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Départ du président de Yes We Can Nette : « Chacun peut jouer un rôle, en mode colibri ou en mode mastodonte »

Laurent Beaumont, président et fondateur de Yes We Cannette a tiré sa révérence, 5 ans après la création de l’épicerie solidaire qui propose aux familles aux revenus modestes d’obtenir des denrées alimentaires en échange de canettes ramassées dans les rues. Il revient sur le chemin parcouru, les objectifs atteints et l’association. Entretien.

 

Flash Infos : L’association a été créée il y a 5 ans, en partant du constat qu’il fallait préserver l’environnement de Mayotte. Quel bilan faites-vous de l’action de Yes We Can Nette ?

 

Laurent Beaumont : Début 2016, lorsque l’association a été fondée, la situation environnementale était alarmante. En 2020, elle l’est tout autant. Notre seule satisfaction à ce jour est d’avoir fait bouger les lignes sur le sujet en démontrant qu’il préoccupait tout le monde et que chacun peut jouer un rôle sur la question, en mode colibri ou en mode mastodonte. Des deux catégories, ce sont surtout les colibris qui se remuent aujourd’hui.

 

FI : Comment était né le concept de l’association ? Pouvez-vous rappeler comment elle fonctionne ?

 

L. B. : Cela peut surprendre mais Yes We Can Nette est un vrai conte de fée associatif ! Il était une fois, quatre copains autour d’une table qui se sont dits « et si « … et puis tout a commencé. Notre concept est né de l’observation que certaines associations s’épuisaient à nettoyer certains sites, dans un cycle sans fin… C’était un peu le tonneau des Danaïdes qui ne se vidait jamais. Sitôt nettoyés, les sites étaient à nouveau pollués par d’autres personnes. Cela va peut-être surprendre mais la vocation de Yes We Can Nette n’est pas de ramasser des canettes, ni autres choses d’ailleurs, mais de créer une démarche dans laquelle chaque acteur, chaque citoyen, chaque habitant prend ses responsabilités dans son cadre de vie environnemental. L’idée d’une contrepartie « sociale » via une alimentation moins chère ne doit pas faire oublier que beaucoup de citoyens apportent des canettes à l’association sans rien demander en retour. Ensuite, on s’est éloignés de la seule question des déchets, notamment en développant des laveries sociales. Aussi, aujourd’hui, notre démarche vise davantage à permettre à tous les citoyens d’être acteurs, vertueux et que la question sociale ne soit plus un obstacle.

 

 

FI : Les épiceries de M’Tsapéré et de Petite Terre ont fait l’objet de vols et d’actes de vandalisme. Cela a-t-il eu un impact sur votre engagement et votre décision de partir ? Et sur le moral des équipes de bénévoles ?

 

L. B. : Ma décision de quitter Mayotte repose sur des motivations familiales et personnelles, et n’est absolument pas liée à ces récentes exactions. Ces actes de vols et de vandalisme ont posé des difficultés en termes de fonctionnement pour les équipes techniques mais aussi pour les bénévoles.

On avait également perdu un véhicule en début d’année, entièrement ravagé par un acte de vandalisme totalement gratuit. Pour une petite association comme Yes We Can Nette, c’est une perte sèche, car nos moyens sont très limités. Voir son outil et son lieu de travail vandalisés est un vrai traumatisme pour les équipes engagées au quotidien sur leurs missions. La détermination de l’ensemble du conseil d’administration et de notre équipe technique n’a pas fléchi, bien au contraire. Les messages de solidarité de la part de nombreux militants nous ont fait chaud au cœur.

 

 

FI : Vous dites sur votre page Facebook que deux objectifs ont été atteints : changer les regards et les pratiques environnementales et prouver que la solution tient à la volonté de préserver l’île plutôt que “de faire de l’environnement un cynique secteur marchand”. Pouvez-vous expliquer ce que vous entendez par là ?

 

L. B. : On parle encore de Mayotte comme de l’île aux parfums. Mayotte est la fierté de ses habitants et nombre d’entre eux répondent présents pour lutter contre les agressions environnementales. Ils sont cependant impuissants lorsque des missions de service public ne sont pas assumées à la hauteur de ce que chaque citoyen est en droit d’attendre.

 

 

FI : Les problématiques des déchets et de la pollution restent très présentes à Mayotte. Sans action forte des autorités et des élus, l’action des associations peut-elle suffire face à l’ampleur des enjeux ?

 

L. B. : Mayotte s’est lancée dans une spectaculaire mutation à la fois économique et sociale qui s’accompagne de retombées environnementales très défavorables. Le secteur associatif joue un rôle clé dans la sensibilisation de toute la société mahoraise mais pendant longtemps on a opposé développement et environnement, et c’est là l’erreur à mon sens. Un engagement pragmatique de toutes les parties sur l’environnement ne pourra qu’être bénéfique pour tous les acteurs et sera source de retombées économiques et touristiques, mais surtout de sens pour une partie de la jeunesse locale qui cherche encore sa place sur notre île.

Mieux maîtriser sa consommation énergétique, le défi de Petite-Terre

La communauté de communes de Petite-Terre vient de lancer le programme Service local d’intervention pour la maîtrise de l’énergie. L’idée est d’accompagner les ménages en situation de précarité énergétique dans le but de leur apporter des solutions adaptées pour réaliser des économies.

Grande première à Mayotte. La communauté de communes de Petite-Terre lance le programme Service local d’intervention pour la maîtrise de l’énergie, qui rentre dans le cadre du plan climat air énergie territorial. « Ce dispositif est très pertinent en matière de précarité énergétique », souligne Tchico Afaya Souffou, chargé de mission au sein de l’intercommunalité. Pour qu’il soit efficace, encore faut-il repérer les foyers modestes éligibles… Et à ce petit jeu-là, il souhaite s’appuyer sur les donneurs d’alerte, à l’instar des centres communaux d’action sociale (CCAS), « sur qui nous comptons fortement » et EDM, pour dénicher les ménages. Et les places sont chères pour cette première année puisque seuls 150 chanceux pourront en bénéficier dès le mois de septembre !

S’ensuit alors la réalisation de deux visites à domicile pour réaliser un diagnostic socio-technique et apporter des conseils d’usage et comportementaux en lien avec la réalité du logement et des équipements. Cette prise de contact est aussi l’occasion d’offrir des petits équipements économes en énergie/eau. « Une fois conseillés, ils reçoivent un kit comprenant une ampoule et des réducteurs de débit. » Mais le nerf de la guerre se joue surtout à partir de l’étape suivante, c’est-à-dire après la phase orientation. C’est à ce moment-là que « des organismes compétents reprennent les dossiers pour chercher des financements pour eux ». Un accompagnement adapté et sur-mesure en fonction de la situation de chacun pour par exemple recourir au fonds de solidarité logement ou au fonds national des aides à la pierre. D’où la signature d’une convention de partenariat avec Soliha (Solidaires pour l’Habitat), qui a déjà fait ses preuves en métropole à ce sujet-là.

Si sur le papier ce nouvel outil peut sembler lourd d’un point de vue administratif, il peut permettre de réduire considérablement la voilure des habitations sélectionnées. La communauté de communes de Petite-Terre espère d’ailleurs donner des idées aux autres collectivités ou encore le voir se développer sur l’ensemble du département. En cinq ans de fonctionnement, le programme SLIME a permis de repérer, diagnostiquer et orienter plus de 18.000 ménages en France et d’investir plus de 17 millions d’euros dans la lutte contre la précarité énergétique.

 

* Pour plus d’information sur le dispositif, les foyers intéressés peuvent contacter la communauté de communes de Petite-Terre par e-mail à environnement@cc-petiteterre.fr ou au 02.69.80.77.00, poste PCAET.

Mouvement social à Mayotte : Le colonel Fabrice Terrien ne fait plus l’unanimité

Hier, lundi 24 août, les sapeurs-pompiers de Mayotte ont enclenché la grève du ras-le-bol. Du conseil départemental de Mamoudzou jusqu’au SDIS (service départemental d’incendie et de secours) de Kaweni, les secouristes ont manifesté envers et contre toutes les difficultés qu’ils rencontrent aussi bien dans leurs casernes que dans les lieux d’intervention. Au cœur de revendications ? L’insécurité et le départ imminent du colonel Fabrice Terrien, directeur de SDIS de Mayotte.

« La raison pour laquelle nous descendons dans les rues, c’est pour revendiquer le départ du directeur, le colonel Fabrice Terrien, mais aussi pour faire comprendre aux autorités compétentes que la vie des pompiers est en jeu », clame Colo Bouchourani, président du syndicat autonome FA/SPP-PATS Mayotte (fédération autonome des sapeurs-pompiers professionnels et des personnels administratifs et techniques spécialisés). « Nous sommes agressés, menacés matin, midi et soir. Avant, c’était dans les lieux d’intervention, maintenant c’est carrément dans nos casernes », raconte-t-il, rappelant au passage que certains de ses collègues ont été poignardés et caillassés.

« Ils attendent quoi ? Qu’un pompier trouve la mort pour qu’ils agissent ? », s’insurge le porte-parole du mouvement. Les soldats du feu veulent que leurs conditions de travail s’améliorent dans ce climat d’insécurité. « Nous demandons à ce que les pompiers aient des lieux de vie convenables, ce sont à l’heure actuelle des taudis. Nous voulons des caméras de surveillance et des murs qui sécurisent les sites au lieu des simples grillages comme à Kahani. Parfois même, c’est le néant comme à Pamandzi. »

Désormais, il n’est plus question d’exercer dans ces conditions sans que des mesures drastiques soient prises. « Ce n’est pas faute d’avoir prévenu. Nous avons envoyé des communiqués de presse aux élus et au préfet pour qu’une solution soit trouvée ». Selon le président du FA, après maintes relances, aucune mesure n’a été prise pour subvenir aux besoins des pompiers. « Mais le pire, c’est que derrière, nous sommes constamment harcelés par la direction », martèle-t-il. Une pression ne cesserait de prendre de l’ampleur depuis l’arrivée du directeur Fabrice Terrien, il y a maintenant « 1 an et 10 mois ».

