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Le combat d’Anli Maba Dali contre le groupe BDM : « Je suis perturbé par ce qu’ils m’ont fait »

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Anli Maba Dali, employé du groupe Bourbon distribution Mayotte, arrive à un point de non retour. Il accuse l’entreprise de l’avoir muté alors qu’il était en arrêt maladie. L’ancien manager du magasin Score de Petite-Terre a porté l’affaire devant la justice, estimant être victime d’abus de pouvoir. Il nous livre sa version de l’histoire.

Flash Infos : Pour quelles raisons avez-vous porté plainte contre BDM ?

Anli Maba Dali : Je suis manager de département à Score Petite-Terre. Le 27 janvier 2021, j’ai envoyé un e-mail à mes supérieurs de BDM parce que je ne partageais pas les mêmes stratégies commerciales et de développement de l’entreprise que le nouveau directeur de Score Petite-Terre. J’ai donc suggéré de me changer de magasin. Puis le 28 janvier, le lendemain, je suis tombé malade à cause de douleurs à la hanche…
Le directeur commercial de BDM m’a contacté dès le 29 janvier dans le but de me rencontrer. Je lui ai expliqué que je ne pouvais pas me déplacer parce que j’étais en arrêt maladie et j’ai raccroché le téléphone. Il m’a rappelé pour me dire que c’était important et qu’il avait besoin de me voir le jour même au siège. J’y suis donc allé en ayant la peur au ventre ! À ce rendez-vous, il y avait le directeur général de BDM et le directeur commercial. Au cours des échanges, ils m’ont sorti les documents de mutation de magasin dans lesquels ils me notifiaient de rejoindre le Douka Bé de Koungou. Sur le coup, j’ai signé l’avenant.

FI : Pourquoi avez-vous signé l’avenant alors que vous saviez que vous étiez en arrêt maladie et que vous ne vouliez pas aller à Koungou ?

A. M. D. : J’ai signé l’avenant sans m’en rendre compte… J’avais pris des médicaments, j’étais fragile… Ma santé n’était pas bonne ! Je n’étais même pas capable d’analyser et de comprendre cette affectation, encore moins de négocier. C’est seulement quelques jours plus tard, le 2 février, que je me suis rendu compte de ce qu’il s’était passé. Je suis allé voir l’inspecteur du travail et les délégués syndicaux qui m’ont dit que ce qu’avait fait BDM n’était pas normal.
Le 3 février, j’ai écrit à la direction pour réclamer l’annulation de l’avenant. Mon avocat a également fait la même chose, mais elle a refusé. Mes supérieurs prétendent que même si je suis en arrêt maladie, ils peuvent me faire parapher un avenant d’affectation de magasin. J’ai donc porté plainte pour exiger son annulation, avant de demander un référé il y a un mois.

FI : Votre procès contre le groupe BDM a eu lieu ce lundi 20 septembre, qu’en est-il ressorti ?

A. M. D. : Chaque parti a exposé les faits devant les juges, mon avocat a insisté sur le fait que lorsqu’il y a un arrêt maladie, il n’y a pas d’affectation valable. La délibération est prévue pour le 4 octobre. En attendant la décision du tribunal, je n’irai pas au travail à Koungou. Je vais certes perdre de l’argent, mais je n’irai pas ! J’aimerais que le tribunal annule cet avenant car le jour où je l’ai signé, je n’ai pas pu négocier à cause de mon état de santé. J’étais tétanisé… Je tremblais. Je ne pensais qu’à Bao (ancien employé du groupe BDM qui s’est suicidé) en voyant le directeur général en face de moi. Je n’étais plus moi-même.

FI : Désormais, qu’attendez-vous de votre employeur ?

A. M. D. : Tout ce que je veux, c’est reprendre mon travail. Je ne suis plus en arrêt maladie alors maintenant ils doivent me proposer un nouvel avenant dans les règles en respectant les lois. Je serai en mesure de prendre la décision en connaissance de cause. Les directeurs peuvent m’affecter dans un magasin plus proche de mon domicile, mais en respectant les lois. Depuis le 17 septembre, la date de fin de mon arrêt maladie, je ne suis pas payé. Et si je ne vais pas au travail, ils risquent de me licencier pour abandon de poste. Nous devons trouver une solution, car je refuse d’aller à Koungou.

FI : Dans quel état d’esprit êtes-vous aujourd’hui ?

A. M. D. : Je réfléchis à porter plainte pour harcèlement. Depuis cette histoire, je ne suis pas bien psychologiquement. Je prends des médicaments. L’hôpital de Pamandzi m’a prescrit des séances chez le psy. Je suis perturbé par ce qu’ils m’ont fait. J’estime que la mesure de mutation à Koungou est abusive. La direction de BDM veut me sanctionner parce que je fais partie des managers qui tiennent tête.

La direction de BDM se mure dans le silence

La rédaction a proposé à la direction du groupe BDM de lui livrer sa version des faits, mais le directeur général, Marc Berlioz, n’a pas souhaité réagir. « Je lui laisse la responsabilité de ses dires, je n’ai pas de commentaire à faire », a-t-il simplement déclaré.

Deux plongeuses autonomes portées disparues pendant plus de quatre heures à Mayotte

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Dimanche dernier, deux plongeuses autonomes ont disparue des radars pendant plus de quatre heures à la suite d’une plongée en bouteille au niveau de la Passe bateau au sud de Mayotte. Elles ont finalement été récupérées saines et sauves par le navire des sauveteurs en mer.

8h. L’heure de rendez-vous des plongeurs. Tout le monde s’équipe dans la bonne humeur. Malgré un soleil aux abonnés absents, les sportifs saisissent leurs blocs et leurs détendeurs avant de se diriger vers le bateau. Au programme de ce dimanche 19 septembre : plongée dérivante dans la Passe bateau située au sud de l’île. “Dans une plongée dérivante, on se laisse porter par le courant. Il faut bien rester prêt de la paroie lorsqu’on sera immergés pour ne pas se faire emporter« , explique l’un des moniteurs à la dizaine d’élèves du jour. Consignes de sécurité ? Check ! Vérification du matériel ? Check ! Le bateau peut enfin prendre la mer, direction le spot de plongée.

9h15. Palmes aux pieds, masque sur le nez et détendeur en bouche, les 11 plongeurs s’immergent tour à tour, répartis en palanquée de quatre à deux personnes. Si le vent souffle et le courant se réveille quelque peu, le spectacle qui s’offre à eux est grandiose ! Paroi abrupt, coraux multicolores, poissons scintillants… L’eau cristalline du lagon offre aux plongeurs une parfaite visibilité. Après près de 45 minutes d’immersion, les « hommes-grenouilles » remontent calmement à bord. Sauf que deux personnes parties en autonomie manquent à l’appel. Immergés il y a plus de 50 minutes, tous se questionnent quant au lieu où elles se trouvent. “Elles sont parties en même temps que nous, elles auraient dû remonter”, lance l’un des amateurs. Sur l’embarcation, tous cherchent du regard les parachutes de sécurité, habituellement déployés dès lors que les plongeurs reviennent à la surface. Dans le bleu profond de la Passe bateau, pas une once de rouge à l’horizon. L’inquiétude grandit parmi les membres d’équipage. Sont-elles sorties ? Le courant les a-t-il fait dériver ? Ont-elles eu un problème technique ? Où sont-elles ? Autant de questions jusqu’alors sans réponses.

10h15. Toujours pas de plongeuses à l’horizon. Le responsable de plongée se saisit de la radio et lance un appel au centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage (CROSS) Sud océan Indien, qui déclenche à 11h09 une intervention de la société nationale de sauvetage en mer de Mayotte. Commencent alors de longues heures de recherche ! L’hélicoptère Écho Delta et l’intercepteur Kondzo de la gendarmerie ainsi que le SNS Tamani quadrillent la zone dès 11h55 dans l’espoir de retrouver les disparues. À 13h30, l’équipage du bateau de plongée qui n’a pas cessé de ratisser le périmètre sud du lagon décide de rentrer au club afin de récupérer des renforts.

14h. Alors que les plongeurs touchent terre, ils apprennent que leurs camarades ont été retrouvées à 13h20 par les sauveteurs en mer, qui les ont prises en charge et réhydratées. Un soulagement pour tous et une bonne frayeur pour les deux plongeuses autonomes qui auront passé plus de quatre heures dans l’eau. Une situation qui reste exceptionnelle, mais qui rappelle les risques de la plongée en bouteille. Une discipline à ne pas prendre à la légère.

Après la suspension du plan de transports interurbains à Mayotte, les chauffeurs de taxi lèvent le pied

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Ce lundi 20 septembre, l’intersyndicale des taxis de Mayotte a été reçue au conseil départemental par le 3ème vice-président en charge de l’administration générale et des transports, Ali Omar. L’occasion pour les deux parties de discuter du marché de transports interurbains de Mayotte qui fait tant jaser chez les chauffeurs professionnels et de poser les bases de séquences de travail dans le but de trouver une issue favorable.

Faut-il forcément manifester à Mayotte pour être entendus ? Il semblerait que cette hypothèse soit vraie. “Nous ne manifestons pas pour casser, mais pour construire ensemble”, s’agace Denis Schoumacher, le directeur de Taxi Vanille 976, las de devoir toujours descendre dans la rue pour être pris en considération. “Notre objectif n’est pas de bloquer pour bloquer. Nous sommes des entrepreneurs qui veulent être écoutés.

Alors que l’intersyndicale des taxis de Mayotte avait annoncé en fin de semaine dernière la tenue d’une opération escargot ce lundi matin, Younoussa Hamada, le président de la fédération professionnelle des artisans taxis, Ahamadi Said, le président de l’union des taxis, ainsi que Abalkini Chanfi, le correspondant l’intersyndicale des taxis, ont finalement été invités à participer à une réunion au sein du conseil départemental pour mettre à plat leurs différentes revendications. “Ali Omar dit comprendre que les artisans se sont toujours battus pour la filière taxi à Mayotte, que ce sont eux qui exercent la mission de transport public sur l’île. Il sera donc naturel de les intégrer dans le plan de transport interurbain du Département”, confie Abalkini Chanfi. Car c’est bien là le nerf de la guerre : ce fameux marché lancé en juillet par la collectivité et estimé à 100 millions d’euros, qui met les chauffeurs professionnels dans une fâcheuse posture.

Un avenir pas encore tout à fait éclairci

Si la date de clôture prévue au départ pour le projet de transport périurbain était ce lundi 20 septembre, le 3ème vice-président se serait engagé à le suspendre. “Lors de notre réunion, Ali Omar a évoqué sa volonté d’organiser des sessions de travail avec l’intersyndicale pour intégrer les taxis dans le plan transport. En revanche, nous ne savons pas encore ce que cela va concerner. Des lignes dédiées ? Des lignes pour les véhicules neuf places ? Un conventionnement des taxis ? Un évolution statutaire vers le droit commun ? Tout cela reste à discuter”, s’interroge encore Abalkini Chanfi, pas encore totalement convaincu à 100%.

Autre desiderata évoqué : le renouvellement et la revalorisation de la subvention pluriannuelle accordée sur trois ans, de 2019 à 2021. En effet, un budget de six millions d’euros avait été attribué à la modernisation de la filière taxi à Mayotte. Soit environ 10.000 euros par artisan. Sauf que l’enveloppe financière n’a pu être que très peu utilisée par les taximen, qui doivent constituer des dossiers conséquents et entreprendre des démarches chronophages afin de pouvoir en bénéficier… Une requête visiblement entendue puisque Soihirat El Hadad et Ali Omar ont promis un nouveau coup de pouce de la part du conseil départemental. Face aux signaux positifs envoyés, les organisations syndicales ont décidé de suspendre leur manifestation dans l’attente du lancement des premières séquences de travail, annoncées d’ici un mois. Gare aux promesses non tenues !

En plus de son plan propreté, Mamoudzou s’attaque à son trafic routier

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Ce vendredi 17 septembre, le maire de Mamoudzou, Ambdilwahedou Soumaïla, a présenté son plan propreté 2020-2030 et signé un arrêté de voirie pour expérimenter une nouvelle réglementation du trafic routier. Deux annonces simultanées qui ont un objectif commun : devenir un modèle de la « ville propre » pour l’ensemble du territoire.

Pointe Mahabou. 9h. Le lieu choisi s’avère tout sauf anodin. Un écrin de nature, emblématique de l’environnement à protéger. « L’espace où nous nous trouvons est propre, la nature est préservée, l’air que nous respirons n’est pas pollué », introduit Ambdilwahedou Soumaïla, le maire de Mamoudzou. Tout l’opposé de ce que la ville chef-lieu dégage en temps normal : une capitale économique engorgée et une insalubrité chronique.

