Alors qu’un protocole de fin de conflit a été signé vendredi et que des contrôles renforcés lundi matin devaient garantir la sécurisation du réseau, un nouveau caillassage de bus est survenu le soir même à Tsoundzou. Il faudra encore du temps pour que les dispositifs promis aux chauffeurs fassent leurs preuves.
L’image inspirait la confiance. Lundi, pour le retour des élèves en classe et surtout la reprise des transports scolaires après des semaines de droit de retrait, un important dispositif de sécurisation était mis en place dès le matin, avec l’appui des forces de l’ordre. Résultat : 83 bus et plus de 3.000 élèves contrôlés. Et surtout, une rentrée sans encombre. C’était sans compter un nouveau caillassage, survenu le soir même, du côté de Tsoundzou… “Et voilà, encore un bus caillassé à Tsoundzou, il y avait 30 élèves à l’intérieur”, souligne un internaute sur Facebook, qui publie une vidéo sur laquelle on peut voir l’ampleur des dégâts : des impacts de pierres et des bris de verre partout, mais aussi la vitre côté conducteur, explosée en mille morceaux.
“Effectivement, on a eu du caillassage hier, et un début d’échauffement à Kahani hier aussi”, confirme Anli Djoumoi Siaka, délégué FO transports. Un seul bus aurait toutefois été la cible des jets de pierre. “On s’en doutait, on savait pertinemment qu’avec la rentrée, les caillassages allaient reprendre”, soupire le représentant syndical. “Mais comme nous nous sommes engagés avec l’administration à reprendre le service, nous avons accepté d’y retourner sans être convaincus que les choses s’améliorent. L’événement d’hier nous en donne la preuve…”
« On n’a toujours pas de solution ! »
Même son de cloche pour Yasmina Mabouroukou, membre du conseil syndical UI CFDT. “Au bout d’un moment, les communiqués, ça va bien, les droits de retrait, on n’en peut plus. On n’a toujours pas de solution !”, s’agace-t-elle. Le protocole signé le vendredi 22 octobre et qui a permis la reprise du trafic pour la rentrée devait pourtant apporter un certain nombre de garanties aux chauffeurs. Notamment, la mise en place d’effectifs des forces de l’ordre dans les zones rouges, la présence d’accompagnateurs dans les bus, le renforcement des vitres, et davantage de moyens techniques, le tout déployé à grande échelle. Les conducteurs attendent aussi beaucoup d’une convention collective pour leur apporter davantage de garanties sociales, notamment une meilleure prévoyance santé et prévention des risques professionnels.
Des moyens qui ont donc, pour certains, fait leurs preuves dès ce lundi. “Le matin, ça s’est bien passé car il y a eu des contrôles un peu partout, mais l’après-midi, c’est reparti en cacahuètes !”, déroule Anli Djoumoi Siaka. Exaspérés par ce nouvel événement, les syndicalistes ne comptent pas pour l’instant interrompre à nouveau le service. “On va laisser encore une semaine à l’administration, le temps de mettre en place ses dispositifs. Mais à partir du 2 novembre, s’il y a encore des caillassages, nous on bloque !”, menace toutefois le représentant FO.
Deux bénévoles de la Croix Rouge française ont été interpellés alors qu’ils devaient travailler au centre de M’Gombani ce samedi. S’ils ont été relâchés dans la foulée, l’affaire interroge alors que la campagne de vaccination contre le Covid-19 doit se poursuivre à Mayotte.
Leur journée a bien failli tourner au vinaigre. Deux bénévoles de la Croix Rouge française, en situation irrégulière sur le territoire, ont été interpellés, samedi, alors qu’ils devaient effectuer leur mission au centre de vaccination de M’Gombani. Ils auront vite été relâchés après un coup de fil de la préfecture, étant entendu qu’ils effectuaient là une action d’intérêt général.
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“Deux personnes ont effectivement été interpellées, deux bénévoles dont on avait besoin sur le centre de vaccination, elles ont donc été libérées très rapidement sur demande de la préfecture et sont retournées à leur mission”, confirme la sous-préfète chargée de la lutte contre l’immigration clandestine, Nathalie Gimonet. “La police aux frontières, plus précisément l’unité GAO (groupe d’appui opérationnel) a fait son travail, qui est de réaliser des contrôles d’identité : si la personne peut prouver la régularité de son séjour à Mayotte, aucun problème ; si elle ne peut pas fournir de preuve de la régularité de son séjour, elle est interpellée pour vérification ultérieure. Cela ne veut pas dire reconduite tout de suite”, précise-t-elle.