« Terrien quitte les lieux ! »

C’est dans un élan de révolte que les pompiers arborent leurs pancartes « Terrien quitte les lieux ! » sous la chaleur du bitume. « Nous ne voulons plus continuer à travailler avec la direction actuelle parce qu’après quasiment 2 ans de silence, nous nous sommes rendu compte qu’il n’y a aucun désir de nous aider », assure Colo Bouchourani. « À part publier des clichés de nos casernes, les juger insalubres, critiquer nos compétences et notre hygiène de vie, il n’a rien fait. » Les secouristes dénoncent également un manque de considération et un mépris profond du colonel Terrien envers eux. Ahmed Allaoui Abdoul-Karim, président du SNSPP (syndicat national des sapeurs-pompiers), va plus loin et fustige directement la présidente du service, Moinaecha Soumaila : « Elle est politiquement irresponsable. Elle n’a aucune compétence pour gérer un service. C’est la marionnette du directeur. Dehors elle aussi ! »

Une réunion se tient ce matin à 8h entre le directeur de cabinet de la préfecture et les quatre représentants des syndicats, à Dzaoudzi. « Nous ne souhaitons ni y voir la présidente, ni le directeur », assène le président de la SNSPP. Si cette rencontre ne s’avère pas concluante, la grève se poursuivra avec une nouvelle stratégie. « Tous les jours, nous procèderons autrement », prévient le président du FA. « Nous engageons le bras de fer jusqu’à l’exécution de nos revendications. Nous sommes prêts à en tirer les conséquences », ajoute-t-il. Hier, le président a estimé le nombre de grévistes entre 150 et 200. Il assure ils seront plus nombreux aujourd’hui car la rentrée scolaire a réquisitionné quelques parents qui devaient répondre à leurs obligations. Pour rappel, chaque caserne a une équipe minimum prête à intervenir en cas d’urgence. « Nous sommes là pour l’intérêt et la sécurité de la population, nous ne les abandonnerons pas », rassure le chef du syndicat autonome.

À Mayotte, les secouristes crient au secours

Alors qu’un torrent de violence s’abat sur l’îe, les secouristes sont dans l’incapacité de ve-nir en aide à la population par peur des hostilités. Témoin malheureux de l’attaque perpé-trée à Combani envers les agents du SMUR, les pompiers et la gendarmerie, Nourddine Mkadara, nous plonge au coeur de cette nuit cauchemardesque qui hante désormais le corps médical mahorais. Du haut de ces 7 années d’expériences au SMUR (service mobile d’urgence et de réanimation) du centre hospitalier de Mayotte, l’ambulancier polyvalent de 40 ans nous livre les détails de l’intervention qui a failli lui coûter la vie.

Flash Info : Dans quelles conditions ont eu lieu l’agression ?

Nourddine Mkadara : C’était dans la nuit du samedi au dimanche 2 août, j’étais de garde. L’appel est déclenché à 1h du matin au sujet d’une agression à l’encontre de trois hommes dans le restau-rant « les artistes » à Combani. D’après les témoins, le passage à tabac résulte d’une pénurie de sandwich. Notre escouade, composée d’un médecin, d’une infirmière, et moi en tant que chauffeur, partait alors immédiatement à leur rescousse. Une fois sur place, les lieux étaient vides à cette heure tardive de la nuit, aucun danger n’était donc à présager. Dès lors, deux dames nous indi-quent l’emplacement des victimes. Avant que nous intervenions, j’ai souhaité faire une vérification des lieux afin de prévenir mes collègues en cas de danger. J’ai été le plus à même à le faire puisque j’habite le village.

Sur la scène du drame, c’était un bain de sang. Deux hommes ensanglantés, le premier assis sur une chaise, le second inconscient au sol et un autre avec des blessures mineures qui a pu rentrer chez lui. C’est à ce moment que je donne le feu vert à mon équipe pour initier les premiers soins. Cinq minutes plus tard, les gendarmes et deux VSAV (véhicule de secours et d’assistances aux victimes) arrivent. Logiquement, ils devaient être sur les lieux bien avant nous qui venions de Ma-moudzou puisque la caserne est à Kahani. Mais les pompiers avaient la consigne stricte de ne pas intervenir sans la brigade de la gendarmerie de Sada.

Il faut savoir que nous sommes des urgentistes non habilités à transporter des patients car notre véhicule est un 4X4 uniquement équipé du matériel médical. Une fois les blessés stabilisés, la prise en charge par les pompiers est enclenchée. Prêt à intervenir en cas de pépin, nous escor-tons les VSAV jusqu’au CHM.

À peine la première ambulance prête à partir, un bruit retentit. Des projectiles sont lancés en notre direction. Les assaillants, à visage découvert dans le premier acte, reviennent cette fois-ci cagou-lés, armés de pierres, de bâtons et de parpaings. Une dizaine de jeunes, âgé entre 12 et 15 ans. Ils saccagent le véhicule du SMUR et le second VSAV, le matériel médical détruit à même le sol. Le chauffeur est allé se réfugier au RSMA (régiment du service militaire adapté). Je suis resté im-puissant face à cette scène d’horreur. Gendarmes, pompiers et soignants, tous étions encerclés tout en étant caillassés. C’est à l’arrivée des renforts de la police municipale que les délinquants se sont enfuis. Bilan : le véhicule du SMUR est hors d’usage, idem pour celui de la gendarmerie.

FI : Quelle a été votre réaction à la suite de cet incident ?

N. M. : Le lendemain de l’incident, une réunion d’urgence s’est organisée entre le personnel soi-gnant, médecins, infirmiers, ambulanciers et l’équipe du SMUR. La direction en a été informée. Nous avons abordé la question des conditions de travail et l’absence de communication de la di-rectrice du CHM, Catherine Barbezieux.

J’ai demandé personnellement à la rencontrer, elle qui est restée muette vis-à-vis de ce drame alors même que les médias en parlent. Je souhaite pouvoir lui partager ces souvenirs horribles qui m’empêchent de dormir, qui sont les causes de mes cauchemars, de mon traumatisme. Et je ne suis pas le seul dans ce cas. Sollicitée depuis la réunion du 3 août jusqu’à présent, elle n’a tou-jours pas daigné nous recevoir.

FI : Quelles sont vos revendications à l’heure actuelle ?

N. M. : Dans un premier temps, il y a un sévère manque de moyen. Les de 4×4 du SMUR sont hors d’usage, nous avons un vieux minibus qui a été équipé de manière à pouvoir continuer à ai-der les Mahorais. Cependant, étant donné la qualité des routes dans l’ensemble de l’île, il y a des zones inaccessibles dans lesquelles il est impossible d’intervenir. Donc nous voulons déjà les moyens d’être opérationnels. Ensuite, nous avons demandé à ce qu’il y ait les forces de l’ordre lors de chaque intervention afin de travailler en toute sérénité car il est inconcevable de se faire agres-ser dans l’exercice de notre fonction. C’est malheureux parce que dans ce métier, le temps sauve des vies. Dorénavant, il va falloir attendre que la zone soit sécurisée pour agir.

FI : Comment est l’atmosphère au sein du personnel hospitalier ?

N. M. : Sincèrement ? La peur règne ! Dès qu’un appel est dirigé vers nous, le premier réflexe est de s’informer sur le lieu. Tout le territoire représentant un risque, nous prenons notre courage à deux mains et nous lançons les gyrophares. Cependant, quand l’intervention fait suite à une agres-sion, nous faisons volte-face. Les sonneries du téléphone provoquent désormais une panique to-tale dans nos rangs. Malgré tout, nous sommes obligés de faire notre boulot, car les gens ont be-soin de notre aide. Il est hors de question d’abandonner la population. Des vies sont en jeu.

Transport scolaire à Mayotte : une rentrée des classes sans bus ?

La situation est au point mort. Le conseil départemental et les chauffeurs de bus scolaire n’ont toujours pas trouvé de terrain d’entente. Coincés entre un cadre administratif flou et la peur de perdre leurs emplois, les 80 conducteurs de Matis ont annoncé ne pas rouler pour la rentrée.

Dimanche 23 août, la rentrée est demain. Mais les chauffeurs de bus, eux, ont prévu de ne pas répondre présents. À défaut d’un accord conclu à temps avec la collectivité, les 80 conducteurs de la société Matis, délégataire de service public, maintiennent leur mouvement de grève illimité annoncé le mois dernier. En d’autres termes, à l’heure où nous bouclons cette édition, les bus ne devraient pas rouler pour la rentrée. Mais à l’échelle du département, un élève sur deux utilise les transports dans le second degré.

Pourtant jeudi soir, élus et représentants syndicaux s’étaient rencontrés pour tenter de clarifier la situation. En vain. D’abord, les chauffeurs de bus réclament depuis plusieurs semaines que le Département s’engage à les transférer automatiquement à la nouvelle entreprise délégataire, et ce en maintenant leurs acquis antérieurs comme le treizième mois ou la prime d’ancienneté. Une clause en vigueur depuis 2010, mais effacé sans sommation du récent appel d’offre de marché public de transport scolaire. Une situation sur laquelle se prononcera le tribunal administratif mardi, après avoir été saisi en référé par la direction de Matis.

La même stratégie qu’en 2018 ?

Et si le conseil départemental cherche repreneur, c’est parce que son contrat passé avec l’entreprise réunionnaise a expiré… au 31 juillet dernier. Et aucun autre nouveau marché n’a été passé. Seule solution envisageable à ce stade : la signature d’une convention de gestion provisoire, qui permettrait d’apporter un cadre juridique en attendant qu’aboutisse l’appel d’offre en cours. Mais selon Anli Djoumoi Siaka, secrétaire général de FO Transport, le Département n’a, en l’état, « rien à proposer ». « Ils se foutent de notre gueule », tempêtait-il au sorti des négociations. « Nous, on ne roulera pas, et s’il faut que ça dure un, deux ou trois mois, ça durera un, deux ou trois mois ! » Autre problème de taille, si les chauffeurs prennent la route sans que ne soit conclu ladite convention, ils ne seront pas assurés en cas d’accident, à l’image des jets de pierre dont sont régulièrement victimes les chauffeurs de bus.

À ce stade, la paralysie de la situation n’est pas sans rappeler le conflit qui opposait le conseil départemental et les chauffeurs de Matis en 2018, suite à la réorganisation du marché du transport. Les bus avaient alors bloqué toutes les voies d’accès routier au Département. Une nouvelle opération escargot est-elle cette fois envisagée ? « Pas pour l’instant », rassure tout de même Siaka.

Mayotte : tout ce qu’il faut savoir sur la rentrée exceptionnelle de 2020

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Alors que les syndicats des enseignants et les associations des parents d’élèves manifestent leurs craintes sur les conditions d’accueil de la rentrée 2020, le recteur de Mayotte se veut rassurant. La majorité des établissements du primaire et du secondaire seraient prêts à recevoir élèves et professeurs. Mais tous le savent, cette rentrée ne rendra pas de copie sans fautes.

