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Le mouvement continue

Malgré la réunion mardi soir avec la ministre des Outre-mer, l’intersyndicale et les collectifs ont décidé mercredi de maintenir la grève générale et les barrages routiers.

L’intersyndicale avait appelé la population à se rassembler mercredi matin place de la République (Mamoudzou) afin de décider de la poursuite ou non du mouvement, suite à l’ultime réunion avec la ministre des Outre-mer mardi jusque très tard le soir.

Un rendez-vous qui a fait flop, la place de la République étant absolument vide hier matin et les barrages toujours fermement tenus par des manifestants peu enclins à les quitter. Hier, la gendarmerie de Mayotte en dénombrait encore onze sur le territoire, les mêmes que la veille. En fin de matinée, l’intersyndicale et les différents collectifs membres du mouvement étaient réunis à Tsingoni, notamment afin de jurer sur le Coran « qu’ils ne trahiront pas le mouvement ». Serment tenu puisqu’ils ont annoncé mercredi en fin d’après-midi « maintenir la grève générale », à l’issue d’une entrevue à laquelle ont également participé des représentants de chaque barrage. « On s’est déjà fait avoir avec l’État et ses promesses », tempête Maoulida Momed, un des porte-parole. Certains syndicalistes ont, en outre, très mal reçu le communiqué apaisant que la ministre des Outre-mer, Annick Girardin, a envoyé dans la nuit de mardi à mercredi, se félicitant de « l’accord de principe entre l’État, les élus, les syndicats et les collectifs », ainsi que des « engagements au nom du gouvernement pour renforcer la sécurité, la lutte contre la délinquance et la lutte contre l’immigration clandestine » mais surtout de l’engagement de l’intersyndicale et des collectifs à lever les barrages. « Nous l’avons perçu comme une trahison », explique Saïd Hachim, membre du mouvement, qui indique avoir reçu des « menaces et des invectives » de la part des manifestants. En effet, pour les leaders, la levée des barrages devait d’abord être discutée avec la population. « Ils [les manifestants] seront les seuls à décider [de la levée des barrages] », commentait Fatihou Ibrahim, un des représentants du mouvement social, à la sortie de la réunion avec la ministre des Outremer mardi. « Mais nous, intersyndicale et Comité des citoyens de Mayotte, aurons cette responsabilité de tenter de leur expliquer l’intérêt de suspendre le mouvement (…) le temps de vérifier que les paroles que nous a données l’État sont des paroles fiables. Nous avons demandé toutes les garanties pour pouvoir juger de cela. » Le porte-parole demande désormais des réponses urgentes, portant uniquement sur la sécurité dans un premier temps. Cependant, le syndicaliste Salim Nahouda a indiqué que l’intersyndicale et les collectifs n’étaient pas opposés à rencontrer deux des personnalités de la délégation ministérielle qui leur en ont fait la demande, à savoir le général Lambert Lucas, commandant de la gendarmerie Outre-mer, et Jean- Jacques Brot, ancien préfet de Mayotte. Avec le conseiller d’État Jean Courtial, ces trois personnes ont été chargées par Annick Girardin de travailler durant un mois maximum à la mise en place des engagements que la ministre a pris mardi avec l’intersyndicale, les élus et les collectifs.

Mouvement social | Appel à la suspension de la mobilisation

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À l’issue d’une réunion entre la ministre des Outre-mer, Annick Girardin, plusieurs élus de Mayotte et des représentants de l’intersyndicale et du Collectif des citoyens inquiets de Mayotte, les différentes parties se sont accordées sur une suspension d’un mois de la mobilisation. Une suspension qui ne signifie pas pour autant la fin du mouvement social.

« Confiance » : c’est le mot d’ordre qui régnait à l’issue d’une réunion entre la ministre des Outre-mer, Annick Girardin, plusieurs élus du territoire*, et des représentants de l’intersyndicale et du Collectif des citoyens inquiets de Mayotte. Cinq heures d’échanges pour parvenir à un consensus : la suspension du mouvement social qui paralyse l’île depuis trois semaines. Pour autant, ni protocole, ni accord formel n’ont été signés. Les leaders du mouvement doivent d’ailleurs tenir une réunion ce matin, place de La République à Mamoudzou, pour consulter et tâcher de convaincre les manifestants de lever les barrages durant ce qui peut être qualifié de période d’essai. Car c’est bien de cela qu’il s’agit.

« Ils [les manifestants] seront les seuls à décider [de la levée des barrages], commentait ainsi Ibrahim Fatihou, un des représentants du mouvement social, mais nous, intersyndicale et Comité des citoyens de Mayotte, aurons cette responsabilité de tenter de leur expliquer l’intérêt de suspendre le mouvement (…) le temps de vérifier que les paroles que nous a données l’État sont des paroles fiables. Nous avons demandé toutes les garanties pour pouvoir juger de cela. »

Parmi elles, et outre les mesures de sécurisation des établissements, des transports scolaires et l’arrivée d’effectifs supplémentaires de forces de l’ordre, de nouvelles mesures concédées par le gouvernement. Quinze, en plusieurs axes : le démantèlement des bandes « de criminels semant le chaos sur le territoire » ; la lutte contre les attestations d’hébergement de complaisance et les reconnaissances frauduleuses de paternité ; la mise en place de navires supplémentaires pour lutter contre l’immigration clandestine ; mais aussi la reconnaissance des acteurs associatifs luttant contre l’insécurité, qui seront associés au travail mené par l’État durant ce mois à venir. De même, l’intersyndicale et le Comité des citoyens seront parties prenantes des décisions qui seront prises durant cette période. Un des points de revendication importants. « Cela a été des discussions difficiles, a expliqué Ibrahim Fatihou. Il a fallu qu’on se comprenne, qu’on se mette sur la même longueur d’onde avec le gouvernement, qu’on comprenne que les souffrances de Mayotte sont réelles, que ses besoins sont réels, que ses difficultés seraient inacceptables partout dans la République, et il a fallu que les membres de l’intersyndicale et du gouvernement parlent avec leur cœur. (…) Il me semble qu’au terme de ces discussions, nous avons des avancées réelles. »

« L’État se renforcera »

Avant de s’envoler immédiatement pour la métropole où se tient ce matin le conseil des ministres, Annick Girardin s’est elle aussi félicitée de cet accord de principe validant sa méthode, notamment l’envoi de trois émissaires pour évaluer les besoins du territoire et déterminer des pistes d’actions : « Les Mahorais et les Mahoraises ne peuvent plus attendre (…) La première des choses que je veux dire est que, sur ce territoire, l’État se renforcera, sera davantage présent, jouera davantage son rôle sur l’ensemble des questions qui lui ont été posées. (…) Dans un mois, nous rendrons notre travail collectif pour qu’il soit ensuite approuvé. (…) J’ai aussi répondu à une quinzaine de demandes du Collectif et des élus, qui vont toutes dans le même sens : plus de sécurité, plus de lutte contre l’immigration illégale, plus de présence de l’État. Un mieux d’État, un véritable accompagnement de l’État à tous les niveaux et sur tous les sujets (…). C’est aujourd’hui un message d’un retour de l’État, ici, sur ce territoire, que je suis venue délivrer. » Et d’ajouter souhaiter, sur la décision qui sera prise aujourd’hui de lever les barrages ou non, « le retour au calme le plus vite possible, puisque nous avons devant nous un court mois de travail pour aboutir sur un ensemble de réponses à apporter sur le territoire. »

À considérer que la levée des barrages soit acceptée par les manifestants, une nouvelle réunion aura donc lieu mi-avril, à Mayotte ou dans l’Hexagone, puisque « rien n’interdit qu’une mission vienne sur Paris », a conclu la ministre.

*Parmi lesquels les maires de Mamoudzou, de Mtsamboro, Bandrélé, Bandraboua, Tsingoni, Dzaoudzi-Labattoir, le sénateur Thani Mohamed Soilihi, le député Mansour Kamardine ou encore les élus du Département Issa Abdou et Fatima Souffou.

 

Un dénouement imprévu ?

L’annonce d’une suspension du mouvement social n’était pas évidente, à la vue de l’arrivée de la délégation de l’intersyndicale et du Comité des citoyens inquiets. Estimant que la ministre des Outre-mer, Annick Girardin, avait « manqué de respect aux Mahorais », Ibrahim Fatihou déclarait à son arrivée, et à propos de la ministre qualifiée de « boîte aux lettres » : « Nous sommes venus [lui] remettre un document pour demander au gouvernement un véritable interlocuteur. » Rien ne laissait donc envisager un pas vers une sortie de crise, d’autant que le leader expliquait que « nous, syndicat et Collectif, avons initié ce mouvement parce que nous avons entendu la souffrance de nos compatriotes de Mayotte. Comme nous l’avons toujours dit, ce mouvement peut dépasser le cadre des syndicats et du Collectif parce que les gens souffrent. Personne ne l’accepterait [cette situation], alors pourquoi le gouvernement insiste pour nous la faire accepter ? Nous ne pouvons pas. Et même s’il a l’intention de nous dicter comment faire, car apparemment il se croit encore en colonie, nous aurons toujours la force de dire non, karivendze. »

 

 

Un nourrisson de deux mois décède à Koungou

La grève contre l’insécurité aura fait une victime. En effet hier en début de soirée une mère de famille appelle les secours pour une prise en charge rapide de son bébé. Arrivés devant l’impressionnant barrage érigé par les manifestants, devant la pointe Koungou, les agents du Smur mettront plusieurs minutes avant de parvenir à se frayer un passage. Une fois sur place, ils contastatent que le nourrisson est en insuffisance respiratoire. Ils tenteront un massage cardiaque mais le bébé fini par succomber.

Visite ministerielle | Des mesures qui n’apaisent pas l’intersyndicale

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La ministre des Outre-mer est arrivée hier dans la matinée pour tenter de convaincre les Mahorais que l’État ne les abandonne pas. Une mission difficile qui se heurte à la méfiance de la population locale, comme de l’intersyndicale. Pour autant, Annick Girardin a annoncé une série de mesures en termes de sécurité et de lutte contre l’immigration clandestine.