Alors pour inverser cette tendance invivable pour toute une frange de la population, la municipalité propose l’application pure et simple d’un plan propreté pour la période 2020-2030 autour de cinq objectifs majeurs : améliorer l’efficience du service propreté urbaine ; sensibiliser les citoyens et les rendre acteurs de la propreté ; aménager la commune pour faciliter la collecte des déchets ; mettre en place des actions pour maintenir la propreté ; réduire la production des déchets. Une mission herculéenne sur le papier !

Le service de nettoiement à pied d’œuvre

Dans la pratique, la municipalité compte bien mettre les petits plats dans les grands, en investissant plus d’1.2 million d’euros au cours des dix prochaines années et en augmentant en moyenne son budget annuel de fonctionnement de 500.000 euros. Principal engagement et non des moindres avec l’acquisition pour le service de nettoiement de matériels mécaniques dernier cri, tels qu’une balayeuse dès 2022 (mais où a bien pu passer celle utilisée en amont de la venue d’Emmanuel Macron en octobre 2019 ?!), de plusieurs camions plateaux pour évacuer les déchets rassemblés en sacs et les gros objets encombrants ou encore de quatre aspirateurs. Le tout dans le but d’améliorer le rendement des agents en place. Un effectif amené à être renforcé par l’embauche de sept nouveaux personnels.

Sauf que l’efficience d’un tel plan repose sur sa gouvernance. D’où la mise en place d’un comité de pilotage et de suivi – comprenant les services de la commune et ceux de la Cadema, la direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Deal), l’agence régional de santé (ARS), le rectorat et le conseil départemental – auquel seront naturellement associés les citoyens, les associations environnementales et les opérateurs économiques. « Nous sommes tous des producteurs de déchets, toutefois, il nous incombe d’adopter les comportements responsables et indispensables pour lutter contre l’insalubrité », prévient Ambdilwahedou Soumaïla. « Nous devons participer, à notre modeste niveau, à cet enjeu écologique. »

Sauver des vies et des emplois

Autres mesures phares, qui ne concernent pas pour le moment les deux roues : la suspension de déplacement sur l’ensemble du réseau routier de la commune aux véhicules de particuliers âgés de plus de 15 ans à compter du 1er octobre ainsi que l’expérimentation à partir de la même date d’une circulation alternée deux jours par semaine jusqu’au 31 décembre – interdiction de rouler de 4h à 20h pour les automobilistes non-résidents de Mamoudzou ayant une plaque d’immatriculation paire les lundis et impaire les mardis. « Bon nombre des accidents surviennent à cause de la fatigue », abonde le maire.

En plus d’une volonté environnementale, « les chiffres en termes de particules fines dépassent les seuils moyens exigés ». Cette initiative s’inscrit par ailleurs dans un intérêt économique. « Les entreprises souffrent des embouteillages (pas moins de 61.365 voitures entrent et sortent quotidiennement) et certaines sont même obligées de mettre la clé sous la porte ! Notre démarche consiste à sauver des emploi. En tant que responsable de ce territoire, je dois entendre ce discours », martèle le premier magistrat, conscient de l’accueil reçu en demi-teinte par les principaux concernés.

Signé ce vendredi, cet arrêté a également pour but d’éveiller les consciences. « Les travaux du projet Caribus vont commencer d’ici la fin 2021 et vont engendrer des bouchons pour les quatre ou cinq prochaines années », alerte Ambdilwahedou Soumaïla. S’il est encore trop tôt pour savoir si cette expérimentation sera prolongée à son terme – « nous ferons le bilan sur la situation de la route en temps et en heure » -, elle doit inviter les habitants à privilégier le covoiturage ou les transports collectifs. « Nous avons demandé aux chauffeurs de taxi de s’organiser et de mettre en place un numéro de permanence. » Impopulaire ou non à la suite de cette décision, le maire de Mamoudzou n’en a cure : « Le mal est très profond, il faut agir pour améliorer notre cadre de vie ! » Point à la ligne.

Dans les yeux des jeunes mahorais avec “Nouveau regard sur ma ville 2021”

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Vendredi dernier avait lieu le vernissage de l’exposition photographique “Nouveau regard sur ma ville 2021”. Un projet mis en place par la communauté d’agglomération de Dembéni-Mamoudzou (Cadema). Durant les mois de juillet et août dernier, ces ateliers avaient permis à 88 adolescents de découvrir ou redécouvrir les sites remarquables de la ville chef-lieu à travers des balades patrimoniales et artistiques.

Vous pensez connaître Mayotte ? Et si on vous la présentait comme vous ne l’avez jamais vue ? Voilà l’ambition de l’exposition photographique intitulée “Un nouveau regard sur ma ville 2021”, portée par la communauté d’agglomération de Dembéni-Mamoudzou. Un beau projet qui fleurit au pays des ylangs-ylangs et qui n’a pas fini de faire parler de lui. “Lors des journées européennes du patrimoine 2021 des 18 et 19 septembre, les 88 photos ainsi que les cartels rédigés par les jeunes seront présentés au public, place de la République, sur le parvis du marché couvert de Mamoudzou”, s’exclame Géry Liausu, le directeur de la culture, du patrimoine, du tourisme et des loisirs au sein de l’intercommunalité, lors du vernissage de l’exposition.

Une première étape avant d’entamer une “phase de restitution itinérante” au cours de laquelle des exhibitions, en partenariat avec l’académie de Mayotte, seront proposées dans les écoles ainsi que dans différents lieux de Dembéni et de Mamoudzou. Un projet qui veut aller au plus près de la population afin d’offrir à tous la possibilité de découvrir des activités culturelles. « L’objectif est de valoriser la créativité des jeunes auprès du plus grand nombre, mais aussi pour que chacun puisse peut-être se découvrir une passion pour la photographie ou toute autre forme d’expression artistique”, confie impatient celui qui a accompagné 88 adolescents pendant les mois de juillet et d’août.

La fierté d’être exposés

Mounya, Mariame, Nadjima et bien d’autres encore se sont rendus sur la place de la République ce vendredi pour assister au vernissage de leur exposition. Ravis d’être les vedettes d’un soir, ils se sont prêtés au jeu et ont présenté leurs œuvres. “L’alignement des maisons, les formes, les boutiques, les garde-corps… C’est beau, cela m’a inspiré”, témoigne Anlime, habitant de Cavani et élève en classe de 3ème. Plus loin, Yesenia, décrypte avec une certaine nostalgie son cliché. “J’ai pris en photo cette ruelle vide. On y voit du linge étendu et au beau milieu, un chat. Il donne une touche de vie à ce quartier.” Une intention artistique résumée dans le cartel qui joint la photographie intitulée “Le chat” : “Une image fige et capture un moment dans le temps […]. Est-ce l’heure du repas ou est-ce que les habitants sont tous derrière leur télévision. Les paraboles situées au bout de cette ruelle nous le laissent à penser.” Un regard juvénile sur le quotidien du 101ème département français qui apporte un peu de poésie aux ruelles colorées.

L’engouement du public

Le père Bienvenu Kasongo, qui a accueilli les jeunes dans sa paroisse pour une petite visite à l’occasion des journées européennes du patrimoine, ne tarie pas d’éloges sur cette exposition. “J’ai été très heureux de les recevoir dans l’église Notre Dame de Fatima. J’ai pu alors conter l’histoire de ce lieu et les jeunes se sont montrés très attentifs et intéressés. Les photos sont superbes et mettent en valeur la ville et ses lieux remarquables.” Un avis partagé par les visiteurs et amateurs de photographie qui se sont massés en nombre sur le parvis du marché couvert vendredi soir.

Stéphane Bijoux, député européen : « Notre responsabilité, c’est d’accompagner nos planteurs, nos éleveurs et aussi nos pêcheurs »

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Lundi 13 septembre, le député européen de La Réunion Stéphane Bijoux présentait devant le parlement de l’Union sont rapport intitulé « Vers un renforcement du partenariat avec les régions ultrapériphériques de l’Union ». Le lendemain, il était adopté à une très large majorité en séance plénière. Parmi les mesures phares du texte, le développement de l’activité agricole, afin de favoriser l’autonomie alimentaire des territoires concernés, et promouvoir le secteur auprès des nouvelles générations, tout en tenant compte des défis environnementaux qui s’imposent à elles.

Mayotte Hebdo : Pourquoi était-ce selon vous nécessaire de renforcer le partenariat entre l’Europe et ses régions ultrapériphériques ?

Stéphane Bijoux : À Mayotte comme dans tous les Outre-mer, les bouleversements d’aujourd’hui nous obligent à revoir nos priorités et nos modes d’actions. La stratégie européenne pour les régions ultrapériphériques (RUP) doit impérativement intégrer les nouveaux défis et apporter des réponses concrètes aux urgences sanitaires, économiques, sociales et climatiques qui touchent nos populations. Avec mon rapport parlementaire, j’assume de vouloir envoyer un message politique fort : nous avons besoin et nous exigeons un nouveau plan d’actions pour nos territoires ultramarins.

C’est la première fois depuis 2019 que le Parlement européen fixe un cap politique pour les RUP et cet appel a été adopté à une très large majorité (avec plus de 600 voix « Pour« ). La nouvelle stratégie que je propose vise à placer les RUP, non pas en périphérie, mais au centre de l’action publique européenne. Pour cela, il faut généraliser un « réflexe Outre-mer » dans toutes les institutions de l’Union européenne : c’est à la fois une vigilance et une exigence de résultats qui doit irriguer toutes les politiques de l’UE.

MH : Qu’est-ce que cela pourrait concrètement changer pour les RUP ?

S. B. : Mon rapport est construit autour de trois priorités : consolider les acquis, respecter nos spécificités et ouvrir de nouveaux horizons.

Consolider les acquis : ça signifie protéger les outils qui rendent l’Europe concrète pour les Ultramarins, qui permettent de développer nos territoires, de construire des projets, de soutenir les secteurs économiques clés : le POSEI (programme d’options spécifiques à l’éloignement et à l’insalubrité, ndlr) pour nos agriculteurs et éleveurs, le FEAMPA pour nos pêcheurs, le FSE pour les plus fragiles, Erasmus pour nos jeunes, ou encore le FEDER pour développer nos infrastructures et soutenir l’économie.

Respecter nos spécificités : c’est un impératif pour répondre aux enjeux spécifiques auxquels sont confrontés nos RUP : l’éloignement, le coût de la vie, le défi de l’autonomie alimentaire, la problématique des transports…

Ouvrir de nos nouveaux horizons : c’est une urgence pour que les RUP soient considérées comme des territoires de solutions pour l’Europe, et pas seulement comme des territoires de subventions.

La nouvelle stratégie que je propose invite ainsi à changer le regard sur les Outre-mer. Nous devons être vus comme des territoires moteurs de la transition écologique, de l’économie bleue, comme des pôles d’innovation et de recherche… Mon rapport propose ainsi de créer des campus d’excellence pour la jeunesse ultramarine, de s’appuyer sur les RUP pour déployer les énergies renouvelables et faire émerger les métiers de demain, ou encore de construire des centres de recherche sur la santé et la biodiversité.

L’ambition de mon rapport, c’est de faire de l’Europe une chance pour nos Outre-mer, de nos Outre-mer des atouts pour l’Europe.

MH : Dans le volet « politique agricole« , le rapport demande que soit renforcé plusieurs dispositifs spécifiques. Pourquoi ? Sont-ils à ce jour insuffisants selon vous ?

S. B. : Notre monde agricole a bien conscience qu’il faut engager et réussir les transitions agro-écologiques et la diversification. Notre responsabilité, c’est d’accompagner nos planteurs, nos éleveurs et aussi nos pêcheurs. Le cap avait été fixé par le président de la République lui-même quand, en 2019, il avait annoncé un objectif clair : travailler ensemble pour atteindre l’autonomie alimentaire dans les DROM en 2030.

Mais, la même année, notre ambition a été percutée par une tentative paradoxale et unilatérale de la Commission européenne qui a voulu baisser le mondant du POSEI, le programme européen d’aides à notre agriculture. En tant de député européen, et avec mes collègues parlementaires, nous avons immédiatement combattu cette manœuvre agressive et contre-productive qui constituait de fait, une entorse inadmissible à l’obligation européenne de respecter nos spécificités. Je défendrai toujours le POSEI. C’est un levier essentiel pour aider nos planteurs et nos éleveurs. Protéger et développer notre production locale est à la fois une nécessité et un impératif.

Le POSEI, c’est surtout un outil indispensable pour aider les RUP à relever le défi de l’autonomie alimentaire : pour structurer l’agriculture et l’élevage ultramarins, pour diversifier les filières agricoles et garantir l’attractivité des métiers agricoles notamment pour les jeunes. Au Parlement européen, nous nous sommes beaucoup mobilisés et avec un soutien actif du gouvernement français, nous avons obtenu le maintien du budget du POSEI. Dans les RUP françaises, ce sont donc 278 millions d’euros qui continueront à soutenir chaque année notre modèle familial pour une agriculture de qualité.

