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Circoncision 3/3

Micro-trottoir : des avis variés

Pour une circoncision rituelle ou médicale ? Quels souvenirs de ce moment ? Comm ent feront-ils avec leurs enfants ? Les habitants de l’île, parfois un peu gênés, nous répondent.

Samir, 31 ans

« Je ne me souviens pas vraiment de ma circoncision, j’étais très jeune, aux alentours de 4 ans. C’est mon père qui m’a rappelé le rituel. Le foundi est venu à la maison où il y avait quelques autres garçons. Il a d’abord brûlé des feuilles pour faire une grosse fumée et puis… Tchak ! À l’ancienne quoi ! En principe on ne doit pas pleurer, mais je ne peux pas y croire. Franchement quand on voit comment ça se passe on a forcément peur à cet âge. Mais mon père m’a raconté que tout s’était bien passé alors je l’ai cru et j’ai fait de la même manière pour mon fils. Je m’en veux parce qu’il a beaucoup souffert le pauvre. Ça s’est plutôt mal passé. Du coup, je ne ferai pas la même erreur pour mon autre fils. Même s’il faut payer on fera ça à l’hôpital. C’est plus sécurisant, il y a moins de risque. Et puis si jamais il y a un souci, je sais que je peux attaquer l’hôpital. Contre le foundi qui fait ça n’importe comment, par contre, on ne peut rien faire. »

Faouzia, 33 ans

« Pour moi c’est l’hôpital, sans aucun doute ! Même s’il faut aller en métropole pour le faire à mon fils, j’irais. Ici les hommes et les garçons n’en parlent pas trop, c’est un peu tabou et je le comprends. Mais j’ai quand même entendu pas mal d’histoires où la circoncision s’était mal passée et franchement je ne veux pas du tout ça pour mon fils. C’est important car c’est la religion mais il faut s’adapter aussi : si on peut le faire sans faire souffrir les enfants c’est forcément mieux. Je comprends aussi que certains veuillent respecter les traditions, mais pour moi c’est la santé de mon fils qui passe avant tout. J’ai déjà eu deux garçons et j’ai convaincu mon mari de les faire circoncire à l’hôpital [en métropole], il était un peu réticent au début à cause de ses parents mais finalement il a compris que c’était mieux. Du coup pour le troisième, on fera encore ça à l’hôpital, c’est clair et net. »

Ahmed, 25 ans

« Je viens de Grande Comore et je ne sais plus trop comment ça se passe là-bas au niveau de la circoncision. Mais je vois comment ça se passe ici avec mes voisins par exemple. Ils appellent le foundi, il y a une petite célébration avec quelques personnes. Ça a l’air de plutôt bien fonctionner et je fais confiance aux foundi, surtout si c’est mes voisins qui me le conseillent. Alors je pense que je ferais comme ça si j’ai un fils. En plus je crois que c’est assez cher de faire ça à l’hôpital. Pour l’instant la question ne se pose pas trop puisque je n’ai pas d’enfant ! En tout cas je n’ai aucun souvenir de comment ça s’était passé pour moi. Peut-être que j’étais trop petit pour m’en rappeler mais je me dis aussi que si je ne m’en souviens pas c’est que ça s’est bien passé… Ou alors c’est l’inverse et j’ai fait exprès d’oublier ce moment (rires) ! Ce qui est sûr, connaissant ma famille, c’est que c’était la méthode traditionnelle. »

Et aussi :

Les couples mixtes coupent court

Socialement, la circoncision marque l’entrée d’un jeune homme dans la communauté. Mais dans les couples mixtes, issus de culture et de religion différentes, cette dimension peine à trouver sa place. « À la naissance de mon fils il y a six ans, sa mère et sa grand-mère ont voulu le faire circoncire », se souvient Christian, un mzungu installé à Mayotte depuis dix ans. Le garçon qui l’a eu avec une Grande Comorienne ne va pas à la madrassa, et comme le dit l’enfant lui-même, il ne veut pas « se faire couper le kololo ». Alors ses parents ont décidé de lui laisser le choix. « Il pourra toujours se faire retirer le prépuce plus tard s’il le souhaite », tempère son père. Même son de cloche pour son collègue Étienne*. Il y a quelques mois, sa femme mahoraise a mis au monde un second enfant, cette fois-ci un garçon. Mais pour l’heure, la question de la circoncision ne semble pas encore avoir été élucidée au sein du couple : « À une époque où il n’y avait pas l’eau courante, l’argument de l’hygiène intime avait un sens, mais aujourd’hui, je pense que ce n’est plus le cas », juge le métropolitain. Native de

l’île, Anaïs estime quant à elle que la circoncision fait partie de son patrimoine culturel : « J’ai été élevée dans cette idée-là, c’est ma culture : les jeunes hommes doivent se faire circoncire. Le jour où j’aurais un fils, il le sera aussi », atteste-t-elle sans une once d’hésitation. À côté d’elle, Momo, 35 ans, approuve d’un signe de la tête : « Ah oui, c’est la tradition, il faut la perpétuer ! » Des enfants, le DJ n’en a pas encore. Mais lorsqu’il aura un fils, et ce quelques soient les origines, la religion et la culture de sa mère, « il se fera circoncire lui aussi ! Mais ce sera fait à l’hôpital, bien encadré médicalement », insiste-t-il.

Et aussi :

Le sambatra, l’exception malgache

Dans la région, les rites et traditions qui rythment la célébration de la circoncision divergent peu. Si à Madagascar aussi, l’ablation du prépuce s’opère désormais majoritairement par des professionnels de la santé, le folklore, lui, demeure intact. Au centre-est de la Grande île, dans le district de Mananjary, le peuple des Antambahoaka célèbre tous les sept ans le Sambatra, commémoration du voyage de leur premier ancêtre, Raminia, de La Mecque vers Madagascar. Pour tous les garçons nés dans cet intervalle, cette occasion sonne aussi l’heure de la circoncision. La fête et ses préparatifs s’étendent sur plusieurs semaines, souvent lors du mois d’octobre. Selon la tradition, les jeunes partent recueillir l’eau du fleuve sacré qui permettra de nettoyer les plaies des circoncis. À leur retour, pères et oncles s’adonnent, sur les berges, à un simulacre de bataille en échangeant des lancés de bambous. Pendant ce temps, les mères tissent les nattes sur lesquelles les enfants seront collectivement opérés. Le grand jour venu, les hommes sacrifient un zébu et les garçonnets enfilent leur tenue rouge avant de partir pour une grande procession. Des grigris sont placés autour de leur taille : ils contiennent des grains de riz qui leur apporteront l’énergie nécessaire pour rejoindre le fleuve. Leur prépuce, coupé au couteau ou au bambou, sera ensuite mangé par l’un des patriarches, accompagné d’une banane.

Psychiatrie : entre animisme et médecine occidentale

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Au Centre Médico-Psychologique du CHM, le personnel hospitalier occupe la lourde responsabilité du traitement des maladies psychiatriques. Entre les croyances locales qui mêlent religion et animisme, et la médecine occidentale, l’équilibre est délicat. Un exercice sanitaire particulier, qui porte néanmoins ses fruits auprès d’une population en constante augmentation dans les visites

Un petit bâtiment caché au milieu des grandes infrastructures. Au Centre Médico-Psychologique (CMP) du CHM, une quinzaine de professionnels accueillent et accompagnent les individus atteints de troubles psychiatriques profonds. Avec une vingtaine d’années d’existence sur le territoire, cette structure est encore jeune comparé aux autres services du CHM. Son bâtiment, en revanche, l’est nettement moins. “Nous sommes dans l’ancien laboratoire de l’hôpital”, présente l’infirmière Anne-Cécile Puget, 39 ans, en fine connaisseuse des lieux. Depuis presque dix ans qu’elle exerce dans le service, la professionnelle assure que les profils des troubles des patients “se sont diversifiés avec le temps”. Pour autant, certaines tendances restent inchangées.

Un djinn ou une maladie ?

“D’une manière générale, nous traitons de tout type de souffrances et de handicaps psychiques. À Mayotte, certaines particularités sont néanmoins constatables. Il nous arrive régulièrement de travailler auprès de personnes atteintes de troubles anxiodépressifs profonds, liés à leur clandestinité, leur absence de moyens financiers, d’entourage, et de perspective d’avenir”, détaille l’infirmière. Autres particularités : “Nous constatons aussi beaucoup de syndromes de stress post-traumatique chez les ressortissants de l’Afrique des Grands Lacs en raison des persécutions qu’ils ont pu subir. D’autres viennent également nous voir suite à un choc provoqué par une agression : vol, viols, cambriolages, etc.” Autant dire que le travail ne manque pas pour ces professionnels particulièrement investis dans leurs missions. Lesquelles relèvent d’un enjeu particulier, sur un territoire où les croyances animistes et religieuses s’articulent tant bien que mal avec la médecine occidentale. “À Mayotte, il est impensable de faire l’impasse sur le contexte socioculturel des patients. Pour les nouveaux arrivants, ce temps d’adaptation est incontournable”, insiste Anne-Cécile Puget. Elle prévient d’emblée : “Qu’il s’agisse des patients comme des soignants, il n’y a aucun tabou à évoquer ces questions. Les traitements prodigués ne sont pas forcément incompatibles avec les techniques de soin traditionnelles recherchées par les individus en dehors du CHM”.

Si la professionnelle reconnaît que ces traitements parallèles sont “assez obscurs”, elle dégage deux grandes tendances : “D’une part, les récitations du Coran couplées de pratiques religieuses, et d’un autre côté, des rites particuliers de tendance animiste censés établir un contact avec le djinn”. Autant de spécificités locales qui nécessitent une attention particulière pour le personnel hospitalier. “Nous travaillons beaucoup auprès des familles et de l’entourage du patient, quitte à nous déplacer à domicile. Il nous est même arrivé de nous entretenir avec un fundi, même si cette tendance est aujourd’hui à la baisse”. Un jeu d’équilibre permanent entre tradition autochtone et modernité, qui s’avère indispensable pour comprendre le parcours des patients.

Entre précarité et espoirs

La tâche des soignants dédiés au CMP est aussi noble et que nécessaire. Elle n’en reste pas moins des plus éprouvantes, d’autant plus vu la précarité du travail des professionnels de santé. “On manque

cruellement de personnel. Les consultations s’enchaînent alors que les patients sont accueillis dans des salles sombres et non adaptées. On ne fait jamais au mieux, on fait au moins pire”, résume Anne-Cécile Puget. Parmi les symboles de ces moyens succincts, seuls une dizaine de lits sont disponibles dans les chambres d’isolement du CMT. Dans cette petite arrière-cour à l’ambiance chaleureuse, infirmiers et psychiatres tentent tant bien que mal d’apaiser la santé mentale des internés malgré le manque de moyens. Un baby-foot, un ballon, quelques activités entre les visites… On s’adapte comme on peut aux circonstances. “Les places sont continuellement prises. Nous devons donc être très sélectifs quant aux personnes accueillies ici”, déplore-t-elle tout en reconnaissant : “Ce n’est pas toujours approprié au profil de ces hommes et femmes, parfois en grande souffrance”.

Loin de s’apitoyer sur son sort, l’infirmière nourrit des espoirs quant à l’avenir de ce secteur de santé dans le département. “D’ici l’année prochaine, nous devrions voir la création d’un CMP en Petite-Terre. La filière adolescente est aussi en train de se structurer. Les budgets et les projets ont été acceptés”, se réjouit-elle. Autre source d’optimisme : “Le développement du Diplôme universitaire en Santé communautaire à l’université de Dembéni.” Une approche des soins unique, qui mobilise l’ensemble des acteurs sociaux (pouvoirs politiques locaux, milieux professionnels, familles, etc.) pour un traitement global du patient. Une goutte d’eau dans l’océan face aux besoins nécessaires, qui n’en reste pas moins encourageante quant au traitement des maladies psychiatriques dans le département.