 » Vous nous avez abandonnés, madame la Ministre ». Malgré les brimades des Mahorais, Annick Girardin a tenu à démontrer que le gouvernement se mobilise pour leur sécurité. Parmi les mesures annoncées : « le maintien jusqu’à la fin de l’année scolaire de 60 gendarmes » parmi ceux débarqués récemment pour sécuriser la rentrée scolaire. La ministre a également confirmé la création d’une brigade de gendarmerie nationale à Koungou ainsi qu’annoncé « l’augmentation de 50% des effectifs de la réserve territoriale de la gendarmerie » actuellement estimée à 60 réservistes. Annick Girardin a précisé que d’autres effectifs de police viendront prochainement sur le territoire dans le cadre de la création d’une nouvelle « brigade de prévention de la délinquance juvénile ». Enfin, une « police du quotidien » sera mise en place composée de 10 policiers et 20 gendarmes supplémentaires. En matière de lutte contre l’immigration clandestine, la ministre a déclaré qu’un Etat-major opérationnel de lutte contre l’immigration clandestine serait créé. L’envoi d’un navire patrouilleur militaire ainsi que l’accroissement des capacités d’appui aérien en hélicoptères sont également prévus. Enfin, Annick Girardin a précisé qu’il serait prochainement nommé un « officier de liaison au sein du ministère de l’Intérieur comorien afin d’améliorer le dispositif de lutte contre l’immigration clandestine ». Des « sous-mesures d’urgence qui ne résoudront rien sur le long terme », estime le syndicaliste Salim Nahouda.

« La ministre sème la zizanie »

Débarquée en Petite-Terre tôt dans la matinée, la ministre des Outre-mer a tenté d’établir un dialogue avec les Mahorais. Une mission difficile qui s’est heurtée d’emblée à la défiance de l’intersyndicale et à des barrages routiers érigés par plus d’une centaine de manifestants, notamment sur le rond-point du Four à Chaux. « Des élus qui étaient au départ solidaires du mouvement ont finalement décidé d’ouvrir leurs établissements scolaires pour accueillir la ministre », s’enrage Foumo Silahi, l’un des porte-parole de l’intersyndicale. Pour le militant, la ministre « sème la zizanie au sein du mouvement social en le divisant ». Résultat : deux réunions étaient organisées hier, l’une regroupant des élus, le préfet et la ministre, et une autre réunissant l’intersyndicale « et les élus qui sont restés solidaires du mouvement », précise Silahi. Si l’intersyndicale reconnaît « un début d’investissement » chez le gouvernement, les mesures annoncées ne sont pas suffisantes : « Il faut renforcer davantage les effectifs de police et s’occuper des mineurs isolés. Et n’oublions pas l’école, qui reste un problème majeur à Mayotte », martèle Salim Nahouda de l’intersyndicale. Par voie de communiqué, celui-ci ne tempère pas sa colère : « Nous ne cautionnons pas le mépris avec lequel madame la Ministre continue de traiter toute la population de Mayotte ». Il conclut pourtant : « Nous demeurons néanmoins ouverts à de véritables négociations ». Alors que la ministre a annoncé rester quelques jours supplémentaires à Mayotte, ce souhait pourrait bien se réaliser prochainement, ou pas. Quoi qu’il en soit, la ministre a d’ores et déjà promis de revenir « très vite » pour une troisième visite sur l’Ile aux Parfums.

Programme de la ministre et manifestation

Arrivée lundi peu avant 10h, la ministre a tenu à rencontrer directement les manifestants sur les barricades de Petite-Terre. Ces barrages n’étaient pas les seuls puisque la préfecture en a dénombré douze rien qu’en Grande-Terre pour la journée de lundi, et a rapporté des caillassages en matinée sur celui de Koungou. Assise dans l’herbe, Annick Girardin a échangé un temps avec les manifestants. Puis, elle s’est rendue vers 13h place de la République, à Mamoudzou, pour un autre temps d’échange populaire. Si elle a reçu un salouva et un accueil chaleureux d’une habitante, la ministre s’est fait huer à plusieurs reprises et a été « accueillie » par une poignée de manifestantes remontées, brandissant des banderoles sur lesquelles il était marqué « Gouvernement assassin ». Puis, elle s’est rendue au sein de l’hémicycle du Conseil départemental et a discuté avec des citoyennes, dont la Femme leader Faouzia Kordjee. Après un stop à la Maison des entreprises, elle a tenu une conférence de presse puis s’est entretenue avec des élus en Petite-Terre. A l’heure où nous bouclons, le programme de la ministre pour ce mardi n’était toujours pas connu. En revanche, l’intersyndicale a confirmé que la manifestation populaire prévue aujourd’hui était maintenue, avec un rendez-vous à 8h, place de la République, à Mamoudzou.

 

 

Mouvement social | Les manifestants préparent « la seconde étape du mouvement »

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Satisfaits que la situation de Mayotte résonne jusqu’en métropole via les médias nationaux, les manifestants sont sur le pied de guerre pour préparer « la seconde étape du mouvement » : mobiliser l’exécutif. En attendant, les grèves et les barrages se poursuivent. L’une des conséquences : la fermeture du service de consultations externes du Centre hospitalier de Mayotte, hier. 

Ce jeudi 8 mars, neuf barrages étaient dressés sur les routes mahoraises, à Chiconi, Chirongui, Coconi, Bandrélé, Kahani, Bouyouni, Longoni, Koungou, Tsararano. La mobilisation sociale ne montre aucun signe d’affaiblissement. D’autant plus au regard de l’intérêt soudain de la presse nationale et de l’opinion publique par-delà les frontières de l’île : « Nous avons réussi notre première étape consistant à mobiliser la métropole au travers de la presse. Maintenant, il est temps de passer à la seconde étape : faire réagir l’exécutif », explique Foumo Silahi, l’un des porte-parole du mouvement. Malgré cette « petite victoire » pour le mouvement social, les grèves et les barrages comptent bien redoubler d’intensité. L’un des stigmates de ce phénomène : la fermeture du service des consultations externes du Centre hospitalier de Mayotte (CHM), faute de « personnel disponible ». « Depuis le début des grèves, c’est la première fois qu’un service est fermé », constate-t-on du côté du service communication du CHM. En guise de remède temporaire, le CHM répartit actuellement ses effectifs dans les centres de référence (dispensaires, par exemple) les plus proches des domiciles respectifs des personnels médical et soignant.  

La crainte de ne plus maîtriser les barrages

A l’entrée du barrage de Tsararano, femmes, enfants et pères de famille sont réunis autour d’un barrage de pneus et de bambous. Si les manifestants sont satisfaits que la métropole se saisisse des problématiques mahoraises par l’intermédiaire des journalistes, la défiance à l’égard de ces derniers reste présente : « Nous avons parfois été déçus par le traitement du mouvement social », lance d’emblée un manifestant. « Beaucoup de journalistes se focalisent sur les débordements au lieu de se concentrer sur notre message de fond : la lutte pour plus de sécurité ». Les tensions désamorcées, certains manifestants font part d’un événement ayant provoqué leur colère plus tôt dans la matinée : « Deux camions de CRS ont foncé dans le barrage vers 4h du matin. C’est scandaleux ! « , dénonce un manifestant. Une information formellement démentie par la gendarmerie qui explique que les camions auraient circulé alors que les barrages n’étaient pas encore érigés.

Pour les usagers de la route, passer le barrage de Tsararano relève du parcours du combattant : « A part les ambulances et les personnes âgées, personne ne passe ! », entend-on sur la barricade alors qu’un taxi transportant des personnes en situation de handicap file entre les pneus temporairement dégagés pour laisser passer le véhicule. Pour les piétons, un petit sentier boueux est libéré afin de contourner le barrage. « Nous avons installé une certaine discipline avec l’obligation de laisser passer les travailleurs du secteur médical et social », explique Foumo Silahi. Mais certains événements tels que la fermeture du service des consultations externes du CHM témoignent de la liberté d’appréciation de ces « obligations » selon les manifestants. « Nous ne sommes pas des chefs, mais plutôt des médiateurs », justifie M. Silahi. L’une de ses craintes : « ne plus maîtriser les barrages et les manifestations si jamais l’Etat n’apporte pas de réponse forte ». Pour motiver ce dernier à agir rapidement, ce porte-parole martèle son projet de « multiplier les actions ». « Nous allons poursuivre les blocages en nous rapprochant progressivement de Mamoudzou. Et nous irons jusqu’à l’aéroport si nécessaire », ambitionne-t-il. Etape suivante : la venue de la ministre des Outre-mer à Mayotte annoncée « prochainement » par le porte-parole du gouvernement. Un événement qui sera décisif dans l’évolution de ce mouvement social qui s’annonce déjà historique.

 

Contestation sociale | Très forte mobilisation des habitants de Mayotte

La rue gronde et ne faiblit pas. Ils étaient 3 000 selon la police, entre 10 000 et 15 000 selon les organisateurs, à avoir manifesté hier contre l’insécurité, devant les caméras nationales. Le soir même, les barrages routiers ont repris.

L’ambiance était particulière ce mercredi matin, à Mamoudzou. Les barges ne circulaient quasiment pas, la plupart des commerces étaient fermés, et à la station-service de Kawéni, plusieurs dizaines de personnes patientaient, aux côtés d’une file colorée de bidons en plastique qui attendaient qu’on veuille bien les remplir. Bloqués depuis plusieurs jours, une partie des habitants de Mayotte n’a en effet pas pu s’approvisionner en essence ces derniers temps. La levée temporaire des barrages à l’occasion de la marche contre l’insécurité fut l’occasion pour ces habitants coupés du monde de se ravitailler fissa. 

Du côté de la pointe Mahabou, le cortège s’organisait et a démarré peu après 9h. Les élus en ont pris la tête, dont plusieurs maires et conseillers départementaux arborant l’écharpe tricolore, et portant une banderole où l’on pouvait lire « Terroristes, coupeurs de route, voleurs, violeurs, cambrioleurs, occupants illégaux de terres, trafiquants, faussaires… Toutes les formes de violence, subir et se taire ! Non ! Kari pvendzeee ! (On ne veut pas, en shimaoré, NDLR) » Et malgré une pluie battante, les habitants de Mayotte, joyeusement menés sous les intempéries par le son du shengué, ont défilé de la pointe Mahabou au rond-point Méga, faisant danser les drapeaux français, ces derniers ayant remplacé les signes syndicaux. A ce giratoire, la foule a marqué l’arrêt et a entonné une vibrante Marseillaise. 