Des bénévoles formés pour prêter main-forte
D’après un syndicat de police, l’un des deux bénévoles se faisait emmener au travail en scooter, quand il a été contrôlé. Il portait alors son t-shirt aux couleurs de la Croix Rouge, mais n’avait pas d’ordre de mission sur lui. “Il n’avait pas de papier, alors les collègues ont appelé la préfecture : son dossier avait été refusé depuis 2019, et il n’avait pas de papier indiquant un éventuel recours au tribunal. Donc ils rentrent au commissariat, ils entament la procédure, et avant de partir pour le CRA, ils reçoivent un appel pour le relâcher. Sans aucune explication !”, s’étonne le représentant syndical.
Le fait est que la participation des bénévoles à la gestion de crise, plus encore depuis l’épidémie du Covid-19, est essentielle au territoire. La plupart, en situation régulière ou non, ont d’ailleurs suivi des formations pour travailler dans les centres de dépistage ou de vaccination, dispensées par l’agence régionale de santé, ou la Croix Rouge elle-même. L’un des bénévoles interpellés ce samedi avait notamment reçu une formation pour administrer les piqûres, selon ce même syndicat.
Des contrôles abusifs aux abords des centres
D’après nos informations, les candidats à la vaccination n’ont, eux, pas été inquiétés ce samedi au centre de M’Gombani. Mais l’affaire n’est pas sans rappeler certains contrôles abusifs qui ont déjà pu avoir lieu dans le passé, alors même que la campagne de vaccination est primordiale pour le département. En août dernier, des agents du centre de vaccination de Koungou, commune dont le taux de vaccination était le plus faible de l’île, avaient constaté dans nos colonnes que la présence de la PAF constituait un frein pour une partie de la population, en situation irrégulière.
Contacté, le président de la délégation de la Croix rouge à Mayotte n’a pas souhaité réagir. Si la vaccination a bien progressé sur le territoire, avec 78,1% de la population cible ayant reçu au moins une dose selon les dernières données de l’ARS, l’épidémie circule toujours. Au 22 octobre, 39 nouveaux cas avaient été détectés sur une semaine.
Dernière née dans le paysage mahorais, l’association Maeva vient à la rescousse des animaux livrés à eux-mêmes sur l’île aux parfums, aux côtés de l’APPF976 (association pour la prévention et la protection de la faune de Mayotte) et de Gueules d’amour. La fermeture du seul refuge de l’île n’a pas aidé les affaires des organisations bénévoles du territoire qui œuvrent chaque jour à la protection animale. Vendredi, une soirée caritative à l’initiative de l’association Maeva est organisée pour les 21 chiens découverts le 13 octobre dans le quartier de Convalescence. Entretien avec Emmanuelle Martin, trésorière de l’association.
Flash Infos : Depuis quand existe l’association et quels sont ses objectifs ?
Emmanuelle Martin : Nous avons fait l’assemblée générale constitutive en avril cette année, la publication au journal officiel est arrivée en juin. Notre objet, c’est la protection des animaux domestiques de manière générale : chiens, chats et pourquoi pas demain les chèvres, les zébus, les moutons… Dans nos objectifs, nous brassons l’ensemble des actions en faveur de la protection animale, du basique recueil des animaux errants, à la re-sociabilisation, au placement en famille d’accueil en passant par la recherche d’adoptant, et pourquoi pas aussi des campagnes de sensibilisation auprès du grand public !
FI : Concrètement, comment fonctionnez-vous ? Avez-vous un refuge pour accueillir les animaux ?
E.M. : Nous n’avons pas de refuge, nous fonctionnons par famille d’accueil. Au début, l’idée c’était d’avoir une petite association qui aurait pris quelques animaux en charge, principalement pour du sauvetage. Mais il y a un vrai souci de place ! Et avec la fermeture du refuge de Gueules d’amour, il y a un besoin réel sur le territoire. Mais les moyens en face manquent cruellement. Pour vous donner une idée, nous étions partis sur 10 ou 12 animaux par an pris en charge par notre structure : en six mois, nous en avons déjà accueilli 65 ! Nous n’avons néanmoins pas de refuge, et ce n’est pas l’objet de l’association. Nous travaillons plutôt avec des familles d’accueil. L’autre volet de notre action, c’est de trouver des partenariats avec des associations de métropole, pour pouvoir envoyer des animaux sociables qu’elles se chargeront de faire adopter là-bas. Et nous nous occupons des adoptions locales. Pour l’instant, sur les 65 recueillis, sept ont été adoptés sur Mayotte, et deux sont partis en métropole. Et nous avons noué un partenariat avec Les rescapés des îles, une association qui travaille avec les Outre-mer. Elle pourra prendre en charge quatre chiots pour un premier départ en novembre. Ensuite, nous essaierons d’avoir des départs réguliers en fonction de la place disponible sur site.