Nous avons un objectif : l’autonomie alimentaire. Nous avons une urgence : la diversification et la transition agro-écologique. Les hommes et les femmes qui travaillent dur dans le monde agricole pourront toujours compter sur mon engagement. Le chemin du succès doit impérativement conjuguer développement et protection et d’ailleurs, dans mon rapport, je propose également de renforcer la protection de nos productions locales dans le cadre des accords commerciaux conclus par l’UE.

MH : Il y est aussi question de renforcer l’attractivité des métiers agricoles notamment. Comment ? Cela signifie-t-il que le secteur ne compte pas suffisamment de professionnels au sein des RUP ?

S. B. : Nos agriculteurs et nos éleveurs sont de vrais professionnels et ils ont un solide savoir-faire. Nos jeunes ont besoin de perspectives, alors nous devons renforcer l’attractivité des métiers agricoles à la fois pour assurer la relève et pour innover. Dans le cadre de la réforme de la PAC, nous nous sommes d’ailleurs battus au Parlement européen pour mieux accompagner l’installation des jeunes agriculteurs.

Face aux défis d’aujourd’hui et de demain : l’Europe doit financer des infrastructures modernes, accompagner les territoires ruraux, développer des formations en lien avec nos nouveaux besoins mais nous devons aussi trouver des solutions pour sécuriser la qualité des sols.

Pour réussir, il faut des moyens financiers bien évidemment. Des outils efficaces comme le POSEI ou le FEADER doivent être consolidés mais nous devons aussi mieux coordonner les actions de tous les acteurs du secteur, l’Europe, l’État, les collectivités locales et les professionnels doivent travailler ensemble et avancer dans le même sens.

MH : Comment concilier politique agricole et développement durable, alors que les territoires d’Outre-mer sont plus touchés que l’Hexagone par le réchauffement climatique ?

S. B. : Concilier l’agriculture et le développement durable revient à concilier économie et écologie, à garantir à la fois la prospérité de nos filières et la protection de nos ressources mais aussi de la biodiversité.

Les RUP sont des territoires particulièrement confrontés à ces défis, et probablement plus que les autres. Les Outre-mer abritent 80% de la biodiversité et nous sommes en première ligne des risques climatiques. Mais compte tenu de leurs spécificités géographiques, nos régions peuvent être aussi des territoires moteurs pour déployer des solutions en matière d’agriculture durable.

Dans mon rapport, je propose de fixer des objectifs pragmatiques et innovants et de sécuriser des moyens pour la transition agro-écologique.

Nous avons lancé une dynamique du changement avec un culture du résultat : la nouvelle PAC que nous avons adoptée n’a jamais été aussi verte. Plus nos agriculteurs et éleveurs agiront en faveur de l’environnement et du climat et plus ils seront financièrement soutenus.

L’UE a aussi proposé une stratégie « De la ferme à la table », qui a pour ambition de garantir un système agricole et alimentaire européen sain et durable. Nous ferons en sorte que les agriculteurs et éleveurs ultramarins soient des partenaires incontournables de cette stratégie.

Lorsqu’on parle de lien entre environnement et agriculture, il faut aussi répondre à l’enjeu de l’impact des risques climatiques sur l’agriculture et les récoltes. Ces risques sont particulièrement importants pour les RUP, qui sont régulièrement confrontées à des ouragans ou des cyclones.

La semaine dernière, le président de la République a annoncé un plan national de 600 millions d’euros par an pour aider nos agriculteurs en finançant un système de gestion des risques climatiques. Ce système mobilisera des fonds nationaux et européens.

Je réaffirme que nous devons jouer la carte de l’intelligence collective, de la mutualisation de nos expertises, de la confiance et du partage des solutions. Plus que jamais, l’Europe est un partenaire indispensable de notre avenir. Être à la fois, Mahorais, Français et Européen est un atout considérable pour relever les défis que nous devons affronter pour nous et pour nos enfants.

Découvrez en plus sur le nouveau numéro de Mayotte Hebdo

 

Les chiffres clés de l’agriculture dans les Outre-mer

Alors que les surfaces agricoles représentent 56% du territoire hexagonal, soit 29 millions d’hectares, le ministère de l’Agriculture estiment comme suit les surfaces agricoles utilisées pour chaque département d’Outre-mer :

• 30% pour la Guadeloupe (52.000 ha) sur 7.000 exploitations agricoles ;
• 20% pour La Réunion (47.000 ha) sur 7.700 exploitations ;
• 0,4% en Guyane (31.000 ha) sur 6.000 exploitations ;
• 30% en Martinique (30.000 ha) sur 3.000 exploitations ;
• 20% à Mayotte (8.700 ha) sur 15.700 exploitations.

Pour atteindre l’objectif d’autonomie alimentaire dans les DROM à l’horizon 2030 annoncé en 2019 par Emmanuel Macron, les départements ultramarins doivent étendre comme suit leur production locale de produits tropicaux et légumes afin de remplacer les importations :

• 95 ha pour Mayotte ;
• 178 ha pour la Guyane ;
• 500 ha pour La Réunion ;
• 511 ha pour la Martinique ;
• 764 ha pour la Guadeloupe.

Des projets dans les cartons

En mai 2021, 67 projets agricoles agroalimentaires et de la filière forêt-bois, contribuant à l’objectif d’autonomie alimentaire, ont été nommés lauréats pour le plan France Relance dans les départements d’Outre-mer, avec un soutien de l’État de près de 15 millions d’euros. À Mayotte, dans le cadre de ces projets, l’entreprise Mayotte Pépinières va moderniser son outil de production, augmenter ses rendements et diminuer la pénibilité du travail de ses collaborateurs en acquérant des tables de culture, du matériel de terrassement et une réserve d’eau. Aussi, la société Les moustaches de l’hippocampe à Pamandzi portent un projet de soutien à l’accueil des animaux abandonnés et en fin de vie.

Compagnies maritimes : la baisse des rotations pénalise les entreprises de Mayotte

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Depuis l’annonce en juin d’une réduction du nombre de navires de CMA-CGM au port de Longoni, les patrons de l’île tirent la sonnette d’alarme. Lors de la visite des deux ministres fin août, Sébastien Lecornu avait assuré que le sujet était sur la table. Inchangée, la situation risque d’engendrer des conséquences à plus long terme, tant sur les coûts des entreprises que sur les paniers des consommateurs…

Le message sonne comme un avertissement. “Bien sûr que les prix vont augmenter, je peux vous le promettre. Et pire, nous allons même connaître des pénuries”, met en garde Carla Baltus ce vendredi au micro de Zakweli, sur Mayotte la 1ère. Une prédiction cousue de fil blanc, dans un contexte mondial en proie à la menace de l’inflation, dopée par la reprise économique post crise Covid. Mais à Mayotte, territoire qui ne connaît que trop bien les problématiques de la vie chère, cette menace d’une hausse prochaine des prix, jusque dans les caddies, a de quoi faire peur.

C’est dans un contexte mondial d’embouteillages dans l’approvisionnement des marchandises – le coût d’un conteneur venu de Chine est passé de 3.000 à 12.000 euros, a rappelé la présidente du Medef Mayotte -, que les compagnies maritimes, CMA-CGM en tête, avaient annoncé en juin une réduction de leurs rotations jusqu’à Mayotte. Ainsi, rentabilité oblige, les navires de l’entreprise française de transport maritime ne font plus qu’une escale dans le lagon par mois contre deux à trois par le passé. Bien sûr, le nombre de conteneurs qui approvisionnent le 101ème département devait rester inchangé, avait promis CMA-CGM. 250 par semaine, soit entre 500 et 750 à faire tenir sur le seul navire du mois, en poussant un peu les murs.

Des frais supplémentaires

Problème : « quand vous avez un bateau qui ramène tout ce qu’il pouvait ramener en quatre fois, il y a des frais”, signale Carla Baltus, évoquant notamment les “surestaries”, les frais de stationnement et de détention des conteneurs au port. Une facture qui peut s’avérer particulièrement salée à Mayotte, d’autant plus à cause des embouteillages ralentissant le rythme des livraisons. “Pour amener des conteneurs à Mamoudzou, parfois on ne peut faire qu’un voyage ou deux dans la journée, donc quand tout arrive d’un coup, tout coûte cher”, explique-t-elle.

Le BTP déjà touché par la hausse des prix

Ainsi, à peine trois mois après cette annonce d’une réduction des rotations, les conséquences commencent déjà à se faire sentir sur les entreprises. “Il y a de moins en moins de rotations maritimes de la part de CMA-CGM et paradoxalement, le prix du fret a augmenté (celui de MCG aussi d’ailleurs)”, déplore un patron affilié au Medef Mayotte, qui cite par ailleurs une redevance supplémentaire, appelée “SGPO” (Sea priority go, ndlr) appliquée par le géant marseillais pour que la marchandise bénéficie d’un embarquement prioritaire.

Aucun secteur ne semble échapper à cette crise des approvisionnements. La filière du bâtiment, déjà frappée par la hausse spectaculaire depuis un an des prix des matières premières comme le bois ou l’acier, n’est pas en reste. “L’augmentation du coût de transit, de 15% depuis le mois de juin, nous impacte directement sur le résultat de notre chantier, et malheureusement, ces hausses ne sont pas mises à jour dans les marchés”, confirme Julian Champiat, le président de la fédération mahoraise du bâtiment et des travaux publics (FMBTP). Lequel évoque aussi les délais de livraisons – “nous étions à six semaines avant dans le meilleur des cas, nous sommes passés à 12 semaines pour des départs métropole” -, qui se répercutent inévitablement sur les chantiers avec “éventuellement des immobilisations et dans de rares cas des pénalités de retard”. Et ces conséquences pourraient se faire sentir à plus long terme, alors que les projets de construction pour les infrastructures structurantes ne manquent pas à Mayotte. “Il peut y avoir des appels d’offres infructueux car les budgets initialement prévus sont dépassés”, avertit le professionnel du BTP.

Des commandes quatre à cinq mois à l’avance

Sans compter que les entreprises doivent alors anticiper ces délais de livraison, et donc commander de plus grandes quantités de marchandises, avec “là aussi un poids sur la trésorerie”, précise Julian Champiat. “Nous devons commander les marchandises quatre à cinq mois à l’avance sans certitude de recevoir les conteneurs, car aucun suivi dans les ports de transbordement”, témoigne un adhérent au Medef Mayotte.

Quid des consommateurs ? “L’augmentation des prix des matières premières va entraîner une nouvelle grève contre la vie chère”, prédit cette entreprise. “En effet, il faut prévoir une hausse sur les produits de première nécessité (farine, huile, viande, etc.) d’environ 15 à 20% (entre augmentation fret et du prix des matières). Le prix du pain va donc probablement connaître une hausse rapide et brutale. Fini les sachets de pain à deux euros.” En pratique, il est encore un peu tôt pour chiffrer précisément l’impact de ces réductions de fret sur les paniers des consommateurs. Contacté, un distributeur nie ainsi une répercussion de ces hausses sur les prix de vente en rayons.

Mais d’après la dernière publication de l’institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), sur 11 mois, les prix ont bien augmenté de 1.1% de juillet 2020 à juin 2021. Et en juin, les prix de l’alimentaire ont crû de 0,.1%, portés par les produits frais (+1.2%) et les boissons alcoolisées (+0.5%). Il faudra attendre les prochains relevés des équipes de l’institut pour savoir si la baisse des rotations a accentué ou non le phénomène sur les trois derniers mois.

Mon Pouleti : une polémique qui prend des ailes

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Le nouvel abattoir Mon Pouleti a-t-il raté sa dernière campagne de publicité ? Ou au contraire, a-t-il fait un coup de maître ? Les avis sur la question sont très partagés. Leur affiche montrant une poule habillée en salouva ne passe pas auprès de certains Mahorais qui crient au scandale alors que d’autres la prennent au second degré. De son côté, la marque réfute toutes les accusations et affirme avoir voulu faire une pub décalée.

Une poule, un salouva et la polémique est lancée. Les panneaux 4 par 3 de l’abattoir de volailles AVM Mon Pouleti visibles partout dans l’île font jaser. Depuis quelques jours, on peut voir dans la rue des affiches mettant en scène une poule habillée en salouva. La version masculine montre un coq vêtu d’un débardeur et d’un chicoyi, une tenue traditionnelle mahoraise pour les hommes. Mais étonnamment, le coq ne fait pas autant parler de lui.

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Entre indignation et incompréhension, certains Mahorais estiment que cette pub est « un manque de respect » envers la femme mahoraise. Et les critiques négatives fusent sur les réseaux sociaux. « C’est déshonorant et honteux » ; « L’image me dépasse » ; « Quel message veulent-ils faire passer ? », peut-on lire sur Facebook. D’autres appellent carrément au boycott. « N’acceptons pas ce genre de pub, boycottons-les tous » ; « N’achetez pas cette marque tant que cette pub n’aura pas été retirée ! » Les critiques vont encore plus loin, puisque certains y voient une forme de discrimination raciale. « Ces racistes ont affiché tout haut ce qu’ils pensent tout bas », lance un internaute mécontent.