Les chiffres divergent évidemment mais de toutes parts, on reconnaît que le mouvement a mobilisé, 3 000 personnes selon la police, entre 10 000 et 15 000 personnes selon les organisateurs. Ces derniers d’ailleurs ne comptent pas en rester là. Leur demande principale n’étant toujours pas satisfaite (la venue du président de la République, du Premier ministre ou du ministre de l’Intérieur), ils ont remis en place les barrages routiers dès le milieu de l’après-midi. Ces barrages étaient étanches, laissant passer les manifestants dans le sens « Paris-province » afin qu’ils puissent rentrer chez eux suite à la marche, mais faisant obstacle aux habitants voulant rallier le chef-lieu. A 16h30, la gendarmerie en dénombrait trois : à Bandrélé, Chirongui et Chiconi mais les leaders du mouvement promettaient de tous les ériger avant la tombée de la nuit.

 

Mansour Kamardine parle de « non-assistance à île en danger »

Suite à la marche de mercredi, le député Mansour Kamardine (LR) a réagi par un communiqué intitulé : « Mayotte : non-assistance à île en danger et discrédit de la ministre ». L’élu se félicite de « la réussite de la grande marche pour la paix ayant réuni plusieurs milliers de personnes, arborant des drapeaux tricolores et chantant la Marseillaise », ce qui « marque la détermination de l’ensemble des forces vives du 101ème département français à se battre pour la paix et le développement économique et social de Mayotte ». Mais le parlementaire est également colère : « Chaque jour qui passe sans réponse du gouvernement nous rapproche du chaos dans le département le plus pauvre de France. Le gouvernement le sait, il joue avec le feu et il le fait avec les plus faibles. Cette volonté manifeste et méprisante face à un mouvement unitaire sans précédent est ressentie comme de la « non-assistance à île en danger ». Les déclarations de la ministre des Outre-mer, hier (mardi, NDLR), à l’Assemblée Nationale, ont fini de saper sa crédibilité. Les élus, maires, conseillers départementaux et parlementaires de Mayotte se sont concertés ces dernières heures. Ils considèrent que le seul interlocuteur crédible est désormais le Premier ministre, à défaut le ministre de l’Intérieur dont ils demandent la venue en urgence à Mayotte. Nos concitoyens savent ce qu’ils veulent, que Mayotte retrouve sa sérénité et qu’une mise à niveau soit lancée en termes de politique de lutte contre l’immigration clandestine, de sécurité, d’équipements, d’accès aux services de base, de traitements sociaux et de politique éducative. Tout est sur la table, point besoin d’une conférence organisée dans plusieurs mois. Il n’y a plus qu’à définir un agenda de mise à niveau des infrastructures, des services et  politiques publiques. »

 

Grève générale | Opération « île morte », acte II

12ème jour de manifestation à Mayotte contre l’insécurité. Une semaine après la première opération « île morte », les organisateurs renouvellent l’action. Elle va s’accompagner d’une marche dans les rues de Mamoudzou.

Pas de barrages ce mercredi : le mouvement social contre l’insécurité regagne Mamoudzou, pour le 12ème jour de manifestation. Une marche est prévue dès 9h dans les rues du chef-lieu. Le départ s’effectuera au rond-point Mahabou, avec un passage par Kawéni, avant que les manifestants ne se dirigent vers la place de la République. Les drapeaux syndicaux sont proscrits dans le cortège, au profit des drapeaux français. « Quatre ou cinq victimes prendront la parole place de la République : des victimes d’occupation illégale de terrain, de coupeurs de route ou d’agressions sur les routes », détaille Foumo Silahi, l’un des porte-parole du Collectif des citoyens de Mayotte. Mardi 27 février, une marche similaire avait rassemblé plus d’un millier de personnes, selon la police.

Le cortège défilera dans le cadre d’une deuxième opération « île morte », une semaine tout pile après la première. Entreprises et commerces sont invités à baisser le rideau toute la journée. La Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb) et la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) rejoignent le mouvement de contestation, affirme le porte-parole du Collectif des citoyens de Mayotte. Selon lui, le Medef a adopté la même position. Jointe mardi, la nouvelle présidente de ce syndicat patronal, Carla Baltus, a indiqué qu’une réunion d’urgence devait encore se tenir dans l’après-midi, pour prendre une décision sur le sujet.

Des élus vont également venir gonfler les rangs du cortège. Par voie de communiqué, l’association des maires de Mayotte a rappelé que « les parlementaires, les maires et les élus départementaux de Mayotte se sont constitués en Comité pour rejoindre le mouvement de l’intersyndicale et du Collectif des citoyens de Mayotte contre l’insécurité et pour le développement de Mayotte. En solidarité avec ce mouvement, les collectivités locales seront fermées jusqu’à nouvel ordre. »

Une plateforme revendicative commune aux élus, à l’intersyndicale, au Collectif des citoyens de Mayotte et au patronat est en cours de rédaction. « On va essayer de faire une synthèse des différentes revendications. Ce document commun permettra de parler d’une seule et même voix », souligne Foumo Silahi. Le texte pourrait être révélé dès jeudi, lors d’une conférence de presse.

Ce sujet – tout comme l’organisation de l’opération « île morte » – était à l’ordre du jour d’une réunion, mardi, au Conseil départemental. Elle aurait rassemblé une trentaine de personnes : des membres de l’intersyndicale, du Collectif des citoyens, les maires de Sada et de Bouéni (porte-voix des élus), et des représentants de la CPME et de la Capeb pour le patronat. Invité par un participant, notre média a été tenu à l’écart des échanges.

Il y a peut-être été question d’un incident rencontré le matin même, sur l’un des barrages en place. Une femme enceinte, qui avait a priori un rendez-vous médical, aurait été empêchée de franchir les obstacles en place. Les faits sont confirmés par le porte-parole du collectif, qui assure que les manifestants ont ensuite « appelé les services concernés pour prendre en charge cette femme ».

Ce mardi, conducteurs et piétons ont rencontré en chemin quasiment les mêmes barrages que les jours précédents. Des barrières ont été érigées à Tsararano, Chirongui, Chiconi, Bandrélé, Coconi et Longoni. Ce dernier s’est davantage rapproché du port, sans pour autant le bloquer, indique-t-on du côté de la gendarmerie. En milieu d’après-midi, aucun incident n’avait été constaté par les militaires.

Comme les jours précédents, les barges ont fonctionné au ralenti, par manque de personnel, avec un seul point de départ, à l’amphidrome, côté Grande-Terre.

En déplacement jusqu’à ce soir à Mayotte, Laurent Wauquiez, le président du parti Les Républicains (LR), s’est rendu ce mardi matin sur le barrage de Tsararano, à la rencontre des manifestants. S’il a échangé avec ces derniers, il n’a en revanche pas pu s’entretenir avec les représentants de l’intersyndicale et du Collectif des habitants de Mayotte, qui ne « veulent pas marquer une préférence politique », explique Foumo Silahi. Le patron de la droite est en visite dans le 101ème département à l’approche de l’élection législative partielle des 18 et 25 mars, à laquelle participera un candidat LR.

Contestation sociale | Blocages routiers et union des maires

Alors que le blocage prévu de l’aéroport a achoppé et que les barrages routiers ont repris du service, les maires de l’île se sont réunis lundi après-midi et se sont mis d’accord sur une chose : ils demandent 1.8 milliard d’euros à l’Etat pour « la tranquillité des Mahorais ».

Un couac dans la communication. Tandis que l’intersyndicale décidait dimanche d’un éventuel blocage de l’aéroport lundi, une manifestante appelait les habitants lors d’une intervention radio à ériger de nouveau des barrages sur les principaux axes routiers de l’île dès le début de la semaine. Résultat ce lundi : des gendarmes mobiles sécurisaient l’aéroport où régnait un calme olympien – une partie des futurs passagers récupérant d’ailleurs un peu de leur courte nuit allongés sur les quelques bancs, étant certainement partis tôt en prévision des blocages et/ou des problèmes de barge – et des barrages routiers de nouveau dressés aux points-clés de l’île. 

Ce revirement a empêché quelques maires de se rendre à la réunion prévue lundi après-midi au Conseil départemental, bloqués par les barrages, notamment du Sud. Les élus se sont concertés afin de mettre en place un comité de coordination, organe représentatif qui leur permettra d’échanger en nombre réduit avec les différents acteurs du mouvement social, dont l’intersyndicale, mais également de « travailler sur le fond », a rappelé Anchya Bamana, le maire de Sada.

Outre la fermeture des hôtels de ville qui devrait être reconduite dans les jours à venir, les élus, via les intercommunalités et l’association des maires de Mayotte, ont décidé de l’élaboration « d’un plan de convergence sur dix ans », a annoncé Saïd Omar Oili. Le président de l’association des maires a également indiqué que ce plan se chiffrait à 1.8 milliard d’euros, montant nécessaire « si l’Etat veut mettre en place les conditions de tranquillité des Mahorais ». Dans le détail, 40 millions seraient dédiés aux équipements sportifs et culturels, 500 millions à l’habitat (pour la construction de 10 000 logements sociaux et le financement de la résorption de l’habitat insalubre, entre autres), 480 millions à l’eau potable et à l’assainissement (comprenant la construction de la troisième retenue collinaire et une centrale de dessalement), 238 millions aux routes et transports, et 480 millions aux constructions scolaires (pour les 600 classes manquantes et la mise en place de 150 réfectoires notamment). 

Les maires devaient rencontrer dans la foulée des membres de l’intersyndicale et envisagent de poursuivre le mouvement aujourd’hui en descendant dans la rue, leurs écharpes tricolores bien en vue. « On continue la pression », a déclaré le maire de Tsingoni tandis que Saïd Omar Oili lançait un cri de ralliement : « De l’action ! »

Comme les manifestants, les élus sont déterminés à poursuivre le mouvement tant que le président de la République – « ou à défaut le ministre de l’Intérieur » – ne se déplacera pas pour rencontrer la population en colère. Les maires ne digèrent pas l’absence de réponse de l’Etat malgré leur « appel d’urgence au Gouvernement », motion qu’ils ont déposée samedi auprès du président de la République, du Premier ministre et des ministres de l’Intérieur, de l’Education nationale, des Outre-mer et de la Santé ainsi qu’auprès du préfet de Mayotte, Frédéric Veau. « Si on essaie de faire pourrir le mouvement, en ne donnant pas de réponse à la population, l’Etat se trompe, car la population est déterminée », a asséné Saïd Omar Oili.