Circoncision 2/3

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Santé : « L’enfant est toujours préparé »

Zoubert* est infirmier de bloc opératoire au Centre hospitalier de Mayotte depuis trente ans. Parallèlement, depuis près de vingt ans il endosse la fonction de circonciseur dans les villages de Mayotte. Un travail non légalisé mais « autorisé » à Mayotte, explique-t-il.

*Le prénom a été changé

MH : Qu’est-ce que la circoncision ?

Z : La circoncision consiste à retirer le prépuce, c’est à dire tout ce qui couvre le gland du sexe mâle afin [d’éviter l’accumulation de sécrétion] et favoriser une meilleure hygiène.

MH : Vous pratiquez la circoncision au domicile de l’enfant, comment se déroule la pratique ?

Z : Je pratique une technique chirurgicale mais sous anesthésie locale. Il faut savoir qu’une circoncision à l’hôpital suscite une indication. Elle est pratiquée par les chirurgiens sous anesthésie générale. Ils procèdent parfois à des blocs péniens (une anesthésie et une analgésie postopératoire lors de chirurgie de la verge, ndlr) pour soulager les douleurs de l’enfant pour les premières 24h. Depuis 2005, les infirmiers de bloc opératoire ne sont plus habilités à la circoncision chirurgicale au CHM, mais nous sommes autorisés à exercer en dehors, en respectant les mêmes conditions. Je me rends au domicile de l’enfant à la demande des parents. J’exige d’avoir les mêmes conditions : un endroit propre, une table bien dégagée, un éclairage suffisant. Il faut que toutes les conditions soient réunies.

MH : Combien de temps dure l’opération ?

Z : La circoncision peut durer de cinq à dix minutes. Tout dépend de la condition de l’enfant, s’il est bien préparé, etc. Une fois que l’anesthésie a fait son effet, au bout de cinq voire dix minutes, il n’y a généralement pas de problème. L’anesthésie elle, tient entre 25 minutes et 30 minutes.

MH : Qu’en est-il de la préparation de l’enfant ?

Z : L’enfant est toujours prévenu [en amont] par la famille qui le prépare à la circoncision afin d’éviter les problèmes pendant l’acte. Il s’agit d’une préparation mentale. Qu’il sache qu’il va être circoncis et surtout qu’il l’accepte. Avec une bonne préparation tout se passe très bien.

MH : Quel âge préconisez-vous pour la circoncision ?

Z : Dès que l’enfant commence à reconnaître son sexe. L’enfant reconnaît son sexe à partir de trois ans. Pour moi, c’est l’âge idéal car il est propre et se maîtrise, il comprend ce qu’on lui dit et sait ce qu’on lui fait.

MH : Comment se déroule la convalescence ?

Z : La convalescence se tient entre une et trois semaines. Une fois l’acte réalisé, on pose le premier pansement tulle gras avec des fils résorbables rapides qui doit tomber au bout du troisième jour. Les fils quant à eux sont censés tomber au bout d’une semaine. Il est important que le pansement tienne au moins 24h. Une fois le pansement retiré, au troisième jour post-circoncision, l’enfant doit rester propre et procéder à des bains moussants à base de bétadine. Une pommade antibiotique est également à appliquer. En cas de forte douleur, il peut prendre un antalgique. Généralement, l’enfant est en bonne forme au bout d’une semaine. Les parents jouent un rôle important pendant la convalescence de leur enfant. Ils apprennent à faire la première douche et la toilette. Il arrive que les parents emmènent leur enfant en mer, trois jours après la circoncision, afin qu’il prenne un bain de mer et fasse tomber le pansement. Une fois rincé, ils procèdent au bain moussant puis à l’application de la pommade. Depuis toutes ces années de pratique, on ne m’a jamais rappelé pour un problème.

MH : Combien coûte une circoncision ?

Z : Je ne fixe pas de prix. J’interviens généralement pour les enfants de mes amis ou de ma famille. C’est très rare que je le fasse avec d’autres personnes. C’est pour leur rendre service. Ils me récompensent soit avec de l’argent, des gâteaux ou autres. Je préfère les gâteaux (rires), c’est plus convivial et plus festif. D’autres circonciseurs fixent le prix entre 50 et 100€ par acte. L’essentiel pour moi c’est que ce soit bien fait.

MH : Vous pratiquez la circoncision depuis vingt ans, comment cela se passait-il à l’époque ?

Z : Je me suis mis à la pratique, sinon à la maîtrise de la technique de la circoncision niveau chirurgical, avec mes collègues chirurgiens. À l’époque on autorisait certains gestes aux infirmiers et aussi pour soulager l’hôpital et éviter que la circoncision soit réalisée de façon barbare et archaïque dans les villages. Soulager les enfants tout en restant dans la pratique de la religion. C’était pour moi plus que nécessaire de maîtriser la technique pour rendre service à la population.

MH : Que devient le prépuce ?

Z : À Mayotte, le prépuce est remis à la famille qui l’enterre.

MH : La circoncision a-t-elle un effet protecteur face à l’acquisition de maladies sexuellement transmissibles entre autres ?

Z : Depuis plus de dix ans, l’Organisation mondiale de la santé (OMS, ndlr) recommande la circoncision. Elle a prouvé statistiquement que les hommes non circoncis étaient plus exposés aux risques de contraction du VIH, de MST et autres. Lorsque le gland est couvert il y a plus de risques de rétention de bactéries que lorsqu’il est nu.

Tradition : la circoncision, ça se fête ! 1/3

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Tous ou presque sont passés par cette étape dans leur vie : la circoncision. Les jeunes Mahorais se voient dès leur jeune âge retirer le prépuce pour motif religieux mais pas seulement. Traditionnellement, cette pratique ancestrale est synonyme de bon augure pour la future vie de l’enfant. Cérémonies coutumières et félicitations sont de rigueur.

 Le rendez-vous se tient toujours après la prière de l’aube, sobh, afin d’en tirer toutes les bénédictions. Il est un peu moins de 7 heures du matin, Karim* jeune Mahorais de cinq ans s’apprête à être circoncis chez lui, au sein de son village natal et dans sa maison aux côtés de son père, d’oncles et sa famille proche. Ils sont une vingtaine, tous en kandzu, symbole d’un évènement religieux. Tel est le scénario plausible pour un jour de circoncision à Mayotte explique Saïd*, Mahorais quinquagénaire habitant à M’tsapéré. Le père de famille est un adepte des traditions de son île d’ailleurs il explique d’emblée que la circoncision est une étape importante dans la vie du jeune Mahorais. « Plus tôt on l’a fait à l’enfant, moins il aura mal », explique celui qui a fait le même choix pour son fils. En effet, l’enfant mahorais est circoncis à trois, cinq ou sept ans. Des âges impairs choisis subtilement de par leur forte connotation. « Par rapport à la religion musulmane, nous à Mayotte on se base sur un chiffre impair, car Allah est unique, il représente donc le chiffre un ». Saïd garde tout de même quelques réserves quant à la circoncision des enfants plus jeunes car « l’acte est douloureux ». Et d’ajouter : « La circoncision est liée à la religion et à notre hygiène intime. C’est ce que nous avons reçu de nos anciens c’est pour ça que nous maintenons sa pratique ».

 Rituels et prières de protection

« La veille de la circoncision, les cérémonies traditionnelles commencent d’abord avec le heredza », indique Saïd. Un rite culturel pourvu de chants religieux réservé aux femmes qui se rapproche du « sauna » pour son bain de vapeur, mais qui est accompagné à Mayotte de plantes médicinales bouillies en amont. Un rite de purification aussi, durant lequel l’enfant est massé afin « d’éviter toute forme d’infection » après la circoncision. Ce même jour, l’enfant a également le crâne rasé, la plante des pieds et des mains couvertes de henné pour marquer cette étape cruciale dans sa vie de jeune homme. Le jour J, les mamans s’affairent en cuisine, les papas quant à eux s’apprêtent à célébrer solennellement la cérémonie de l’acte de la circoncision.

« Les cérémonies de la circoncision à Mayotte dépendent aussi des familles et de leur village », poursuit Saïd expliquant que ces dernières procèdent chacune à leur manière. En effet, plusieurs étapes sont à noter. La première, le chidjebou, une oraison tirée des textes du Coran sollicitant la protection divine avant l’acte. Chez Saïd, le matin même de la circoncision, les hommes de la famille récitent le chidjebou. Puis, vient le moment de la circoncision pratiquée par un infirmier ou « vraiment de manière traditionnelle avec un [circonciseur] du village, comme à l’époque de nos parents ». Une cérémonie relativement courte, durant laquelle l’enfant reste entouré des hommes de sa famille. Une fois l’acte fini, s’en suit un autre chidjebou.

Le choix du jour est également lié à la religion. Le vendredi, « jour du Seigneur pour les musulmans », souligne le père de famille. D’autres favorisent le jour de la naissance du Prophète Muhammad, le maoulida, « un jour béni » ajoute-t-il. Aujourd’hui, la circoncision se déroule de plus en plus durant les vacances scolaires afin d’éviter l’absence aux cours. De son côté, Saïd se réjouit de l’avancée de la science qui permet aujourd’hui, selon les pratiques, de circoncire l’enfant sans engendrer de période d’alitement longue. « Certaines familles, très traditionnelles ne veulent pas faire appel aux infirmiers. Les traditions c’est bien, moi aussi j’aime mes traditions, mais quand on a les moyens d’éviter la souffrance à l’enfant pourquoi ne pas le faire. Je pense qu’il faut évoluer avec le temps ».

 « Rendre visite au Boina Haroussi »

Une fois l’acte fini, une autre cérémonie suit, celle-ci « a plus tendance à fêter l’événement ». En effet, l’enfant circoncis suscite la visite de sa famille et du voisinage, tel un héros. Tout un chacun souhaite voir le « boina haroussi » (jeune marié) pour le féliciter et célébrer sa bravoure. Un tournant a eu lieu. « Traditionnellement, on considère que c’est son premier mariage », indique Saïd. Durant toute sa période de convalescence, l’enfant, reçoit cadeaux et offrandes en tout genre : gâteaux, jeux, enveloppes d’argent… Il est au centre de toutes les attentions. « Il ne sort pas. Il reste dans la chambre. On le laisse jouer dans la cour mais il est très surveillé pour éviter qu’il ne se blesse ou qu’il attrape des infections ». Trois semaines voire un mois après la circoncision, s’en suit un dernier chidjebou. À ce moment-là, « l’enfant est guéri, tout va très bien ». Place au mateheri, cérémonie qui marque le cap de l’enfance à la vie de jeune adulte, bien qu’il ne soit pas encore un jeune adulte, précise toutefois Saïd. « Certaines familles vont jusqu’à tuer un zébu ». Un sacrifice qui se perpétue encore aujourd’hui. La viande du zébu est partagée entre « notables du quartier » choisis subtilement par le père de l’enfant qui leur offre approximativement à chacun deux kilos. Le reste est cuisiné et consommé le jour même avec tout le voisinage. Si la circoncision s’avère être un rituel de joie et d’accomplissement pour les familles de l’enfant, ce dernier pour sa part s’étonne souvent de la « diminution » de la taille de son sexe quelques semaines plus tard se gausse Saïd.