C’est le jour J pour les élèves mahorais. À partir de ce lundi 24 août, ils retrouvent progressivement les bancs de l’école. Des écoles qui sont censées respecter les règles du nouveau protocole sanitaire de l’Éducation nationale. Celui-ci a été allégé, au grand dam des enseignants qui redoutent une recrudescence des cas positifs à la Covid-19 pour cette rentrée. Certaines règles ne seront plus de mise, notamment la fameuse distanciation physique. Dans les espaces clos, « elle n’est plus obligatoire lorsqu’elle n’est pas matériellement possible ou qu’elle ne permet pas d’accueillir la totalité des élèves », précise le protocole sanitaire. À l’extérieur, elle ne s’applique pas du tout. On pourrait croire que cet allègement a été pensé pour les établissements en sureffectif, à l’image de ceux de l’île. Les groupes de 10 à 15 élèves ne seront donc plus de rigueur, mais les enfants de plus de 11 ans devront porter un masque. Les professeurs aussi y sont contraints, sauf ceux des écoles maternelles et s’ils arrivent à garder une distance d’au moins un mètre. « Les personnels de l’Éducation nationale recevront des masques et du gel hydroalcoolique sera à disposition dans tous les établissements », annonce le recteur Gilles Halbout. Les élèves qui n’en n’ont pas pourront en bénéficier, mais « il appartient aux parents de fournir les masques à leurs enfants », rappelle le protocole sanitaire.

Des travaux en cours

Le plus gros enjeu de cette rentrée est probablement la mise aux normes des établissements scolaires pour assurer la sécurité sanitaire de tous. Pour cela, des travaux ont été entamés pendant les vacances scolaires et même bien avant pour certains. Un cabinet d’architecte a été mandaté par le rectorat de Mayotte pour aider les communes à faire l’état des lieux de leurs écoles et donner des directives pour les rénovations. Pour l’heure, il reste encore beaucoup à faire. « Les préconisations à court terme ont été suivies et tout est prêt. Les plus gros travaux sont lancés pour finir d’ici deux mois, mais ils n’empêcheront pas la rentrée », avance le recteur. Une affirmation à relativiser puisque plusieurs écoles ont d’ores et déjà annoncé le report de la rentrée à la semaine prochaine à cause de travaux non finis. Ces retards auraient-ils pu être évités si tous les établissements avaient rouvert au mois de mai ? Selon Gilles Halbout, « les collèges et lycées qui avaient ouvert en période de forte pandémie sont encore plus prêts maintenant. C’est la raison pour laquelle on voulait que les cours reprennent avant les vacances, c’était pour s’apprêter pour la rentrée ».

La sécurité au centre de tout

Les récents épisodes de violence qui se sont répétés sur l’ensemble du territoire et notamment à Majicavo et à Kawéni ne rassurent pas les parents d’élèves. « Au lycée Mamoudzou Nord, il y a beaucoup d’élèves qui viennent de la commune de Koungou, il ne faudrait pas qu’ils se retrouvent piégés par négligence des autorités », avertit Haïdar Attoumani Said, co-président de la FCPE (association de parents d’élèves). À ce sujet le recteur est clair, il n’est pas question de mettre un escadron de gendarmerie devant chaque établissement. Cependant, « on va adapter la présence de la gendarmerie et de la police en fonction de l’actualité. Les forces de l’ordre doivent nous dire quels sont les zones de tension et on aura des renforts », informe-t-il. La présence des équipes mobiles de sécurité (EMS) de l’Éducation nationale sera par ailleurs renforcée aux abords des établissements scolaires et sur les lieux de passage des bus. Les agents seront équipés de matraques, une nouveauté pour eux. Il ne reste plus qu’à espérer qu’ils n’auront pas à les utiliser…

Enfermer les jeunes criminels, le souhait d’Ambdilwahedou Soumaila, maire de Mamoudzou

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Une semaine après les violents affrontements qui ont secoué les communes de Mamoudzou et de Koungou pendant quatre jours, le nouveau maire de la ville chef-lieu, Ambdilwahedou Soumaila revient pour Flash Infos sur la gestion de cet événement mais aussi sur les solutions futures et pérennes pour apaiser les tensions. Selon lui, il est indispensable de pourvoir mettre derrière les barreaux les mineurs coupables de crimes.

Flash Infos : Près de deux mois après votre élection à la tête de la mairie de Mamoudzou, vous venez de vivre une semaine intense avec plusieurs jours d’une extrême violence entre bandes rivales. Comment avez-vous géré la situation ?

Ambdilwahedou Soumaila : D’abord, je tiens à saluer la bonne coordination entre la police nationale, la gendarmerie nationale ainsi que les polices municipales de Mamoudzou et de Koungou. Nous avons fait en sorte que les deux groupes de jeunes ne se rencontrent pas à la limite des deux communes. Même si nous déplorons un mort, je pense que le bilan aurait pu être bien pire ! L’hélicoptère s’est notamment interposé pour que les affrontements ne soient pas aussi dramatiques que ce que nous avons connu.

Ensuite, dès le premier jour, il y a une mobilisation sur le terrain d’une grande partie des élus du conseil municipal de Mamoudzou pour faire de la médiation, qui a permis à une trentaine de jeunes de Kawéni de rendre les armes (chombos et couteaux) à la police nationale. Ils les ont déposées volontairement ! Le tissu associatif dans le village a également permis d’apaiser un peu les tensions.

FI : La réunion de dimanche avec les principales institutions de l’île a débouché sur l’organisation des assistes de la sécurité, des réunion fréquentes du conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance. En quoi consistent-elles ?

A. S. : Le courrier qui a débouché de cette rencontre et que j’ai signé doit être envoyé dans les prochaines heures. L’idée est d’inviter le préfet, le président du conseil départemental, les quatre parlementaires, le président de l’associations des maires et les présidents des intercommunalités pour participer à une première réunion de préparation qui aura lieu le 22 septembre. Cette rencontre va jeter les bases et voir les modalités d’organisation de ces assises, qui devraient intervenir courant octobre.

Ce rendez-vous doit permettre à l’ensemble des victimes, souvent collatérales, de ces violences d’avoir un espace pour témoigner de ce qu’ils ont vécu ou de ce qu’ils vivent au quotidien. Ce serait déjà une belle victoire ! Certains d’entre eux ont été touchés au plus profond de leur chair. Après, la sécurité n’est pas l’affaire de tous, mais bien l’affaire de chacun. Je considère que chacun a une solution à apporter pour que nous puissions venir à bout de ces affrontements. Les élus, la société civile, l’ensemble des protagonistes… N’importe pourra apporte SA solution. Il y en a peut-être 300.000. Et à partir de là, il faudra retenir les plus pertinentes pour notre rapport que nous déposerons vraisemblablement au premier ministre au mois de novembre.

FI : À l’échelle municipale, que comptez-vous mettre en place pour tenter d’enrayer ces tensions ? Renforcement de la police municipale, soutien aux associations, déploiement de la vidéosurveillance, etc.

A. S. : Dans un premier temps, nous allons réactiver le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance dans le but de réunir les associations – qui sont un élément très important à mes yeux -, les parents mais aussi les foundis et réfléchir tous ensemble aux premières actions que nous pourrions mettre en vigueur. Nous travaillons également sur le renforcement de l’éclairage public. Autre décision qui va intervenir très prochainement : nous allons allonger l’amplitude horaire des policiers municipaux jusqu’à 6h du matin, contre 4h actuellement. D’ailleurs, ils vont déménager d’ici la fin de l’année dans l’ancien bâtiment de la caisse de sécurité sociale de Mayotte, place Mariage, pour être encore plus près de la population. Idem pour tout le système de vidéosurveillance. Et d’ailleurs, nous allons accroître la capacité en termes de caméras, sachant que certaines d’entre elles étaient hors service, et les multiplier dans les quartiers isolés, avec le soutien financier de l’État.

FI : Plus largement, on a l’impression qu’aucune décision institutionnelle ne renverse la situation. Comment l’expliquez-vous ?

A. S. : Vous savez, les causes de la délinquance à Mayotte sont multiples : la bidonvilisation du territoire, la non-éducation des enfants, la perte de repère… Mais il faut aussi donner les moyens à la justice. Avec une seule maison d’arrêt sur l’île et seulement vingt places pour les mineurs, le magistrat est tout simplement démuni. Même s’il prend la décision d’incarcérer un jeune, où voulez-vous l’envoyer ? C’est normal que les forces de l’ordre reçoivent des moyens humains et financiers, ils sont là pour nous protéger, mais il ne faut pas non plus oublier l’appareil judiciaire pour que les décisions soient prises le plus rapidement possible. Et dans ce cas-là, il faut également avoir les espaces pour mettre hors d’état de nuire les jeunes qui sont des dangers pour la société. Après je n’ai pas la solution miracle, mais ce qui est sûr, c’est que tous ceux qui commettent des crimes doivent trouver place en prison !

Des chantiers d’insertion pour restaurer les zones humides à Mayotte

Après la prairie humide d’Ambato à M’Tsangamouji, le groupe d’études et de protection des oiseaux de Mayotte (GEPOMAY) entame un nouveau chantier d’insertion à Malamani en début de semaine prochaine avec l’association Mlezi Maoré. L’arrachage de plantes exotiques va ainsi favoriser le développement de la biodiversité et la protection du Crabier blanc. En phase de test, ce projet est amené à se multiplier sur d’autres communes.

Grande première pour le groupe d’études et de protection des oiseaux de Mayotte (GEPOMAY). Habituée à la mise en protection des espèces, l’association vient de terminer son premier chantier d’insertion avec Mlezi Maoré sur la prairie humide d’Ambato, à M’Tsangamouji, dont la restauration a permis un agrandissement du site de l’ordre de 150 mètres carrés pour le pâturage de zébus. Une opération ayant eu pour but de retirer les plantes invasives, notamment les plants de songes échappés des cultures, qui empêchent les autres plantes de se développer.

Bis repetita à partir de ce lundi derrière le Sodicash de Malamani sur la commune de Chirongui. Seule différence ? « Il s’agira principalement d’arrachage de plantes exotiques envahissantes, dont notamment le Senna alata », confie Lorraine Condon, la chargée de communication et vie associative de la structure coordinatrice. Un travail d’orfèvre attend l’équipe composée d’une dizaine de personnes, spécialisée dans la gestion des espaces verts, à quelques heures de s’attaquer à près d’un hectare. L’idée par la suite est la signature d’un bail rural entre le propriétaire du terrain et le GEPOMAY pour que l’agriculteur mette en place une rotation régulière des zébus pour favoriser la biodiversité. « C’est tout bénéfique pour l’éleveur car il va agrandir sa surface », ajoute-t-elle, précisant au passage que « le Conservatoire Botanique apporte son expertise sur la végétation et réalise une étude préalable d’identification des espèces ». Et par la suite, il assure un suivi pour « voir comment ça évolue ».

