encore au respect des délais légaux d’achèvement des opérations. Pour ce « transfert de charges conséquent » aux communes mahoraises, ces dernières percevront une dotation forfaitaire de l’État, avec lequel elles partageront le coût de l’enquête annuelle. 

 

 

Une centaine de manifestants contre la réforme de la fonction publique

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Les syndicats des fédérations FSU, CFDT et Unsa ont appelé à une grève nationale ce lundi pour dénoncer les 2.650 suppressions de postes d’enseignants dans le secondaire dans le cadre de la réforme de la fonction publique. À Mayotte, les manifestants étaient rassemblés devant les locaux de vice-rectorat ce lundi matin pour revendiquer notamment des mesures d’attractivité et un changement de politique vis-à-vis des contractuels. 

« C’est une première depuis 2011 », a fièrement affirmé Henri Nouri, co-secrétaire départemental de la FSU Mayotte et secrétaire général du Syndicat National des Enseignements de Second degré (SNES), en préambule de la manifestation. En effet, l’appel massif à la mobilisation de tous les syndicats représentant l’ensemble des personnels de l’Éducation nationale était inédit. Ce lundi matin, trois des principaux syndicats de l’Éducation nationale (FSU, UNSA-Éducation et SGEN-CFDT) regroupés en intersyndicale étaient représentés par une centaine de manifestants devant les locaux du vice-rectorat de Mamoudzou pour protester contre la suppression de 2.650 postes, la précarité de la profession, la réforme de l’enseignement professionnel et celle du lycée. Les manifestants ont marché jusqu’au dispensaire de Jacaranda pour marquer leur refus « net et précis » de la réforme.

« Nous avons un budget annuel de 500 millions d’euros. Au prorata, par élève, c’est deux fois moins qu’en métropole », a pointé Bruno Dezile, enseignant en lycée professionnel et responsable CGT Educ’action. L’intersyndicale réclame donc un « plan pluriannuel » de construction scolaire et le passage en réseau d’éducation prioritaire (REP+) sur le territoire. « À Mayotte, nous avons un déficit en personnel dans la plupart des établissements scolaires. Cela créé un problème de suivi des vies scolaires, avec des effectifs beaucoup trop importants par classe. Dans le premier degré, c’est encore plus notable », a confirmé l’enseignant. 

Des mesures d’attractivité

Parallèlement, le gouvernement cherche, selon Henri Nouri, à contractualiser « massivement » la fonction publique. Malgré une augmentation des postes ces dernières années, le 101ème département français ne sera pas épargné par ces suppressions, a prédit le secrétaire général du SNES Mayotte. Et d’ajouter que « nous sommes attachés à une fonction publique de carrière, de statut et malheureusement elle risque d’être détruite, au détriment des usagers. Un service public indépendant, c’est la meilleure chose possible pour les usagers. Si vous l’enlevez, vous retirez la possibilité aux personnes les plus démunies d’avoir des enseignements de qualité, et donc, d’avoir un avenir. »

Les syndicats réclament donc des mesures d’attractivité et de stabilisation pour permettre la titularisation des contractuels – dont la proportion est estimée à près de 50% par les différents syndicats –  et une gestion plus efficace des ressources humaines. « Effectivement, comparativement à la métropole, le salaire est plus élevé mais nous ne sommes pas dans le même contexte, et au regard de la situation de Mayotte c’est insuffisant pour à la fois attirer et stabiliser les enseignants », affirme-t-il. Un versement plus prompt des salaires et un traitement plus rapide des dossiers de fin de contrat sont aussi demandés par l’intersyndicale. « Actuellement, le taux d’encadrement est inférieur à la moyenne de toutes les académies, DOM-TOM compris », a-t-il encore pointé. 

L’intersyndicale exige également que les ex-agents de la collectivité départementale devenus fonctionnaires – grâce à la départementalisation – voient leur ancienneté reconnue dès le début de leur carrière, ainsi qu’un changement dans le traitement de la maladie des enseignants. « Les collègues soignés pour un cancer par exemple et qui sont obligés de se déplacer à la Réunion ou en métropole perdent leur indexation », souligne Quentin Sedes, membre de la CGT Educ’action. 

Injecter des moyens au Lycée agricole

Afin d’apporter plus de poids à leurs revendications, les syndicats ont pu compter sur la participation d’une vingtaine d’agents du lycée de Coconi. « D’autres sont déclarés grévistes mais ne participent pas à la grève », a annoncé Yazide Mohamed, secrétaire général FO enseignement agricole. Après deux semaines de droit de retrait suite à l’agression de deux agents, les professionnels du lycée avaient décidé, vendredi soir, de le retirer. Malgré une rencontre avec le directeur de la DAAF (Direction de l’Alimentation, de l’Agriculture et des forêts, qui relève du ministère de l’Agriculture) de Mayotte, Bertrand Wybrecht, et la signature d’un protocole d’accord de sortie de crise, les professionnels de Coconi manifestaient ce lundi, principalement pour revendiquer des investissements plus importants. 