 

 

 

 

 

 

 

Maria Mroivili, sociologue passionnée

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Alors qu’elle enseigne sa discipline aux adultes de demain au sein du centre universitaire, la mahoraise s’inquiète de voir que les transformations socioculturelles du 101ème département ne suivent pas, lorsqu’il est question d’offrir à sa jeunesse des métiers nouveaux et prometteurs, en somme, des métiers tournés vers l’avenir.

Plus de la moitié des bacheliers mahorais quittent le territoire pour poursuivre leurs études supérieures, la plupart du temps, à La Réunion ou en métropole. Entre difficultés de langue et d’insertion, différences de culture et de niveau, ils ne sont finalement qu’une poignée à atteindre la deuxième année. Pourtant, à 35 ans, Maria Mroivili compte à son actif deux masters et un doctorat, tous obtenus dans l’Hexagone. Mais alors même qu’elle se trouvait à plusieurs milliers de kilomètres de Sada, village où s’est établie sa famille, la Mahoraise a choisi de placer son île au coeur de ses travaux. Son île, oui, mais aussi sa propre histoire.

À la rentrée 2012, après une première thèse en écogestion dédiée à l’action sociale au sein d’une université parisienne, elle doit, cette fois dans le cadre de ses études de sogiologie “ pure ”, comme elle le dit elle-même, réfléchir à un nouveau sujet. La région champenoise où elle vit alors aidant, elle s’intéresse d’abord à la trajectoire professionnelle des femmes dans les métiers de la vigne et du vin. “ Évidemment, j’ai eu du mal à m’approprier ce thème, alors au bout de six mois, j’ai dû en changer ! ”, s’en amuse-t-elle aujourd’hui. “ Et je n’ai pas dû aller très loin pour ça ”. Sous ses yeux, son propre parcours l’inspire : pendant cinq ans, elle se consacre à la trajectoire, non plus professionnelle mais universitaire des étudiants mahorais à l’épreuve du genre. Quel rapport les différentes générations insulaires entretiennent-elles avec leur propre scolarité ? Comment, au fil du temps, les parcours évoluent-ils au sein d’une société en pleine mutation ? Vers quels secteurs ? Quelle influence joue le sexe des étudiants dans leurs orientations ? Autant de questions épineuses, mais certainement pas inconnues à la jeune Maria.

La révélation

Très tôt baignée dans la culture musulmane, la Sadoise assimile, à une vitesse incroyable, nombre de versets du Coran qu’elle récite par coeur à la madrassa. À tel point qu’au sein de sa famille, elle devient l’enfant prodige. “ Mais je ne me reconnaissais pas dans cette éducation-là, ça ne me correspondait pas ”, reconnaît à présent Maria Mroivili. Une sorte de mal-être intérieur grandit en elle. Une quête identitaire et intellectuelle, surtout. Elle intègre alors un collège laïque, puis le lycée de Sada où elle décide de s’orienter vers une filière économique et sociale, une révélation qui apportera quelques réponses aux questions qu’elle se pose à elle-même en son for intérieur. “ En classe, j’ai découvert les notions de normes et de valeurs et comme un miroir, elles m’ont aidées à me voir différemment ”, se souvient la trentenaire. Immédiatement, elle interroge son professeur sur

ses études. “ J’ai voulu à mon tour devenir prof car il avait fait naître en moi l’amour de la sociologie ”. Enfin, la femme en devenir trouve sa voie. En 2005, Maria Mroivili intègre le lycée de Mamoudzou et son internat. Elle troque son voile musulman contre des jeans déchirés, et devient même la première jeune fille de son village à arborer une coupe « à la garçonne ». Petit à petit et malgré l’incompréhension de son entourage, elle apprend à se façonner une identité qui enfin, lui correspond véritablement. Mais à l’obtention de son baccalauréat, la voilà contrainte de quitter son île, où le centre universitaire de formation et de recherche (CUFR) de Dembéni n’a pas encore vu le jour. Des études, la jeune Maria rêve assurément d’en faire, et elle ne soupçonne pas alors l’étendue du parcours qui l’attend, toujours vertébré par sa passion alors naissante.

L’année de son départ, elle intègre l’université du Havre où la Mahoraise suit un DUT en carrières sociales. Trois ans plus tard, la voilà à Reims, qui deviendra “ sa ville d’adoption ”, celle qui verra naître son fils. Pendant deux ans, elle étudie l’intervention sociale dans le cadre de sa licence professionnelle. Puis, de 2009 à 2011, elle se consacre à un master en éco-gestion, management des services de santé et de l’action sociale à l’université de Paris-Est-Marne-la-Vallée, qui la ramène ensuite à Reims pour un master dédié cette fois aux sciences humaines et sociales, éducation et formation. Finalement en 2012, la consécration : Maria Mroivili intègre un doctorat en lettres et sciences humaines et sociales. Parallèlement à ses études, elle enchaîne plusieurs activités, dans le social évidemment : coordinatrice pédagogique au sein d’écoles de la deuxième chance, conseillère en insertion dans le milieu associatif et conseillère municipale de quartier, chargée de projet pour la Croix-Rouge française et même conseillère principale d’éducation d’un collège rémois, autant d’approches différentes qui assurent son épanouissement.

Une mutation sociale perpétuelle mais lente

Au contact de ses élèves, Maria Mroivili comprend que la nouvelle génération de mahorais privilégie encore des parcours universitaires courts et peu variés. Alors qu’en métropole, elle constatait avec bonheur la féminisation de plusieurs métiers jusqu’alors considérés comme typiquement masculins, elle comprend qu’à Mayotte, l’offre de vocations et le niveau scolaire en lui-même affichent un sérieux retard, en dépit du développement institutionnel et éducatif – parfois lent – de l’île aux parfums. Elle concentre alors ses recherches sur trois périodes distinctes : des années 70 à 90, ère de refonte du système scolaire mahorais, puis de 90 aux années 2000 et enfin, de 2000 à nos jours. Mais alors qu’elle s’attend à découvrir une évolution sociale profonde, Maria Mroivili s’aperçoit au contraire qu’aujourd’hui encore, “ on se limite à de brèves formations conduisant à des métiers déjà bien connus ”. Finalement, “ les jeunes mahorais ne s’identifient pas aux transformations de leur société ”.

La doctorante produit même une cartographie des parcours universitaires locaux. Sa thèse cite ainsi comme exemple une famille sadoise dans laquelle, sur une génération entière, tous les parents et enfants ont occupé la fonction de policiers ou gendarmes. “ Je remarque une tendance à quitter le système scolaire, favorisée par des dispositifs comme le RSMA ”, pointe-t-elle du doigt. “ Beaucoup de jeunes intègrent ce genre de structures alors qu’ils ont largement le potentiel pour poursuivre leurs études : la nouvelle génération qui devrait pouvoir s’émanciper est finalement en train de subir ce manque de formations universitaires »

Elle identifie “ les métiers de la paix ” comme les plus populaires, chez les hommes comme chez les femmes. “ D’une part, c’est une bonne chose qui prouve la volonté des jeunes Mahoraises, leur capacité à oser, mais le problème c’est qu’elles interrompent leurs études pour rejoindre la fonction à des niveaux peu élevés ”. Autre constat que Maria Mroivili déplore, le manque de prise en compte des métiers d’avenir dans l’offre de formations localement dispensées, comme le paramédical, notamment. “ Il y a toute une dynamique à construire, même si le conseil départemental commence à s’intéresser au sujet, à travers la mise en place de bourse au mérite pour inciter à aller vers ces branches-là ”.

En ce sens, la sociologue relève une lente mais progressive prise de conscience collective : “ Notre société est en perpétuelle mutation. Après une phase de transformation, elle est maintenant dans une phase de révolte marquée à tous les niveaux ”, analyse-t-elle. “ Je ne parle pas de mouvements sociaux, mais du fait que la société entière, toutes générations confondues, se rend compte peu à peu du manque de moyens à Mayotte ”. Preuve en est selon elle, le développement rapide du nombre de conférences et séminaires dans tous les domaines, particulièrement depuis ces deux dernières années. “ Nous sommes en train de comprendre l’importance de l’analyse de la parole, et plus largement du travail d’étude et de la place des universitaires ”. Alors que la sociologie en elle-même n’a jamais fait l’objet d’orientation universitaire à Mayotte, les sciences humaines pourraient finalement sembler vouées à se développer. Une aubaine, peutêtre, sur l’île hippocampe où, en 2017, 65 % des jeunes de 16 à 29 ans étaient en rupture scolaire avant même d’avoir décroché un seul diplôme qualifiant.

Construire un tunnel entre grande-terre et petite-terre

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Un temps imaginé, le pont entre Petite-terre et Grande-terre n’aura été qu’un fantasme. De toute façon, cela n’aurait pas été très beau sur le lagon. En revanche, pourquoi pas un tunnel ?

En mai dernier, on fêtait les 25 ans de l’inauguration du tunnel sous la Manche. À Mayotte, bon nombre d’habitants imaginent un pont pour relier Grande-Terre à Petite- Terre. Mais un pont sur le lagon, c’est moche, alors pourquoi pas un tunnel ? La distance ne représente que 1,8 km : bien loin des 50,5 kilomètres séparant le sud-est du Royaume- Uni au nord de la France. Dans le monde entier, il existe peu de tunnels sous-marins connectant deux îles. Le plus long se trouve au Japon, entre Honshu et Hokkaido. En Europe, l’un des plus célèbres se trouve aux Îles Féroé et permet de rejoindre la ville de Leirvik depuis Klaksvik au terme d’un trajet de 6,3 km. Dans l’océan Indien, un projet est en prévision aux Seychelles. Il consiste en la construction de deux tunnels sur Mahé. Le principal devrait relier Grand Anse, à l’ouest, à Providence, à l’est. L’autre serait entre le district nord de Beau Vallon et English Rivers, un district central. L’étude estime qu’une fois le chantier démarré, il faudrait environ trois ans pour le mener à bien et qu’il devrait coûter plus de soixante millions de dollars. Si l’on tient compte du fait qu’un projet de pont entre Petite-Terre et Grande-Terre ne répond pas aux objectifs fixés par le plan global de transports et de déplacements puisqu’il amènerait une grosse partie du trafic en centre-ville, il apparaît comme peu probable qu’un tunnel soit dans les cartons. D’autant plus que la construction est estimée à plus de 220 millions d’euros d’investissement et que le Département ne semble pas avoir les ressources financières suffisantes pour assumer une telle opération. De facto, un tunnel est pour le moment inconcevable sur l’île aux parfums. Mais qui sait ? Un jour peut-être…

Flaccine Daniel : entrepreneuse gourmande

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 Fondatrice de l’agence de communication May Kidz et plus récemment du salon de thé et traiteur ô gourmandises, la jeune mahoraise ne compte pas arrêter là son expérience de cheffe d’entreprise. Flaccine fourmille d’idées novatrices qu’elle compte bien exporter dans la région, avant de s’attaquer à l’international, où elle n’a cessé de voyager. Rencontre.

Sa nouvelle enseigne, raffinée, orne la façade des vitrines de M’gombani depuis maintenant trois mois. Nous sommes à quelques pas du brochetti mangrove, mais ce sont cette fois les douceurs sucrées, traditionnelles ou non, qui se dévoilent généreusement derrière le comptoir fraîchement décoré, entre bocaux de bonbons et grands verres de citronnade, qui attirent l’attention et attisent l’appétit des passants. Il faut dire qu’à Mayotte, Ô Gourmandises est la première entreprise du genre à proposer à la fois traiteur, salon de thé, magasin de confiseries, bar à salades, à wraps, etc. Même les curieux Bubble Tea, les premiers de l’île aux parfums, sont au rendez-vous. Une idée originale sortie tout droit de la tête de Flaccine Daniel. À 32 ans, la Mahoraise n’en est pas à son coup d’essai, puisque trois ans plus tôt, elle créait May’Kids, une agence évènementielle exclusivement dédiée aux fêtes pour enfants. Une première activité, déjà inédite sur le territoire, qui complète parfaitement celle nouvellement créée.