Tsararano et la baie de Bouéni dans le visieur

Ces interventions sont d’autant plus nécessaires que les zones humides de l’île sont en déclin… alors que ces espaces sont indispensables à l’être humain puisqu’ils procurent de l’eau et limitent les inondations ! Mais surtout, leurs nettoyages ont pour objectif de permettre au Crabier blanc, l’oiseau le plus menacé du territoire, qui a élu domicile dans cette lagune en 2018, de revenir s’installer dans les meilleures conditions. Sachant que cet oiseau se tient le plus souvent immobile en lisière, généralement un peu dissimulé, de la végétation aquatique, flottante ou dans l’eau peu profonde. Si le GEPOMAY vient seulement d’entamer son projet de restauration, l’association espère bien multiplier ces actions dans un avenir proche. « Cette année, nous sommes en phase de test, mais si cela fonctionne, nous allons le déployer sur les lieux où le Crabier blanc s’alimente, comme Tsararano ou la baie de Bouéni », conclut Lorraine Condon. Avec ces chantiers d’insertion, le groupement d’études et de protection des oiseaux de Mayotte répond parfaitement au programme européen Life Biodiv’OM (2018-2023) dont le but est de protéger la biodiversité sur cinq territoires ultramarins.

Mayotte : dernière ligne droite et petits couacs avant la rentrée

Entre les poussées de violence qui ont agité le nord de l’île il y a quelques jours et les derniers aménagements à peaufiner pour assurer le respect des gestes barrières, la rentrée s’annonce mouvementée.

 

C’est l’heure des derniers préparatifs. Mais alors que les quelques 100.000 élèves doivent reprendre le chemin de l’école ce lundi, de nombreuses inquiétudes et inconnues demeurent, sur fond de crise sanitaire et de poussées de violence. Cette semaine, c’était au tour des enseignants de faire leur pré-rentrée. Et certains ont fait l’amère expérience de retrouver des locaux pas tout à fait prêts. « Si l’école n’est toujours pas nettoyée lundi, moi je ne viendrais pas travailler ! », menace ainsi la maîtresse d’une classe de CP, à M’Gombani, en découvrant que l’établissement n’avait pas désinfecté depuis sa fermeture. Déjà, la ville de Mamoudzou a annoncé le report de la rentrée scolaire à l’école Doujani 2, au 31 août. En cause : une occupation illégale des locaux, et d’importantes dégradations et vols de matériels. Pas de retours en classes prévus non plus à l’école de M’tsangamouji 4 et à la maternelle du centre avant cette date, car les travaux de rénovation n’y sont pas terminés.

 

Il faut dire que les enjeux sont importants puisque la crainte d’une seconde vague plane sur cette rentrée. Or, le protocole sanitaire de l’Éducation nationale a été assoupli, surtout pour permettre à tous les élèves de retourner en classe. Impossible, dans les écoles déjà saturées de Mayotte, de limiter les groupes à 10 ou 15 élèves par classe, comme c’était le cas pour la reprise. Désormais, la distanciation physique d’un mètre n’est donc plus exigée, mais le port du masque reste obligatoire pour les adultes et les enfants de plus de 11 ans. Une décision qui inquiète en réalité les professionnels de l’éducation. « En revoyant les mesures de prévention à la baisse, le nouveau protocole sanitaire engage le risque de voir l’école contribuer à la relance épidémique et donc d’impacter à terme la possibilité d’accueillir les élèves en présentiel, au lieu d’organiser cet accueil de manière sécurisée, durable et pérenne », s’alarme ainsi la CGT Educ’Action.

 

Pas toujours de savon

 

Certes, des aménagements ont bien été entrepris pour permettre d’assurer le lavage des mains fréquent et le respect des gestes barrières. Pendant toutes les vacances, il a fallu charbonner pour installer des nouveaux sanitaires, récurer les locaux, livrer le savon. Mais des failles demeurent. À l’école primaire de M’gombani par exemple, l’une des trois du chef-lieu à avoir rouvert ses portes en juin pour deux semaines, la commune a bien installé quelques lavabos en plus. Mais l’enceinte manque toutefois toujours de sanitaires, au nombre de six pour 400 élèves. Et à côté des robinets, pas de trace de savon… Rien que sur la commune de Mamoudzou, 30% des points d’eau préconisés par l’ARS dans le cadre de crise sanitaire n’étaient pas encore opérationnels en milieu de semaine, même si la mairie assure travailler à pied d’oeuvre pour que tout soit prêt lundi.

 

La crainte des violences

 

Mais ce ne sont pas là les seules zones d’ombre de cette rentrée. Entre le risque d’une grève des transporteurs scolaires et les poussées de violence, qui ont éclaté le weekend dernier entre Majicavo et Kawéni, le retour en classe lundi prochain risque bien d’être tendu. Une rencontre entre le recteur et le commandant de la gendarmerie est d’ailleurs prévue pour mettre au point la politique de sécurité. Et les 39 agents des équipes mobiles de sécurité (EMS) de l’éducation seront postés aux abords des établissements dès lundi. Des dispositifs qui ne parviennent toutefois pas à rassurer parents comme élèves. « Sur la zone de Kangani jusqu’à Mamoudzou, les bus sont fréquemment caillassés, les chauffeurs sont agressés. Il faut donc qu’il y ait une vigilance très particulière sur ce circuit, quitte à mettre des gendarmes et policiers », insiste Haïdar Attoumani Said, le co-président de la Fédération du conseil des parents d’élèves (FCPE). Alors, prêts pour la rentrée ?

Le Challenge Mayotte Tour, une 4ème étape en hommage à Mansoib Ahmed

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Parti d’un triste constat sur le quotidien infernal sur l’ile, trois jeunes, décident d’agir. Youssouf Chadhouli, Ybnou Ben Hamada et Adifane Noussourou créent le mouvement Challenge Tour Mayotte pour lutter contre les violences et l’insécurité. Un combat que même les instances politiques ont du mal à mener. Ces instigateurs optent pour une mesure thérapeutique dans l’espoir de soigner les maux de mahorais. Quel remède ? Le sport.

C’est avec un dévouement sans faille que les acteurs du Challenge Tour Mayotte (CTM) s’engagent dans la promotion des pratiques sportives. Chadhouli Youssouf, plus communément connu sous le nom de Chad, ancien militaire, aujourd’hui éducateur, est l’initiateur du projet. Avec lui, Adifane Noussourou et Ybnou Ben Hamada, des ex-footballeurs professionnels, sont tous aussi impliqués pour valoriser les bienfaits d’une activité physique régulière. « Nous sommes des sportifs, le bien-être prime avant tout. C’est notre manière de dénoncer la situation locale et d’inciter les gens à la pratique du sport », insiste Chad.

Dans un esprit de liberté, nos athlètes organisent des sessions de courses à pied dans les 4 coins de l’île. « L’idée est de traverser ces villes sans craindre de se faire agresser. Aujourd’hui, les gens ont peur d’aller courir à l’extérieur. » Pendant les excursions ? Quelques arrêts pour admirer le paysage, sensibiliser la population à toutes les formes de violences, favoriser l’échange intergénérationnel… « Il n’y a pas plus fédérateur que le sport, il permet de s’unir et d’agir ensemble », assure Chad. Déjà 3 étapes ont eu lieu et à chacune d’entre elles, le nombre de participants ne cesse de croître. La prochaine promet de faire passer le message.

Rendre hommage au défunt Mansoib Ahmed

Dimanche 23 août se tient la 4ème étape du Challenge Tour Mayotte. Cette marche ou course selon les envies est en l’honneur du défunt Mansoib Ahmed, agressé et décédé le 13 août dernier. Le mouvement social débute au Port de Longoni et doit s’achever à M’Tsapéré, lieu du drame. « Plus de 500 personnes sont attendues », estime l’éducateur. Selon lui, de Mamoudzou à Koungou, les communes et l’ensemble des associations sont mobilisées. « Les secouristes et les sapeurs-pompiers sont également de la partie », annonce-t-il. Récemment victimes d’acte de violence, ils rejoignent le rassemblement au même titre que l’association des personnels de justice de Mayotte.

D’ores et déjà plusieurs acteurs socio-politiques ont confirmé leur participation. Parmi eux, « le sénateur Thani Mohamed Soilihi et l’ancien président du conseil général, actuel conseiller départemental de Pamandzi, Daniel Zaidani ». Cependant, le collectif espère la participation des 17 maires actuels « pour marquer l’importance de ce mouvement social ». Pour l’heure, 14 élus répondent présents. « Pas moins de 12 partenariats sont en place », évoque Chadhouli Youssouf. Le RSMA (régiment du service militaire adapté), l’un d’entre eux, compte tenir un stand d’information pour orienter les jeunes qui souhaite s’engager dans l’armée. D’autres partenaires vont s’occuper des espaces de ravitaillement sur les grands axes de circulation. Une implication qui vise à faire prendre conscience de la gravité de la situation. Dès 6h, les manifestants du Challenge Tour Mayotte s’élanceront chacun à leur rythme et arboreront l’asphalte en prônant « Stop ! Violence – L’insécurité. Oui, la liberté de circulation ».

Pour prévenir d’éventuels débordements, un dispositif de sécurité est mis en place par la police municipale des communes concernées. En ce qui concerne les mesures sanitaires, les gestes barrières sont à appliquer et le port du masque est obligatoire. En cas de malaises ou d’incidents, des sapeurs-pompiers bénévoles, la Croix-Rouge et la société Ambulance Madiana 976 pourront intervenir tout le long du parcours.

De nouveaux fonctionnaires de police dès septembre à Mayotte… mais pour quels services ?

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Lors que des affrontements d’une violence inouïe entre bandes rivales ont éclaté la semaine dernière, la direction territoriale de la police nationale doit accueillir de manière progressive une cinquantaine de nouveaux fonctionnaires à partir du mois de septembre. Toutefois, les syndicats craignent que la police aux frontières soit le principal bénéficiaire de cette augmentation des effectifs, au détriment de la sécurité publique.