Mais parmi les critiques, tout n’est pas négatif. Certains en revanche ne comprennent pas la polémique. « C’est seulement une caricature, je ne vois pas pourquoi vous en faites tout un plat » ; « Nous avons tous une façon différente d’interpréter une image » ; « Moi je vois un poulet en salouva, pas une boueni en salouva » ; « Au lieu de soutenir une enseigne locale qui d’autant plus nous propose du produit frais, on appelle au boycott », s’indignent d’autre part les fervents défenseurs de la marque. Quoi qu’il en soit, elle a réussi son coup puisque toute l’île parle d’elle.

Une publicité décalée

Depuis la polémique, l’abattoir Mon Pouleti n’a pas communiqué, mais contacté par nos soins, le directeur général se dit surpris par l’ampleur des réactions. « La campagne doit se lire avec la poule et le coq. On n’est pas en train de dénigrer la femme mahoraise pour laquelle on a beaucoup de respect. Parmi nos éleveurs il y a beaucoup de femmes », défend Guillaume Rubin le directeur général de AVM Mon Pouleti. Et si certains commentaires accusent la marque d’être raciste, l’entrepreneur rappelle que son président est mahorais et que la campagne de communication « a été réfléchie par les deux communautés, mzungu et mahoraise, ça a été validé par tout le monde ».

L’entreprise n’en est pas à son premier coup. Peu de temps avant, elle avait publié une illustration d’une poule drapée dans le salouva dit Zéna Mdéré. Les réactions ont immédiatement été vives sur les réseaux sociaux et la marque a aussitôt retiré l’image. « On a compris qu’associer cette grande dame était mal vu et ce n’était pas le but de notre campagne. On s’est trompés là-dessus et on a tout de suite changé cette image pour mettre un salouva normal », reconnaît Guillaume Rubin.

L’objectif n’est donc pas de heurter les Mahorais, mais plutôt de se démarquer des autres en proposant une « publicité décalée, quelque chose d’original », assure la direction. Et malgré les critiques négatives, elle assume complètement cette campagne publicitaire et ne songe pas à la retirer. Au contraire, l’entreprise est plutôt satisfaite des retombées. « Ça fait parler et c’est ce que l’on voulait. On est désolés que ça en choque quelques-uns, mais on est plutôt contents de la manière dont ça se passe », affirme le directeur général de AVM Mon pouleti. Buzz ou bad buzz : comme on dit, il n’y a pas de mauvaise publicité !

Intersyndicale des taxis de Mayotte : « le Département prend le travail des chauffeurs de taxis »

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Lassitude, incompréhension, colère… C’est dans cet état d’esprit que se trouvent les chauffeurs de taxis de Mayotte. Révoltés par un plan de transports interurbains lancé par le conseil départemental, les conducteurs demandent des explications. Le projet du Département est estimé à 100 millions d’euros et les chauffeurs de taxis redoutent leur mise à l’écart. Les syndicats des taxis se sont rassemblés ce jeudi matin pour crier leur désarroi, espérant être entendus par les élus. Abalkini Chanfi, correspondant de l’intersyndicale, nous explique les raisons de leur colère.

Flash Infos : Quel était l’objet de la réunion avec tous les syndicats de taxis ?

Abalkini Chanfi : La réunion fait suite à l’offre de marché du conseil départemental lancé en juillet dernier, s’agissant du projet de transports interurbains de Mayotte. Tous ceux qui veulent répondre d’ici le 20 septembre peuvent le faire, mais le problème c’est qu’il y a un seul lot à 100 millions d’euros sur dix ans. L’intersyndicale estime que personne à Mayotte n’est capable de répondre à ce marché, pas même ceux qui sont très bien fournis. Il faut être un très gros transporteur, comme la RATP, pour pouvoir y répondre.

FI : En quoi consiste ce plan de transports interurbains ?

A. C. : C’est un plan avec beaucoup d’incohérences car « interurbain » signifie que les bus transportent d’une ville à une autre et pas seulement à Mamoudzou. Or, nous n’avons pas de routes pour cela. Le Département veut rajouter au moins 50 bus, et avec la taille du marché, je pense qu’il y aura au moins 100 bus. Comment 100 bus peuvent rouler à Mayotte ? Nous n’avons pas les infrastructures nécessaires pour les accueillir. Et je vous le dis, si nous rajoutons ces bus à Mayotte en l’état actuel, nous tuerons les taxis ! Aujourd’hui, les chauffeurs de taxis ont du mal à vivre de leur travail parce qu’il y a de plus en plus de bouchons, tout est plus cher, ils ne survivront pas à ça… De plus, ils veulent une mise en service pour septembre 2022. Même si vous avez les capacités de répondre au marché, les délais pour faire venir des bus à Mayotte sont trop courts. En un an, ce n’est pas possible.

FI : Avez-vous entamé des discussions avec les élus du conseil départemental ?

A. C. : Il y a un mois, le président du Département avait promis qu’il allait suspendre le marché. Ce n’est toujours pas le cas à l’heure où nous nous parlons alors que l’appel d’offre se termine dans trois jours. Pour nous, c’est encore un discours « bla bla ». L’intersyndicale des taxis est extrêmement révoltée car la mission des transports publics est assurée par les taxis depuis une cinquantaine d’années et aujourd’hui, ils se sentent écartés. Il y a un an, le Département a décidé d’aider les chauffeurs à moderniser leurs véhicules à hauteur de 10.000 euros par artisan. Sauf qu’un an plus tard, ils lancent leur plan de transports interurbains. Comment peuvent-ils demander aux artisans d’investir dans des véhicules plus modernes et ensuite mettre en place des bus ? Le Département prend le travail des chauffeurs de taxis parce que si ces bus arrivent, nous n’aurons plus de place sur le marché. À Mayotte, il y a 600 licences : au moins 5.000 personnes vivent de cette économie.

FI : Selon vous, quelle serait la solution pour satisfaire tout le monde ?

A. C. : Nous souhaitons voir le président du Département et le 3ème vice-président en charge des transports pour discuter et voir de quelle manière les taxis peuvent s’intégrer dans ce marché. La collectivité doit pouvoir nous répondre sur les questions d’avenir de notre métier. Ce lundi 20 septembre, de 10h à 12h, nous allons faire un défilé pacifique avec nos voitures à Mamoudzou. Nous ne bloquerons pas la route, cela ne sert plus à rien. Nous allons faire une opération escargot en passant devant les principales institutions – la Cadema, la préfecture, le conseil départemental, les banques – pour faire réagir !

Naissance/mortalité à Mayotte : l’année 2020, une exception à la règle

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2020 se démarque par une baisse sensible des naissances. Un indicateur à prendre avec des pincettes puisque 2021 pourrait coïncider avec le franchissement de la barre symbolique des 10.000 nouveaux-nés dans le 101ème département. En parallèle, la surmortalité, liée à la pandémie de Covid-19 et à l’épidémie de dengue, explose sur ces deux dernières années. Décryptage avec Bertrand Aumand, le chef du service régional de l’institut national de la statistique et des études économiques (Insee).

Plus grande maternité de France, Mayotte scrute toujours attentivement la publication des chiffres de l’institut national de la statistique et des études économiques (Insee) pour connaître l’évolution des naissances d’une année à l’autre. Idem pour la mortalité. Quoi qu’on en dise, un lien de cause à effet existe bel et bien avec la pandémie de Covid-19 par rapport à ces deux indicateurs. Éléments de réponse.

9.180. C’est le nombre de naissances en 2020. Soit 580 bébés de moins par rapport à 2019 (-6%). Si ce chiffre est le plus faible depuis 2015 (9.000), le taux de fécondite, lui, reste élevé à Mayotte – 4.2 enfants par femme – en comparaison aux autres départements d’Outre-mer (3.6 en Guyane par exemple) et à la métropole (1.8). Ce recul général « concerne davantage » les femmes de l’Union des Comores : 6.300 naissances en 2020, contre 6.810 un an plus tôt (-8%). Toutefois, il faut noter que, comme depuis 2016, trois nouveaux-nés sur quatre proviennent d’une mère de nationalité étrangère (69% de comoriennes et 5% de malgaches).

56. C’est en pourcentage la part des bébés nés en 2020 qui ont au moins un parent français. C’est autant qu’en 2019 et en 2018 (55%), un peu inférieur qu’en 2016 et 2017 (58%) et surtout qu’en 2014 (72%). « Depuis 2015, nous sommes au moins à 40% de père et mère étrangère », rappelle par ailleurs le chef du service régional de l’Insee. Cette inversion notable se justifie notamment par l’explosion d’une immigration massive venue des îles voisines.

415. C’est le nombre d’enfants nés de mères mineures en 2020, contre 430 en 2019 et 470 en 2018. « Le côté positif est que nous avons une tendance à la baisse, cela représente – seulement – 4.5% des naissances sur l’année 2020 (2% à La Réunion, 4.8% en Guyane et 0.4% en métropole, ndlr) », insiste le représentant de l’Insee. Parmi ces mamans âgées de moins de 18 ans, 94% d’entre elles ont accouché dans une maternité.

236. C’est le nombre de mères domiciliées à Mayotte qui ont accouché hors du département (à La Réunion et en métropole). À l’inverse, en 2019, on en comptabilisait 300. Elles ont 32 ans en moyenne et sont de nationalité française pour 86% d’entre elles. Cette « baisse marquée » s’explique par les difficultés de déplacements en raison de la fermeture des frontières durant la crise sanitaire.

6.550. C’est le nombre de naissances au cours des sept premiers mois de 2021, soit 550 de plus que sur la même période de 2020 (+9.1%). « Il n’y a qu’en janvier que les chiffres sont inférieurs puisqu’ils ont été conçus en avril 2020, au début d’un confinement qui a pu décourager les couples de procréer et les inciter à reporter de plusieurs mois leurs projets de parentalité », relativise Bertrand Aumand. Cette tendance « très forte » pourrait bien faire franchir la barre symbolique des 10.000 bébés d’ici la fin de l’année.

970. C’est le nombre de personnes domiciliées à Mayotte qui sont décédées. Une hausse de 25% par rapport à 2019, contre 9% en métropole. Cette surmortalité, visible principalement entre février et mai ainsi qu’en décembre, touche davantage les 75 ans ou plus (+37%). « Le graphique sert à démontrer qu’en fonction du département d’Outre-mer, l’impact n’a pas été à la même période de l’année », souligne le chef du service régional de l’Insee, qui met cette explosion sur le compte du Covid-19 et de la dengue, sans toutefois faire la distinction. « L’agence régionale de santé a des informations sur la cause de mortalité que nous n’avons pas. Nous sommes uniquement destinataires des bulletins de décès. »

610. C’est le nombre de décès recensés de janvier à juin 2021. Une augmentation spectaculaire de l’ordre de 53% par rapport à la même période de 2019, qui frappe essentiellement les personnes âgées (+91% parmi les 75-84 ans au premier semestre, en lien avec la dernière vague épidémique), mais pas que (+65% parmi les 50-64 ans). Autre indicateur : les hommes sont plus touchés que les femmes (+134% contre +61%). « Nous avons une aggravation de la surmortalité en 2021 », conclut Bertrand Aumand.

Journées européennes du patrimoine : 40 événements à Mayotte pour une 38ème édition encore sous la menace Covid

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Pendant trois jours, la population aura l’occasion de découvrir les richesses du territoire à travers les nombreuses activités proposées par les collectivités et les associations. Seule contrainte : la présentation du passe sanitaire. Tour d’horizon avec Arnauld Martin, conseiller pour les musées et le patrimoine immatériel à la direction des affaires culturelles

Ateliers de maquillage, exposition artisanale, sortie découverte à l’îlot M’Bouzi ou encore balades contées aux cascades de Barakani… Pour la 38ème édition des Journées européennes du patrimoine, les richesses de l’île aux parfums seront une fois encore à l’honneur tout le week-end. Au total, plus de 40 événements figurent au programme, répartis sur quelque dix communes : Mamoudzou, Ouangani, Chirongui, Chiconi, M’Tsangamouji, Tsingoni, Pamandzi, Dzaoudzi, Acoua ou encore M’Tsamboro accueilleront ainsi les amateurs de culture locale. “Nous sommes presque au même niveau que l’année dernière, avec des villes qui ne participaient pas parfois depuis quelques années et qui sont revenues, comme M’Tsamboro”, se réjouit Arnauld Martin, le conseiller pour les musées et le patrimoine immatériel à la direction des affaires culturelles (DAC).