« Le but, c’est de proposer un service à la carte, du sur-mesure adapté à toutes les demandes », développe Flaccine Daniel. De la simple animation musicale à la décoration, du repas aux jeux et ateliers ludiques, en passant par les mascottes de Mickey et Minnie – là encore, les premières de l’île –, la jeune entreprise révolutionne les évènements familiaux que sont les baby shower – des fêtes destinées à annoncer la grossesse d’une future maman –, les baptêmes, la circoncision, les manzaraka, les anniversaires, etc. Tout pour accompagner, de la pré-naissance à l’adolescence, les premiers événements clés de la vie, sur lesquels les Mahorais ne transigent jamais. « C’est une façon d’amener de la modernité dans la tradition, sans l’abîmer », résume simplement l’entrepreneuse, bercée depuis l’enfance par les coutumes locales, comme le montre le voile gris qui entoure délicatement son visage. « Cela me permet d’apporter au côté mahorais une petite touche à la française, qui est une référence largement reconnue à l’international ! ». Et ça, la jeune femme en sait quelque chose.

DES VOYAGES À L’ANCRAGE

Née de parents mahorais, Flaccine Daniel quitte en bas âge le 101ème département avec sa famille qui, comme beaucoup d’autres, préfèrent s’installer à La Réunion. Elle vivra 10 ans sur l’île intense avant de débarquer en métropole pour y poursuivre sa scolarité dans la région toulousaine. La Mahoraise se lance dans un bac hôtelier, suivi d’un BTS tourisme en vente et production. Un parcours qui lui permet de mettre, très jeune, un pied dans le monde professionnel : « J’ai fait un peu de tout, j’ai travaillé dans l’insertion, dans l’aérien », se souvient Flaccine Daniel, accoudée sur l’une des petites tables roses qui remplissent la salle de sa nouvelle entreprise.

Diplômes en poche, la jeune femme, curieuse de s’ouvrir au monde, s’envole pour l’Australie où elle s’installe quelques temps. Puis, « En revenant en métropole, je n’ai plus supporté y vivre, il fallait que je reparte ! », commente-t-elle dans un large sourire qui ponctue souvent ses phrases. Elle décide alors de retourner quatre mois seulement à Mayotte, en vacances, avant de finalement s’y établir pour de bon. Rapidement, la trentenaire comprend que nombre de services manquent sur l’île, plus qu’ailleurs. Ni une, ni deux, elle fonde sa première entreprise, May’Kidz. « À l’époque, pour les enfants, il y avait déjà le parc gonflable Kiddy Kid, mais ce n’est pas la même chose, il n’y a pas vraiment de concurrence sur ce créneau ».

Des années plus tard, elle décide de s’inspirer de la chaîne américaine Starbucks pour créer, cette fois, un salon de thé à l’ambiance douce et élégante, où il serait à la fois possible de bruncher, prendre le goûter et déguster quelques sucreries. Le tout dans un cadre très british, à la façon des cafés londoniens dans lesquelles Flaccine Daniel a eu l’occasion de savourer toutes sortes de gourmandises tout au long de ses voyages. « Petit à petit, j’ai repensé à toutes les heures passées là-bas pour profiter de la connexion wifi pour pouvoir appeler ma famille et mes amis », s’amuse la baroudeuse. « Je commandais un milkshake et je restais des heures, à table, sur Skype ! » Et si le tourisme manque à Mayotte, « il y a quand même une diaspora assez importante qui désire peut-être profiter d’un espace comme celui-ci pour joindre ses proches à l’autre bout du monde. » Finalement, grâce à ses voyages, la jeune femme contribue au développement de son territoire, dont les habitants semblent déjà accrocher à ce nouveau projet : le mois dernier, alors que Flaccine et ses deux employées faisaient face à une pénurie d’oeufs, nombreux ont été les clients à débarquer à la boutique les bras chargés de boîtes, afin de pouvoir continuer à déguster les fameuses Bubble gaufres, spécialité asiatique dont la forme ronde et aérienne garantit une gourmandise moelleuse à souhait.

CARRIÈRE ET CARACTÈRE

La solidarité, le sens de la communauté, incarnent des valeurs qui ont toujours bercé la jeune femme. Les premiers temps de l’installation de la boutique, son mari l’a accompagné de l’administratif jusqu’aux travaux, en passant par la logistique. « Les nuits blanches, on les a faites à deux ! », sourit Flaccine Daniel. Sa famille, aussi, l’épaule beaucoup. Rien de plus naturel, pour cette fille issue d’une fratrie de huit enfants, « dont cinq carriéristes », se réjouit la gérante de Ô Gourmandises by May’Kidz. Une énergie, une soif d’aller de l’avant héritées de sa mère, célibataire, qui a toujours transmis à ces enfants la confiance dont ils avaient besoin pour rêver et oser. Une force de caractère, aussi, que Flaccine Daniel porte encore au coeur. Car au gré des projets concrétisés, les idées se renouvellent sans cesse et s’ouvrent à présent vers l’international. Soutenue par l’Agence De l’Outre-mer pour la Mobilité (Ladom), Flaccine Daniel projette d’étendre son activité à Madagascar dans un premier temps, particulièrement en tant que consultante dans le milieu de l’hôtellerie, où elle proposerait, évidemment, les services évènementiels de May’Kids, avant de les exporter en dehors de l’océan Indien. Un projet ambitieux pour cette jeune Mahoraise qui porte, comme elle le dit en souriant, « le syndrome de l’entreprenariat. »

« 1 jour 1 plaisir » livre de l’amour aux Mahorais

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En moins de trois semaines, la jeune entreprise 1 jour 1 plaisir a séduit le cœur des Mahorais. Son principe : livrer une preuve d’amour ou d’affection par un professionnel équipé d’une caméra discrète. Pour ceux qui vivent loin de l’île, ou qui sont trop timides pour assumer leurs sentiments, témoigner de son affection devient désormais possible en quelques clics.

« Le messager de vos émotions« . Le slogan est simple et parle de lui-même. Avec son entreprise 1 jour 1 plaisir, le Mahorais Bachir Cassim, 30 ans, livre des preuves d’amour à travers l’île depuis la mi-septembre. Qu’il s’agisse d’une rose, d’un mot doux, d’un cadeau matériel ou d’une bonne nouvelle, ses idées comme ses clients ne manquent pas. « On a déjà dépassé la trentaine de livraisons ! », se réjouit-il. Avec sa petite GoPro sur le casque, le jeune homme filme discrètement, et permet ainsi à ses clients de constater l’émotion procurée par leur attention. Une bénédiction pour les personnes vivant à l’extérieur de l’île et qui souhaitent chouchouter leurs proches au travers d’une attention particulière. « Des gens de Marseille, Toulon, et de La Réunion ont déjà fait appel à nos services« , détaille-t-il. « C’est un bonheur de voir la réaction des gens et de la transmettre à la personne concernée. Je viens de livrer une femme à la mairie de Sada, les gens m’ont carrément applaudi« , rembobine l’entrepreneur, sourire aux lèvres.

 « Qui a dit que les Mahorais n’étaient pas romantiques ? »

Sur sa jeune page Facebook qui dépasse déjà le millier d’abonnés, Bachir propose différentes offres. Du pack roses à 10 euros, en passant au pack mots doux à 20 euros, jusqu’au pack prestige à 90 euros où l’entrepreneur installe carrément un jacuzzi à domicile orné de pétales de rose, les recommandations positives ne manquent pas. « Franchement chapeau ! Cela fait  trois ans que je poursuis mes étude sur l’île de La Réunion. Je n’ai jamais pu procurer autant d’émotions à ma mère, et ce n’est pas faute d’avoir essayé« , peut-on lire.

Plus qu’une aventure entrepreneuriale, Bachir avoue éprouver une certaine satisfaction dans son travail aux allures de Cupidon. « Un homme était dingue d’une femme qu’il croisait tous les jours sur la barge, sans oser lui parler. Il m’a appelé pour un pack mots doux, et la semaine suivante je les voyais en train de boire un coup au 5/5. C’est génial« .  Dans une île où témoigner son affection, voire son amour, n’est pas toujours une sinécure, 1 jour 1 plaisir permet de fluidifier les rapports en s’émancipant des contraintes sociales. Un filon que l’homme a repéré suite à la venue d’un ami sur l’île. « Il est tombé amoureux d’une Mahoraise et tentait par tous les moyens de la séduire. J’ai dû trouver une activité à lui proposer chaque jour durant une semaine. C’est ainsi que m’est venu le concept. » si l’entreprise est encore jeune, ses projets ne manquent pas. « Nous allons développer le pack restaurant. Je m’occupe des réservations en fonction de la demande du client et de mes partenaires. Ensuite, j’installe un tapis rouge et des couverts haut standing, en plus d’annoncer la bonne nouvelle. C’est ainsi qu’on transforme une simple soirée au restaurant en événement d’une plus grande ampleur« , ambitionne-t-il avant de conclure : « Qui a dit que les Mahorais n’étaient pas romantiques ?« .

 

Pour contacter 1 jour 1 plaisir :  0639 09 96 28

 

Sida : « Le réflexe du dépistage n’est pas encore là »

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Chaque année, 30 nouvelles personnes sont dépistées séropositives dans le département. Problème : plus de la moitié de ces individus sont des femmes, qui apprennent la nouvelle lors de leurs examens de grossesse. Le réflexe du dépistage n’est donc toujours pas acquis sur le territoire, et le sujet est généralement uniquement évoqué lors de campagnes nationales ou régionales spécifiques. Pourtant l’urgence est là, et son combat se mène au quotidien.

Le sujet est grave, et pourtant majoritairement abordé dans l’espace public uniquement lors d’événements particuliers.Tout au long de l’année pourtant, le sida continue sa route dans le département. Dans le petit local de Narike M’sada à Cavani, l’association travaille au quotidien pour faire reculer le virus dans l’île. Avec comme fer de lance : « La nécessité du dépistage », martèle Moncef Mouhoudhoire, directeur et membre fondateur de l’association.

Depuis l’année dernière, cette structure permet aux hommes et aux femmes de se faire dépister en toute discrétion. « L’année dernière, nous avons réalisé 178 dépistages alors même que l’île était sujette à de graves mouvements sociaux », indique Moncef. Plus qu’une prise de sang, il s’agit également d’accompagner les malades en leur offrant un soutien. Également dans leurs activités ? « Des campagnes de sensibilisation dans les établissements scolaires, associatifs, daministratifs et pénitenciers. Nous réalisons également des maraudes nocturnes afin notamment de sensibiliser les travailleurs du sexe ». Pour autant, sa priorité reste inchangée: « le dépistage reste le meilleur moyen de freiner l’avancée du virus. Une fois la personne consciente de la maladie, elle peut prétendre à la charge virale indétectable qui la rend intransmissible auprès de ses partenaires sexuels, même sans préservatif », insiste-t-il. À Mayotte pourtant, le « réflexe du dépistage » semble loin d’être acquis, selon le professionnel.