Que réserve la rentrée de la direction territoriale de la police nationale en termes de recrutements ? À cette question, un officier au sein de l’administration stipule l’envoi imminent de 32 nouveaux fonctionnaires à partir du mois de septembre. Un chiffre non négligeable permettant de gonfler des rangs déjà soumis à rude épreuve. Seul hic pour Aldric Jamey, secrétaire départemental d’Alternative Police, « toutes les mutations sont attribuées à la police aux frontières ». Des renforts surtout « profilés pour le groupe d’appui opérationnel ». De quoi faire également grincer des dents son homologue de l’UNSA, Badrou Ali, qui milite inlassablement pour l’augmentation en capacité de la compagnie départementale d’intervention dans le but de devenir autonome sur l’ensemble de la circonscription et de ne plus avoir recours à la gendarmerie. « Il faudrait une vingtaine de gars supplémentaires pour alléger le temps de travail et adapter le cycle horaire », plaide-t-il, prenant pour exemple la mise en quatorzaine jusqu’à jeudi dernier d’une section en raison de la crise sanitaire pour argumenter ses propos. « Cela devient inquiétant, on a du mal à faire face ! » 

Un ras-le-bol généralisé des services de la sécurité publique qui s’explique aussi par la recrudescence de la délinquance en cette période de vacances scolaires. À l’image des événements d’une violence inouïe de la semaine dernière entre des bandes rivales de Mamoudzou et de Koungou. « Vendredi après-midi, on était 16 collègues à gérer la situation face à 150 jeunes de Majicavo. Heureusement que ceux de Kawéni, qui se trouvaient derrière nous, ne nous ont pas attaqués », se remémore Aldric Jamey, qui précise avoir tiré plus de 40 grenades ce jour-là pour disperser les foules. « On est vraiment ricrac… » Cet énième affrontement interloque alors naturellement sur les moyens déployés. « On a de la chance que ça ne pète qu’à un seul endroit en même temps. »

« Plusieurs filières, dont celles qui sont le plus sous le feu »

Face à toutes ces spéculations concernant l’évolution des effectifs de la DTPN, la préfecture assure que « les discussions sont encore en cours avec la direction centrale pour maximiser les arrivées ». Seule certitude à l’heure actuelle ? Les renforts seront « d’une cinquantaine au minimum » et renforceront « plusieurs filières, dont celles qui sont le plus sous le feu », affirme les services de l’État, qui se montrent optimistes quant au dénouement des négociations. Quant à leur déploiement, il se fera « de façon progressive » à partir de septembre. Selon nos informations, une première vague de 32 fonctionnaires doit effectivement débarquer sur l’île aux parfums, avant que deux autres ne lui emboîtent le pas par la suite. « Et ce n’est pas parce qu’ils sont affectés à la PAF qu’ils ne feront pas de la sécurité publique », appuie-t-on du côté de la DTPN. Suffisant pour calmer les ardeurs des uns et des autres ? 

Si la lutte contre l’immigration clandestine en mer reste indéniablement l’objectif numéro un du gouvernement, la réalité sur la terre ferme demande une attention tout aussi particulière. « Il faut renforcer les brigades de roulement car elles sont déficitaires la nuit. Il n’est pas rare qu’un seul fonctionnaire se retrouve avec deux adjoints de sécurité… Ce n’est pas normal », critique un officier sous couvert d’anonymat. Et cette problématique semble aussi s’appliquer aux groupes de sécurité de proximité. Alors, Badrou Ali compte sur sa récente rencontre avec le sénateur Thani et le député Kamardine, qui ont tous deux poussé un coup de gueule en raison de l’insécurité grandissante, pour que les doléances des forces de l’ordre remontent jusqu’aux oreilles des responsables politiques à Paris. Car pour Aldric Jamey, il y a urgence. À ce rythme-là, il craint tout simplement que seul « un drame pourra faire réagir la direction ». « On n’a aucun moyen d’atténuer les tensions. Les foundis et les anciens ne sont plus respectés, les jeunes s’en foutent complétement », déplore le syndicaliste. « À la moindre étincelle, ça peut exploser ! Ça aurait très bien pu se finir avec les flingues en main s’ils nous avaient chargés [vendredi]. » Et dire que le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin déclarait, il y a moins d’un mois : « Il n’y a pas de zone de non-droit, il n’y a pas d’endroit où l’on ne va pas en République. » Une déclaration qui ne s’applique visiblement pas au 101ème département. 

 

 

 

 

Jean-Mi, la nouvelle marque de café mahorais haut de gamme

6h04, Nourdine Hakim gare un instant sa bécane, enlève sa veste de motard et nous éclaire sur « Jean-Mi », la marque de café qui n’a rien à envier aux plus grands torréfacteurs. Issu de l’industrie de l’automobile, cet homme de challenge se donne le défi de vivre de sa passion pour le café. 

En 2011, Nourdine Hakim lance le label régional Green Fish : « L’idée est de développer les valeurs traditionnelles, d’offrir des recettes et une agriculture à l’ancienne à base d’engrais naturels. » C’est là toute la différence avec ce qui est commercialisé à Mayotte. « J’ai appris à torréfier le café avec les commerçants malgaches », poursuit-il. L’entrepreneur s’est implanté chez ses ancêtres dans le nord de Madagascar pour travailler son produit et ensuite l’acheminer vers le territoire. C’est un projet d’échange en marge de la coopération entre les deux iles. Ceci-dit, l’agriculteur est en train de lancer une plantation sur la terre de Coconi. Selon lui, cette initiative répond aussi aux besoins alimentaires des Mahorais, qui vivent principalement de l’export.

Le café est d’ores et déjà disponible sur l’île, vendu à faible quantité dans les enseignes Madora et chez Délices de Mayotte sur la place Mariage. Le prix de base se situe entre 5 et 6 euros sous la forme moulue et en grain. Pour le moment, le Magasin Green Fish, basé à M’Tsapéré sert de dépôts « le temps de développer le réseau de distribution qui pourrait s’étendre jusqu’en métropole et en Belgique », prévient Nourdine Hakim. Dès lors, le torréfacteur ambitionne, à court terme, de tripler le volume de production et d’importer 500 kilos de café tout cela avec un budget de 30.000 euros, « ce qui est largement suffisant », se réjouit-il. 

Toute une histoire se cache derrière « Jean-Mi » 

C’est avec fierté que Nourdine Hakim décide de labeliser le produit « Jean-Mi ». En effet, toute une histoire se cache derrière cette appellation. « Tout d’abord, c’est en hommage à un vieil ami du même prénom qui m’a poussé à concrétiser ce projet », rapporte-t-il. Mais c’est surtout l’histoire du « robusta » que ce passionné cultive. Ce café, qu’il confectionne et qu’il affectionne, « est d’origine malgaches mais a été créée par la France », rappelle-t-il. « L’objectif est de réveiller notre mémoire culinaire, car cela fait partie de notre histoire. » En outre, Nourdine Hakim insiste sur « la transmission de la mémoire collective ». « J’aurais pu l’appeler Hakim ou Saïd, mais j’ai choisi « Jean-Mi » pour rappeler la French Touch. C’est un produit de qualité qui renvoie l’image de la France », s’amuse le patron de Green Fish.

 

 

Mayotte Explo lancera bientôt son hôtel sur l’eau à Mayotte

Si les opérateurs nautiques sont légion dans le 101ème département, le lagon accueillera bientôt un nouveau catamaran, mais pas n’importe lequel. À bord de l’appareil baptisé Mayotte Explo et commandé par le gérant de Lagon Aventure, seront proposés des services haut de gamme d’hôtellerie et de restauration. Entre autres. 

Un catamaran, mais pas seulement. D’ici le mois de novembre, un nouveau voilier viendra caresser les eaux mahoraises, pour le plus grand plaisir des amoureux du lagon et de farniente. Avec une surface habitable de 130 m², le futur appareil du prestataire Mayotte Explo – une société fondée par le gérant de Lagon Aventure – sera un véritable hôtel flottant. 

À bord du catamaran, cinq chambres doubles, Wifi, télévision, climatisation, bains de soleil et plancha… Côté prestations, toutes les formules sont possibles : excursion à la journée autour de l’île, croisière vers Madagascar et Mohéli, nuit sur l’eau, au mouillage ou au ponton de Mamoudzou ou privatisation, le tout supervisé par un marin… et un cuisinier. « Les attentes des gens ont évolué », explique Denis Fabre, gérant de Mayotte Explo et Lagon Aventure, capitaine et propriétaire du bateau fait sur-mesure en métropole. « Le but n’est pas de proposer des safaris dauphins ou baleines et de faire un maximum d’îlots dans la journée, mais plutôt de proposer une formule pour décompresser totalement. L’idée, c’est de se poser sur le cata, de se faire plaisir et de souffler. C’est ce que beaucoup de monde recherche sur le lagon ! »

Et ça, Denis en sait quelque chose. Arrivé à Mayotte comme militaire de la marine nationale, il ne quittera jamais la mer. C’est d’ailleurs pour la faire découvrir aux habitants de l’île qu’il décide fonder sa propre entreprise, Lagon Aventure. Il sera même le premier à organiser des excursions à bord de ce qu’il surnomme « l’aquarium », le bateau à fond de verre. Pourquoi, alors, ne pas avoir investi plus tôt dans un catamaran haut de gamme ? « À l’époque, le ponton n’avait rien à voir avec ce qu’il est maintenant, et pour pouvoir faire hôtel au ponton quand nécessaire, on a besoin d’eau, d’électricité… Avant ça ne valait pas le coup et beaucoup de prestataires ont dû arrêter à cause de ça », souffle le capitaine. « Mais les choses ont bien évolué, et c’est maintenant qu’il faut le faire ! » 

Il passe alors commande à Canet-Plage, dans le Languedoc-Roussillon, où son « petit » bébé de 17 mètres de long se construit jour après jour, pour rejoindre Mayotte d’ici trois mois. « Une fois qu’il arrivera, on pourra lancer la machine tout de suite, tout est déjà en règle », se réjouit Denis Fabre. À côté de lui, son épouse, Chloé, elle aussi investie dans le projet, acquiesce : « Et notre gros point fort, c’est toute la place qu’il y a bord ! » En atteste la capacité du catamaran : il pourra accueillir jusqu’à 30 personnes à la journée, contre 11 à 12 en mode croisière ou hôtel. Le tout pour environ 90 à 120 euros selon la prestation choisie. 

Où réserver ? 

Si le catamaran Mayotte Exploration n’est pas encore arrivé sur l’île, il sera bientôt possible de réserver la sortie de son choix par téléphone uniquement, en contactant Lagon Aventure au 0639 65 4263. Un site web au nom de Mayotte Explo est par ailleurs en construction. 

 

Mayotte, une fois de plus en proie au manque d’eau

Depuis lundi, un arrêté préfectoral impose des restrictions temporaires sur l’eau. Une décision qui fait craindre de nouvelles séries de coupures comme en avait connues le département en 2016-2017.

Safina Soula est une femme préoccupée. Il faut dire que depuis déjà début août, les membres de son collectif constatent avec effroi la baisse rapide de la retenue collinaire de Combani. “Tous les jours, on envoie quelqu’un pour contrôler, et il y a à chaque fois une vingtaine de centimètres d’eau en moins”, s’alarme la vice-présidente des Assoiffés du Sud. Sa plus grande crainte ? Revivre le cauchemar de 2016-2017, et ces fameux “tours d’eau” censés aider le département à supporter la pénurie liée au manque de précipitations pendant la saison sèche. À l’époque, les habitants du sud et du centre de l’île avaient dû vivre deux mois de calvaire, entre décembre et février, marqués par ces mesures de rationnement et ces heures perdues à remplir seaux et bouteilles dès que cela était rendu possible.