FI : Comment peut-on devenir famille d’accueil ou adoptant ?
E.M. : Nous avons mis en place un protocole et les candidats à l’accueil doivent répondre à un questionnaire. Il faut savoir que s’engager comme famille d’accueil, cela peut vouloir dire garder l’animal quatre ou cinq mois avant une éventuelle adoption ou un départ en métropole. Et nous prenons en charge le vétérinaire, mais pas les croquettes ou la litière. De même pour les adoptants, il y a des règles à respecter, notamment la stérilisation obligatoire. Nous faisons une campagne de lutte contre les animaux errants, qui sont un danger pour la faune de Mayotte, ce n’est pas pour ajouter de la reproduction sur l’île ! Il faut aussi s’assurer que la famille adoptante est prête. Les 21 chiens de Convalescence, pour ne citer qu’eux, ont tout de même été enterrés dans des trous avec des plaques de tôle au-dessus de leur tête… Ce n’est pas pour les envoyer dans des familles qui n’en veulent plus et nous les renvoient derrière. Le questionnaire est ensuite validé par l’association, puis il faut remplir un contrat d’adoption, avec un chèque de caution pour la stérilisation, et les 200 euros de frais de base.
FI : Comment avez-vous été amenés à travailler avec Gueules d’amour et APPF976 ?
E.M. : Tout est parti de l’opération de police à Convalescence, avec ces 21 chiens partis en fourrière. Une bénévole nous a appelés à la suite des articles de presse. J’ai alors contacté la ville de Mamoudzou et la fourrière : sans refuge, il était prévu que les animaux partent à l’euthanasie… Après discussion, la mairie a accepté que les associations les récupèrent. Donc nous y sommes allés avec Gueules d’amour et APPF, les seules assos existantes sur le territoire pour accueillir les chiens. Il y avait une femelle et ses huit chiots, une autre et ses cinq chiots et un mâle adulte. Tous devaient être euthanasiés le lundi ! Nous avons pu placer quasiment tout le monde chez Maeva, sauf la femelle et ses cinq chiots, qui ont été pris en charge par APPF. Après, l’idée pour nous, au vu de tout ce qu’il y a à faire sur le territoire, c’est qu’il y a de la place pour toutes les bonnes volontés. Nous travaillons en bonne intelligence avec Gueules amour et APPF : chacun a des moyens différents, mais nous avons une cause commune, la protection des animaux. C’est toute l’idée de la soirée caritative de vendredi que nous organisons ensemble. Nous nous partagerons les recettes au prorata des animaux que nous avons pris en charge avec APPF.
FI : Justement, pouvez-vous expliquer le concept de cette soirée, et vos objectifs ?
E.M. : Le concept est simple : chaque personne paie 30 euros, dont dix seront reversés aux associations. Cela se passe au restaurant Le Moya, en Petite-Terre, sur inscription car il s’agit d’un buffet à volonté. Nous avons déjà 80 inscrits. Après, il faut bien avoir en tête que 21 chiens, c’est minimum 200 euros par animal, sans compter les éventuels problèmes qui peuvent être détectés par la suite. Ces 200 euros permettent de payer les vaccins, le passeport, l’identification, la teigne, le déparasitage et le vermifuge… Là par exemple, ils avaient tous la teigne et étaient blindés de vers ! Donc 200 euros, c’est vraiment un minimum, la base des soins et le paiement des vétérinaires. Grâce à la cagnotte en ligne, nous avons récolté 740 euros chez Maeva. Si 100 personnes viennent vendredi, il y aura peut-être 800 euros pour l’association. Ce qui veut dire que j’aurais payé un peu plus de la moitié de ce qu’il faut en trésorerie, juste pour les soins de base !