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En pleine période de crise sanitaire, cette nouvelle édition doit aussi signer un “retour à la vie normale” pour la culture, ou du moins “lui redonner une place dans un monde où elle a été un peu oubliée ces deux dernières années”, souligne le pilote des JEP à Mayotte. Covid-19 oblige, en plus de l’habituelle rengaine des gestes barrières, le passe sanitaire sera exigé pour tous les publics âgés de 18 ans et plus. Une contrainte qui risque de peser sur la fréquentation, sur un territoire où 30% de la population est vaccinée… “Habituellement, nous sommes à environ 9.000 visiteurs les bonnes années, là nous serons peut-être autour de 3.000. Même si nous pouvons toujours espérer plus !” sourit-il. Avant d’ajouter : “Nous ne sommes pas à la recherche du chiffre, l’idée reste de sensibiliser le public.

Patrimoine et environnement à l’honneur

Et surtout, tous les publics, à en croire le thème choisi pour cette 38ème édition : “Le Patrimoine pour tous”. “L’occasion de mettre en valeur la diversité de notre patrimoine, qu’il soit matériel ou immatériel, traditionnel ou plus inattendu”, abonde la ministre de la Culture, Roselyne Bachelot dans son édito. Et à Mayotte, cela passera notamment par les propositions de nouveaux participants, “qui profitent de ces journées pour parler de leurs activités« , explique Arnaud Martin. L’association Yes We Cannette organisera ainsi un atelier maquillage avec des matériaux naturels et de création d’objets artisanaux à partir de déchets recyclés. “C’est cohérent avec la notion de patrimoine, car en milieu insulaire, avant l’arrivée de la société de consommation de masse, les matériaux étaient réutilisés, détournés pour un autre usage. Cela fait partie de l’héritage, donc c’est une initiative intéressante, qui fait le lien entre problématiques patrimoniales et environnementales”, analyse le conseiller de la DAC.

La danse plutôt que les pierres

Autre initiative notable : une journée consacrée aux musiques et danses traditionnelles samedi et organisée par Talmalandi, une association de Miréréni, qui présentera pour l’occasion l’aboutissement de son travail avec les enfants du quartier. “C’est une action à signaler car le contexte dans le coin n’invite pas forcément à l’optimisme, et malgré tout, il y a des associations, qui plus est avec des jeunes, qui essaient de donner un peu d’espoir et une autre vision du territoire”, salue Arnauld Martin, en référence aux heurts qui émaillent les relations entre les deux villages de la commune de Tsingoni depuis plus d’une semaine.

Une journée pour les scolaires

Enfin, grâce à “Levez les yeux”, un dispositif commun entre les ministères de la Culture et de l’Éducation nationale, les scolaires pourront eux aussi profiter de ces journées du patrimoine, et ce, dès vendredi. Parmi les ateliers au programme : un jeu de piste à Barakani, la découverte des bangas à Tsimkoura, et même la visite d’un chantier de fouille archéologique, celle-ci exclusivement réservée aux élèves… De quoi élargir la cible des visiteurs et remplir l’objectif affiché par le thème de cette édition. Une initiative qui prend de plus “un sens particulier à Mayotte ”, soulève le conservateur du patrimoine. “Pour les scolaires, c’est une occasion de découvrir vraiment une partie de leurs racines et de prendre conscience de la richesse de leur héritage culturel.” Sortez vos agendas !

Pour découvrir le programme complet et s’inscrire aux événements, connectez-vous sur https://openagenda.com/jep-2021-mayotte.

Colocs ! : “Passer du tabou à libération de la parole en 13 minutes, c’est assez dingue”

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Diffusée depuis le 6 septembre sur Mayotte La 1ère, la série Colocs ! alimente des débats parfois houleux sur les réseaux sociaux, après seulement deux épisodes. En début de parcours, la réalisatrice Jacqueline Djoumoi-Guez analyse pour Flash Infos ces réactions à fleur de peau.

Flash Infos : Deux semaines après le lancement de la série Colocs, quelles sont vos premières impressions sur l’accueil des spectateurs ?

Jacqueline Djoumoi-Guez : Quand je l’ai écrite sur papier et proposée à France Télévisions, on brossait le tableau depuis Paris sans peser à quel point cela pouvait être très clivant. Pour autant, les réactions sont attendues. Déjà, dans les commentaires, 90% sont des hommes, qui réagissent de manière très virulente. On se dit qu’on a peut-être touché quelque chose de pas totalement faux… Je ne les ai jamais vus s’exciter à ce point pour une série brésilienne ou américaine ! C’est quand même étrange de voir à quel point on est capable d’accepter ce qui vient d’ailleurs et très peu ce qui vient de l’intérieur. Surtout quand cela parle de nous, à une époque où la jeunesse a un besoin criant de représentation, pour avoir des modèles de référence et une pensée différente sur laquelle se construire et grandir. Ces critiques arrivent par milliers sur les réseaux sociaux, sur Facebook, sur Twitter… Sur Twitter, ils ont fait des spaces, des espaces de conversation pour discuter de la série. Le lendemain du premier épisode, ils étaient 300 personnes ! C’est un événement qui n’a jamais eu lieu à Mayotte. Dimanche dernier, un autre space a réuni la communauté comorienne cette fois, qui vit les mêmes problématiques que la jeunesse mahoraise. Et maintenant, rendez-vous est pris toutes les semaines pour aller débattre après chaque diffusion…

FI : Avez-vous participé à ces échanges ? Quelles critiques ressortent le plus souvent, ou vous ont le plus marquée ?

J. D.-G. : Oui, le premier space, je me suis connectée à partir de la troisième heure, car quelqu’un m’avait avertie. Je me suis proposée de répondre à leurs questions. Il y a eu des réactions, notamment sur le rôle de la femme voilée. On l’a taxée de trop caricaturale, car elle défend la tradition, elle veut faire son manzaraka, du coup elle serait dans une forme d’obscurantisme. Je leur ai dit d’y regarder à deux fois. Ce personnage est sûrement celui avec la plus grande ouverture d’esprit : elle ne remet pas en question sa foi, elle est en paix avec cette question personnelle. Donc, elle fait sa prière, mais elle sort avec ses copines, qui sont toutes différentes. L’une porte une des mini-jupes, mais elle ne la juge pas. Elle veut faire son manzaraka, comme une autre voudrait le mariage romantique, robe blanche, Versailles ! Elle n’est pas caricaturale, au contraire.

Dans le collimateur des commentateurs, il y a aussi le personnage principal, Raïssa. Ils m’accusent d’avoir mis dans la bouche de ce personnage des paroles très dures vis-à-vis de sa mère, alors qu’en réalité, ce n’est pas à elle qu’elle parle : ce sont ses pensées, d’où le cadrage et la colorimétrie, qui changent pour montrer ses frustrations intérieures. Pour moi, ce personnage, un peu schizophrène, qui donne le change face à la société, à ce qu’attend sa famille, c’est l’archétype de la femme mahoraise d’aujourd’hui. Celle qui essaie de conjuguer la liberté acquise en métropole et la fille qu’on attend, qui fait ce qu’on lui dit et ne crée pas de problème.

FI : Sur les réseaux sociaux, une partie des spectateurs ont aussi le sentiment que la série bafoue la culture et les valeurs mahoraises…

J. D.-G. : Dans les milliers de commentaires, on m’a reproché de participer à ce que la jeunesse mahoraise se dévergonde. C’est une critique que je prends très mal, car elle insulte ma cible, mon public, essentiellement féminin, en induisant qu’elles ne sont pas capables de penser par elles-mêmes et de prendre de la distance par rapport aux images qu’elles voient. C’est une façon de continuer à infantiliser la femme, de continuer à juger que les jeunes femmes doivent être sous la protection et l’accompagnement d’un tuteur. Et ce que je réponds à cela, c’est aussi que les gens n’ont pas attendu Colocs ! pour faire ce qu’ils avaient à faire. Là, dehors, il y a tout un monde que les gens ici n’ont pas envie de voir… L’autre critique qui me chamboule, c’est de dire : si on permet aux femmes de quitter le foyer familial, elles vont tomber enceintes. Je n’ai jamais vu d’appartement mettre une femme enceinte… Encore une fois, on omet 50% du problème ! Ceux qui formulent cette idée ne se rendent pas compte qu’ils oublient de s’intégrer à l’équation : on fait encore peser la responsabilité sur la fille, alors que le garçon n’a rien fait, ce n’est pas de sa faute. Enfin, le dernier sujet qui m’embête, c’est de résumer la liberté de la femme mahoraise à porter des mini-jupes et aller en boîte. Non ! Le problème est bien plus profond que ça, il s’agit d’égalité, de place de la femme dans la société mahoraise. Une société qui se prétend matriarcale, alors que nous savons très bien que c’est une légende urbaine.

FI : Malgré ces critiques qui fusent de toutes parts, vous avez aussi reçu beaucoup de compliments ! Quels impacts positifs retenez-vous de la diffusion de cette série ?

J. D.-G. : C’est sûr ! Pour la première fois sur ce territoire, on a une série intelligente et intellectuelle qui aborde des thématiques de société compliquées, et dans laquelle toute une génération se reconnaît. Tous les jours depuis le 3 septembre, je reçois des dizaines de messages, partout où je mets les pieds, des gens m’arrêtent, me remercient, m’embrassent… Ils se sentent représentés, pour la première fois. Cette jeune génération, quand elle revient à Mayotte, se sent très isolée, elle a le sentiment que c’est elle le problème, alors que c’est au moule de changer. Résultat, même entres jeunes, ils n’en parlent pas ! Le tabou reste. Il y a quelques jours au marché, une fille m’a arrêtée en pleurant, en m’expliquant qu’elle était en dépression depuis trois ans car sa mère la faisait se sentir responsable. Elle m’a dit “quand j’ai vu votre série, j’ai compris que tout ça, c’était du flan !”. C’est juste la façon de faire de l’ancienne génération, qui passe par du chantage affectif car elle n’a pas appris d’autre modèle. Les gens sur les réseaux sociaux ont beau nier l’existence de la jeune génération, elle est là, elle occupe des postes à responsabilité, donc il faudra bien composer avec. Soit on essaie d’avoir un dialogue au sein des familles, au sein des fratries, pour vivre des relations sincères, soit on continue à ce jeu-là… Mais la jeune génération gagnera, c’est mathématique.

FI : Vous aviez salué lors de l’avant-première le courage de vos quatre actrices, qui se mettaient au devant de la scène sur un sujet aussi clivant et sensible. Après ces deux premiers épisodes, comment les actrices vivent leur quotidien, est-ce, en effet, difficile.

J. D.-G. : On les arrête pas mal dans la rue, pour leur parler de leur personnage. Mais cela reste relativement calme. Après, nous n’en sommes qu’au deuxième épisode ! Il y en a 14 ! Et je peux vous assurer qu’il y a matière à débat. Le pilote n’est pas celui qui invite le plus à la polémique, d’ailleurs. Donc j’invite les gens à se tenir prêts à débattre intelligemment, argument contre argument. L’idée c’est ça : pouvoir débattre. Chaque épisode ne dure que 13 minutes, et les discussions s’étalent sur des jours et des jours.

FI : Mission accomplie, alors.

J. D.-G. : Ce qui est extraordinaire, c’est qu’on est passé d’un sujet dont on ne parle jamais à un sujet dont tout le monde parle. C’est un sacré tour de force ! Réussir à passer du tabou à libération de la parole en seulement 13 minutes, c’est assez dingue. Certes, le dialogue est encore virulent, il n’est pas encore qualitatif. Mais c’est la première fois qu’on parle, donc on n’a pas les mots. Au fur et à mesure, avec le temps et les générations à venir, on trouvera de meilleurs mots pour pouvoir dire les choses sans violence, sans colère. Et dans l’écoute !

1.2 million d’euros pour structurer le territoire et les clubs et relancer la pratique sportive

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Le domaine du sport n’a pas été épargné par les conséquences de la crise sanitaire. En France, 30% des licenciés n’ont pas renouvelé leur inscription, un réel manque à gagner pour les clubs et les associations sportives. C’est pour cette raison que le gouvernement, dans son plan de relance, a injecté 122 millions d’euros dans le secteur du sport. À Mayotte cela se caractérise particulièrement par la création d’emplois et la modernisation des équipements sportifs.

« C’est trop bon de faire du sport ! » Voici le slogan du plan de relance consacré au sport. Par ces quelques mots, le gouvernement veut mettre ou remettre le sport au centre des activités favorites des Français, et notamment des moins de 18 ans. Et pour cela il n’hésite pas à mettre la main à la poche, avec une enveloppe de 122 millions d’euros consacrés au plan de relance au niveau national. Le budget exact alloué à Mayotte s’élève à plus d’1.2 million euros. Les 300 clubs de l’île peuvent en bénéficier sous différentes formes en montant un dossier. Le « fonds territorial de solidarité » a déjà permis d’aider des associations en difficultés à hauteur de 247.000 euros.