Si nous n’en sommes pas encore là, “la situation est quand même assez critique, avec des niveaux dans les rivières et les retenues qui sont assez bas”, confirme Aminat Hariti, la nouvelle vice-présidente en charge de l’eau potable au SMEAM, le syndicat mixte d’eau et d’assainissement de Mayotte. Le niveau des retenues collinaires est en effet à un peu moins de 50% – en 2016, la réserve qui alimentait 84% du sud de l’île était tombée à 20% de sa capacité totale. Des réunions hebdomadaires sont donc prévues avec les nouveaux élus du syndicat, la SMAE et la préfecture pour décider de la marche à suivre.

Des premières restrictions

Pour éviter d’épuiser la ressource trop rapidement, la préfecture a d’ores et déjà pris un arrêté préfectoral qui limite depuis lundi certains usages de l’eau sur le département. Sont concernés le lavage des véhicules, des trottoirs, bâtiments, façades, terrasses, cours, murs et bateaux de plaisance de particuliers, l’arrosage des pelouses, potagers et équipements sportifs ou encore le remplissage des piscines. Des mesures d’économies qui n’empêcheront malheureusement pas les coupures. “Nous n’aurons pas le choix, mais dans un premier temps, nous allons surtout faire ces coupures le soir, et un jour sur sept, puis peut-être un jour sur six si la situation se tend davantage”, explique Aminat Hariti. Le calendrier doit encore être discuté en fonction des localités et de l’évolution des prévisions météorologiques. À moyen terme, le syndicat explore avec l’ensemble des parties prenantes les autres solutions, comme le captage de l’eau en forage et en rivière, tandis que les projets de retenue collinaire d’Ouroveni et de l’usine de dessalement de Grande-Terre peinent encore à sortir de terre.

Une saison des pluies tardive

Des solutions qui ne suffisent pas à rassurer les Assoiffés, qui dénoncent déjà les gaspillages. Dans leur viseur : les rampes d’eau installées par l’Agence régionale de santé pendant le confinement pour permettre aux populations les plus précaires d’accéder à la précieuse ressource. En tout, 12 équipements sont venus s’ajouter aux 63 bornes fontaines

du territoire. Mais “ce ne sont pas les rampes d’eau qui sont responsables des pénuries”, répond Julien Thiria. D’après les relevés hebdomadaires réalisés par les préleveurs de l’ARS, la consommation d’eau aux rampes ne représente en effet que 0,3% de la consommation totale de l’île par jour, et celle aux bornes fontaines 0,5%. Soit moins de 1% de l’eau distribuée qui alimente ⅓ de la population du territoire, sans accès à l’eau dans son logement. “Le problème, ce sont les 6 à 8% d’augmentation des besoins en eau chaque année, une hausse qui provient surtout de la modernisation des ménages”, souligne encore Julien Thiria.

Sans compter que le principal problème réside aussi dans les conditions météorologiques. « Nous constatons depuis quelques années un phénomène de resserrement avec une saison des pluies qui arrive plus tardivement et une saison sèche qui arrive plus tôt », confirme Laurent Floch, directeur de Météo France Mayotte. Les précipitations, qui sont quant à elles plus importantes, notamment au mois de janvier et de février, perdent alors en efficacité car l’eau ruisselle davantage vers la mer. Et les premières prévisions saisonnières laissent présager une saison des pluies tardive, cette année encore.

Dhitoimaraini Foundi de Maoré Digital : « Nous devons exploiter ces nouvelles technologies pour créer de la valeur et réduire les inégalités »

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Cofondateur de la première plateforme d’investissement en actions sur les entreprises non cotées à l’île Maurice, Dhitoimaraini Foundi vient de lancer le concept Maoré Digital, dont l’idée est d’accompagner individuellement des projets de startup qui ont pour ambition de mêler technologies et innovations au service de l’inclusion.

Flash Infos : Comment est né votre projet d’incubateur de startup 100% digital à Mayotte ?

Dhitoimaraini Foundi : L’incubateur de startup 100% digital est l’un des projets développés au sein du Café de l’Entrepreneur, qui se veut être une véritable plateforme d’innovation à Mayotte. Nous sommes dans la quatrième révolution industrielle, l’ère de l’Internet des objets, de l’intelligence artificielle, de la blockchain (une technologie de stockage et de transmission d’informations sans organe de contrôle, ndlr.), des FinTech (technologies financières, ndlr.) et des cryptomonnaies… Les Mahorais doivent prendre en considération cette nouvelle réalité économique pour penser l’avenir de l’île.

Comme partout dans les économies matures, la nouvelle génération est encouragée à innover et à inventer des technologies disruptives (ces fameuses deeptech). Nous, jeunes mahorais, avons fait les mêmes études que ceux qui réussissent ailleurs, que ce soit à Paris ou à Londres ! Nous avons fréquenté les mêmes écoles, avons le même bagage intellectuel. Mais alors pourquoi eux réussissent dans leurs pays respectifs et pas nous à Mayotte ? La réponse est que nous n’avons pas créé un écosystème favorable à l’émergence et au développement de l’économie numérique. C’est de ce constat qu’est née l’idée d’incubateur, avec comme missions de former, d’informer et d’accompagner les acteurs dans cette nouvelle ère économique, l’ère de l’entreprise 2.0.

FI : Comment se matérialise la mise en place de ce projet sur le territoire ?

D. F. : Concrètement, il s’agit d’un support technique à destination des jeunes porteurs de projet d’entreprise innovante se déclinant en deux parties. D’abord, un programme de pré-incubation de 4 à 6 semaines au sein duquel les incubés découvriront la culture de start-up et durant lequel ils apprendront des méthodologies spécifiques aux start-ups, notamment le lean startup (une approche spécifique du démarrage d’une activité économique et du lancement d’un produit, ndlr.). Créer une start-up est différent d’une société traditionnelle. Par exemple, lorsque quelqu’un veut monter une entreprise à Mayotte, nous lui demandons d’emblée de produire un business plan et une étude de marché, alors que pour une start-up, c’est une étape non nécessaire, pour ne pas dire une perte de temps…

Durant cette période, la partie primordiale est d’identifier la clientèle et de connaître ses besoins ainsi que le potentiel du chiffre d’affaires. Une fois que nous avons cette data pertinente entre les mains, nous devons aller tester ces hypothèses directement sur le marché avec un MVP (minimum viable product). En d’autres termes, il faut se présenter sur le marché avec seulement 20% du produit. C’est un exemple parmi tant d’autres qui illustre la dichotomie de méthodologie entre la création d’une entreprise traditionnelle et une start-up.

Après la phase de pré-incubation suivra un programme d’accélération sur quatre mois durant lequel seront abordées les questions liées aux stratégies d’affaires, de financement, de branding… Une start-up n’est pas réservée à un marché local, sa vocation est de croître rapidement et de se lancer à l’international. C’est pourquoi, il est utile de se préparer au mieux à cette possibilité, en nouant des partenariats avec des acteurs implantés aux quatre coins du monde. Enfin, le coaching et l’accompagnement individualisés se feront exclusivement via des plateformes en ligne.

FI : Combien de porteurs de projets pouvez-vous accompagner en même temps ? Et à l’avenir, est-il envisagé de mettre en place un espace coworking pour rassembler les différentes startups qui vont voir le jour dans un seul et même lieu ?

D. F. : Pour cette première édition, nous nous limiterons à 20 candidats. Un appel à projets sera lancé dans les jours à venir. Ne seront retenus que ceux qui sont porteurs d’idées innovantes mais aussi ceux qui ont la motivation nécessaire pour se lancer dans l’entrepreneuriat.

Maoré Digital a opté pour la version digitale parce qu’il finance le programme sur ses fonds propres et n’a donc à ce jour pas les moyens d’offrir à ces jeunes un espace coworking, même si un incubateur peut en proposer un. Mais dans l’absolu, pouvoir faire du présentiel serait la configuration parfaite.

FI : Comment le digital pourrait-il permettre à Mayotte de « s’émanciper » économiquement et socialement ? Sachant que le développement de la fibre est encore en cours de réalisation sur le territoire…

D. F. : Toutes les économies matures sont en crise et cherchent de nouveaux leviers de croissance, notamment à travers l’économie numérique. Mayotte étant un territoire structurellement fragile et économiquement limité, nous devons exploiter ces nouvelles technologies pour créer de la valeur et réduire les inégalités, à l’image de la Tech For Good, qui conjugue rentabilité et impact sociétal positif. Nous devons revoir notre modèle d’économie sociale et solidaire actuel en y intégrant la dimension technologique. Sur le territoire, nous avons un instrument très puissant pour subvenir à nos besoins de consommation : il s’agit des « chikoa » (groupes de personnes qui mettent chaque mois une certaine somme pour qu’elle soit récupérée par l’une d’elles en cas de besoin). Il nous appartient de l’utiliser pour financer des activités créatrices de richesses, en le fléchant sous forme de capital dans nos entreprises. D’où l’intérêt de montrer un FinTech Hub à Mayotte pour promouvoir l’inclusion financière. Ce sont des technologies que nous maîtrisons déjà. Et cela aurait pour conséquence de ne plus avoir besoin de se reposer sur une ingénierie importée.

La Tech est importante sur l’île aux parfums parce qu’elle doit jouer son rôle d’intégrateur social. Le digital doit contribuer à réduire les inégalités économiques et sociales. Enfin, Maoré Digital, comme toutes les autres technologies hébergées au Café de l’Entrepreneur, entend jouer un rôle de pivot en contribuant modestement à la construction d’un écosystème Tech favorable aux innovations et à l’émergence de l’économie numérique dans notre territoire. La formation et l’innovation sont les clés de notre développement.

Mayotte : le « Globe Tour Ylang », le Vendée Globe du Canal du Mozambique

Après six années de préparatifs intenses, le projet « Globe Tour Ylang » de l’association Défi Inter Ylang commence à prendre forme. L’évènement promet de secouer l’ile mahoraise. En effet, la plus grande régate est en phase de se concrétiser. Cette aventure sportive, à consonance culturelle, entend faire rayonner Mayotte à l’échelle nationale et internationale en conjointe coopération avec cinq îles voisines.