Un changement timide

« L’urgence pour la population mahoraise, c’est d’assurer le quotidien. Pour ce qui est du futur, beaucoup sont tentés de dire: « Inchallah, Dieu y pourvoira ». Il y a donc un manque d’anticipation », introduit le président de Narike M’sada. Il poursuit : « Les gens vont voir le médecin quand ils sont malades, mais comment leur expliquer la nécessité d’y aller en amont, par anticipation ? » Pour autant, pas question de blâmer la population. « Il faut dire aussi qu’on ne fait pas assez la promotion du dépistage. Celui-ci reste généralement hospitalocentré sur Mamoudzou et ses environs. Or, on connaît le manque de transports en commun sur le territoire », explique-t-il. Malgré ces difficultés, force est de constater que les mentalités évoluent. « Lorsque nousavons lancé notre campagne de communication sur le dépistage avec des couples en février dernier. Douze couples ont répondu à l’appel. Il y avait même des personnes âgées dont une djahoula. C’était impensable, il y a encore peu de temps, que des gens acceptent d’associer leur image avec la problématique du sida ». Si cette dernière semble relativement connue pour les jeunes publics, notamment autour de la promotion du port du préservatif, celui-ci semble nettement moins automatique « en ce qui concerne leurs parents ». Pour autant, « chez les jeunes, nous constatons toujours les mêmes questions et les mêmes remarques que lors de nos premières interventions dans les collèges. Il y a encore beaucoup de méconnaissance. Pourtant cette jeunesse a accès au savoir via internet. Mais elle a aussi accès à du cyber sexe… »

Le combat continue

En 1989, Mayotte enregistrait son premier dépistage positif sur le territoire. Depuis, « le nombre de séropositifs n’a jamais dépassé 300.
Cela s’expliquant par les mouvements des populations, entre les métropolitains qui finissent leur contrat, les reconduits à la frontière, ou les Mahorais qui préfèrent s’exiler en métropole ou à La Réunion par crainte du jugement social ». Chaque année pourtant, 30 nouveaux cas sont décelés. À 62%, il s’agit de femmes ayant appris la nouvelle lors de leurs examens de grossesse. Pour modifier cette tendance, Narike M’sada ambitionne de nouveaux projets. « On est en train de récupérer un véhicule pour aller faire du dépistage au plus près de la population. Il faut se décentrer de Mamoudzou », insiste-t-il. Son objectif ? S’inscrire avec succès dans l’objectif universel de l’ONU sida à l’horizon 2025, à savoir « 90% de la population mondiale dépistée, 90% de séropositif ayant accès à une prise en charge médicale, et 90% de personnes ayant accès à la charge virale indétectable ». Également dans ses espoirs : « Mettre en place durablement le traitement PreP à Mayotte, qui permet aux personnes non atteintes, mais qui ont une conduite à risque, de ne pas contracter la maladie ».

Conscient que la problématique sida relève d’un contexte particulier dans l’île, Moncef Mouhoudhoire n’oublie pas la situation sociale et économique du département le plus pauvre de France. « Il faut faciliter l’accès au préservatif. Or Mayotte ne compte que vingt pharmacies dont près de la moitié sont concentrées sur Mamoudzou. 84% de la population vit sous le seuil de pauvreté. Nous avons le taux de chômage le plus élevé de France. Difficile dans ces conditions d’imaginer un jeune prendre le taxi pour se rendre à la pharmacie, puis mettre encore la main au portefeuille pour acheter des préservatifs ». On l’aura compris : réduire la progression du sida est donc un combat global, qui doit se mener au quotidien pour espérer un avenir meilleur dans l’île aux parfums.

Il y a 12 000 ans, Mayotte était cinq fois plus grande

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Il y a 10 ans presque jour pour jour (Mayotte Hebdo n°443 du vendredi 18 septembre 2009), nous publions un article présentant Mayotte il y a 12 000 ans. Puisqu’il est question aujourd’hui de montée des eaux, l’occasion nous est donnée de le republier et de se pencher sur le phénomène inverse, quand Mayotte était bien plus grande qu’aujourd’hui. Saisissant !

 

À l’échelle de l’histoire géologique, Mayotte, même si elle est la plus ancienne de l’archipel des Comores, est une île très jeune : elle est en fait la réunion de deux édifices volcaniques qui ont commencé à se former il y a 15 millions d’années, pour émerger il y a seulement 9 millions d’années. La construction de l’île s’est achevée il y a 1,5 million d’années par les derniers apports du volcan du M’tsapéré. Il y a 100 000 ans, un volcanisme plus récent marquera la création des dépressions de Cavani, Kawéni et Petite Terre, avec des éruptions jusqu’à – 6 000 bp (before present). Depuis, l’île est soumise à l’érosion due aux aléas climatiques. Aujourd’hui, le relief est donc quasiment le même qu’il y a 100 000 ans, à une exception près : entre -80 000 et -12 000 bp, l’île était 5 fois plus grande, à cause de la grande glaciation de Würm qui a provoqué une baisse du niveau de la mer de 120 mètres !

« Le paysage actuel de Mayotte date d’il y a 3 000 ans seulement ». Arnauld Malard, hydrogéologue au BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières) de Mayotte a rassemblé divers travaux publiés dans des revues spécialisées, notamment les articles de l’océanographe Bernard Thomassin, pour étudier l’ère quaternaire de l’île, qui s’étend de -1,9 million d’années à aujourd’hui. Pour comprendre comment l’île s’est formée, il faut d’abord en étudier les profondeurs. « Mayotte est comme un iceberg : l’île ne représente en fait que 1 à 3% de toute la masse du cône volcanique, qui descend jusqu’à 3 400 mètres en dessous du niveau de la mer. » Il y a 1,5 million d’années, les apports de matériaux issus de l’activité volcanique ont fini par ne plus compenser la « subsidence », un phénomène naturel qui absorbe tous les déficits et les excédents de matières, la croûte terrestre équilibrant les pressions. « Quand l’édifice n’accumule plus de matériaux, il a tendance à s’enfoncer », résume Arnauld Malard.
Tandis que l’île commence à s’enfoncer, le récif frangeant continue de se développer : les coraux étant attirés par la lumière, ils vont petit à petit former une barrière récifale, rendant les pentes du volcan de plus en plus abruptes. C’est ainsi qu’apparaît un lagon. À terme, l’île finit par être engloutie sous la mer et il ne reste plus que la barrière : c’est ce qu’on appelle un atoll, le stade final des îles volcaniques.

« Le niveau de la mer change en fonction des glaciations »
« Depuis un million d’années, le lagon et Mayotte s’enfoncent de 2 mètres tous les 10 000 ans, ce qui est assez faible. La barrière actuelle montre le contour de l’île à l’époque où il y avait une émersion maximale », explique Arnauld Mallard. On peut donc dire que l’île d’aujourd’hui est la même qu’il y a un million d’années, sauf qu’elle était moins érodée, plus émergée et donc plus haute de 200 mètres. « Mais le niveau de la mer change en fonction des glaciations », rappelle le scientifique.
Les glaciations sont des phénomènes cycliques naturels « conditionnés à 80% par des changements climatiques provoqués par des modifications orbitales ». Il y a trois facteurs astronomiques qui expliquent les glaciations : la « précession axiale », la variation de l’axe de rotation de la terre qui décrit un cône en 10 000 ans, modulé par la lune ; « l’obliquité », la variation de l’angle de rotation de la terre qui s’ouvre et se ferme en 41 000 ans ; et « l’excentricité », la variation de l’orbite terrestre, avec un cycle de rapprochement et d’éloignement du soleil de 100 000 et 400 000 ans. Un quatrième facteur, le rayonnement solaire, ne semble en revanche pas suivre de cycle déterminé.
L’ère quaternaire est ainsi composée d’une succession de périodes glaciaires et interglaciaires, appelées Gunz, Mindel, Riss et Würm, du nom des affluents du Danube où ces glaciations alpines ont été découvertes. En 1996, un forage à plus de 3 000 mètres de profondeur dans le lac gelé de Vostok en Antarctique a permis d’extraire une carotte glaciaire dont l’étude a révélé le climat passé sur une période remontant à 420 000 ans.

Les rivières se jetaient dans la mer sur des cascades de 60 mètres
La dernière période interglaciaire s’appelle l’Eemien (du nom de la rivière Eem aux Pays- Bas), et s’étend de -131 000 à -114 000 bp (before present) : les températures à l’époque avoisinaient celles d’aujourd’hui. Puis commence la glaciation de Würm, la dernière qu’a connue notre planète et qui ne s’achèvera que vers -10 000 bp. De -80 000 jusqu’au pic de glaciation atteint vers -18 000 bp, les températures chutent et des calottes glaciaires apparaissent sur tout le Nord de l’Europe et tout le Canada. Il y a 18 000 ans, le niveau de la mer a chuté de plus de 120 mètres par rapport à son niveau actuel. De nouvelles terres apparaissent, comme la Béringie entre la Sibérie et l’Alaska (qui explique le peuplement de l’Homme en Amérique) ou le Sahul, un continent formé de l’Australie, de la Nouvelle Guinée et de la Tasmanie. La France et la Grande-Bretagne sont alors reliées par un cordon terrestre, tout comme l’Indonésie et les Philippines ou le Japon et la Corée. Mayotte n’a bien sûr pas échappée à ce phénomène, ce qui explique qu’elle était 5 fois plus étendue qu’aujourd’hui : le lagon, situé à environ 60 mètres de profondeur maximum, était entièrement à découvert et l’île mesurait 1 800 km², contre 374 km² actuellement. Les falaises abruptes formées par l’amoncellement vertical des coraux faisaient de Mayotte une sorte de forteresse dont les eaux s’échappaient en se jetant dans la mer du haut de cascades qui pouvaient potentiellement atteindre 60 mètres !

40 000 ans sans coraux
Complètement « exondé » pendant la glaciation de Würm, le lagon s’est peu à peu végétalisé, jusqu’à devenir une savane herbacée, au milieu de coraux morts.
Comme il faisait plus froid et plus sec à cause des alizés sudpolaires, il y avait d’autres espèces végétales, comme des fougères (analogues à celles du Mont Choungui d’aujourd’hui) et des forêts d’euphorbes et de petits conifères. Les plages se sont tassées, et les cours d’eau beaucoup plus puissants ont entraîné une érosion très rapide, créant la célèbre Passe en S à l’Est et les passes Sada et Bateau à l’Ouest. Quand il n’y avait pas de passe, les cours d’eau creusaient des grottes pour se jeter dans la mer, comme en témoigne « la Cheminée », un site de plongée au Nord de la Passe en S. Durant cette période qui s’étale de -50 000 à -10 000 bp, tous les coraux qui colonisaient le lagon sont morts. Le niveau des océans remonte depuis -18 000 bp, mais le lagon n’a commencé à se remplir que vers -12 000 bp, de manière très progressive mais irrégulière, de quelques millimètres à 2 centimètres par an selon les périodes, ce qui est très rapide. Vers -10 600 bp, l’eau de mer s’infiltre dans les endroits les plus profonds du lagon, au banc de l’Iris et à la sortie de la baie de Bouéni et forment ce qu’on appelle des « rias » ou petites mers intérieures. Il y a 10 000 ans, Mayotte est constituée d’une multitude d’îles, et on peut encore aller à l’îlot de M’tsamboro à pied. En -9.000 bp, nous sommes à 22 mètres en dessous du niveau actuel de la mer : on peut toujours aller en Petite Terre à pied et faire le tour de l’île sur la barrière.