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Le plan de relance du sport sur l’île aux parfums est géré par la délégation régionale académique à la jeunesse, à l’engagement et aux sports (DRAJES), le rectorat et le comité régional olympique et sportif (CROS) de Mayotte. Il est évident que les priorités du territoire ne sont pas celles des autres régions de France. Le domaine du sport peine encore à se développer dans le 101ème département, alors ce coup de pouce est comme un renouveau pour les professionnels et les amateurs. Le dispositif prévoit toute une panoplie de mesures pour redynamiser la pratique sportive.

Création d’emplois

Beaucoup de clubs de l’île existent grâce à l’engagement des bénévoles. Or, pour développer le sport à Mayotte, il faut plus de moyens humains et des éducateurs rémunérés. C’est en ce sens qu’une partie du budget du plan de relance est destiné à favoriser l’emploi dans le sport. « Il ne s’agit pas uniquement de créer des emplois, mais c’est aussi s’assurer que nous aurons des formateurs bien formés », précise Gilles Halbout, le recteur de Mayotte. Pour la seule année 2021, 40 nouveaux emplois aidés ont été crées, un chiffre amené à augmenter dans un avenir proche. En collaboration avec la DRAJES, le CROS forme des jeunes dans les métiers du sport. « Nous avons une formation appelée BPJEPS, nous avons déjà toute une promotion, mais nous voulons augmenter la cadence car il y a de la demande », indique Mohamed Tostao Ahmada, vice-président du CROS chargé de la professionnalisation. 138.000 euros ont déjà été accordés et ont permis la formation des jeunes.

50 euros pour le Pass’Sport

Relancer l’activité physique et remettre sur les rails la vie des clubs, ce sont les deux objectifs aussi du Pass’Sport. Depuis la fin du mois de juillet, certaines familles reçoivent un chèque d’une valeur de 50 euros par enfant afin de les inciter à inscrire leur progéniture dans les clubs sportifs. Les familles éligibles sont celles bénéficiant de l’allocation scolaire, vivant dans les quartiers prioritaires, ou celles recevant l’allocation pour enfant handicapé. Seuls les jeunes âgés de 6 à 17 ans révolus peuvent en bénéficier, cela représente 25.000 jeunes mahorais. Le Pass’Sport est également un coup de pouce pour les clubs. À Mayotte, beaucoup ne font pas payer l’entrée, alors ce dispositif est « un peu comme une compensation ». « Le club peut utiliser l’argent pour acheter des équipements et mieux se structurer », explique Madeleine Delaperrière, la directrice de la DRAJES. Il est encore trop tôt pour connaître l’impact de ces chèques sur la santé financière des clubs sportifs, mais le vice-président du CROS, Mohamed Tostao Ahmada se montre d’ores et déjà serein. « Il y aura un impact ! Beaucoup de parents viennent déjà s’informer pour inscrire leurs enfants. »

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La natation, une priorité

Avec une ministre des sports, nageuse et championne olympique, la natation ne pouvait être en reste. « Le savoir nager est une priorité gouvernementale. C’est propre aux écoles et notre objectif est que tous les élèves aient une initiation à la natation cette année », annonce Gilles Halbout. Mais comment y parvenir si les piscines publiques se comptent sur les doigts d’une main sur l’île ? Face à ce manque, le recteur rappelle la construction par le conseil départemental d’un bassin olympique sur Kawéni. À cela, s’ajouteront 12 bases nautiques dans les différentes communes de Mayotte. « Il n’y aura pas de piscine, mais il s’agit de petites constructions avec des points d’eau qui permettront de déployer des activités nautiques sur le lagon », poursuit le responsable de l’académie. Des bases nautiques financées par l’Éducation nationale via des « crédits d’investissement ». Les noyades étant fréquentes à Mayotte, au même titre qu’ailleurs en France, les sports nautiques et particulièrement la natation, sont plus qu’une nécessité pour les enfants, mais également les adultes.

Frais de bouche, voyages, rémunérations… Le cabinet du ministère des Outre-mer épinglé par la Cour des comptes

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Dans un référé publié le 14 septembre, la juridiction passe au crible les dépenses de cabinet des deux derniers ministres de la rue Oudinot, Annick Girardin et Sébastien Lecornu. Certaines maladresses doivent être corrigées pour des questions d’économies mais aussi d’exemplarité.

À près de 4.500 euros l’heure à bord de l’avion du gouvernement, on comprend un peu mieux pourquoi Sébastien Lecornu et Gérald Darmanin ont fait le trajet jusqu’à Mayotte par le vol commercial Air Austral, le 28 août dernier. Dans une publication du 14 septembre, la Cour des comptes, qui a décortiqué les dépenses de cabinet des ministres des Outre-mer, entre 2017 et 2020, constate “des risques particuliers en termes d’image, d’économie et d’exemplarité”. Au total, rien que pour le volet aérien, 1.7 million d’euros ont été dépensés pour les 61 voyages officiels des deux ministres successifs (Annick Girardin puis Sébastien Lecornu), auxquels s’ajoutent 120.000 euros pour quatre voyages spéciaux à bord de l’escadron de transport, d’entraînement et de calibration (ETEC) de l’armée de l’air. Or, deux de ces voyages auraient pu être effectués avec des compagnies aériennes classiques, note le rapport.

“Début de remise en ordre”

Bien sûr, “cette fréquence et ce niveau de dépenses sont une spécificité du ministère des Outre-mer, dont le champ couvre 12 territoires dispersés sur le globe”, concèdent les magistrats. Mais ces frais aériens ne sont pas les seuls sur lesquels le cabinet pourrait réduire la voilure. Primes de fin d’année qui ne disent pas leur nom, amendes pour des infractions de circulation commises par les chauffeurs du cabinet, ou encore la mauvaise comptabilité pour les frais de bouche de la “popote” – la cantine des conseillers -, sont passés au crible dans ce rapport de sept pages adressé à l’actuel locataire de la rue Oudinot. Et si la Cour observe “une meilleure prise en compte de ces risques” et “un début de remise en ordre” depuis le changement de ministre en juillet 2020, les efforts de maîtrise accrue doivent être poursuivis, “à l’exemple des pratiques observées par la présidence de la République”.

La carte bleue passe de main en main

Outre le niveau des dépenses, qui reste relativement “limité”, pour la plupart des postes observés, ce sont surtout leur nature qui sont susceptibles de porter préjudice au ministère. Exemple avec les délégations de signatures “peu encadrées” ayant conduit à la “confusion des responsabilités et la dilution des contrôles”. Sur la base d’un échantillon d’une centaine de dépenses, le Cour a ainsi relevé quelques irrégularités, dont des amendes des chauffeurs du cabinet. Même manque de suivi pour les frais de bouche, qui ont représentés 15.800 euros par mois en moyenne pour une équipe de 10 puis 15 conseillers entre 2017 et 2020 : “la possibilité de se restaurer sur place, en principe réservée aux seuls membres du cabinet (…) a été fortement élargie à d’autres personnels du ministère, malgré le coût de revient élevé par repas”, avertit la Cour.

L’administration centrale, ce parent pauvre

La juridiction financière mentionne aussi les effectifs du cabinet du ministre, au nombre de 56 agents, qui représentent “quasiment la moitié de l’effectif de la direction générale des Outre-mer”. L’administration centrale compte, elle, 137 agents. De quoi “affaiblir la capacité de cette direction” à l’heure où elle doit piloter plusieurs plans stratégiques, comme le Plan logement Outre-mer, le Plan de relance Outre-mer, le Livre bleu Outre-mer. Un déséquilibre déjà pointé du doigt par un référé en 2016, mais qui n’a pas donné de suite, déplore la Cour. À noter qu’Emmanuel Macron avait fait de la rigidité de la haute administration un cheval de bataille lors de sa campagne en 2017, le président souhaitant accroître la marge de manœuvre des cabinets face aux hauts fonctionnaires, souvent accusés de ralentir la mise en place des réformes.

Autre inégalité de traitement : les rémunérations. Passées de 2.99 millions d’euros à 3.76 millions d’euros en l’espace de quatre ans, celles-ci se révèlent assez disparates et dépendent « davantage des profils des personnes, de leur affectation précédente, de leur statut, que de l’importance des fonctions qu’ils exercent au sein du cabinet”, signalent aussi les sages. Par ailleurs, une indemnité de sujétion particulière (ISP) exceptionnelle est versée systématiquement aux fonctionnaires du bureau du cabinet. Une “prime de fin d’année” déguisée dont leurs collègues de la direction générale ne bénéficient pas. Par ailleurs, certaines déclarations d’intérêts et de patrimoine à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) manquent à l’appel… quand des doubles destinés directement au supérieur hiérarchique prennent tout bonnement la poussière, “non ouverts et sans avoir été consultés”, dans un coffre du cabinet. Oubli volontaire ou simple maladresse ? Reste que le risque de conflit d’intérêts existe bel et bien. Pour conclure ce référé, la Cour des comptes formule donc cinq recommandations, de la meilleure répartition des crédits à la détermination objective des rémunérations en passant par un référentiel commun rassemblant les normes relatives aux dépenses du cabinet. Espérons que ces bons conseils ne finissent pas leur course au fond du tiroir…

CDG/CNFPT : une convention de trois ans pour améliorer la qualité du service public à Mayotte

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Ce mercredi 15 septembre, le centre de gestion et le centre national de la fonction publique territoriale ont formalisé leur partenariat vieux de 15 ans par la signature d’une convention. Basée sur six axes prioritaires, elle a pour but de fixer des orientations communes et de mettre en place des indicateurs partagés pour évaluer efficacement la qualité de cette coopération au cours des trois prochaines années.

Avec près de 9.000 agents, les collectivités locales ont fort à faire en matière de formation. Depuis 2005, le centre de gestion et le centre national de la fonction publique territoriale œuvrent pour la construction des parcours professionnels et accompagnent les différents projets structurants dans leurs domaines respectifs.

Une coopération de longue date renforcée par la loi du 6 août 2019, relative à la transformation de la fonction publique, et formalisée ce mercredi 15 septembre par la signature d’une convention pour une durée de trois ans. « Une collaboration certes obligatoire, mais surtout voulue et désirée pour mettre en place des actions territoriales locales et ciblées », affirme Ambdilwahedou Soumaïla, le maire de Mamoudzou et le délégué du centre national de la fonction publique territoriale. Une appréciation du goût de son voisin, Youssouf Ambdi, le premier magistrat de Ouangani et le président du centre de gestion de Mayotte. « Aujourd’hui, c’est en toute cohérence que nos deux établissements unissent leurs forces afin d’être lisibles au sein de nos instances délibérantes, mais aussi auprès des différents partenaires institutionnels auxquels nous devons rendre compte de nos actions. »

Six axes prioritaires de travail

Marqué d’une pierre blanche, ce partenariat s’identifie autour de six axes prioritaires : l’organisation et la préparation des concours et examens professionnels ; le développement et la connaissance de l’emploi et des métiers territoriaux ; leur promotion sur le site Emploi territorial et dans le cadre des salons de l’emploi ; l’apprentissage ; l’appui aux collectivités et aux agents en matière d’évolution professionnelle et de reclassement ; le maintien des actions de mutualisation et de rapprochement en faveur des événements à forts enjeux. Illustration sur ce dernier point avec les rencontres interrégionales des DRH des collectivités de Mayotte et de La Réunion prévues les 28 et 29 octobre prochains sur l’île voisine.

Pour résumer, le CDG et le CNFPT travaillent de concert pour l’intégration des fonctionnaires territoriaux et à leur montée en compétences grâce à une offre de formation qui « répond aux grands enjeux et défis de notre département », précise Ambdilwahedou Soumaïla. Et qui se matérialise par un chiffre clé : 5.632 stagiaires accueillis en 2019 dans les 1.652 journées de formation organisées. Au fil des ans, « nous avons mis l’accent sur les compétences métiers des agents du secteur administratif, technique, social et de la sécurité ». Preuve en est avec la formation de plus 200 policiers municipaux, dont une bonne partie au port d’armes.

En ce contexte sanitaire « incertain », « nous devons rêver Mayotte dynamique et attractive. Nous devons rêver Mayotte tournée vers l’avenir », insiste le maire de la ville chef-lieu. En ayant toujours en tête un seul et même objectif : « améliorer la qualité du service public local », conclut Youssouf Ambdi. Reste maintenant à définir un cadre commun pour développer des actions spécifiques et dessiner le territoire de demain.

Violences à Miréréni/Combani : l’enseignement pris en étau

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Depuis plus d’une semaine, les violences entre Miréréni et Combani se retrouvent dans les établissements scolaires. Les personnels éducatifs du collège de Mroualé, dans la commune de Tsingoni, décident donc d’afficher des banderoles de contestation et de ralentir la progression pédagogique pour alerter et faire réagir les autorités locales. Une démarche qui ne passe pas auprès du recteur, Gilles Halbout.