Comme nous sommes une jeune association, nous sommes aussi extrêmement liés au financier. D’où l’importance de nos appels aux dons. Sur le post au sujet de 21 chiens de l’élevage, nous avons eu 100 réactions et plus de 300 partages… Si chacun avait donné 10 euros, – soit deux verres de jus de fruit ! – nous aurions déjà rempli la cagnotte. En attendant, chaque fois que nous prenons en charge un nouvel animal, ce sont nos comptes personnels à tous qui en pâtissent. Avec 21 chiens, nous allons aussi être obligés de mettre en parenthèse la prise en charge, sauf moyens financiers supplémentaires et un partenariat pour envoyer les chiens en métropole. Mais nous ne demandons pas la lune ! Avec 3.000 euros pour payer les frais de vétérinaires, nous pourrions chercher sereinement les partenariats qu’il nous faut…
Le rectorat a décidé de rendre un nouvel hommage à Samuel Paty, l’enseignant assassiné le 16 octobre 2020, en baptisant la salle de conférence en son nom. Un message symbolique selon le responsable de l’académie, Gilles Halbout, pour qui ce lieu de réunion représente la liberté d’expression. À travers cette inauguration, le recteur espère donner des idées aux maires et aux chefs d’établissements scolaires.
« Professeur d’histoire-géographie et d’enseignement moral et civique, assassiné pour avoir enseigné et défendu les valeurs de la République dont la liberté d’expression ». La salle de conférence du rectorat arbore fièrement depuis ce lundi le nom de Samuel Paty, victime du terrorisme islamiste le 16 octobre 2020. Une pièce « qui nous rassemble » au sein de laquelle « sont prises les grandes décisions » et où « nous rencontrons le corps enseignant et les organisations syndicales », déroule le recteur, Gilles Halbout, qui invite au passage les maires et les chefs d’établissement à suivre cet exemple. « Il faut que ce soit une démarche collective de l’ensemble de la communauté éducative. »
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En plus de la plaque commémorative, un portrait de l’enseignant, « que l’on sent pleinement impliqué devant ses élèves », trône à deux pas de la porte d’entrée. « Il nous accompagnera dans l’ensemble de nos travaux », insiste le responsable de l’académie. À travers la mémoire du quadragénaire, il apparaît essentiel à ses yeux de « nous forger un esprit éclairé, notamment sur les sujets plus sensibles », pour que le message de laïcité partagé à l’intérieur des écoles, des collèges et des lycées ait davantage de poids à l’extérieur de leurs murs. « Nous avons des formes de séparatisme, comme les rivalités entre les villages. Notre travail à nous tous est d’éveiller les consciences. »
La notion d’autorité en danger
Cet hommage est également une manière de rappeler le rôle et la place des enseignants, qui incarnent ni plus ni moins l’institution scolaire. « Ils doivent être toujours et pleinement respectés. Nous devons veiller à leur sécurité et à ce qu’aucun d’entre eux ne soit arrêté dans le cadre de ses missions. » Or, la notion d’autorité commence petit à petit à se déliter dans le 101ème département… En témoignent les caillassages et les règlements de compte fréquents aux abords de certains établissements scolaires. Mais aussi plus récemment dans les salles de classe.
Face à cette menace de plus en plus insistante, à Mayotte comme partout ailleurs, toutes les académies de France ont pour mission de former tous les personnels de l’Éducation nationale au cours des quatre prochaines années « pour que chacun sache quoi faire et comment réagir quand il se sent attaqué. Car nous pouvons vite être pris au dépourvu ». Et ainsi d’assurer la transmission des valeurs de la République. Comme s’y était tant attaché Samuel Paty.
28 auditeurs en déplacement à Mayotte la semaine du 15 novembre
Alors qu’elle prépare un diplôme universitaire « Valeurs de la République », la promotion Jean-Pierre Chevènement à l’institut des hautes études de l’éducation et la formation de Poitiers se rend à Mayotte à partir du 14 novembre dans le cadre d’une mission extérieure sur la thématique de la laïcité, de l’égalité hommes-femmes et des violences sexuelles. « Ils viennent une semaine et ont un programme bien chargé », précise Stéphane Planchand, conseiller technique établissements et vie scolaire.
Le traileur El-Habib Zoubert est le première athlète de Mayotte à remporter vendredi l’une des fameuses courses du Grand Raid de La Réunion, la Mascareignes en 8h44’02sec. Un exploit sportif pour le licencié du club d’athlétisme de Mamoudzou qui s’entraîne depuis seulement 2017. Retour sur cette victoire avec le principal intéressé, communément appelé Tecno, et le président de l’association, Michel Latour.