Il y a 9 000 ans, on pouvait aller de Mamoudzou à Petite Terre à pied

Il y a 7 000 ans, Grande Terre et Petite Terre ne sont plus reliées. En -6 000 bp, il n’y a plus que 5 mètres de moins. Les derniers évènements volcaniques de Petite Terre, dont on observe les traces dans les maars de Moya, datent de cette période.
Les coraux – qui avaient disparus – recolonisent le lagon au niveau de la barrière récifale, mais aussi au niveau du récif frangeant au gré de la remontée. La mangrove également se déplace en fonction de la montée des eaux.

« Aujourd’hui, on retrouve quasiment les mêmes traits de côtes qu’à l’époque interglaciaire de l’Eemien », précise Arnauld Malard. La seule différence, c’est l’érosion du lagon, qui est beaucoup moins plat et plus entaillé qu’avant la glaciation de Würm, à cause de l’érosion provoquée par la pluie, le vent et les cours d’eau. Mayotte telle qu’on la connaît aujourd’hui, avec ses passes, ses coraux et ses mangroves, n’a en fait que 3 000 ans, le début de l’âge de fer en Europe.

Le Banga Parc ouvre ses portes à Chirongui

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Ce weekend, le Banga Parc ouvre ses portes à l’occasion des journées du patrimoine. Dernier témoignage des habitations traditionnelles de Mayotte, le lieu accueille également les enfants au travers d’activités ludiques : balançoires, toboggans, trampolines… On s’amuse en découvrant l’histoire du territoire.

Le patrimoine mahorais fait de la résistance. Sur son terrain de Tsimkoura, l’entrepreneur Fayadhu Halidi surnommé « J’accuse« , entretien avec passion les derniers bangas traditionnels du département. Un labeur des plus éprouvants, que l’enseignant de profession peine à rendre lucratif. Lorsque nous le rencontrions l’année dernière, l’homme s’avouait résigné face à son projet de maison d’hôte dans la plus pure tradition mahoraise : « en l’absence de soutien des institutions et avec la baisse du tourisme à Mayotte, je suis obligé de détruire ces bangas que j’ai construits de mes mains« , déplorait-il . Une déchirure sentimentale, que l’entrepreneur n’a apparemment pas réussi à encaisser. « J’ai commencé à en détruire deux, puis je me suis dit : non. J’aime trop mon île et son histoire.  Je dois reconstruire. Je ne peux pas jouer à ce jeu. Il faut dépasser le simple concept du banga pour le faire perdurer« . Ainsi vint au monde le Banga Parc : un espace de jeux, de détente, et de convivialité, ou les petites attractions cohabitent avec les habitations historiques des Mahorais. Pour le découvrir, rendez-vous ce week-end sur son terrain à l’occasion des journées du patrimoine.

Les enfants jouent, les parents font la fête
 
 

Balançoires, toboggans, trampolines… Le Banga Parc se définit comme un lieu d’accueil à destination des familles. Pendant que les plus jeunes s’amusent, des tables et des espaces d’intimité sont aménagés pour les adultes. « J’accuse » a tout prévu, des repas aux boissons en passant par la sono. Egalement présents : les fameux « bangas traditionnels »,que les couples, familles et touristes peuvent louer la journée, voire tout le weekend. « Le Banga Parc, c’est aussi un lieu de convivialité pour les adultes qui souhaitent se détendre à la campagne pendant plusieurs jours« , précise l’entrepreneur. Là où son terrain était autrefois réservé aux touristes désireux de toucher du doigt les racines du département, il est aujourd’hui également un lieu d’accueil pour les Mahorais. L’occasion de diversifier son activité sans renier sa passion première : la tradition mahoraise, et ses habitations historiques.

Initialement ouvert au début de l’année, le Banga Parc a dû fermer ses portes suite aux dégâts provoqués par la dernière saison des pluies. « Tout le monde m’appelait pour venir, mais le terrain était impraticable. J’ai dû investir à nouveau pour réhabiliter les lieux. Dorénavant, nous ne serons plus obligés de fermer pendant la saison des pluies« , rembobine le passionné. Lui qui martèle son désir de ne pas modifier les techniques ancestrales de construction a cependant dû faire quelques concessions dans un souci financier. « Les bases des habitations sont en béton, et les toits sont en tôles recouvertes de feuilles. C’était obligatoire pour qu’ils restent en place sans devoir les entretenir quotidiennement« , reconnaît-il, le regard plongé sur ses créations. Pour le reste, la tradition est respectée. Bois, bambous, pieds de riz, terre… les murs végétaux retiennent la fraîcheur sans devoir utiliser de climatisation. Ce qui n’empêche pas « J’accuse » de raccorder certains bangas en électricité, tout en proposant des commodités contemporaines.

Un échantillon de « Musada »


Plus qu’une simple habitation, le banga représente, pour « J’accuse », le pilier d’un ordre social considéré comme révolu : « La musada » (l’entraide villageoise,en français). « Avant que les Mahorais investissent les habitations en dure, le banga était un symbole de cohabitation et d’entraide. Les familles construisaient les leurs à proximité pour garder un lien. C’est un logement sain qui respecte la nature. La nécessité de l’entretenir permettait aussi aux jeunes de prendre conscience de leur environnement et de le respecter« ,insiste-t-il. Comme un symbole de son caractère historique, le Banga Parc ouvrira ses portes ce weekend à l’occasion des journées européennes du patrimoine. Des jeux, activités ludiques, et ateliers de confections sont organisées. De quoi redonner un second souffle à une tradition dont la perte laisse, encore aujourd’hui, des conséquences difficilement réparables dans l’île aux parfums. 

 

Pour réserver sa place et son repas à l’occasion de l’ouverture du Banga Parc, contacter J’accuse au 06 39 22 31 37.

Mayotte est un super terrain de jeu pour la randonnée

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Si les activités nautiques se multiplient pour admirer les mammifères marins présents dans le lagon, à quelques encablures de l’eau bleu azur se dressent, sur le terre ferme, un paysage tout aussi spectaculaire. « Mayotte regorge de zones de forêt encore bien préservées, c’est un super terrain de jeu. Plus de la moitié du territoire a les caractéristiques de l’environnement spécifique montagne », affirme David Vancauteren, accompagnateur en montagne et formateur au centre de formation professionnelle et de promotion agricole au lycée de Coconi. En ce moment, il enchaîne les séries de tests dans le but de dénicher les douze candidats qui participeront à la formation de Guide Pays à partir du début du mois d’octobre. 

L’idée ? « Former des personnes compétentes pour encadrer les randonnées. » Seulement, cette formation, prise en charge par le plan d’investissement compétences (PIC) de Pôle Emploi, n’est pas diplômante (une réflexion est actuellement en cours avec le ministère des Sports pour y remédier)… Elle facilite simplement à la préparation au probatoire du diplôme d’État d’accompagnateur en moyenne montagne qui se passe à La Réunion. Néanmoins, cette formation s’avère tout aussi sérieuse. Les futurs stagiaires vont suivre un calendrier chargé au cours des quatre prochains mois, avec pas moins de 400 heures d’instruction pédagogique, dont la moitié sur le terrain, et un mois de stage en entreprise, par exemple dans un centre de loisirs, chez les Naturalistes ou le groupe d’études et de protection des oiseaux de Mayotte (Gepomay). Au programme : un apprentissage complet de la faune et de la flore, mais aussi de la biodiversité au sens large du terme, par exemple la végétation indigène, grâce aux données du Conservatoire botanique de Mascarin.

 

 

Un complément de revenu intéressant

« À l’issue de la formation, les accompagnateurs ne peuvent pas s’installer à leur compte, mais ils peuvent devenir bénévoles dans des associations, par exemple à Mayotte Rando », glisse David Vancauteren. « Il est compliqué de vivre de ce métier, mais ça peut apporter un complément de revenu intéressant. » Lui-même encadre chaque week-end des ascensions en direction du mont Bénara, le point culminant de Grande-Terre. 

Malheureusement, la structure a malheureusement du mal à se professionnaliser… Le Département ayant visiblement d’autres priorités en matière de tourisme ! Si l’étude pour la réhabilitation des sentiers de grande randonnée est déjà réalisée, la réalisation des aménagements reste entre les mains de la collectivité. « On n’a pas forcément besoin d’énormément de balisages pour encadrer un groupe, mais dans le cadre d’une sensibilisation des jeunes, bon nombre d’outils sont vétustes. » Un point non négligeable qui permettrait également de sensibiliser la population à la richesse terrestre du territoire.

 

 

Une diversité de paysages du nord au sud

Un constat amer pour celui qui a animé le site AROMaoré pendant deux ans, lui permettant ainsi de faire la promotion de la randonnée sur l’île aux parfums. « Mayotte offre une telle diversité de paysages du nord au sud », admet-il. « Il y a quelques spots bien connus, mais il en existe également beaucoup d’autres qui sont à découvrir. » Toutefois, l’insécurité peut naturellement rentrer en ligne de compte dans la tête des promeneurs, qui y réfléchissent bien souvent à deux fois avant de s’aventurer en pleine brousse. « Certaines personnes ont peur de rentrer dans les terres et de se perdre. »

Toujours est-il que David Vancauteren a des idées plein la tête pour partager sa passion de la randonnée. Son but ? « Étendre cette discipline sur les autres îles de l’archipel, à savoir Anjouan, Mohéli et la Grande Comore, qui présentent un très grand intérêt. » En effet, alors que Mayotte propose un relief collinaire, le voisinage s’avère plus montagneux. « D’où l’idée de faire le lien et de créer un circuit global. La seule difficulté dans ce projet réside dans les moyens de transport entre les îles. »

Le nouveau préfet Jean-François Colombet a pris ses fonctions

À l’occasion de la prise de fonction de Jean-François Colombet, préfet de Mayotte, délégué du gouvernement, ce lundi matin, une cérémonie officielle s’est tenue place de France à Dzaoudzi. L’occasion pour le successeur de Dominique Sorain de saluer les forces de l’ordre et les différents officiels. Au cours d’un discours improvisé, il a notamment rappelé ses missions : la sécurité publique et la lutte contre l’immigration clandestine.

 

JIOI 2019 : 8 médailles pour Mayotte à l’aube de la septième journée

Avant la septième journée des Jeux des îles de l’océan Indien ce mercredi, la délégation de Mayotte comptabilise huit médailles : sept en judo et une en athlétisme – au javelot féminin précisément. Les Mahorais espèrent toujours accrocher la cinquième place de ces Jeux devant les Maldives et les Comores, et battre le record de médailles établi en 2015 (13 médailles dont 2 en or).

Pour cela, Mayotte peut compter sur ses équipes de sports collectifs dont le football et le basket-ball, qui se sont qualifiés en ce début de semaine pour les demi-finales de leur compétition. Elle peut également compter sur les sports individuels comme le javelot, où Soultoini Ali et Zoubert Hadhurami sont très attendus, ce mercredi. Ou encore sur le tennis de table en individuel avec Kilomo Vita.

En attendant, la plus belle de toutes a été décrochée en judo par Rudolphe Méchin, ce mardi au dojo de Côte d’Or . Dans sa catégorie des plus de 100 kilos, le licencié du JC Chiconi Sada a battu son adversaire. A elle seule, la délégation de judo de Mayotte compte sept médailles (6 bronzes, 1 or). La dernière médaille de la délégation mahoraise est à mettre à l’actif de Tanzila Jean Jacques.

 

Qualification de l’équipe masculine de basket-ball pour les demi-finales, après sa victoire hier soir à Phoenix, face aux Mauriciens (72-56).

 

Tanzila Jean Jacques a apporté une huitième médaille pour la délégation de Mayotte : la première en argent.

 

Comme en 2015, Mayotte accède aux demi-finales des Jeux des îles de l’océan Indien : une nouvelle qui faisait suite à son succès lundi soir à Mayotte La 1ère. Les footballeurs mahorais affrontent les Mauriciens pour une place en finale.