« Nous avons un retard considérable par rapport à l’Éducation nationale en termes de moyens. Nous avons sans doute vingt ans de retard », déplore le secrétaire général FO enseignement agricole. Le lycée, qui relève du ministère de l’Agriculture, ne dispose par exemple d’aucune salle munie d’un vidéo-projecteur. De même, les différents matériels volés lors de cambriolages commis ces dernières années n’ont, selon lui, jamais été renouvelés. « Les travaux pratiques (TP) par exemple, nous ne les faisons plus puisque nous n’avons pas les moyens pour les faire », regrette Yazide Mohamed. Le syndicaliste et enseignant ajoute que « nous dépendons toujours du ministère de l’Agriculture. Le département ne nous aide pas et (le ministère) ne met pas assez de finances pour l’Éducation à Mayotte ». Une rencontre avec Stephan Martens, le nouveau vice-recteur de Mayotte, était organisée à 11h00 ce lundi. À l’issue de cette réunion, le secrétaire général du SNES Henri Nouri a fait part de sa satisfaction, aussi bien au regard de la mobilisation que de la réunion qui a suivi, se félicitant d’une écoute « assez attentive ». « Je pense que les représentants départementaux ont compris que nous ne pourrons pas construire un rectorat de plein exercice sans les personnels. D’ailleurs, ils soutiendront ces mesures d’attractivité auprès de la direction générale des ressources humaines de l’Éducation nationale. C’est un signe d’encouragement », a-t-il estimé.

 

 

 

Droit de retrait levé au lycée de Coconi

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Après deux semaines de droit de retrait, les personnels du lycée agricole ont finalement décidé de reprendre le travail. Les garanties de sécurisation de l’établissement, qu’ils réclamaient à la suite de l’agression de deux de leurs collègues sur le site de Coconi, le 23 octobre dernier, semblent désormais remplies. Alors qu’une nouvelle grève nationale débute ce lundi dans les établissements scolaires, le droit de retrait des agents du lycée agricole de Coconi, en vigueur depuis le 26 octobre, est désormais levé. 

Vendredi, les personnels ont une nouvelle fois rencontré Bertrand Wybrecht, le directeur de la DAAF (Direction de l’Alimentation, de l’Agriculture et des forêts, qui relève du ministère de l’Agriculture) de Mayotte et le directeur de cabinet du préfet, Étienne Guillet pour discuter des modalités et du budget alloué à la sécurisation du site de l’établissement, encore récemment visé par diverses intrusions et actes de délinquance. Vendredi soir, les représentants des personnels ont signé un protocole d’accord de sortie de crise, a indiqué la DAAF à Flash Infos. Les frais de gardiennage seront budgétisés pour « l’ensemble des sites à l’avenir » et « avec rétroactivité pour tous les frais que nous avons déjà engagés » ont en outre indiqué les agents à nos confrères du JDM. En effet, les représentants du personnel craignaient de ne pas pouvoir être remboursés des dépenses déjà effectuées et réévaluées au fur et à mesure de l’année, prises sur le budget de fonctionnement du lycée et risquant de peser sur sa santé financière ainsi que sur le paiement des salaires des personnels ne relevant pas, comme les enseignants, du ministère de l’Agriculture.

Une enveloppe d’urgence de 40.000 euros

La mise en place d’une clôture d’enceinte avec des sorties sécurisées – l’une des principales réclamations des agents avec l’intensification des rondes de gendarmerie – étant conditionnée à l’élaboration de l’étude de construction du futur internat du lycée va être accélérée, indique le JDM. Dans un premier temps, au moins 300.000 euros avaient été débloqués par le ministère pour la sécurisation globale du site sur deux ans (2018 et 2019). En outre, 40.000 euros ont également été dégagés au titre d’une enveloppe d’urgence pour répondre à différents besoins, telles que la distribution de talkie-walkies, des matériels de vidéosurveillance et de compléments d’alarme. Pour rappel, deux jeunes femmes, agents du lycée agricole, avaient été victimes d’une agression à l’arme blanche sur le site « Valarano » de l’établissement dans l’après-midi du 23 octobre. Cet acte de violence avait été suivi, lundi 5 novembre au soir, et alors que le droit de retrait était d’ores et déjà en cours, par une nouvelle attaque opérée par une dizaine d’individus encagoulés, visant cette fois des gardiens de l’établissement. « Depuis l’an dernier, la violence a pris une autre tournure, avec de plus en plus d’agressions à l’arme blanche. Comme Kahani (le lycée ndlr) est sanctuarisé, maintenant les jeunes se rabattent sur le lycée agricole » avait alors confié à Flash Infos le secrétaire général FO « enseignement agricole » et enseignant à Coconi, Yazide Mohamed. 