 

Initiative | L’école du civisme contre l’école de la rue

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A l’heure où Mayotte se soulève contre l’insécurité, des bénévoles proposent des solutions concrètes sans attendre d’aide de l’Etat. L’un des meilleurs exemples : l’école du civisme Frédéric d’Achery qui accompagne des enfants en difficulté, pour éviter qu’ils ne basculent dans la violence. 

Un îlot d’optimisme dans un désert d’inquiétude. Perchée sur les hauteurs du quartier de la Convalescence, l’école du civisme Frédéric d’Achery contraste avec l’atmosphère ambiante à Mayotte. Plutôt que de désespérer dans l’attente d’un geste de l’Etat, une poignée de bénévoles se mobilise depuis deux ans pour venir en aide aux enfants en difficulté. L’objectif : « Proposer un accompagnement et un cadre aux jeunes afin d’éviter qu’ils ne basculent dans la violence », résume Chaharoumani Chamassi, fondateur de l’école du civisme. A 54 ans, celui qu’on surnomme « l’infatigable » s’investit corps et âme dans la prévention de la délinquance. Egalement capitaine de police nationale, et chargé de mission auprès du préfet, l’homme n’a pas attendu de signe de l’Etat pour combattre la violence urbaine à la racine. « Tout ce que vous pouvez voir ici nous a été offert par des donateurs. Qu’il s’agisse des cahiers, des livres, des ordinateurs et même de la salle de classe », énumère-t-il avant de conclure : « Nous voulions prouver qu’il est possible d’agir contre la délinquance sans attendre d’aide venant des instances supérieures ». Née dans un principe d’indépendance vis-à-vis des institutions comme des partis politiques, l’école du civisme a cependant reçu une première aide de l’Etat de 5 000 euros l’année dernière. Une somme aux allures de récompense pour les bénévoles qui s’investissent quotidiennement contre la délinquance.

Un programme bien rodé 

Du lundi au vendredi, 16 élèves de 8 à 16 ans sont en classe de 18h à 20h. Au programme : des cours de français, de mathématiques et d’informatique « afin qu’ils soient autonomes dans leurs futures démarches administratives », justifie le fondateur de l’école. Des leçons d’histoire d’un genre particulier sont aussi dispensées : « Nous apprenons aux élèves l’histoire de Mayotte, des Comores et de Madagascar dans un désir de lien social. Cela permet à chacun de connaître le passé de l’autre et de créer des ponts entre les cultures », explique Chamassi. « J’aime ces cours contrairement à ceux de l’école où les professeurs se concentrent uniquement sur l’histoire de la métropole », déclare ainsi une élève. A l’occasion, des intervenants particuliers viennent également confier leur vécu tout en écoutant les élèves. « Nous avons eu des éducateurs, des entrepreneurs, des policiers, des cadis, un prêtre et même un ancien délinquant. Celui-ci a fini son intervention en larmes devant les élèves en racontant les difficultés familiales qui l’ont conduit à devenir un délinquant », se souvient « l’infatigable ». Des activités de chant et de théâtre sont également proposées aux élèves afin de favoriser leur expression en public. Enfin, des ateliers sont organisés au sein du quartier de la Convalescence pour créer du lien social avec les habitants. « Nous avons organisé des sorties pour laver le quartier de ses détritus bien avant que la mairie ne le fasse. Cela a notamment permis aux voisins de se rencontrer autour d’un événement qui profite au bien commun », se réjouit Chamassi. 

Blouse « bleu blanc rouge » pour tout le monde

Au-delà du contenu des cours, la particularité de cette école réside dans son enseignement du « civisme ». « Nos élèves sont soit repérés et recueillis par nos bénévoles, soit orientés vers nous via leur famille ou leur école. Pour beaucoup, il s’agit de profils instables avec de lourdes difficultés sociales. Nous reprenons ainsi les bases : l’apprentissage de la politesse, le respect des parents et de l’adulte en général, mais aussi le respect du drapeau », explique le fondateur de l’école du civisme. Tous les élèves portent ainsi une blouse aux couleurs du drapeau français dans un désir d’égalité, mais pas que : « Là où ce drapeau est parfois utilisé pour marquer une distance vis-à-vis de l’étranger, nous l’utilisons pour unir les enfants par-delà leurs différences ». Loin de toute velléité nationaliste ou xénophobe, le drapeau permet ici de rassembler les jeunes quelles que soient leurs origines, tout en rappelant les valeurs républicaines. « Je suis fier de porter ce drapeau. Pour moi, il représente les valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité », récite sagement un élève. Une omniprésence des couleurs nationales et de ses valeurs, qui n’empêche cependant pas les enfants d’afficher fièrement leurs origines et leur culture propre.

Un exemple à suivre ?

Conscient des limites de son projet vis-à-vis des difficultés sociales de Mayotte, Chamassi n’en reste pas moins optimiste : « Si l’on permet ne serait-ce qu’à un seul jeune d’éviter de sombrer dans la délinquance, on sauve dix victimes », martèle-t-il. « Seize élèves, ce n’est peut-être pas grand-chose. Mais il faut bien commencer par quelque chose, plutôt que de se plaindre sans agir », ajoute-t-il. Pour preuve du succès de l’école du civisme, deux nouvelles structures du même genre sont à l’étude, dont une en Petite-Terre. « Nous avons conclu des partenariats avec des écoles maternelles afin que celles-ci ouvrent leurs portes de 18h à 20h pour accueillir les élèves, et éviter qu’ils ne traînent dans la rue », explique fièrement le directeur. Jamais à court d’idée constructive, Chamassi envisage la création d’une école du civisme aux Comores. Une fois encore, l’idée est de créer des ponts entre les cultures pour éviter que chacun ne s’enferme dans la haine de l’autre. Dans un même principe d’inclusion et de respect des valeurs nationales, les élèves comoriens porteront également des blouses aux couleurs de leur drapeau. A l’heure où l’île de Mayotte s’enferme dans une inquiétude aux relents parfois xénophobes, Chamassi persévère contre vents et marées pour améliorer la situation sociale : « Je suis comparable à un oiseau perdu dans un incendie. Pour l’éteindre, l’oiseau enchaîne les allers-retours en transportant des gouttes d’eau dans son bec. Les autres animaux pourraient lui demander : ‘Mais enfin, qu’est-ce que tu fais ?’, l’oiseau répondra simplement : ‘Je fais ma part’. » 

 

Grève générale | Barrages et arbres coupés, mouvement prolongé

Huitième jour de manifestation contre l’insécurité. Le mouvement s’est à nouveau traduit par la mise en place de barrages routiers. Aucun incident n’a été constaté par les forces de l’ordre. Les barges ont fonctionné au ralenti. La grève générale se poursuit ce vendredi.

On prend les mêmes et on recommence. Les actions menées jeudi, au huitième jour de grève générale contre l’insécurité, s’apparentaient au mode opératoire de la veille. Cinq barrages étaient dressés dès l’aube à Chirongui, Chiconi, Coconi, Miréréni et Bouyouni, tenus par au moins 300 manifestants, selon la gendarmerie. Ceux érigés à Chirongui et Chiconi n’avaient d’ailleurs pas été levés dans la nuit de mercredi à jeudi. La circulation s’est révélée difficile hier entre Kahani et Combani, après que plusieurs arbres, principalement des manguiers, ont été coupés. La gendarmerie a envoyé « des patrouilles de contrôle » sur les barrages tout au long de la journée. Aucun incident n’a été relevé par les militaires, en fin d’après-midi.

La journée a aussi été marquée par plusieurs rumeurs insistantes : de jeunes coupeurs de route auraient mené des actions délictuelles dans la nuit de mercredi à jeudi entre Combani et Kahani et un homme aurait été agressé sur le même axe mercredi soir. La gendarmerie n’a pas constaté le premier point et n’avait reçu aucune plainte, hier, en fin d’après-midi, concernant le second volet.

Gérard Collomb sinon rien

Mamoudzou avait des allures de ville calme, jeudi. Comme la veille, de nombreux automobilistes n’avaient pas pu gagner le chef-lieu en raison des barrages. Cela a notamment été le cas des employés de la barge, qui a fonctionné « en mode dégradé », indique-t-on du côté de la police. Seul l’amphidrome était ouvert, sous protection des forces de l’ordre. 

Fonctionnement ralenti aussi, du côté du service des migrations et de l’intégration de la préfecture, par manque de personnel. Le site était également placé sous protection policière. Les forces de l’ordre sont restées mobilisées, en zone police, même si le mouvement s’est déplacé depuis deux jours dans le reste de l’île. La plupart des congés des fonctionnaires ont été annulés, en raison de la grève générale.

Et le mouvement, reconduit aujourd’hui, pourrait durer. La grève générale se poursuivra jusqu’à un déplacement sur l’île du ministre de l’Intérieur, a rappelé jeudi soir Maoulida Momed, un des porte-parole du mouvement. Le Collectif des associations de Mayotte ne digère pas l’absence de Gérard Collomb. Il pourrait exiger un report de l’élection législative partielle, alors que l’exécutif respecte un devoir de réserve, à l’approche du vote.

Au barrage de Bandrélé, « on respecte les consignes », indique un représentant syndical CGT. Une vingtaine de manifestants étaient mobilisés, pour couper la route nationale 3, à l’aide de pneus, morceaux de bois, voiture et poubelles. Les piétons pouvaient franchir le barrage « tout le temps », selon un représentant syndical CGT. Une version nuancée par un automobiliste bloqué. « Ils laissent passer une partie [des piétons] toutes les 30 minutes. » L’homme a remarqué un ballet de taxis, derrière le barrage, « qui font une navette » pour transporter leurs clients. Les secouristes sont par ailleurs autorisés à franchir les obstacles. 