 

Le volet jeunesse a su gagner sa place dans la compétition.

 

Pas de top 10 pour la sélection mahoraise de cyclisme, battu à l’épreuve du contre la montre

 

Rudolphe Méchin décroche la médaille d’or dans la catégorie des plus de 100 kilos : la première d’une très longue série.

 

Ça ne passe pas pour Mayotte : battu par Maurice puis les Seychelles. L’aventure s’achève en phase de poule pour les volleyeurs mahorais

 

Kilomo Vita est le leader de la délégation de tennis de table. Il croit en une chance de médaille dans l’épreuve en individuel.

 

Droit de retrait des salariés de BDM après le braquage d’un Douka

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Les salariés de Bourdon distribution Mayotte (BDM) ont décidé d’exercer leur droit de retrait. Mardi matin, ils ont manifesté sur le parking de Jumbo score de Majicavo Lamir pour alerter contre les violences dans les Doukas Be à la suite d’un vol à Bandrélé. Ils réclament un agent de sécurité par magasin.

« Il ne se passe pas un seul jour où nous ne connaissons pas des actes de violences« , résume Antoine Tava, délégué du personnel de Bourdon distribution Mayotte (BDM) et secrétaire du Comité d’entreprise au sein de BDM. Mardi matin, une soixantaine de salariés de BDM ont exercé leur droit de retrait en se réunissant sur le parking de Jumbo score de Majicavo Lamir pour manifester contre les violences dans et aux abords des épiceries du groupe. « Les autres employés sont devant leur magasin pour protester. Tous soutiennent le mouvement« , explique Antoine Tava. En effet, ces épiceries seraient la cible fréquente et depuis des années de vol avec violences physiques ou morales.

 Pour preuve, le vol à main armé d’un Douka Be samedi matin à Bandrélé. Le responsable de la boutique, présent lors de la manifestation ce mardi matin, est revenu sur les faits : « Je suis arrivé à mon magasin vers 6h50, j’ai ouvert la porte puis j’ai refermé derrière moi. Ensuite, j’ai désactivé l’alarme, allumé les lumières et fais ma ronde comme tous les matins« . Le responsable se rend alors dans son bureau. « J’ai senti une odeur de cigarette fumée et je me suis dis qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas. C’est à ce moment-là que j’ai vu un gros trou dans le mur entre les toilettes et le bureau« . Il entend alors du bruit et retourne vers la porte d’entrée et tombe nez à nez avec le voleur, armé d’un pistolet d’alarme. « Il m’a dit de m’asseoir en braquant son pistolet vers moi. Il voulait s’enfuir mais n’arrivait pas à ouvrir la porte avec toutes ces clés. Il est alors revenu vers moi, m’a demandé d’ouvrir et est parti en m’enfermant à l’intérieur« .

 Un agent de sécurité par magasin

Selon le responsable, il aurait vidé tous les coffres contenant les recettes des trois derniers jours et les rouleaux de monnaie. Les pertes s’élèveraient à une somme comprise entre 24.000 et 24.500 euros. « Il était forcément bien renseigné puisqu’il a su où se trouvaient les clés alors qu’elles étaient cachées. Il a arraché les caméras du bureau ainsi que le disque dur enregistrant les vidéosurveillances« .

Un épisode traumatisant pour le responsable et « qui est la goutte d’eau qui fait déborder le vase » selon les salariés présents sur le parking. Depuis quelques mois, le personnel de ces enseignes connaîtrait des actes de violences de plus en plus graves. Des sujets qui sont évoqués régulièrement avec le délégué du personnel lors des réunions avec la direction. « La direction ne veut pas renforcer la sécurité de ces magasins par souci d’économie. Aujourd’hui, nous connaissons la politique des économies, c’est au péril des vies des salariés« , assure le délégué. Et d’ajouter que « nous voulons un agent de sécurité pour chacun des 33 magasins installés sur l’île, de l’ouverture à la fermeture. »

 Une stratégie qui connaît ses limites

 Même si certains magasins bénéficient de la surveillance d’un agent de sécurité, ceux-ci  ne sont pas présents du matin au soir. « Souvent, ils [les agents de sécurité, ndlr] sont présents de 16h à la fermeture. D’autres magasins en sont totalement dépourvus« . Si cette présence peut dissuader certains voleurs, elle ne permet pas d’endiguer tous les actes de vol et d’agression. « Ce n’est pas aux salariés d’être exposés à des faits aussi graves« .

D’autant plus que d’autres enseignes telles que Sodifram bénéficient d’au minimum trois agents de sécurité par magasin, font valoir les salariés. « Nous savons pertinemment que de mettre des agents de sécurité ne va pas forcément stopper le nombre de vols mais cela va dissuader davantage et de manière conséquente« .

 Pourtant, il y a quelques années, une stratégie de la direction avait été mise en place pour employer du personnel originaire du village dans lequel se trouvait le magasin afin d’apaiser les violences. Une stratégie qui, aujourd’hui, semble trouver ses limites, selon certains employés. « À Tsararano, par exemple, le responsable du Douka Be se fait menacer par des gamins : « on connaît ta famille, on connaît ta femme, on connaît tes enfants ». Une situation qui va beaucoup trop loin !« . Un travail pourrait également être réalisé par la police ou la gendarmerie, selon les manifestants. « Mais c’est tout d’abord à notre direction de nous montrer l’importance de la sécurité« , affirme une gérante de Douka Be dans le Nord.

Depuis quelques semaines, des négociations annuelles obligatoires (NAO) – imposées par le Code du travail (art. L2242-8) – ont lieu au sein du groupe. Une troisième réunion devrait se tenir vendredi prochain, le 5 juillet. « Au regard des avancées des négociations, le personnel se garde le droit de publier un préavis de grève à l’issue de cette réunion« , confirme le délégué CFDT Antoine Tava.

 

 

 

 

Retour en images sur la course de pneus

 

Comme sur des roulettes. La 36ème édition de la course de pneus s’est déroulée dans des conditions idéales, samedi, à Mamoudzou. Les 910 participants ont bénéficié d’une organisation quasi-parfaite tout au long des 1.800 mètres du parcours qui menait de la MJC de M’tsapéré à l’ancienne place du marché.

La belle histoire de la journée, c’est celle de la jeune Hounaida Mahamoud (photo), élève au collège Zéna M’déré de Pamandzi, qui a remporté haut la main la course des filles, comme l’an dernier. Tout sauf une surprise pour l’intéressée, qui « adore courir » et confie s’être « entraînée tous les jours pour la course« .  Elle a aussi suscité la très grande fierté de sa mère Echadi qui l’attendait sur la ligne d’arrivée : « Quand j’ai vu qu’elle était première, j’ai eu le cœur qui battait très fort ! », raconte celle-ci.   

Une convention pour développer et harmoniser l’action sociale communale

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L’Union départementale des centres communaux d’action sociale (UDCCAS) a signé, vendredi 28 juin, un partenariat financier avec la DJSCS de Mayotte. Avec un objectif : permettre la mise en cohérence des politiques d’actions sociales communales.

 

« Les centres communaux d’action sociale sont primordiaux pour assurer le premier relais de la politique sociale« , déclare le directeur de la Direction de la Jeunesse, des Sports et de la Cohésion Sociale (DJSCS), Patrick Bonfils, en amont de la signature de la convention qui lie désormais sa structure à l’UDCCAS, présidée par Anchya Bamana, également présente ce vendredi. Des centres communaux « qu’il faut mettre en musique« , estime la maire de Sada. L’union qu’elle préside affiche ainsi cet objectif : mettre en réseau les seize centres d’action sociale de l’île, assurer la cohérence de leurs interventions, les accompagner dans celles-ci et évaluer leurs impacts. Surtout, du point de vue de l’État et de sa direction dédiée qu’est la DJSCS, cette union doit servir de passerelle entre ses politiques sociales et leurs mises en œuvre, au plus près de la population.

Voilà pour les objectifs, mais pour les mettre en œuvre, il faut des financements. Et c’est tout l’objet de la convention signée ce jour. Avec la subvention de 60.000 euros accordée par la DJSCS, l’Union départementale des centres communaux d’action sociale va pouvoir recruter un chargé de développement et chercher des locaux pour installer ses services. Si la démarche de recrutement n’est pas encore enclenchée, l’UDCCAS devrait s’installer prochainement aux côtés des bureaux du Groupement d’intérêt public (GIP) Politique de la Ville, situés à Dembéni.

Partenaires un jour, partenaires toujours. « Nous avons besoin de cet outil – l’UDCCAS – donc le partenariat a vocation à durer, on ne peut mettre en œuvre de politique sociale sans l’échelon local et nous avons besoin de CCAS bien armés pour la déployer auprès de la population« , considère ainsi Patrick Bonfils. Anchya Bamana, abondant dans le sens de son partenaire, a toutefois tenu à assurer de l’indépendance des centres communaux. Si certains mettent l’accent sur l’aide aux personnes âgées, d’autres se soucient de l’accès au droit des riverains par exemple.  Toujours est-il que pour être indépendants, les centres communaux doivent d’abord se structurer, puis apprendre les uns des autres. D’où le rôle de l’union « pour donner cette impulsion commune« , comme le fait valoir sa présidente.

Car sur le volet social, bien qu’en grand besoin, le 101ème département reste sous doté. Au niveau du conseil départemental, par exemple, « moins de la moitié du budget est dédié à l’action sociale à Mayotte quand plus des trois quarts sont mobilisés sur ce plan dans les départements de métropole« , rappelle Patrick Bonfils. « On sent qu’il y a d’énormes difficultés et que la route est longue pour mettre ce territoire à niveau  mais tous les voyants sont au vert et maintenant il faut démarrer le moteur« , ajoute le directeur de la DJSCS.  

Défilé de mode sur le front de mer

Dans le cadre de la foire artisanale régionale qui a connu un vif succès, la CMA de Mayotte organisait pour la 3ème édition un défilé de mode vendredi soir sur le front de mer de Mamoudzou.

Plusieurs couturiers de Mayotte et sa région ont présenté leurs créations au cours de défilés entrecoupés de morceaux de musique proposés par le groupe Patrick & Co.

Présentée par Denise Harouna, la cérémonie a permis de découvrir des créations traditionnelles mahoraises de boubous du créateur installé à Poroani, très demandé en cette période de mariages ou de bien belles robes valorisant des tissus locaux ou malgaches (photo) utilisant notamment de la soie. Une belle soirée alors que se prépare l’ouverture de l’École régionale de la mode et du design à Mayotte…

Détournement de 56.000 euros : Faouzia Kordjee reconnaît les faits

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Placée en garde à vue mardi pour avoir détourné 56.000 euros lorsqu’elle présidait l’association Les Doigts d’Or, Faouzia Kordjee a reconnu l’intégralité des faits, se justifiant par un « certain laxisme », a-t-on appris de source policière.

 

La célèbre femme leader et présidente de l’Acfav Faouzia Kordjee (orthographié Cordji selon son état civil) est actuellement inquiétée par la justice pour abus de confiance, recel d’abus de confiance et travail dissimulé, selon nos informations. Les faits se sont déroulés entre juillet 2013 et août 2017 alors qu’elle était présidente de l’association d’artisanat Les doigts d’or, dont les activités ont cessé depuis pour raisons économiques.