« Notre but est d’alerter et de faire réagir les autorités. L’école est un droit pour tous, peu importe d’où l’on vient. » Au bout du combiné, Céline* ne sait plus sur quel pied danser pour voir revenir « les 10 ou 15 élèves absents dans chaque classe depuis huit jours ». L’enseignante au collège de Mroualé dans la commune de Tsingoni prépare une action coup de poing, avec « le soutien de la moitié du personnel éducatif », à partir de ce mercredi 15 septembre. Au programme : l’affichage de banderoles devant l’établissement scolaire et le ralentissement de la progression pédagogique.

Si Gilles Halbout comprend « l’émotion » et exprime sa « solidarité », le recteur ne cautionne absolument pas la démarche. « Nous n’allons pas pénaliser les élèves des voisins au prétexte que d’autres l’ont été… Ce n’est pas entendable ! C’est le jeu malsain de la revanche et de la punition collective. » En d’autres termes, le responsable de l’académie craint que ce procédé ne rajoute de l’huile sur le feu. « L’appliquer va simplement attiser les rivalités entre les uns et les autres. » À savoir celles qui gangrènent Miréréni et Combani depuis un an maintenant.

Un barrage aux lourdes conséquences

Une tension palpable matérialisée par l’installation d’un check-point filtrant entre les deux villages. Un choix qui s’explique pour une raison simple selon Fatima Ali, une habitante de Combani. « Le barrage tenu par les mamans est une manière d’exprimer leur ras-le-bol pour que les politiques prennent un engagement définitif. Plusieurs médiations entre adultes ont été tentées par le passé, mais aucune n’a fonctionné… » Et tant que la solution miracle n’aura pas été trouvée, pas question de lâcher du lest ! « Nous ne pouvons pas faire comme si de rien n’était. Nous voulons un calendrier d’actions. » Premier élément de réponse avec la mise en œuvre par le préfet de la loi Élan pour la destruction de quartiers informels. Reste encore à la maire de déposer un dossier pour identifier les parcelles concernées.

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Sauf que l’accord des opérations de démolition n’empêche pas les répercussions éducatives de cette frontière imaginaire. « Aucun élève n’a été contraint de rebrousser chemin », assure Fatima Ali. Balivernes pour Céline, qui ne manque pas d’exemples pour contredire cette affirmation. « Ceux à la limite de Miréréni et de Combani mais aussi ceux de Tsingoni ne peuvent pas se rendre dans leurs établissements scolaires. Ce n’est pas la peur qui les empêche, mais les refus intempestifs. » Pis encore : « Deux collègues ont été caillassés parce qu’ils viennent de Vahibé. D’autres qui habitent près de cette zone de guerre sont choqués car ils ne peuvent pas rentrer chez eux tranquillement. »

« Scandaleux ! »

Dans ces conditions, le recteur demande que « les parents irresponsables se prennent en main ». « Tout ce qui empêche les enfants d’aller à l’école est scandaleux ! », persiste et signe Gilles Halbout, agacé par ces blocages incessants aux quatre coins de l’île, à l’instar de celui d’Handréma la semaine dernière. Ainsi, le responsable de l’académie promet « des moyens supplémentaires, quoi qu’il en coûte, pour rattraper le retard accumulé. » En attendant un éventuel retour au calme, les écoliers de Miréréni peuvent déjà bénéficier d’une cellule psychologique depuis vendredi dernier « pour les aider à avancer ». Au vu de leurs dessins (des maisons en feu et des gamins en sang), le mal semble bel et bien profond… « C’est perturbant, vraiment ! », admet-t-il la gorge nouée. Pour ne pas arriver à un tel point de non-retour, les enseignants du collège de Mroualé comptent bien aller au bout de leur initiative, voire même durcir le mouvement en cas de statu quo. « Nous essayons juste de protéger les enfants et d’assurer l’éducation pour tous. »

* le prénom a été modifié

Vaccination obligatoire des soignants à Mayotte : face aux réticences, le CHM joue les prolongations

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Au niveau national, l’obligation de se faire vacciner contre le Covid-19 entre en vigueur ce mercredi 15 septembre. Alors que 88% des personnels ont reçu au moins une dose en France, à Mayotte comme ailleurs, des doutes subsistent dans les rangs de certains professionnels.

C’est le jour J. À partir de ce mercredi 15 septembre, les soignants doivent se plier à l’obligation vaccinale, sauf contre-indication médicale. Plus précisément, comme le dispose la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise, les personnels des secteurs sanitaire et médico-social peuvent continuer à exercer leurs activités professionnelles s’ils justifient de l’administration d’au moins une dose pour les vaccins à double-injection, sous réserve d’un test négatif toutes les 72h jusqu’à disposer d’un schéma vaccinal complet, dont la date butoire a été fixée au 15 octobre. D’après le dernier bulletin de Santé Publique France, 88% des personnels soignants salariés en établissements de santé faisaient partie de ce premier cas de figure, en date du 7 septembre.

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Problème : à Mayotte, la part des soignants non-vaccinés pourrait bien être un peu plus élevée. “Au CHM, il y a encore quelques réticences, je pense qu’on doit avoir peut-être 30% qui ne sont pas vaccinés”, chiffre à la louche Abdoul-Wassion Arkaddine, représentant syndical Force Ouvrière au centre hospitalier. Contacté, l’hôpital n’a pas de données à communiquer à l’heure où nous écrivons ces lignes. “Ce sont des informations médicales auxquelles nous n’avons pas accès, néanmoins toute personne vaccinée doit faire remonter son certificat au niveau de la médecine du travail, nous en saurons plus à ce moment-là”, nous explique-t-on.

Passe sanitaire ou salaire ?

Selon la loi, les professionnels qui ne pourront pas présenter de preuve vaccinale seront suspendus, sans salaire. “La suspension dure tant que l’agent ne remplit pas les conditions nécessaires à l’exercice de son activité”, précise le ministère des Solidarités et de la Santé. Mais, pédagogie oblige, la règle semble avoir été légèrement adoucie pour les soignants de l’île aux parfums. Ainsi, dès ce mercredi, seront en réalité contrôlés les passes sanitaires, avec les trois options habituelles : soit la vaccination, soit un test antigénique ou PCR de moins de 72h, soit un certificat de rétablissement. Sans l’une de ces trois conditions, le salarié pourra se voir proposer de prendre des congés, ou bien, s’il n’en dispose plus, une suspension de salaire risquera de s’appliquer.

Un dispositif qui fait déjà grincer quelques dents, malgré le laps de temps accordé. “Dès le départ, nous tenions à ce que le vaccin ne soit pas imposé aux personnels à Mayotte, c’est pourquoi nous avons proposé à la direction lors d’une réunion du CHSCT (comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail), un protocole de mise en œuvre du passe sanitaire”, retrace Mouayad Madjidi, le délégué syndical SUD Santé Sociaux au CHM. “Or, ce protocole prévoyait un temps de pédagogie et d’organisation, à savoir deux semaines pour essayer la méthodologie à mettre en place, chose que nous n’avons pas pu faire aujourd’hui”, regrette le syndicaliste. Son organisation avait également demandé le recrutement d’aide-soignants supplémentaires pour contrôler les passes à l’entrée et ne pas “puiser sur des effectifs insuffisants”. Enfin, un suivi des personnes vaccinées devait être assuré par la médecine du travail. “Ceux qui se sont fait vacciner sont ceux qui voulaient voyager. Mais il y a une majorité pour qui ce n’est pas le cas : et ils ne veulent pas recevoir le vaccin, car ils ne connaissent pas leur état de santé.

“J’ai trouvé que c’était du chantage”

Or, dans les couloirs, le bouche-à-oreille va bon train pour rapporter les histoires des collègues ayant développé des effets secondaires après l’injection. “J’ai des témoignages qui font état d’effets récurrents et invalidants pour aller travailler, il y en a qui ont des problèmes musculaires et se fatiguent très vite… Et on ne peut pas les relater car il ne faut surtout pas dire que c’est lié au vaccin !”, s’inquiète ainsi une soignante, qui préfère garder l’anonymat.

Elle n’a pas encore reçu sa première dose. Mais plutôt par conviction que par crainte de symptômes indésirables, insiste-t-elle. “J’étais partie pour me faire vacciner. Mais le jour où le président a déclaré que c’était obligatoire, j’ai trouvé que c’était du chantage. Quand on était positif au Covid, on nous obligeait à aller travailler, parfois avec un seul masque pour toute la journée et maintenant qu’on a des vaccins en grande quantité, c’est obligatoire ?”, s’agace-t-elle. Ce mercredi, pour rejoindre son poste, l’infirmière ira faire un test antigénique. Même si elle sait que la porte se refermera inexorablement. “Personnellement, je suis prête à rester cinq mois sans salaire s’il le faut. Mais si je me retrouve toute seule, je vais devoir jeter les armes. Sans qu’on sache après vers qui se tourner en cas de souci. C’est dommage d’en arriver là”, soupire-t-elle.

“On est très divisés sur le vaccin. Mais si ça peut sauver la vie d’une personne ?”

Il n’a pas pu souffler sur ses cinquante bougies. Frappé par le Covid-19 en début d’année, à la veille de son anniversaire, Abdoul-Wassion Arkaddine tente aujourd’hui de sensibiliser les personnes autour de lui à la vaccination. “Je suis passé à un stade très très complexe dans mon existence, et je me rappellerai de mes cinquante ans pendant plusieurs années”, souffle ce régulateur au bloc opératoire qui a été hospitalisé pendant dix jours en février. “À côté de moi, il y avait ce monsieur qui était allongé sur le ventre, de la même manière que moi. Le temps qu’on m’amène au scanner et de revenir, il était décédé. Cette image m’a choqué”, se remémore-il, encore glacé par ce souvenir. Toujours marqué par les séquelles de cette infection, le soignant n’a pas attendu le 15 septembre pour se faire vacciner. “J’y suis allé dès que j’ai pu, de mon propre chef. Et avant cela, j’ai conseillé à mes parents qui sont âgés de le faire : je leur ai dit ‘‘moi là où je suis passé, c’était pas évident à mon âge, alors imaginez, vous !’’. Maintenant dès que j’ai la possibilité autour de moi, je conseille aux gens, j’ai même accompagné quelqu’un qui avait la phobie, pour qu’elle accepte”, déroule Abdoul-Wassion Arkaddine. Alors que l’obligation vaccinale doit entrer en vigueur pour les soignants, le syndicaliste déplore le climat de doute qui règne encore dans les services. La faute, selon lui, des réseaux sociaux, des vidéos qui circulent et “de toutes ces histoires que les gens ont pris pour argent comptant”. “Les scientifiques expliquent en se basant sur les chiffres, sur des études. Mais le citoyen lambda lui, quand il va expliquer que untel habitait là et qu’il est décédé après son injection, les gens ont plus peur”, analyse-t-il. Signe que ces clivages persistent bel et bien, le débat s’est invité jusque dans les réunions du CHSCT. “Dans les commissions, on est très divisés sur le vaccin. Moi je dis à mes camarades, si vous ne voulez pas vous faire vacciner, ne faites pas de la propagande dans les médias, c’est criminel ! Si ça peut sauver la vie d’une personne ? Même si une personne vaccinée attrape la maladie: si ce n’est pas la forme la plus virulente, c’est tant mieux”, conclut-il.

Les chauffeurs de bus de Mayotte reprennent le volant, sous certaines conditions

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Depuis lundi, les conducteurs de bus refusent de se mettre derrière leurs volants tant qu’ils n’ont pas la garantie d’être en sécurité. Au terme de nouvelles négociations acharnées, la sortie de crise est envisagée, mais sous certaines conditions.

L’heure n’est toujours pas à la rigolade pour les chauffeurs de bus. Après une première réunion ce lundi entre les représentants du personnel, les transporteurs et les élus du Département, bis repetita ce mardi. L’objectif du jour ? Essayer de trouver une sortie de crise pérenne. En vain. Malgré 1h30 de pourparlers, la position des conducteurs reste inchangée, avec le maintien du droit de retrait débuté la veille. Au grand dam de la collectivité qui pensait avoir pourtant trouvé des solutions satisfaisantes pour tous. « Vous ne voulez pas signer, donc vous nous affaiblissez. Nous comprenons votre souffrance, mais nous devons nous appuyer pour aller de l’avant », déclare d’une voix agacée Abdoul Kamardine, conseiller départemental de M’tsamboro. Mais pour les syndicats, il est hors de question d’aller de l’avant sans la certitude d’être en sécurité sur les routes.