« On va peut-être nous entendre »

Ici, des quêtes se mettent en place, pour financer le mouvement. « On se cotise et on mange ensemble à midi. Quand je suis arrivé, on m’a dit « Bon bah, aujourd’hui t’es puni parce que t’étais pas là hier. J’ai sorti la carte bleue », sourit le représentant syndical CGT.

Vers midi, ce jeudi, la forte pluie n’a pas eu raison de la motivation des manifestants de Bandrélé. Richard Ali, un habitant du village, pense qu’en fermant « un peu les routes de Mayotte […] on va peut-être nous entendre ». Cet agent administratif à l’Education nationale s’est « fait cambrioler trois fois […] Tous les jours, il y a des agressions et des intrusions » dans un magasin de Bandrélé, assure-t-il. « Ça suffit. Il faudrait que les Mahorais se sentent en sécurité chez eux ».

Les automobilistes à l’arrêt « comprennent parce que ça concerne tout le monde, toute la population, toutes les communautés de Mayotte, les blancs, les noirs, les Mahorais, les Anjouanais […] On est prêt à continuer jusqu’à ce que le gouvernement comprenne qu’on est des Français à part entière », ajoute-t-il.

Le mouvement social a des impacts sur la vie économique de l’île. Exemple concret avec ce chef de chantier, bloqué à hauteur du barrage de Bandrélé, jeudi midi. Venu de La Réunion, Pascal doit intervenir sur les travaux d’une station d’épuration, à Miréréni. Il a tenté de franchir l’axe routier vers 6h30, « avant qu’ils ferment. Ça n’a pas fonctionné […] C’est impossible [de négocier pour passer]. Ils ne veulent pas en entendre parler. » Et d’ajouter : « Il faut bloquer les personnes qu’il faut, pas nous, les petits travailleurs ».

 

 

21 exclusions définitives au lycée de Kahani

Suite aux évènements violents survenus en janvier aux lycées de Kahani et de Tsararano, « un certain nombre d’élèves fauteurs de trouble ont été identifiés et sanctionnés », a indiqué mercredi le vice-rectorat de Mayotte, précisant que des poursuites judiciaires avaient été enclenchées. Au lycée de Tsararano, cinq exclusions définitives dont une avec sursis ont été prononcées, entre autres sanctions. A Kahani, 21 exclusions définitives ont été prises, et 6 autres avec du sursis. Le vice-rectorat a encore déclaré que « malgré les perturbations, de nombreux établissements de l’île participent à l’opération Ecole ouverte ».

 

Mouvement social | « Les actions vont être multipliées »

Le septième jour de grève générale a été marqué par la mise en place de cinq barrages routiers dès l’aube. Les « maigres annonces » de la ministre des Outre-mer n’ont pas calmé le jeu. Le mouvement est reconduit ce jeudi.

Les réseaux sociaux ont surchauffé, mercredi, sur l’Île aux parfums. Tout au long de la matinée, les internautes ont partagé les points de blocage des axes routiers, dans un groupe Facebook dédié à la circulation. La grève générale contre l’insécurité s’est traduite hier par la mise en place de cinq barrages routiers, avec des pneus, du bois ou encore de la végétation. Les routes ont été notamment coupées à Dzoumogné, à Combani, au carrefour de Soulou, à Chiconi et à Chirongui. De quoi perturber la circulation de l’ensemble de l’île. Pour preuve, la fluidité du trafic dans les rues de Mamoudzou. Nombre d’automobilistes vivant dans le reste de l’île n’ont pas pu gagner le chef-lieu. Les premiers barrages ont été « érigés vers 4h30 », précise-t-on du côté de la gendarmerie. Des militaires ont été positionnés à chaque point de blocage, pour sécuriser les lieux. Vers 16h30, tous étaient encore en place. 

Deux pelotons de gendarmerie dès cette semaine

Mais on se dirigeait vers un retrait de ces derniers, au cours de la soirée. « On ne gardera pas la même stratégie à chaque fois », prévient Maoulida Momed, le porte-parole du Collectif des citoyens de Mayotte. « Les actions vont être multipliées » dans les prochains jours, avertit-il.

Et ce, malgré des annonces dès le début de la matinée, mercredi, de la ministre des Outre-mer. En l’espèce, « l’arrivée dès cette semaine de deux pelotons de gendarmerie mobiles », soit 48 gendarmes, selon nos informations. « Le déploiement à Mayotte de la police de sécurité du quotidien lancée se traduira par l’arrivée progressive de 20 gendarmes de plus », indique Annick Girardin, par voie de communiqué. Dix policiers supplémentaires viendront aussi gonfler les rangs de la PAF (police aux frontières) « dès le premier trimestre […] Le gouvernement veillera également à ce que les nouveaux bateaux dédiés à la lutte contre l’immigration illégale soient livrés dès septembre prochain […] Et dès cet été, une brigade de prévention de la délinquance juvénile sera effective. » En outre, « à la demande du gouvernement, le préfet va réunir les maires concernés pour accélérer [la] mise en place » d’une zone de sécurité prioritaire, énonce la ministre. Un plan de sécurisation des établissements et des transports scolaires « sera opérationnel dans les 10 jours », liste également l’exécutif.

« Sans effets majeurs »

« Je me félicite de [ces] annonces, qui sont des premiers pas dans la prise en compte des exigences de sécurité de nos compatriotes de Mayotte », salue par voie de communiqué le député mahorais Mansour Kamardine (Les Républicains). « Mais il conviendra d’en faire d’autres, sans attendre, pour résoudre la grave crise sécuritaire à laquelle les autorités se doivent de répondre immédiatement. »

« Ce sont de maigres annonces qu’on a l’habitude d’entendre ça et là, sans effets majeurs », déplore de son côté Maoulida Momed. Il annonce la reconduction du mouvement ce jeudi. Mouvement qui perdurera jusqu’à un déplacement du ministre de l’Intérieur dans le 101ème département, prévient-il. Que Gérard Collomb « vienne discuter à Mayotte […] avec nous des choses qu’il compte mettre en place. Je ne remets pas en cause la ministre des Outre-mer mais elle doit toujours se référer au ministre de l’Intérieur sur les questions de sécurité intérieure », justifie-t-il.

Maoulida Momed se refuse à indiquer les actions prévues ce jeudi. Le mouvement social fait le pari de renouveler ses formes de mobilisations, tous les jours.

Au Medef, on craint « la mort de nombreuses entreprises »

« Le mouvement est légitime, la forme est des fois contestable », regrette la nouvelle présidente de l’organisation locale du Medef à Mayotte, Carla Baltus. « On sort à peine des séquelles de 2011. Si on retourne dans un mouvement prolongé, ce sera sans aucun doute la mort de nombreuses entreprises, de projets et le manque d’attractivité qui va encore s’aggraver […] Les gens n’arrivent pas à se rendre au travail. Les entreprises sont au ralenti. Quand on n’a pas d’activité, je ne vois pas comment on peut payer un salaire […] Bloquer toute l’île, l’économie, je trouve cela très dommage », poursuit-elle.

 

Mouvement social | Une ville à l’arrêt et une manifestation monstre

Au sixième jour de manifestation contre l’insécurité, nombre de commerçants ont rejoint le mouvement, en baissant le rideau. La journée a été marquée par des blocages routiers, un fonctionnement au ralenti des barges et un défilé de grande ampleur. Des élus, dont le député Mansour Kamardine, ont participé à la marche. La grève est reconduite ce mercredi.

Et de six jours. La grève illimitée contre l’insécurité, qui a débuté il y a tout juste une semaine à Mayotte, s’est poursuivie ce mardi, à Mamoudzou et ses environs. La mobilisation a démarré dès le début de la matinée. Partie de Petite-Terre, la barge de 7h30 n’a pas pu accoster au quai de la Colas, où une première action était menée par des manifestants. L’embarcation a été redirigée vers l’amphidrome. Ce sera le cas de toutes les barges, au moins une grande partie de la journée. Elles ont fonctionné au ralenti. En cause, des encombrants qui ont été déposés sur les plateformes d’abordage, rendant impossible la rotation des bateaux à ce niveau. Les forces de l’ordre ont déployé un important dispositif vers l’amphidrome, l’autre lieu d’embarcation, afin d’empêcher l’arrêt complet du service public. Les forces de l’ordre filtraient les passagers autorisés à embarquer, en milieu de matinée, pour éviter que des manifestants ne se retrouvent à bord des barges.

Comme vendredi et lundi, le mouvement social s’est accompagné du blocage du centre névralgique de Mamoudzou. Le rond-point de la Barge a été tenu par les manifestants plus d’une heure, dans la matinée. Un blocage qui s’est traduit par le dépôt de cailloux et d’objets le long d’un axe secondaire, pour empêcher tout véhicule de le franchir. Une table d’occasion trônait au milieu de la route, rapidement transformée en instrument de percussion.

Cette ambiance bon enfant a caractérisé cette sixième journée de mobilisation, loin des incidents rencontrés ces derniers jours. Vendredi, trois individus ont été placés en garde à vue et déférés, après que les forces de l’ordre ont essuyé coups et caillassages.

Opération « île morte »

On retiendra de ce mardi l’entrée dans le mouvement des commerçants. Dès le début de la matinée, la plupart des boutiques étaient fermées, rue du Commerce et dans les environs. Un soutien inconditionnel au mouvement ? Il est permis d’en douter, selon un chef d’entreprise, qui témoigne anonymement. « Les manifestants sont passés hier [lundi] pour me donner des tracts sur l’opération île morte. Ils m’ont dit que j’avais intérêt à fermer mon établissement, sinon ils le fermeraient eux-mêmes. » L’homme a refusé de céder à cette pression qu’il évoque.

A Kawéni, plusieurs établissements avaient également décidé d’ouvrir leurs portes. Mais face à l’incitation à la fermeture exercée par de nombreux manifestants, qui ont défilé jusqu’au tribunal de grande instance, beaucoup ont fini par baisser leurs grilles, au moins le temps du défilé.