Le montant total de ce détournement a été estimé dans un premier temps à 56.000 euros. Le bénéficiaire de ces malversations est un membre de sa famille qu’elle a embauché pour un travail de « coaching » en le rémunérant via les fonds de l’association mais sans contrat de travail, nous a appris une source proche du dossier. Cette même source indique le fisc ne conserve aucune trace de cette collaboration rémunérée. Faouzia Cordji a donc été placée en garde à vue pour des faits de « travail dissimulé par dissimulation de salaire et dissimulation d’activité« .

Une enquête a été ouverte après que le secrétaire général de l’association Les Doigts d’or a porté plainte pour travail dissimulé mais les investigations menées ont fait ressortir d’autres infractions commises par l’ancienne candidate malheureuse aux dernières sénatoriales. En effet, c’est en entendant les salariés de la structure, en tant que témoins, que les enquêteurs se sont également penchés sur l’enveloppe de 14.000 euros d’indemnisation qui aurait été promise aux employés n’ayant pas touché leur salaire pendant dix longs mois avant la fermeture de cette association de promotion de l’artisanat mahorais.

Lors de sa garde à vue, Faouzia Cordji a reconnu l’ensemble des faits qui lui sont reprochés, invoquant un certain laxisme pour justifier ses agissements.

Mahopolitains : Ce qu’ils pensent de leur île

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Si l’immigration est souvent mise en avant dans la diminution de la part des Mahorais dans la population de l’île, un autre phénomène joue un rôle majeur dans le processus : le départ des Mahorais de leur île de naissance. Pour des raisons de formations et d’emplois, parfois partis tout jeune avec leurs parents, certains choisissent de ne pas revenir, d’autres si. En cause : l’attractivité du territoire. Témoignages.

« Personne ne semble en parler, [mais se pose la question] de la fixation ou du retour des Mahorais partis de chez eux. Le solde migratoire est négatif (…). C’est quand même une tragédie » : dans notre numéro 878 de mars dernier, le sénateur Thani Mohamed Soilihi soulignait la problématique des départs de la jeune génération de Mahorais vers d’autres territoires, la métropole et La Réunion en tête de liste. Un constat confirmé par l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee). Dans son analyse parue en février 2019 et basée sur le recensement de la population réalisé à Mayotte du 5 septembre au 2 octobre 2017 et intitulé À Mayotte, près d’un habitant sur deux est de nationalité étrangère, l’organisme note : « Le solde migratoire des natifs de Mayotte est très déficitaire et ce déficit s’est accru (-25 900 personnes entre 2012 et 2017, contre -14 900 entre 2007 et 2012). En effet, de nombreux jeunes de 15 à 24 ans quittent le territoire pour poursuivre des études ou chercher du travail en métropole. »

Ce constat – « pour poursuivre des études ou chercher du travail en métropole » – est également confirmé par Céline Leroux, docteure en sciences de l’éducation et auteure d’une étude sur le sujet : La mobilité des jeunes Mahorais en métropole : l’action des missions locales, parue en 2017. Elle y explique : « Dans le cas de Mayotte, la mobilité des jeunes est (…) fortement corrélée à l’emploi, problématique à laquelle doivent faire face les professionnels de jeunesse sans pour autant disposer des mêmes moyens qu’en métropole. »

Un manque de moyens dans la mise en place de politiques publiques destinées à fixer nos jeunes sur le territoire qui n’est par ailleurs pas nouveau. Ainsi, la chercheuse cite dans son étude un ancien coordinateur emploi et formation du Conseil général, auditionné en 2014 et qui estimait « qu’à Mayotte, chaque année, peuvent être créés entre 500 et 1 500 nouveaux emplois alors que le nombre de jeunes sortant du système scolaire et arrivant sur le marché du travail serait de l’ordre de 4 000. Il [soulignait] la nécessité d’ouvrir Mayotte vers l’extérieur et de faciliter la mobilité des jeunes Mahorais. » Un manque de perspectives, donc, qui encourage au départ, et qui, par la suite peut rendre délicat le retour de ces jeunes sur qui Mayotte compte pour son développement. Mises en avant : une attractivité trop faible, notamment en termes d’emplois et de loisirs quotidiens, mais aussi un doute sur la volonté politique locale ou étatique à développer le territoire.

 

Roubouanti Madi – 23 ans – BTS commerce international

« Tant que les élus et les entreprises ne laisseront pas leur chance aux jeunes diplômés, rien n’avancera. »

Un parcours

Ça fait déjà 14 ans que je vis en métropole avec ma mère. Elle a fait le choix de quitter Mayotte pour fuir la précarité éducative sur l’île, et donc pour nous offrir à mes sœurs et à moi de meilleures conditions de vie, et de meilleures conditions d’études. Depuis, je rentre quand même régulièrement à Mayotte pour voir ma famille. L’île me permet de me ressourcer et de me détendre du stress et de la pollution qu’il peut y avoir en métropole. Mayotte est synonyme de joie de vivre, de plages, de barbecues et bien plus encore !

Un regard sur l’île

La dernière fois que je suis venue à Mayotte, c’était en 2008. Comparé à la situation actuelle, il n’y avait pas encore cette violence : on pouvait dormir les fenêtres ouvertes et rencontrer plusieurs jeunes mahorais dans les villages, etc. Les mariages étaient autre chose et les gens étaient plus solidaires. Au départ, je me suis dit que j’allais rester de façon définitive, car j’avais besoin de retrouver les miens, mais plus les mois passaient moins j’avais le sentiment d’avoir ma place. Il faut dire que quand tu ne bois pas ou que tu ne fais pas la prière, tu t’ennuies vite à Mayotte. Les semaines se suivaient et se ressemblaient. Les voulés, les sorties à la plage le week-end, aller à la campagne, etc. : c’est bien un moment, mais on s’en lasse forcément. J’ai connu autre chose que la vie mahoraise et bien évidemment je suis arrivée à un stade où je voulais repartir. À Mayotte, où que tu ailles, tu retrouves les mêmes têtes, les mêmes délires. Et puis, Mayotte ne semble pas évoluer. J’ai l’impression que derrière tout ça, il y a une volonté politique de ne pas faire de Mayotte un département à part entière. À Mayotte, tout est en retard comparé aux autres départements d’outre-mer. La violence est devenue le quotidien des Mahorais. L’immigration clandestine n’a jamais été aussi forte également. Oui, il faut parler de cette immigration qui sature écoles, hôpitaux, et tous les services publics confondus. Les Mahorais sont obligés d’aller se soigner à l’extérieur. Le niveau d’études est catastrophique, et pendant ce temps, nos élus se font la guerre pour être le roi du pétrole. Eh oui, il n’y en a pas un pour rattraper l’autre : le bien-être général n’est pas encore à l’ordre du jour dans leur agenda. Tant que l’on ne cessera pas le principe du « vote pour moi, je te donnerai un poste de directeur même si tu n’en as pas les compétences », l’île n’avancera pas. Tant que les élus et les entreprises ne laisseront pas leur chance aux jeunes diplômés, rien n’avancera. Tant que chacun ne fera pas convenablement le travail pour lequel il est payé, rien n’avancera. Tant que nous ne retrouverons pas la solidarité mahoraise, idem. Nous devons aussi arrêter de copier tout ce qui se fait ailleurs et essayer plutôt de valoriser notre culture et nos traditions. Mayotte reste malgré tout une belle île qui ne demande qu’aux Mahorais de s’occuper d’elle. C’est notre maman à tous.

Un retour, un jour ?

Je ne suis pas encore prête à revenir habiter à Mayotte. J’ai d’autres projets : voyager à travers le monde, découvrir autre chose que ce que j’ai l’habitude de voir et vivre dans un autre pays. Alors, qu’est-ce qui me pousserait à rentrer ? Après plus d’une décennie loin de ma famille, je me rends compte que j’ai raté plusieurs évènements importants ou graves. J’ai raté les mariages de mes frères, cousins et cousines, amis intimes, etc. Je n’ai pu dire « au revoir » à aucun de mes grands-parents décédés suite à de longues maladies. Aujourd’hui, cela me fait réfléchir et me rend triste. Lorsque tu es ici, tu perds la notion du temps. Tu penses que les personnes que tu as laissées vont t’attendre ou ne vont pas vieillir. Retrouver ma famille et avoir un bon travail où je pourrais subvenir aux besoins des miens pourraient être une bonne raison de rentrer. Car oui, il faut avoir un bon travail pour ne pas être tenté de repartir. Je suis consciente que ça ne va pas être facile et que je devrais faire un travail sur moi-même, mais aujourd’hui, j’ai la maturité nécessaire pour surmonter les obstacles. Certains ont réussi à déposer leurs valises de façon définitive, alors pourquoi pas moi ?

 

Faiza Laou Madi – 22 ans – licence biologie

« C’est à nous de proposer des innovations »

Un parcours

J’ai été en métropole pendant quatre ans pour poursuivre mes études. Au départ, je n’étais revenue de métropole que pour les vacances et je n’avais jamais songé rentrer maintenant à Mayotte, et surtout pas définitivement. Mais finalement j’ai fait le choix de rester. J’ai eu besoin de rester, de reprendre ma vie en main ici et de repartir sur de bonnes bases tout en reprenant mes études sur le territoire.

Un regard sur l’île

À mon retour ici, je n’ai pas vraiment remarqué de changement au niveau des infrastructures. Ce n’est pas comme certains le voudraient, mais en termes de développement, je pense qu’on évolue à notre rythme. D’ailleurs je trouve ça dommage, que beaucoup de jeunes qui partent étudier en métropole à la fin de leurs études ne rentrent pas à Mayotte pour aider notre île à évoluer. Il n’y a certes pas tant d’emplois dans les secteurs qu’on recherche, mais on peut tirer profit de chaque expérience et pourquoi ne pas créer sa propre entreprise ensuite ? Le but est de faire avancer l’économie locale et c’est à nous les jeunes de proposer des innovations qui permettraient de faire avancer les choses à Mayotte !

 

Arsène Ali – 22 ans – BTS économie et social

« Dans 10 ans, je reviendrai peut-être »

Un parcours

J’ai vécu la grande majorité de mon enfance à Bordeaux. Huit ans après, je suis rentré à Mayotte avec mes parents jusqu’à l’obtention de mon baccalauréat. Puis, j’ai dû quitter le foyer familial pour poursuivre mes études en métropole. Je n’avais qu’une hâte : quitter Mayotte et retourner dans la ville où j’avais grandi.

Un regard sur l’île

Aujourd’hui, je trouve qu’à Mayotte il n’y a pas assez d’activités, il n’y a pas grand-chose à faire, pas comme en métropole. Pour moi, Mayotte est une île sur laquelle je viendrai pour passer des vacances, mais pas pour y vivre. Les week-ends riment avec plages, fêtes, sorties bateaux ou randonnées. Je pense que Mayotte n’évolue pas parce que les gens qui travaillent au Conseil départemental ne pensent qu’à remplir leurs poches. Ils ne pensent pas à améliorer l’île, ils ne pensent pas à construire les infrastructures nécessaires pour elle. En plus, ils ne font pas grand-chose pour remédier aux problèmes de l’immigration clandestine. Les violences augmentent d’année en année. Vivre à Mayotte n’est plus comme avant : on vit constamment avec la peur, la crainte d’être agressé dans la rue et même dans sa propre maison. Mayotte présente vraiment un retard que ce soit au niveau des infrastructures, des mentalités, mais aussi au niveau de la vie qui est très chère.

Un retour, un jour ?

Peut-être que dans 10 ans je reviendrai à Mayotte. Une fois que je serai stable avec une situation et un travail.

Le flash infos du jour

Flash infos Mayotte du Jeudi 15 mai 2025
Jeudi 15 mai 2025

Mayotte Hebdo de la semaine

Mayotte Hebdo n°1116

Le journal des jeunes