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Flash Infos : Vous avez bouclé les 72km et les 3.900 mètres de dénivelé de la Mascareignes 2021 en 8h44’02sec. Comment vous êtiez-vous préparé et comment avez-vous vécu cette course ?
El-Habib Zoubert : J’avais fait pas mal d’entraînements avec mon coach Pascal Blanc malgré le Covid-19. J’ai enchaîné les sorties de trois à sept heures en n’oubliant pas le renforcement musculaire et la vitesse.
Michel Latour : L’un des problèmes pour une telle préparation est que Tecno n’a pas vraiment de sparring-partner… Mais il a appliqué à la lettre les séances envoyés par Pascal Blanc, qui est une référence dans le milieu du trail !
El-Habib Zoubert : J’aime bien courir tout seul, cela ne me pose pas de problème ! Pour ce qui est de la course, j’étais très en forme jusqu’au 62ème kilomètre. Je n’avais aucune douleur. Puis ensuite, ça a commencé à tirer… J’ai eu des crampes au niveau des cuisses et j’ai été obligé de marcher un peu. Je me suis retrouvé avec Romain Fontaine. Nous étions ensemble jusqu’au Colorado, avant que je ne le distance dans la dernière descente !
FI : Quel sentiment vous a traversé l’esprit lorsque vous avez franchi la ligne d’arrivée ?
E-H. Z. : En tant que croyant, j’ai tout simplement remercié Dieu ! C’est pour cette raison que je me suis agenouillé par terre après avoir franchi la ligne d’arrivée. Je me suis dit que tous les efforts avaient fini par payer.
FI : Lors de votre première participation en 2019, vous avez terminé 4ème en 2019. C’est ce qu’on appelle une progression fulgurante…
E-H. Z. : Vous savez, je n’ai commencé le trail qu’en 2017. Cela fait seulement quatre ans que je m’entraîne dur… J’avais notamment bouclé le trail des amis en 2h48 en 2018. Je regarde beaucoup les autres athlètes sur Youtube pour m’améliorer. Toute cette énergie au club m’a donné envie de faire quelque chose de grand. Je connais mon potentiel dans les montées qui me permettent de grapiller quelques secondes sur mes concurrents lors des compétitions.
M. L. : Tecno a surtout des prédispositions naturelles pour le trail. Il mémorise facilement les chemins et il a une technique très impressionnante dans les descentes. Il s’adapte très bien au parcours. Il prend des risques énormes. Des risques qui ont notamment payé face au meilleur descendeur réunionnais lors de la Mascareignes.
FI : À la suite de votre victoire, une polémique a pris le dessus sur l’exploit sportif : à savoir si vous étiez comorien ou mahorais. Qu’avez-vous à répondre à vos détracteurs ?
E-H. Z. : Je suis Comorien, je ne le cache pas. Je suis fier de ce que j’ai fait à Mayotte et d’avoir pu saisir les opportunités que le 101ème département m’a apportées au cours de ces dernières années. Je suis vraiment très heureux d’avoir pu représenter le club d’athlétisme de Mamoudzou à La Réunion.
FI : Si l’on prend un peu plus de hauteur, c’est une grande fierté pour le club d’athlétisme de Mamoudzou…
M. L. : Tout à fait ! Nous sommes très fiers de ce qu’il a réalisé. Cela nous conforte dans l’idée que nous allons dans le bon sens. Nous essayons de mettre les athlètes dans les meilleures conditions, comme nous le faisons avec Tecno, qui a un énorme potentiel, en lui mettant un coach personnalisé à disposition. En plus des deux sponsors qui le suivent, Maydeco et La Cabane à Sara, nous faisons le nécessaire, avec nos « petits » moyens, pour l’accompagner, en lui finançant des billets d’avion et des équipements. Cette victoire à La Réunion nous encourage à continuer en ce sens.
FI : Vous ne semblez avoir aucune limite. Quel est votre prochain objectif ?
E-H. Z. : Mon rêve serait de participer un jour au marathon du Mont Blanc.
M. L. : Nous lui laissons d’abord le temps de savourer sa victoire avant de penser à la suite. Nous allons faire une visio avec son coach pour faire le point. Mais pourquoi pas prendre le départ d’une course à l’étranger ? Avec sa première place à la Mascareignes, peut-être qu’il sera plus facilement invité ! En tout cas, nous ne nous précipitons pas : nous prenons les étapes comme elles viennent, les unes après les autres.