Un défilé qui est parti du centre de Mamoudzou aux environs de 11h. Dans les rangs, plus d’un millier de manifestants, selon la police. C’est près de trois fois plus que le nombre de participants au mouvement recensés la veille. Un peu plus tôt, les forces de l’ordre ont tenté sans succès d’arrêter le cortège, avant le rond-point SFR, pour obtenir des précisions sur le parcours prévu puis a cédé une fois les informations obtenues. La marche s’est déroulée sans heurts. Les forces de l’ordre étaient présentes tout au long du parcours.

« Entendre cette colère »

Parmi la foule, le député de la 2ème circonscription de Mayotte, Mansour Kamardine, et le maire de Sada, Anchya Bamana. Le parlementaire n’a pas hésité à mouiller la chemise, en invitant une poignée de manifestants au calme, alors qu’ils haussaient le ton sur les employés d’une boutique ouverte. « Je voulais dire à mes compatriotes mahorais que les forces de l’ordre ne sont pas nos adversaires, ce sont nos alliés objectifs », explique Mansour Kamardine. « Quand ils sont là pour assurer notre liberté et notre sécurité, ce sont nos alliés et il faut les considérer comme tels », appuie encore le député. « Ce que je veux dire à l’Etat, c’est qu’il faut entendre cette colère. (…) Aujourd’hui, Mayotte est devenue une grande maison d’arrêt. Les honnêtes gens sont parqués (…) et les délinquants sont en liberté, parfois avec des décisions de justice ou même des décisions administratives qui sont prises et qui sont manifestement incomprises parce que complètement décalées des réalités et des faits », assène encore l’élu qui demande un renforcement des moyens, la création d’un CDI (Compagnie départementale d’intervention), de deux commissariats de police à Koungou et Dzaoudzi, le repositionnement de la PAF au Nord et au Sud, bref « un reparamétrage du plan de sécurité du territoire », explique Mansour Kamardine, poursuivant sa marche. 

Le mouvement s’est concentré hier sur Mamoudzou et ses environs. La gendarmerie a indiqué en milieu d’après-midi, mardi, n’avoir constaté ni blocage, ni incident en lien avec l’actuel mouvement social dans le reste de l’île. La grève est reconduite ce mercredi, a confirmé Maoulida Momed, le porte-parole du Collectif des citoyens de Mayotte. « La grève continue tant qu’on n’est pas entendus au ministère », a-t-il encore déclaré.

En parallèle, à 14h30, une réunion entre l’intersyndicale et des élus du Conseil départemental devait avoir lieu mais a été bousculée par une manifestation spontanée d’une trentaine de personnes ayant mis feu à une poubelle entre l’Agence régionale de santé et la Direction des Affaires culturelles, en haut du service des migrations et de l’intégration de la Préfecture. L’intersyndicale a toutefois échangé en interne pour mettre au clair une plateforme revendicative et adresser une lettre au préfet de Mayotte, a-t-elle indiqué. 

Le préfet sort de son devoir de réserve

A l’approche de l’élection législative partielle, il est censé s’astreindre à un devoir de réserve. Le préfet de Mayotte, Frédéric Veau, s’est finalement exprimé mardi matin à la radio sur le mouvement social en cours, chez nos confrères de Mayotte la Première. « Il y a un malaise, un mal-vivre au sein de la société mahoraise. [Le] climat d’insécurité, c’est une situation qui est réelle », a déclaré le représentant de l’Etat. « La sécurité, ça n’est pas que des statistiques, mais la statistique, c’est le thermomètre. On a en 2017 une baisse de 9 % alors qu’il y a deux ans, on a eu une augmentation de 15 %. C’est quand même un changement important. Mais derrière les statistiques, il y a des situations humaines qui peuvent être dramatiques […] Nous devons absolument nous mobiliser pour lutter contre des violences qui sont importantes et répétitives. » Le préfet a salué « depuis 2016 et le Plan sécurité un effort extrêmement important sur la présence des forces de l’ordre […] Il est vrai qu’on ne peut pas être partout et en tout moment. Mais en tout cas, on a cette volonté d’être sur le terrain, de prévenir lorsqu’il y a des infractions. »

Et d’ajouter : « Manifester est un droit constitutionnel. Mais il y a des limites. C’est les entraves à la circulation publique et c’est la violence. Il y a quand même eu deux épisodes le 20 février et le 23 février où les tensions sont montées. Je rappelle que le 23 février le directeur départemental de la sécurité publique et son adjoint ont été personnellement visés par des actions de personnes incontrôlées […] Si on bascule dans la violence, c’est quelque chose qu’on ne peut pas tolérer. On manifeste contre la violence. On ne peut pas répondre par la violence. »

Alors que parmi les manifestants, beaucoup jugent la politique migratoire trop laxiste à Mayotte, le préfet a rappelé que « la lutte contre l’immigration clandestine, c’est 20 000 personnes qui sont reconduites tous les ans. Le chiffre national, c’est autour de 25 000. Donc on fait à Mayotte ici presque autant que le reste de la France […] Il y a un chiffre que je trouve très parlant, [c’est] l’écart de revenu par habitant entre Mayotte et les Comores. Il est de 1 à 12 ou 13. Tant qu’on reste dans ce rapport-là, il y aura toujours une incitation. D’où l’importance de travailler sur la coopération et sur l’aide au développement des Comores. Ce que demandent les Comoriens, c’est de la santé, de l’éducation, de l’activité. »

 

Grogne sociale | Les manifestants s’assouplissent mais poursuivent le mouvement

Réunis comme au premier jour place de la République lundi matin, quelque 300 manifestants ont défilé dans les rues de Mamoudzou en tractant les entreprises et les administrations afin qu’ils participent aujourd’hui à une opération « île morte ». En parallèle, une réunion s’est tenue entre les élus afin de décider d’une réponse à donner à la colère populaire qui s’exprime depuis près d’une semaine.

Ils se sont assagis, mais ils sont toujours aussi nombreux. Réunis ce lundi matin place de la République, les manifestants menés par des délégués syndicaux de FO et de la CFDT ainsi que par le collectif des associations de Mayotte ont ensuite défilé dans les rues de Mamoudzou. Objectif : distribuer des tracts aux commerçants et administrations afin qu’ils rejoignent l’opération « île morte » prévue aujourd’hui. « Ce mardi 27 février 2018, fermez les administrations, vos magasins et vos entreprises et [rejoignez] la marche en soutien [aux] victimes de l’insécurité à Mayotte », peut-on lire sur ces tracts. 

Cependant, au cours de la distribution lundi, la foule a marqué un temps d’arrêt de près d’une vingtaine de minutes en haut de la place Mariage, hésitant à se rendre devant le service des migrations et de l’intégration de la Préfecture, toujours verrouillé par des grilles anti-émeutes. Mais les délégués syndicaux se sont interposés et ont appelé les manifestants au calme. « Il ne faut pas que ça pète », estime Anli Rigotard qui ajoute : « L’objectif n’est pas de se prendre la tête avec les forces de l’ordre ». Changement de direction donc, après les violences de vendredi et les trois gardes à vue qui s’en sont suivies. Les manifestants ont ensuite bloqué le rond-point de la barge dans l’après-midi durant près de deux heures. Des bus de lycéens en sortie extrascolaire n’ayant pu passer, plus d’une quarantaine d’enfants ont dû faire le trajet barge / Kawéni à pied. 

Renfort d’un peloton de gendarmerie de La Réunion

Cependant, ce calme relatif n’entame pas la prudence à laquelle s’astreignent les autorités depuis plusieurs jours puisqu’un peloton de gendarmerie de l’île de La Réunion serait arrivé en renfort le matin même. En parallèle, une partie des maires de l’île ainsi que des conseillers départementaux, soit une douzaine d’élus, se sont réunis lundi matin sous la houlette du président du Conseil départemental afin de définir leur propre mode d’action commun face à cette grogne sociale qui prend de l’ampleur. « La population nous pousse à réagir ; il faut qu’on le fasse, c’est notre devoir », estime Ahmed Darouechi, maire d’Acoua. « On a atteint la limite, on est sûrs que ça va déraper. Et ce qui chauffe la population, c’est notre silence », a renchéri Anchya Bamana, maire de Sada. Une entrevue devrait se tenir aujourd’hui entre ces élus et l’intersyndicale dans l’après-midi. Au préalable, le président du Conseil départemental aurait demandé aux membres de l’intersyndicale de « mettre sur papier une plateforme revendicative, commune et cohérente ». Soibahadine Ibrahim Ramadani a par ailleurs ajouté : « La chose tourne à la chasse aux étrangers. C’est peut-être un problème majeur mais ce n’est pas le seul ». Les élus ont également rédigé un « appel d’urgence au gouvernement », qu’ils n’avaient toujours pas cosigné ce lundi matin. Dans ce courrier, ils requièrent : l’affectation de 100 postes de policiers et de gendarmes à répartir sur le territoire, la mise en place du « groupe de contact » avec la population au niveau du commandement de la gendarmerie nationale, le positionnement de deux sites d’accueil délocalisés de la brigade de gendarmerie de Mamoudzou à Dembéni et Koungou. Ils demandent également que la procédure pénale soit réformée « en renforçant le pouvoir des enquêteurs et l’effectivité des sanctions judiciaires afin de mettre un terme au climat d’impunité qui incite à la récidive, encourage les actes de délinquance juvénile et aggrave la criminalité sur le territoire ». 

 

Sportif de l’année 2017 | Et les lauréats sont…

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Deux mois après le lancement de l’événement, la Somapresse a clôturé les trophées Mayotte Hebdo du sportif de l’année 2017 ce samedi, en organisant la cérémonie de remise des trophées : le footballeur du FC M’tsapéré Faïze Ali Charif et la handballeuse du Combani HC Hamidati Ahamadi Abdillah sont les grands vainqueurs.

Samedi soir au cinéma Alpa Joe, les sportifs mahorais étaient réunis pour la neuvième cérémonie de remise des trophées Mayotte Hebdo du sportif de l’année, organisée par la Société mahoraise de presse (Somapresse). Celle-ci a eu la mauvaise surprise de voir la pluie s’abattre sur Mamoudzou peu avant le lancement de l’événement et de constater par conséquent de nombreux désistements de la part d’invités. Si le cinéma n’était finalement pas rempli comme l’organisation le prévoyait, la cérémonie, elle, a tenu toutes ses promesses !