 

Véronique Lepoivre : « L’allaitement maternel est une question de culture »

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Durant deux jours se tenait la sixième édition des journées périnatales organisées par Répéma – réseau périnatal de Mayotte – à l’hôtel Sakouli. Jeudi, des gynécologues, des pédiatres, des sages-femmes et des puéricultrices sont intervenus pour parler de l’allaitement maternel. Pour l’occasion, Mayotte Hebdo a interviewé Véronique Lepoivre, sage-femme libérale à Labattoir. Selon elle, l’allaitement maternel est ancré dans la culture mahoraise. 

Mayotte Hebdo : Mayotte est le département français le plus pauvre avec près de 80% de la population qui vit en-dessous du seuil de pauvreté. Les mères mahoraises allaitent les bébés de manière naturelle, au sein. Au-delà du contexte de précarité monétaire, pourquoi privilégient-elles l’allaitement maternel ? 

Véronique Lepoivre : Nous sommes, à Mayotte, dans un contexte de précarité monétaire effectivement mais aussi nutritionnel. C’est donc une solution à l’état nutritionnel précaire des enfants puisque cela apporte notamment des anti-corps. Et puis, pour les mamans et les familles qui n’ont pas les moyens, cet allaitement est naturel. Par contre, là où il y a de la disparité c’est dans le niveau de connaissances des parents, qui varient souvent en fonction du milieu social de chacun. Ce n’est pas propre à Mayotte, c’est identique en métropole. Dans les familles les plus scolarisées, nous allons avoir une meilleure alimentation des plus jeunes avec un apport nutritionnel beaucoup plus important. C’est également une question de culture. C’est quelque chose que toutes les femmes ont vu puisqu’elles ont été allaitées par leur maman. Je pense que quand on voit tout le monde allaiter autour de nous et que c’est naturel, nous pouvons être poussés dans ce sens-là. 

MH : À Mayotte, les Mahoraises ont donc choisi l’allaitement maternel. En métropole, l’allaitement artificiel, autrement dit, le biberon, est aussi courant que le naturel. Comment expliquer cette différence ? 

V.L. : En métropole, il y a eu une grande période d’allaitement artificiel et puis les femmes reviennent peu à peu à l’allaitement maternel. En ce moment, surtout en métropole, les femmes font de plus en plus attention à ce qu’elles mangent. C’est un peu une mode. Je pense donc que c’est en partie pour cela que l’allaitement artificiel va s’effacer petit à petit pour faire place au maternel. Et puis, il y a plusieurs cas de figure concernant le choix de l’allaitement : des mamans qui vont donner le sein jusqu’à la diversification alimentaire par exemple. D’autres mamans vont donner le sein surtout les premiers jours et par la suite vont utiliser l’allaitement artificiel. Il y a le désir d’allaiter ou non, pour toute femme. À Mayotte, ce désir est plus prononcé. C’est simple, pour allaiter, il faut le vouloir. C’est une raison propre à chacune mais pour certaines, le sein est quelque chose de sensuel et sexuel et n’est pas du tout nourricier. Le sein reste dans le cadre de la féminité. D’autres encore ont des croyances sur l’allaitement. Elles imaginent que cette pratique transforme et déforme leurs seins. Il y a aussi des premières expériences qui ont pu être extrêmement difficiles pour la mère. Elle peut ne plus ressentir le besoin d’allaiter à nouveau. Des contre-indications médicales peuvent aussi en être à l’origine. 

MH : Dans le département, nombreuses sont les grossesses à risque. Comment se passe la lactation chez la mère après avoir accouché ? 

V.L. : Il y a toujours moyen de stimuler. Une maman qui a son bébé qui n’est pas forcément alimenté au lait – surtout chez les grands prématurés au début – dans les services de pédiatrie et de maternité, nous allons lui proposer de tirer son lait pour stimuler la montée de lait afin qu’elle puisse ensuite donner le sein à son enfant. Mais ce qui nous manque à Mayotte c’est le lactarium. C’est un centre de collecte, de traitement et de distribution de lait maternel. Cette collecte permet pourtant d’alimenter des bébés qui n’ont pas forcément la possibilité d’être allaités par leur mère. Pour eux, le lait maternel a des propriétés biologiques irremplaçables qui favorisent leur croissance et permettent de prévenir certaines pathologies fréquentes. Pour y remédier, les mères peuvent conserver leur lait en surplus dans le congélateur chez elle, soit il est jeté. Ce n’est pas quelque chose d’indispensable puisque nous faisons sans, mais il serait tout de même judicieux d’en avoir un ici à Mayotte.

 

 

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