Les organisations syndicales regrettent l’absence de l’État autour de la table des négociations ce mardi. Ils souhaitent attendre l’ultime réunion avec la préfecture, prévue ce mercredi, pour prendre une décision définitive. Las d’attendre, les élus du Département décident d’appeler le préfet en direct pour que ce dernier apporte son lot de garanties. Après plus de trois heures de discussion et l’intervention du délégué du gouvernement, les syndicats acceptent finalement de reprendre le travail, à une seule condition : la présence dès l’aube des forces de l’ordre sur les zones sensibles avant le passage des bus. En cas d’absence, les chauffeurs promettent de faire marche arrière…

Comme un air de déjà vu

Commencées ce lundi, les négociations avec les transporteurs et les chauffeurs de bus mettent surtout en lumière une ribambelle d’anciennes mesures. En effet, les élus du Département proposent la mise en place de film anti-caillassage sur les vitres, d’un dispositif de géolocalisation et de caméras de vidéoprotection dans tous les véhicules. Mais aussi le déploiement de 30 médiateurs dans les zones dites à risques, la reprise des parents relais, la révision de plan de transport pour que les élèves de Koungou ne passent pas par Majicavo, une patrouille de sécurité avant chaque mise en service des transports scolaires, matin et soir, ou encore les fouilles systématiques dans les sacs des élèves par les policiers et les gendarmes.

Des mesures déjà inscrites pour la plupart dans le protocole de sortie de crise de novembre 2020. Que la présidente de l’union départementale de la confédération syndicale des familles (UDCSF) n’hésite pas à rappeler. « Tout ce que vous proposez a déjà été dit précédemment et il n’y a pas eu d’engagement. Nous voulons vous faire confiance, mais vous devez mettre en place ces mesures », insiste-t-elle, appuyée par les chauffeurs de bus. Et si certaines d’entre elles sont déjà appliquées, leur efficacité laisse encore à désirer, comme en témoigne Yasmina Mabouroukou, membre du conseil syndical UI-CFDT. « Les bus caillassés vendredi étaient équipés de film anti-caillassage et pourtant, les vitres se sont brisées. » En réalité, les vitres brisées sont celles qui n’ont pas été filmées puisqu’il est interdit de recouvrir l’ensemble des vitres, pour des raisons de sécurité !

« Ce n’est pas la meilleure des solutions, mais nous n’avons pas mieux », prévient le représentant du groupe Matis. Suffisant pour convaincre le 1er vice-président du Département, Salime Mdéré, qui annonce la mise en place « immédiate » de cette mesure urgentissime. Alors que les autres « prendront plus de temps ». Un choix stratégique refusé par la présidente de l’UDCSF et les syndicats qui exigent de la « présence humaine » dans les véhicules pour que les chauffeurs et les élèves affichent davantage de sérénité.

« Trop d’engagements ont été pris »

Les représentants des parents d’élèves, les transporteurs et les conducteurs ont tous l’impression de revivre la même situation. En novembre 2020, les chauffeurs avaient entamé une grève illimitée à la suite d’agressions répétées. La grève de trois jours avait fini par trouver une issue favorable, cosignée par le Département, la préfecture, le rectorat, les transporteurs et les syndicats. Si les professionnels pensaient avoir trouvé des solutions sur le long terme, force est de constater que la situation s’est dégradée quelques mois plus tard… Conséquence : élèves et chauffeurs se sentent de moins en moins en sécurité ! « Le problème c’est que chacun travaille dans son coin et il n’y a pas de suivi », dénonce Anli Djoumoi Siaka, secrétaire général FO Transport logistique UNCP Mayotte.

Les nouveaux élus l’admettent, tout n’a pas pu être mis en place, car « trop d’engagements ont été pris », selon Abdoul Kamardine, le conseiller départemental de M’tsamboro. Pour le groupe Matis, le problème réside ailleurs. « Nous essayons de mettre des gilets par balle à nos enfants et aux chauffeurs alors que nous devrions retirer l’arme aux agresseurs », estime amèrement le représentant de l’entreprise. Et si finalement c’était cela la vraie solution ?

Violences à Miréréni-Combani : « Nous nous demandons si nous vivons en France ou en Afghanistan »

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Depuis un an, les habitants de Miréréni et de Combani ne dorment plus sur leurs deux oreilles et se renvoient constamment la balle face aux actes de violence qui gangrènent les deux villages. Malgré plusieurs tentatives d’apaisement, les pouvoirs publics semblent totalement dépassés par les événements. Au point que la population demande la démission du maire de Tsingoni, Mohamed Bacar.

C’est un énième cri de désespoir que pousse Anziza. « Ce qu’il se passe entre Miréréni et Combani n’est pas un simple fait de délinquance comme on pourrait l’entendre ici et là. » Depuis plus d’un an maintenant, pas un jour ne passe, ou presque, sans que les deux villages ne défraient la chronique. Et que les annonces institutionnelles se multiplient. Mise en place d’un couvre-feu pour interdire la circulation des mineurs la nuit, organisation d’un tournoi de football entre les jeunes pour atténuer les tensions, rencontres d’apaisement et de médiation chez le doyen Rama, à la Maison France Service (pas plus tard que vendredi), à la MJC de Miréréni ou encore à l’école primaire… En vain ! Aucune proposition concrète n’apporte de solutions durables face aux barrages intempestifs et aux actes de violence devenus monnaie courante.

Interrogé sur cette situation inqualifiable, le maire de Tsingoni, Mohamed Bacar, adresse un simple copier-coller de son message posté sur les réseaux sociaux dimanche matin. « La municipalité que je conduis a tout fait pour ramener le calme et la raison, mais ces délinquants ont refusé. […] Nous savons que des adultes, d’un côté comme de l’autre, prennent part à ces conflits et [les] considèrent comme des héros. Ces personnes leur apportent assistance et matériel. » Malgré l’instauration, sur ordre du préfet Thierry Suquet, le 6 septembre dernier, d’un dispositif de sécurité avec la gendarmerie nationale qui a pour objectif d’éviter les drames et d’intervenir rapidement en cas de troubles à l’ordre public, les incivilités continuent encore et encore. « Samedi, ils sont allés exprès à Kahani pour cramer les camions d’un entrepreneur du BTP qui vit à Miréréni », témoigne, sidéré, un habitant qui souhaite garder son anonymat pour des raisons évidentes.

« Le mépris institutionnalisé »

Pis encore, pour traverser Combani, il faut tout simplement présenter sa carte d’identité, sous l’œil des forces de l’ordre. Et en cas de refus ? C’est la fouille du véhicule… Pour s’assurer que des élèves ne se cachent pas dans l’habitacle. « Nous nous demandons si nous vivons en France ou en Afghanistan », s’interroge Anziza. Avant de dénoncer « le mépris institutionnalisé qui règne dans cette commune depuis toujours ». À ses yeux, la population de Miréréni se retrouve paralysée et asphyxiée dans l’optique de maintenir un semblant de vie économique de l’autre côté du pont. « J’ai toujours cru que les gendarmes étaient là pour faire régner l’ordre public, la libre circulation des personnes. Est-ce un mauvais rêve ou un cauchemar ? Je travaille, je paie mes impôts locaux et nationaux pour accepter ça ? Je tiens juste à leur rappeler qu’ils citaient nos jeunes en exemple il y a de cela un an. Aujourd’hui, ils les traitent comme des criminels et des assaillants. »

En guise de bonne foi, Mohamed Bacar assure à nouveau avoir transmis en décembre 2020 la liste des fauteurs de troubles, des marchands de sommeil, et autres financeurs de cette délinquance, au procureur de la République, comme il l’avait fait remarquer en avril dernier. Mais visiblement, le tour de force n’a pas eu l’effet escompté. « Des gens payent des sommes considérables pour faire venir des jeunes de l’extérieur de la commune et semer la terreur », se révolte encore le citoyen. Face à ces constats répétés, une pétition circule depuis quelques heures sur la toile pour exiger la démission de la majorité et de l’opposition du conseil municipal. Une revendication appuyée par le Collectif Mayotte en Sousfrance. « Nous ne lâcherons pas, la liberté, la dignité et le respect sont des droits fondamentaux pour tout être humain. Nous vivons dans le pays de la déclaration des droits de l’Homme. Le temps où les Combaniens pouvaient venir foutre le bordel chez nous est révolu », prévient Anziza, prête à défendre l’honneur de son village, « quoi qu’il en coûte ». Pendant ce temps, les représentants de l’État dénoncent. Encore et toujours…

Dix jeunes mahorais s’envolent pour être formés en tant que steward et hôtesse de l’air

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Ils sont dix. Huit filles et deux garçons mahorais sélectionnés par Ewa Air ont l’opportunité de se former en tant que steward et hôtesse de l’air. Une formation totalement prise en charge par la compagnie aérienne et ses partenaires, le conseil départemental, Pôle emploi, LADOM et ACTO. Les stagiaires ont décollé le dimanche 12 septembre pour une formation intensive de deux mois en région parisienne.

Habillés en rouge et noir avec un foulard « ylang-ylang » pour rappeler les couleurs de Mayotte, les stagiaires sélectionnés par Ewa Air, huit filles et deux garçons, ont décollé dimanche dernier pour Paris. Ils sont partis se former en tant que personnel navigant commercial au centre interlines des Guyards, près d’Orly en région parisienne. Si le projet a été rendu possible, c’est notamment grâce à Ewa Air et ses partenaires qui prennent en charge la totalité de la formation, ainsi que les charges annexes telles que l’hébergement ou encore le transport. « Nous voulons que toutes les chances soient de votre côté, que vous n’ayez aucun souci et que vous puissiez vous concentrer sur votre formation », a expliqué Daoud Saindou-Malidé, le sixième vice-président du conseil départemental chargé de la formation professionnelle, de l’éducation et de l’insertion.

À la clé, ils peuvent décrocher le certificat de membre d’équipage de cabine, appelé « Cabin Crew Attestation » (CCA). Il permettra aux diplômés d’exercer en tant qu’hôtesse de l’air ou steward dans n’importe quelle compagnie nationale et internationale. Mais pour l’avoir, les dix Mahorais devront se soumettre à deux mois de formation intensive, à l’issue desquels deux examens théoriques et pratiques valideront ou pas l’obtention du diplôme. Il s’agit là d’une « formation de qualité », a rappelé Ayub Ingar, le directeur d’Ewa Air. Et les places sont chers. Au départ, 25 candidats ont postulé, ils ont été soumis à un test de culture générale puis ensuite, à une phase d’entretien. Dix ont réussi à passer cette étape cruciale. « C’est l’entretien qui a été déterminant, car nous avons vu la motivation de ces jeunes… Ceux sélectionnés ont un très bon niveau, mais je ne suis pas étonné, cela prouve qu’à Mayotte il y a de la compétence », a indiqué le directeur de la compagnie aérienne.

Obligation de réussir

Les heureux élus ont écouté attentivement les discours des différents partenaires, et désormais ils savent qu’ils n’ont pas le droit d’échouer. « Il faut que nous ayons 100% de réussite, nous attendons de vous que vous réussissiez », leur a lancé le vice-président du conseil départemental. « Vous avez intérêt à revenir avec le fameux sésame en poche ! », a surenchéri Ayub Ingar. Malgré la pression, les principaux concernés ont commencé cette nouvelle aventure l’esprit serein. « J’estime que j’ai déjà obtenu la formation. J’ai juste hâte de voler de mes propres ailes », a assuré Hafdhoiti, l’une des stagiaires. Cette dernière est partie confiante puisqu’il s’agit pour elle d’un projet de longue date. « Cela fait déjà très longtemps que j’ai envie de faire cette formation. Il y a quatre mois, j’ai demandé des aides à LADOM pour pouvoir financer la formation, mais ça n’a pas abouti », a-t-elle indiqué. Alors lorsqu’Ewa Air a lancé sa campagne de recrutement, la jeune femme de 25 ans a sauté sur l’occasion. Elle n’est pas la seule à être aussi déterminée. L’un de ses camarades, Yacoub, a réalisé un rêve d’enfant. « C’est un métier que j’ai toujours voulu faire depuis que j’ai neuf ans. J’aime le fait de beaucoup voyager, de découvrir de nouvelles personnes, de nouveaux horizons et de nouvelles cultures. Je suis prêt, en réalité je suis prêt depuis très longtemps », a affirmé le jeune homme de 21 ans.

Tous sont particulièrement motivés, car ils savent que le diplôme qu’ils obtiendront leur garantira un emploi au sein d’Ewa Air. Le directeur de la compagnie a promis d’embaucher tous ceux qui réussiront les examens. Une décision qui s’inscrit dans sa politique de recrutement puisque son personnel navigant est 100% mahorais. Mais Ayub Ingar veut aller encore plus loin. « Il y a une multitude de métiers dans l’aérien. À Mayotte, la population est jeune, c’est un bon réservoir, il faut juste qu’ils aient confiance en eux. Nous pouvons former des pilotes, des mécaniciens, etc. Et les filles aussi peuvent faire ces métiers », a-t-il insisté. Mais pour l’heure, Ewa Air et ses partenaires restent concentrés sur ces dix jeunes en formation qui doivent prouver qu’ils sont les meilleurs en relevant le challenge.

Mayotte Hebdo de la semaine

Mayotte Hebdo n°1116

Le journal des jeunes