Diffusée en direct à la télévision et en live Facebook sur Mayotte La 1ère, l’émission présentée par Youmna et Aurélien Février, a vu la consécration de neuf lauréats parmi les quarante cinq nominés cette année. Faïze Ali Charif a été sacré Sportif de l’année 2017. Le meneur de jeu du Football Club de M’tsapéré a remporté avec son équipe le championnat de Mayotte et la coupe de Mayotte. Chez les filles, c’est Hamidati Ahamadi Abdillah qui a été couronnée. En 2017, la Combanienne a remporté un nouveau titre de champion de Mayotte : le septième de suite ! Dans les autres catégories individuelles, le président de la Ligue mahoraise de football, Mohamed Boinariziki, a été élu dirigeant de l’année. Le fondateur de l’Ecole de Football Daka, Kolo Ndaka, a été désigné meilleur entraineur 2017. Les trophées des Mahopolitains de l’année ont été décernés à Fayzat Djoumoi, championne d’Europe de basket-ball avec l’équipe de France U16 féminine, et Kadri Moendadzé, de L’Orléans Loiret Basket.

 

Bahedja Souhaïli, prix spécial du jury, Docteur Léo, prix « surprise »

Pour le M’tsapérois, il s’agit du quatrième trophée du Sportif de l’année après ceux de 2010, 2012 et 2013. Mirhane Abdallah, arbitre de football succède à l’arbitre de basket-ball Fouad Soibri en tant que meilleur arbitre mahorais. Enfin, Bahedja Souhaïli a reçu le prix spécial du jury. De ce qui est des trophées collectifs, l’AS Jumelles de M’zouasia pour son doublé championnat- coupe de Mayotte féminine, et le BC M’tsapéré pour sa série de trophées obtenus l’an dernier ont été sacrés. Pour l’organisation, les trophées Mayotte Hebdo sont l’occasion de mettre en lumière des disciplines sportives moins connues, mais également les artistes locaux. D’où les animations intercalées entre les remises de trophées, qui ont vu les prestations réussies du comité de taekwondo, de la ligue de kick boxing, du groupe TV Mafoumbouni, des danseurs de hip hop de la New Team Wanted, ou encore des chanteurs Komo, Shanna et Docteur Léo. Ce dernier, paraplégique s’est vu remettre un prix surprise : un trophée similaire à ceux des lauréats du Sportif de l’année, pour son tour de Mayotte en fauteuil roulant et son ascension du mont Choungui. Le résumé de la cérémonie, les réactions, les résultats des votes détaillés et plus de photos sont à retrouver dans le prochain Mayotte Hebdo (MH 830 du vendredi 4 mars 2018).

 

 

L’île à l’arrêt

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Entre les différentes opérations escargot au nord, centre et sud de l’île, la grève menée par le SNUipp-FSU et le blocage par les autorités de la rue du service des migrations et de l’intégration via des grilles anti-émeutes, Mamoudzou semblait à l’arrêt hier matin, tandis que les files de voiture s’allongeaient inexorablement sur le reste de l’île. Reportage.

S’inscrivant dans le cadre du mouvement social initié par une intersyndicale mahoraise, les opérations escargot des conducteurs de bus ont surpris la population qui s’apprêtait à se rendre au travail ce jeudi matin. Ayant débuté entre 3h et 4h du matin au nord, au centre et au sud de l’île, cette action a quasiment paralysé la circulation routière de l’île jusqu’à la pause méridienne. Convergeant vers le rond-point de la Barge, plusieurs dizaines de cars scolaires ont bloqué en début d’après-midi ce point névralgique du centre de Mamoudzou. « [Pour les prochains jours], nous allons innover », prévient Mikidadi Moussa, porte-parole des conducteurs en droit de retrait depuis plus de trois semaines. « Tout en restant dans la légalité, (…) au fur et à mesure, ce sera géant. Si on doit court-circuiter l’économie de l’île, on le fera », menace-t-il.

Ces blocages ont conduit le mouvement parallèle mené par le collectif des associations de Mayotte à s’essouffler quelque peu jeudi (pour rappel, ce groupe a été très actif dans les actions de manifestation devant le service des migrations et de l’intégration de la préfecture mercredi). Cependant, le noyau dur s’est réuni en début d’après-midi place de la République afin de décider de la suite des opérations. Safina, porte-parole du collectif des associations de Mayotte, a affirmé qu’en tout cas, les membres cherchaient à « faire quelque chose qui va durer ». 

Anticipant d’éventuels débordements à l’image de ce qui s’est passé mercredi, les autorités ont choisi de déployer un dispositif de sécurité autour du bâtiment abritant le service des migrations et de l’intégration de la préfecture de Mamoudzou. Des grilles anti-émeutes et une importante mobilisation des forces de l’ordre (une quarantaine d’agents) protégeaient cette zone sensible, les grilles bloquant même totalement l’accès à la rue de ce service. Jeudi, il était d’ailleurs totalement vide, une majorité d’agents n’ayant pu rejoindre leurs bureaux en raison des problèmes de circulation, a indiqué la préfecture. Ce dispositif pourrait être renouvelé, en cas de menace, si les autorités le jugent nécessaire. 

« Attentisme de l’Etat »

Du côté du vice-rectorat, quelques enseignants grévistes sont parvenus à rejoindre le point de ralliement. Ce jeudi, une grève menée par la FSU était prévue mais a peu mobilisé, en raison des difficultés de circulation. Malgré tout, une petite trentaine d’irréductibles étaient venus protester contre la « dégradation » du système éducatif et les violences scolaires, a indiqué Henri Nouri, secrétaire général Snes-FSU Mayotte. « Il y a eu une hausse des effectifs [scolaires] de 80% sur 10 ans », dénonce le syndicaliste qui a porté devant les directeurs de cabinet de la préfecture et du vice-rectorat jeudi un certain nombre de revendications telles que la mise en place d’une politique d’attractivité visant à attirer davantage de titulaires et non plus seulement des contractuels, l’augmentation du rythme des constructions scolaires et des effectifs – « Nous souffrons d’un sous-encadrement général que ce soit pour les infirmiers, les assistants sociaux, les psychologues » –, et l’instauration de points de restauration scolaire, entre autres. Henri Nouri a dénoncé « l’attentisme de l’Etat qui laisse pourrir les choses [comme au lycée de Kahani] ». Sur cette dernière situation particulière, le secrétaire général a déploré « cette violence qui [fait] que les conditions de travail sont de plus en plus intenables ». Pour Henri Nouri, les personnels de cet établissement seront certainement poussés à reprendre le travail « sans véritable changement ». 

A l’issue de sa rencontre avec les directeurs de cabinet de la préfecture et du vice-rectorat, la FSU a rapporté quelques éléments de réponse donnés par les deux instances. Selon le syndicat, la préfecture aurait déclaré que « les forces de l’ordre sont déployées sur les sites à chaque fois qu’il est nécessaire » mais aurait « [avoué] à demi-mot [son] incapacité à être partout au même moment » et aurait proposé « de la co-construction en matière de sécurité entre les parents, l’Etat et les collectivités ». Sur la question des constructions scolaires, le directeur de cabinet du vice-rectorat aurait rappelé « la rénovation du bâtiment D du lycée de Kahani, le projet du lycée de Kwalé, Longoni et Mtsangamouji ». 

Difficile, au regard de la fragmentation des mouvements et de la nébulosité de certains d’entre eux, de prévoir les actions qui seront menées dans les jours à venir. 

 

Une tournure que décrient certains syndicats

Par voie de communiqué, la CGT Educ’action a fait part jeudi de sa décision de suspendre le mouvement de grève car « il règne (…) une regrettable confusion quant aux objectifs du mouvement ». Deux jours après la mise au point de la FSU, déclarant que « nos drapeaux ne doivent pas être associés à une manifestation qui s’est traduite par un arrêt hautement symbolique devant le service des étrangers de la préfecture » et qui n’est pas « [exempte] d’amalgames et de stigmatisations », c’est au tour de la CGT Educ’action Mayotte de clarifier sa position. Ainsi le syndicat « refuse que ce mouvement social unitaire soit l’objet d’une quelconque forme de récupération et ne souhaite, en aucun cas, s’associer à des actions stigmatisant une partie de la population ». 

 

Mansour Kamardine s’indigne

Dans un communiqué envoyé à la presse jeudi, Mansour Kamardine s’indigne. Ainsi le député craint-il qu’après « plusieurs mois de mépris vis-à-vis de la communauté éducative de Mayotte, le ministère de l’Education nationale [ne prenne] le risque de déclencher la colère ». Pour Mansour Kamardine, « le Gouvernement passe de l’indifférence à la provocation vis-à-vis des élèves, des familles, des enseignants, des conducteurs de bus scolaires, des agents en charge de la sécurité et plus largement vis-à-vis de l’ensemble des habitants de Mayotte ». Le parlementaire fustige « l’absence de réponse de l’Etat » et son « dédain » qu’il qualifie de « dangereux » et conclut : « La situation est intenable. Je demande au Gouvernement d’agir avant qu’elle ne devienne incontrôlable ». 

 

Mouvement social | Violences devant le service des migrations

Le mouvement social de mercredi a pris une tournure anti-étrangers lorsque la foule de manifestants s’en est violemment prise au cordon des forces de l’ordre protégeant le service des migrations et de l’intégration de la préfecture. Récit. 

Ils étaient moins nombreux mais plus énervés. Pour le deuxième jour des mouvements sociaux ayant débuté mardi, les manifestants (environ 450 personnes selon la police) se sont rendus devant le service des migrations et de l’intégration de la préfecture et y ont stationné plus d’une heure ce mercredi matin. Dans les rangs, de simples citoyens, de nombreux membres du collectif des associations de Mayotte (Codim, Assoiffés du Sud, Femmes Leaders, etc.) et des syndicats (CFDT, FO, SUD, etc.) Les étrangers avaient été confinés au préalable au sein de l’administration, protégée par un cordon de policiers et de gendarmes, d’une quarantaine d’agents. Une partie des manifestants ont, durant plus d’une heure et de manière sporadique, chargé les forces de l’ordre qui les ont repoussés, provoquant de violentes bousculades et des mouvements de foule. Difficile de savoir dans cette assemblée hétéroclite qui cautionnait ces accès de violence et qui les condamnait. Une partie des délégués syndicaux sur place, ainsi que de simples citoyens, ont eux-mêmes déployé spontanément un autre cordon de sécurité durant un temps pour protéger les forces de l’ordre des assauts, mais n’ont pas donné l’ordre tout de suite de quitter les lieux ni de poursuivre le parcours.