C’est aux abords du port de plaisance de Mamoudzou que Frédéric Niewiadomski crée, en 2013, l’association Défi Inter Ylang. Du haut de ses 17 années sur l’île, c’est un Mahorais dans l’âme. Conscient de l’image négative que reflète Mayotte, le président allie sa passion pour l’océan et son amour pour sa localité dans le but d’imaginer un évènement qui va apporter un souffle nouveau à cette étiquette. C’est sur un copier-coller assumé du « Vendée Globe » que l’association calque son projet. « Nous nous appuyons sur ce qui a été réalisé, qui est connu et qui marche », annonce fièrement le porte-parole du GTY. Le « Globe Tour Ylang » s’articule sur Mayotte, « qui sera la plateforme de départ et d’arrivée. Le coup d’envoi est envisagé pour 2022 ». Les voiliers, revêtis de leurs plus beaux drapeaux, vogueront à travers l’océan Indien en empruntant la route d’Ylang pour la première fois lors d’une compétition officielle. Les autres 5 îles participantes : Madagascar, Maurice, Les Seychelles, Moroni et Zanzibar sont à l’honneur à l’occasion de ce road-trip maritime.

Chacune d’entre elles est garante du bon déroulement de cette aventure. « L’objectif est d’impliquer chaque île dans sa découverte et d’offrir un accueil label qualité », prévient Frédéric Niewiadomski. Les organismes de tourismes locaux se chargent de mettre en place des ateliers à thème. Au programme ? Rencontre entre les usagers et les animateurs, échanges thématiques, techniques, professionnelles, traditionnelles et culturelles. « C’est une véritable ouverture sur le monde », s’enthousiasme-t-il. Cet épisode inédit compte révolutionner le domaine de l’aéronautique mahorais.

« Mayotte va se développer uniquement par le bleu »

Cependant, aux vues des infrastructures actuelles, l’île aux parfums n’est pas encore en mesure d’accueillir cet évènement. « Nous prévoyons d’agrandir le ponton de Mamoudzou et de doubler sa capacité d’accueil afin de pouvoir amarrer les navires », ambitionne le président du DIY. Il prévoit d’en accueillir 25. En ce qui concerne la logistique, « 3.000 lits sont attendus pour loger les navigateurs, ce qui est impossible à l’heure actuelle », ajoute-t-il. Le plaisancier reste optimiste car un partenariat est déjà conclu avec la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) qui prévoit de faire venir des acteurs extérieurs de l’hôtellerie.

« C’est un gros chantier de l’ordre de 5 millions d’euros », rapporte l’instigateur du projet. « Nous parlons des retombées économiques avoisinant les 20 à 30 millions d’euros, un excellent retour sur investissement », se réjouit-il. Mais Frédéric Niewiadomski souligne aussi les bienfaits de l’aspect « terrestre » du GTY, avec la création de pas moins de 2.500 emplois. « Pas seulement dans le secteur maritime, mais aussi dans ce qu’on appelle l’électron arrière, à l’instar de la restauration, l’hôtellerie et le tourisme. » Si cette course lui tient tant à cœur, c’est surtout dans l’espoir de faire prendre conscience de l’environnement aquatique qui entoure la population : « Nous sommes en train de couler et il nous faut un rayonnement mondial. Mayotte va se développer uniquement par le bleu, car c’est notre richesse première ». Selon lui, le seul moyen d’éradiquer la délinquance omniprésente à Mayotte, c’est en impliquant activement les jeunes dans le projet.

« Mayotte, l’âme d’une île » ou la découverte de l’île aux trésors

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Véritable ode à la culture mahoraise, « Mayotte, l’âme d’une île », fruit de la collaboration entre le photographe Thierry Cron et l’écrivain Nassuf Djailani est désormais disponible en librairie. L’ouvrage invite, au fil des lignes et des images aux émotions captivantes, à porter un autre regard sur l’île. Et à entretenir le feu d’un patrimoine sans pareil.

Si la République est « une et indivisible » comme le dit le texte, ce petit bout de terre reste pourtant unique. Souvent invisible. Noyés sous les gros titres des journaux « métros » ou éludés par les œillères des voyageurs, oubliés dans la course à la modernité et rattachés de force au passé, vivent ainsi ses secrets. Et vive ses secrets ! Alors, pour qu’ils ne soient tus à jamais, Thierry Cron et Nassuf Djailani se sont fait les orpailleurs des richesses de Mayotte. Non pas pour se les approprier, mais pour les partager, pour « encourager la jeunesse à reprendre le flambeau que les anciens ont su leur transmettre ». Un objectif pour ce premier, le photographe, une émotion pour ce second au choix des mots. L’émotion, justement, est partout dans ce livre. Au fil des pages, au cours des lignes de lettres et des êtres en images. Les âmes y sont incarnées.

On les retrouve ainsi, ces âmes, ces hommes et ces femmes de l’île à la pêche, aux champs, lors des mariages, au long de leur vie et des rites qui l’anime. « J’espère avoir témoigné d’une réalité. C’est en tout cas ma réalité, celle que j’ai vu à travers mon objectif mais elle a été capturée sans trucage, avec sincérité », explique Thierry Cron qui, au cours de ce projet a louvoyé entre « la peur de l’illégitimité » pour ce photographe métropolitain et le désir profond de rendre hommage à une culture « fabuleuse, que l’on ne retrouve nulle part ailleurs », pour le baroudeur qui a traîné ses boitiers aux quatre coins du globe. Et c’est sa rencontre avec Nassuf Djailani, dit-il, qui lui aura permis de lever ce premier doute. De sublimer cette seconde volonté.

Un autre regard sur Mayotte

« Quand j’ai lu les premiers textes de Nassuf, j’en ai pleuré. Le travail du photographe s’arrête à une image, et même si l’on fait tout pour raconter une histoire, chacun se l’interprète librement et Nassuf a su trouver des mots d’une justesse incroyable pour donner vie à ces images », lâche-t-il, encore ému par la symbiose qui est née de leurs deux regards sur une île. « Ce livre, c’est d’abord une histoire de rencontres. Le travail de Thierry m’a replongé dans mon lieu d’écriture », raconte de son côté l’écrivain. « Le passage par la photo permet de faire une pause, il n’y a rien de tel pour ancrer l’imaginaire », poursuit-il. Et pour plonger dans des réalités souvent discrètes. « En tant que natif de l’île, on croit tout savoir d’elle, mais c’est en réalité bien souvent une prétention de connaître qui nous empêche d’aller voir plus loin. Se mettre à la place de l’autre, à travers des visages, des mains, permet de raconter autre chose. De mon côté, en tout cas, ça m’a permis de faire un pas de côté », confie l’auteur.

Un autre regard, « pour rendre compte de ce qui disparaît face à la violence du temps », voilà donc ce que veut susciter « Mayotte, l’âme d’une île ». « J’ai découvert un Mayotte fabuleux, à rebours de celui qui fait l’actualité. Malheureusement, on a l’impression que toute la richesse de cette culture est vouée à disparaître. Inéluctablement, les coutumes s’effacent face aux désirs de modernisation et on ne peut pas vraiment jouer sur cela », pointe le photographe. Les coucher sur papier de la manière des plus nobles permet ainsi de les faire vivre encore. Et déjà, prenant du recul sur leur travail, les deux complices parviennent-ils à entrevoir de l’espoir.

Une île qui résiste

« On peut voir Mayotte comme une île oubliée ou comme une île qui résiste et je pense que malgré tout, elle compose et avance à son propre rythme. Pour moi, c’est une île qui résiste, dont les secrets sont bien ancrés mais qui ne les livre qu’à ceux qui veulent bien regarder. Malgré les différentes pressions qui peuvent l’accabler, tout cela vit encore et ce livre est une manière d’offrir à ceux qui maintiennent ce feu le sentiment d’être réhabilités, de pouvoir se réapproprier une parole, une vision alors que l’espace est saturé de paroles tordues, manipulatrices », considère Nassuf Djailani. « J’espère que la jeune génération, que je sais attachée à la culture exceptionnelle qui leur a été transmise, tienne encore dans ce patrimoine et j’espère que ce livre les y encouragera », conclut le photographe. Ra hachiri.

Covid-19 : un casse-tête pour les crèches à Mayotte

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Crise sanitaire oblige, les crèches du 101ème département sont toujours limitées à des groupes de 10 enfants maximum, selon le guide ministériel publié au début du confinement. Un protocole qui pèse sur les structures et sur les parents, dont beaucoup restent sur liste d’attente alors que la rentrée approche.

C’est l’incertitude de plus pour cette rentrée. Alors que les vacances touchent à leur fin, trouver une place en crèche risque bien de relever du parcours du combattant cette année. Car avec l’état d’urgence sanitaire prolongé à Mayotte jusqu’au 30 octobre, les crèches doivent toujours appliquer les protocoles édités en mars dernier qui prévoient une capacité d’accueil maximale de dix enfants à la fois. Alors depuis quelques jours, c’est un peu la chasse à la place.

“Nous avons rouvert depuis le 3 août et là, les demandes affluent”, raconte Fatima Aboudou, la présidente de la fédération des crèches de Mayotte. Sa structure à Kani-Kéli peut en temps normal dorloter une vingtaine d’enfants, un nombre qu’elle prévoyait de faire monter à 30 à la rentrée. Impossible, avec ces restrictions sanitaires qui perdurent. Résultat, 23 familles sont encore sur liste d’attente. Même son de cloche à Emamex, la crèche de Kangani, qui peut normalement prendre en charge trente bambins. “Beaucoup de parents qui étaient déjà inscrits chez nous sont très en colère. C’était leur moyen de garde favori et là on les vire, ce qui les met dans une situation très compliquée”, déplore Faima Zidini, la directrice adjointe de l’établissement.

Seulement 262 places à Mayotte

“Cela fait deux semaines que j’ai fait ma demande, mais c’est plus une formalité. Au fond, je sais bien que la liste est longue devant moi”, soupire ainsi Said Kalame. Cette responsable de service aménagement et voirie à la mairie, mère de trois enfants, dont une fillette de 10 mois, a repris le travail à temps plein depuis juin. Et pour garder la plus jeune, elle a dû faire des pieds et des mains. “J’ai vraiment fait un appel au secours à tous mes contacts. Heureusement, j’ai pu trouver une nounou in extremis”, rembobine-t-elle. Sinon, sa fille devait rester à la maison avec sa grand-mère, déjà âgée. “Pour moi, ce n’était pas la solution, ma fille a besoin de s’éveiller, et vu qu’elle a déjà vécu en crèche, c’était comme la faire régresser”.

Or, difficile de trouver un plan B. “Beaucoup de crèches ont déjà une liste d’attente conséquente”, signale Fatima Aboudou. Les 262 places réparties au sein des 13 structures en activité, dont 4 micro-crèches, valaient déjà cher avant la crise sanitaire. Et aujourd’hui, seules quatre peuvent se permettre d’avoir deux groupes de dix enfants. Une organisation qui apporte de plus son lot de contraintes pour les établissements. À Kangani, Emamex a ainsi fait le choix de répartir les enfants en trois petits groupes. “Et pour chaque groupe, il faut prévoir un espace couchette, un espace jeux, et un espace change”, développe Faima Zidini. Sans parler du personnel en charge de chaque groupe, qui ne doit pas se croiser, ou encore de la disposition des couchettes, qui doivent être espacées minimum d’un mètre les unes des autres.