Préfet, nalawé 

« Nous ne voulons pas que quelqu’un soit blessé », affirme Safina, du collectif des citoyens de Mayotte. « Mais il faut que le préfet s’explique ou qu’il démissionne (…) Son but, c’est de régulariser massivement la communauté comorienne (…) Ce qui est transmis au national est erroné, la population n’a plus confiance », explique-t-elle. « Nous avons besoin d’exprimer notre colère : nos enfants ne vont plus à l’école ! », s’indigne encore Safina. Ainsi une partie des manifestants criait-elle ce mercredi sa volonté de voir le préfet de Mayotte, Frédéric Veau, démissionner, « Nalawé »… 

Au bout d’une heure un peu tendue, les manifestants ont poursuivi leur chemin, passant notamment devant le dispensaire Jacaranda, vidé telle la veille de ses patients – en effet, les autorités, par précaution, ont confiné les étrangers au sein du service des migrations et de l’intégration, les patients à l’intérieur du dispensaire, et les agents du vice-rectorat et des services fiscaux dans leurs bureaux. Devant Jacaranda, un membre des Assoiffés du Sud a chassé une mère et son enfant qui attendaient devant l’hôpital et a invectivé une autre mère de famille. 

Le mouvement de grève devrait se poursuivre jeudi. 

 

 

A Sada, une dizaine d’écoliers est venue armée en classe

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Le maire de la commune a convoqué lundi les parents des élèves concernés pour un rappel à l’ordre. Elle a pris un arrêté d’interdiction de port d’armes dans les écoles et les espaces publics.

Les faits se sont produits il y a exactement une semaine, dans les écoles de Sada 2 et de Sada 4. Selon nos informations, une dizaine d’élèves scolarisée en CM1 et en CM2 est venue mercredi dernier munie d’armes blanches en classe. En l’espèce, « des chombos à la mahoraise et des objets divers assez dangereux », précise le maire de la commune, Anchya Bamana. Ces « quelques élèves […] allaient se faire la guerre après les cours », s’inquiète la première magistrate. « C’est alarmant. »

Lundi, l’élue a convoqué les parents des jeunes concernés, soit une vingtaine de personnes. « J’ai fait un rappel à l’ordre », déclare-t-elle. Ce dispositif a été rendu possible par une convention signée avec le parquet il y a quelques années. Par ailleurs, « un arrêté d’interdiction de port d’armes a été pris dans l’enceinte de l’école mais aussi dans l’espace public », poursuit la maire.

« La responsabilité des parents d’abord »

Les parents convoqués lundi ont écarté la piste d’une bagarre entre élèves des deux écoles de la commune. Selon eux, les armes blanches étaient destinées à se défendre du racket opéré par des jeunes non scolarisés, qui seraient présents aux abords des écoles. « Les parents réagissent maladroitement en disant : « Défendez-vous » [à leurs enfants] », regrette l’élue, incertaine de la véracité de cette version. « Le racket est plausible. C’est quelque chose qui existe dans tout Mayotte et qui se généralise. C’est un problème territorial […] Le sentiment général d’insécurité s’étend […] Ceux qui ne sont pas scolarisés ont tendance à venir semer le bordel dans les écoles. »

Jeudi puis vendredi, des réunions ont été organisées entre l’élu municipal en charge de la sécurité, les délégués de parents d’élèves, le vice-rectorat, et la brigade de gendarmerie de Sada. Une brigade qui « a réagi très rapidement » mercredi dernier, salue Anchya Bamana.

L’alerte a pu être donnée à temps par « l’un des élèves qui en a parlé à l’institutrice. » La police municipale a été mobilisée et la première magistrate informée des événements. « Des enfants de 9 ou 10 ans, ça parle. Ils nous ont dit : « Un tel en a, un tel en a » [des armes NDLR]. On a pu les encercler rapidement », détaille Anchya Bamana, qui s’est rendue sur place. Le maire a lundi rappelé aux parents qu’ils « sont responsables de leurs enfants. […] Le tout n’est pas de faire des enfants mais de s’en occuper. Plus ça va, et plus on nous dit que c’est la responsabilité des pouvoirs publics, du maire, du préfet. C’est celle des parents d’abord », insiste l’élue.

« Quand elles ont des difficultés, les familles doivent venir en mairie, au CCAS (Centre communal d’action sociale) », conseille la première magistrate. L’élue mentionne également qu’une convention avec le Conseil départemental est en place pour l’aide sociale à l’enfance, avec des psychologues à disposition. Cet incident est « l’occasion de rappeler que des services sont là pour aider les parents qui ont besoin d’un soutien en matière d’éducation. » L’incident de mercredi « permet d’éveiller la conscience sur cette question [de l’éducation parentale], de discuter de manière générale sur les politiques à mettre en place en la matière ».

 

 

Manifestation | Un millier de personnes dans les rues

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La manifestation de mardi a clairement mobilisé les troupes puisque près d’un millier de personnes, d’horizons divers, ont défilé dans les rues de Mamoudzou. Les manifestants protestent contre l’insécurité, et notamment celle qui émaille le quotidien des établissements scolaires et a poussé enseignants et conducteurs de bus au droit de retrait. 

La foule était dense et hétéroclite. Simples citoyens, parents d’élèves, enseignants, associations et syndicats se sont rassemblés mardi place de la République (Mamoudzou) afin de protester contre l’insécurité, notamment celle qui sévit aux abords et à l’intérieur des établissements scolaires.

Pour rappel, rien que sur ces quatre dernières semaines, des personnels de trois lycées de l’île ont exercé leur droit de retrait, notamment après l’attaque le 19 janvier d’un établissement par des dizaines de jeunes armés. Et l’ensemble des conducteurs du réseau Halo observe également un droit de retrait depuis plus de trois semaines, suite aux caillassages répétés de leurs véhicules par de jeunes délinquants.

Après une courte prière, les manifestants, de l’ordre d’un millier selon la police, ont défilé dans les rues du chef-lieu de l’île, selon un parcours balisant des endroits-clés de Mamoudzou, tels que la préfecture, le conseil départemental, l’hôpital, la mairie, etc. Devant le service des migrations et de l’intégration de la Préfecture, un dispositif de police avait été déployé en amont afin d’éviter tout débordement lors du passage du cortège devant cet « endroit sensible », a déclaré le commissaire Philippe Jos. « Par précaution », les étrangers qui patientent généralement devant l’administration ont été priés de rentrer à l’intérieur de l’enceinte gardée par un cordon de policiers. Le dispensaire de Jacaranda était, lui aussi, bien vide en regard de l’activité quotidienne qu’il connaît d’habitude. Le cortège a marqué des arrêts devant les structures accueillant des étrangers, une décision d’ailleurs condamnée par la FSU qui a rappelé mardi par voie de communiqué que son propre mouvement aurait lieu le 22 février et que « [ses] revendications [resteraient] dans le champ de l’éducation ». 

Un cortège mixte

Si cette foule s’est fédérée mardi autour des enjeux de sécurité, elle n’était pas homogène en termes d’idéologies. Parmi ses rangs, des associations telles le Codim, connues pour ses actions radicales contre les étrangers en situation régulière ou irrégulière sur Mayotte, mais aussi de simples citoyens sans étiquette et de nombreux syndicats d’enseignants. 

« Je suis là en tant que secrétaire général du Snudi-FO », explique Tadjini Indaroussi, « mais aussi en tant que citoyen et père de famille. J’ai deux enfants, qui restent à la maison ces derniers temps. J’ai un fils scolarisé à Bandrélé et ma fille est à Tsararano. Il n’y a pas de transport scolaire et quand je les emmène en cours, les professeurs sur place refusent de faire cours pour si peu d’élèves », témoigne ce syndicaliste, narrant une situation symptomatique. 

D’autres professionnels grossissent encore les rangs, tel Thierry Lizola, du syndicat Alliance Police Nationale. « Il nous faut des moyens techniques adaptés à (…) la topologie du terrain », revendique le porte-parole du syndicat qui énumère : « renouvellement du parc total des Duster (au nombre de 12) avec du grillage sur les parties vitrées », des renforts de policiers, « que le phénomène des stupéfiants soient pris en compte, notamment au niveau des enquêtes », et des formations aux nouvelles violences urbaines, de type guérillas. Les interventions que nécessitent les éclats de violence en milieu scolaire représentent 30 à 40% du taux de l’activité des policiers. « Ca a permis de juguler les violences scolaires car on n’a pas eu d’incident très grave, mais ça c’est fait au détriment de la sécurité des biens et des personnes », déplore encore Thierry Lizola. 

Le collectif des associations de Mayotte a annoncé mardi que le mouvement serait reconduit ce mercredi, avec des actions « dont le contenu est encore confidentiel » et un appel au rassemblement dès 7h place de la République. 

 

 

 

 

 

Agression sexuelle en milieu scolaire

C’était « un jeu de garçons » selon les suspects. Trois adolescents auraient agressé sexuellement l’une de leurs camarades, mardi dernier, en fin de cours d’éducation physique et sportive dans un établissement scolaire de Koungou. Deux d’entre eux seraient d’abord entrés dans le vestiaire des filles. A l’intérieur, trois élèves. Deux des jeunes filles auraient pris la fuite. L’adolescente restant dans la pièce aurait subi de multiples attouchements par-dessus les vêtements. Un troisième suspect serait alors entré dans le vestiaire et aurait tenté de retirer le pantalon de la victime. Les trois agresseurs présumés ont pris la fuite, avant l’arrivée d’un professeur. Au moins deux des trois suspects ont été entendus par les services de gendarmerie. Ils sont âgés de 15 ans. Selon les premiers éléments de l’enquête, il semble que les quatre filles de la classe subissent depuis près de deux ans des agressions sexuelles de la part de l’ensemble des garçons de ladite classe. Elles auraient subi des menaces de représailles, pour les contraindre au silence.

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