Encore le flou sur les aides

À ces réorganisations complexes s’ajoutent enfin les mesures sanitaires, qui pèsent sur le personnel et les enfants. “On ne peut plus que leur proposer des jeux que l’on peut désinfecter facilement. Cela veut dire, plus de piscine à balles, plus de lego, plus de dinette… Pour eux, les journées ne sont plus aussi enrichissantes qu’avant”, note la directrice adjointe d’Emamex. Et pour les structures, cette situation représente aussi un coût financier non négligeable, car elles doivent notamment se fournir en masques et laver les tenues des employés quotidiennement. Des dépenses qui finissent par peser, alors que la limitation des capacités d’accueil représente déjà un manque à gagner. À la base, les établissements se sont vus promettre une aide de 10 euros par jour et par place non attribuée. “Mais vu que ces aides se sont arrêtées au 3 juillet au niveau national, on ne sait pas combien de temps nous allons pouvoir continuer à en bénéficier à Mayotte”, explique Fatima Aboudou. Une réunion est prévue le 24 août avec la Caisse de sécurité sociale, la préfecture, l’ARS et la PMI pour tenter de démêler cette situation. “J’espère bien que la règle des dix enfants va être levée rapidement”, souffle Alexandra André, directrice de la crèche de Bandrélé. Sans cela, de nombreux parents risquent bien de se retrouver sur la touche…

Risques naturels à Mayotte : pour Fahad Idaroussi Tsimanda, « sans la sensibilisation, nous sommes voués à l’échec »

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Une équipe de chercheurs se trouve actuellement à Mayotte pour identifier les différents points de refuge en cas de risques naturels. Doctorant au laboratoire Gred à l’université Paul Valéry de Montpellier 3, Fahad Idaroussi Tsimanda, un Mahorais de 28 ans originaire d’Acoua, y prend part et détaille les contours de cette mission baptisée « Tsunami ».

Flash Infos : En quoi consiste cette mission scientifique ? Et qu’est-ce qui va en découler ?

Fahad Idaroussi Tsimanda : À la suite des différents essaims de séisme à Mayotte, la préfecture nous a sollicités, mon professeur, Frédéric Leone, une ingénieure de mon laboratoire, Monique Gherardi, et moi-même, pour procéder à des repérages pendant deux semaines. Compte tenu de la naissance du volcan, notre objectif est de modéliser les différents tsunamis qui sont susceptibles d’affecter l’île avant de les cartographier pour identifier les différentes zones qui seraient plus impactées que d’autres, à l’image des plaines côtières. À partir de là, nous avons essayé de repérer les zones de refuge pour que la population puisse se mettre à l’abri.

Toutes ces informations seront intégrées dans l’application SW Map. En cliquant sur n’importe quelle maison, vous pourrez connaître l’itinéraire le plus court pour rejoindre les points de refuge, que nous avons géoréférencés pour les associer dans le système d’information géographique qui nous permet de modéliser des cartes.

Enfin, nous réfléchissons aux différents dispositifs qui pourront être installés, tels que des sirènes. En cas de risque avéré, elles seront automatiquement enclenchées. Des GPS et des radars, placés au large de Mayotte, alertent en premier lieu le service interministériel de défense et de protection civile, qui donne ensuite le signal aux différentes communes.

FI : En décembre dernier, le cyclone Belna est passé à quelques kilomètres de Mayotte. Cet événement avait poussé les autorités compétentes à réagir dans l’urgence et a mis en lumière que les habitants préféraient rester chez eux plutôt que de rejoindre un lieu sûr.

F. I. T. : La population marginale et vulnérable a peur de perdre le peu en sa possession. En cas de risques de cyclone, elle refuse d’évacuer. Mais la croyance joue également un grand rôle dans ce type de refus. En parallèle de cette mission, je poursuis ma thèse intitulée « Vulnérabilité différentielle des migrants à Mayotte : enjeux socio-politiques de la réduction des risques dans un département français insulaire en développement », qui me permet de réaliser des enquêtes dans les bidonvilles. Bon nombre d’habitants m’expliquent que Dieu pèse sur leurs gestes et leurs agissements. Après, le problème est aussi plus profond et concerne leur situation administrative. Pour éviter toute expulsion, certains préfèrent ne pas entrer en contact avec les autorités.

Les municipalités doivent jouer le jeu et rentrer dans les quartiers les plus précaires. Et pour cela, elles devraient se rapprocher des associations qui y mènent des actions. Ces structures connaissent davantage les réalités du terrain et surtout, elles ont une relation de confiance avec les habitants de ces quartiers informels. Sans la sensibilisation, nous sommes voués à l’échec et à des catastrophes de grande ampleur. Il faut aussi passer par les écoles. Car vous n’êtes pas sans savoir que les enfants sont un vecteur de message auprès de leurs parents.

FI : Avec ses spécificités, Mayotte peut-elle espérer passer entre les mailles du filet en cas de catastrophe naturelle ?

F. I. T. : Le risque est réel ! Il faut savoir que dans l’océan, Mayotte se situe sur un plancher, qui rassemble des zones de montagne. Et avec les différents essaims de séisme, celles-ci peuvent se fragiliser et s’écrouler. Les roches dans l’eau peuvent être un vecteur de tsunami. En cas de glissement de l’édifice du volcan, ce phénomène peut provoquer l’arrivée soudaine de grosses vagues. Du coup, la mangrove est protectrice, tout comme les deux barrières de corail qui entourent l’île. Elles peuvent jouer un rôle important dans l’atténuation d’un éventuel tsunami.

Malheureusement, la situation est plutôt alarmante à certains endroits, notamment à Iloni où la mangrove est assiégée et abîmée. Et d’ici quelques années, il y a de fortes chances qu’elle ait complètement disparu du paysage… Idem à Acoua. La zone marécageuse a été rasée et remblayée pour accueillir le terrain de football et les écoles maternelles. Sans oublier le remblai de M’tsapéré où se situe le siège de la direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement. Je pense que l’État n’a pas pris conscience, ou alors très tardivement, de l’enjeu de la mangrove.

En 2014, lors du passage du cyclone Hellen, il y a eu un phénomène de submersion marine. Cela montre bien que quand la nature décide de reprendre ses droits, l’humain n’est qu’un simple pion sur l’échiquier. Si l’objet de cette mission n’est pas de créer des psychoses, nous devons avertir les acteurs. Il faut insister et travailler main dans la main avec la population. Le risque zéro n’existe pas. Nous ne pouvons prédire ce que l’avenir nous réserve… Sensibiliser et faire des exercices permettent de minimiser les impacts. Au Japon, cela a pu sauver 95% des vies. Il faut donc multiplier les exercices. Il ne faut pas en faire un par an, mais plutôt un tous les trimestres pour que les mécanismes puissent rentrer plus facilement dans les mœurs. Comme le dit l’adage, mieux vaut prévenir que guérir !

Jardin de M’tsangamouji : une association mahoraise aux multiples facettes

L’association Jardin de M’tsangamouji fête cette année ses 5 ans d’activités. 5 ans de dur labeur dédiés à préserver et mettre en valeur la nature ainsi que le patrimoine de Mayotte. Les bénévoles sont également impliqués dans l’éducation et accompagnent les plus jeunes dans leur parcours scolaire.

Lorsqu’il a créé son association en 2015, Moussa Nassim, président de Jardin de M’tsangamouji, voulait redorer l’image de sa commune du même nom. « Il y avait des manques, à part le sport, rien d’autre ne fonctionnait », déclare-t-il. C’est donc tout naturellement qu’avec 10 autres membres de l’association, ils sensibilisent les habitants aux questions environnementales. Très vite, le nombre de bénévoles s’agrandit et ils réalisent que d’autres domaines tels que l’éducation et le patrimoine culturel et historique sont également délaissés. Depuis 2017, Jardin de M’tsangamouji accompagne les élèves de CM1 jusqu’en 3ème pendant la période scolaire. « De 18h à 20h, des animateurs et quelques professeurs les aident pour leurs devoirs. Et chaque année, nous organisons un grand concours communal pour les élèves du primaire. Ils sont récompensés avec des tablettes et des livres d’exercices », explique Moussa Nassim. Ceci-dit, les plus grands enjeux de l’association demeurent dans le patrimoine et l’environnement. Depuis 2017, elle mène des actions de sensibilisation sur l’utilisation de l’eau et de l’énergie. Des sorties pédagogiques sont organisées sur les retenues collinaires, les stations de traitement des eaux ou encore les rivières. Le président de l’association est particulièrement impliqué dans la préservation de la Lagune d’Ambato, une zone humide se trouvant à M’tsangamouji. « Elle est protégée par un arrêté préfectoral depuis 2005, mais elle a été laissée à l’abandon. Des gens l’occupent illégalement, il y a donc beaucoup de dégâts. C’est pourtant un site exceptionnel puisqu’il abrite des plantes endémiques, des plantes qui ont disparu de Mayotte mais que nous retrouvons que dans cette lagune. Ainsi que des oiseaux en voie de disparition. »

Des combats menés seul

Jardin de M’tsangamouji est souvent sollicité par les écoles, les autres associations, ainsi que par les touristes pour organiser des excursions, en parallèle avec son travail de protection du patrimoine et de l’environnement, mais aujourd’hui leurs actions ne suffisent plus. « Nous avons des sites magnifiques à Mayotte, mais qui ne sont pas forcément connus. Il faut les mettre en valeur et les faire connaître », selon le président de l’association. Les sites historiques nécessitent également un coup de pouce qui faciliterait le travail des bénévoles. Des fouilles et des études approfondies permettraient d’appuyer leurs propos lors des visites pédagogiques. Tout cela a un prix et Jardin de M’tsangamouji n’a pas les moyens financiers de s’impliquer à 100%. « L’intercommunalité 3CO nous a indiqué qu’elle avait un projet pour la préservation du patrimoine, mais pour l’instant nous n’avons rien vu. Du côté de l’État, il n’y a pas grande chose qui se fait non plus », regrette Moussa Nassim. L’association a songé plusieurs fois à créer et à porter les projets elle-même mais il fallait à chaque fois avancer le budget avant d’être remboursé, chose qui n’était pas possible pour elle. À cela s’ajoute le laxisme de la justice qui ne serait pas assez ferme avec ceux qui dégradent la nature et tuent les animaux. « La justice doit nous aider en prononçant des peines exemplaires pour dissuader les autres. » Leur appel sera-t-il entendu ou sera-t-il classé avec les nombreux appels à l’aide des autres associations ? L’avenir nous le dira.

Mayotte Hebdo de la semaine

Mayotte Hebdo n°1116

Le journal des jeunes