Cela fait presque dix mois que les avions de la compagnie Kenya Airways ne se sont pas posés sur le tarmac de l’aéroport de Mayotte. De longs mois qui ont mis la patience des passagers à rude épreuve et qui ont affaibli la santé financière de l’agence de voyage Rogers Aviation basée dans le département. L’attente prendra fin à partir du 3 novembre, date de reprise des vols Kenya Airways. Mais pour monter à bord, les voyageurs devront se plier à des mesures sanitaires plus exigeantes que celles demandées par les autres compagnies qui desservent l’île. Nash Emrith, le directeur de l’agence Rogers Aviation Mayotte, nous explique en détails.
Flash Infos : Cela fait plusieurs mois que Kenya Airways n’était pas autorisé à se poser à Mayotte. Qu’est-ce qui a changé la donne ?
Nash Emrith : La situation sanitaire s’est nettement améliorée comparé au début d’année où c’était très tendu. On suivait l’évolution chaque mois, on faisait des demandes assez souvent au-près de la préfecture, mais on nous avait expliqué que la situation était un peu compliqué et que ça allait prendre du temps. Quand l’État a autorisé les vols vers les Comores, on nous avait dit qu’il fallait encore patienter un peu. En octobre, on a fait le maximum que l’on pouvait, on a sollicité une nouvelle fois la préfecture et on a été soutenus par les élus et cette fois-ci, ça a porté ses fruits.
FI : Dans quelles conditions allez-vous reprendre les vols ?
N. E. : On reprend dès le 3 novembre et dans un premier temps, on aura trois fréquences par semaine : lundi, mercredi et vendredi. Les vols iront à Nairobi et puis les correspondances se feront pour Paris, Dubai, Dar es Salam.
FI : Quelles sont les mesures sanitaires à respecter si l’on veut voyager avec Kenya Airways ?
N. E. : Pour pouvoir voyager avec Kenya Airways, il faut que les passagers aient leur schéma vaccinal complet, c’est obligatoire à partir de 12 ans. Il faut aussi un test PCR de moins de 72h. Les tests antigéniques ne sont pas acceptés. Ces mesures s’appliquent à l’aller et au retour. On a aussi pris des mesures additionnelles en interne. Une fois arrivés à Nairobi, les passagers qui seront en transit seront installés dans un terminal dédié, c’est-à-dire que tous les voyageurs de Mayotte seront ensemble, ils ne seront pas mélangés avec les autres transitaires venant d’autres destinations.
FI : Pourquoi est-on obligés de faire un test même lorsque l’on est vacciné ?
N. E. : Parce que l’on respecte les conditions des deux pays, le Kenya et la France. Le ministère de la santé au Kenya a mis en place des protocoles sanitaires et tous les passagers qui passent par le Kenya doivent présenter un test PCR. Ils n’acceptent pas les tests antigéniques. Par contre, ils ne demandent pas l’obligation vaccinale, mais comme à Mayotte c’est exigé pour pouvoir voyager alors on a mis en place toutes ces conditions afin de respecter les mesures de chaque pays.
FI : Les autres compagnies, Corsair et Air Austral, n’exigent pas l’application de toutes ces mesures en même temps. N’avez-vous pas peur de perdre des clients de cette manière ?
N. E. : Cela peut arriver, mais on est confiants. Le pass sanitaire va devenir une réalité tôt ou tard. Il y a déjà des pays qui obligent les gens à être vaccinés, notamment Singapour et l’Arabie Saoudite. Il y aura toujours quelques personnes qui seront réticentes à faire le vaccin. Elles vont préférer voyager avec Corsair ou Air Austral, mais on n’a pas le choix.
FI : Comment avez-vous gérer ces longs mois d’attente ?
N. E. : C’était extrêmement compliqué. Notre dernier vol en 2021 date du 12 janvier… Nos clients n’arrêtaient pas de nous solliciter. Les commerçants n’ont pas pu voyager parce qu’ils partent plu-tôt à Dar es Salam et à Dubai pour acheter leurs marchandises. Heureusement, la majorité de notre clientèle a compris que ça ne dépendait pas de notre volonté mais qu’on devait respecter l’arrêté préfectoral. Cependant, on a aussi eu des passagers qui voulaient être remboursés afin de pouvoir voyager avec d’autres compagnies. On l’a fait, ce qui était un peu malheureux. Ces derniers mois, on a eu beaucoup de voyageurs qui ont demandé un remboursement pour ensuite par-tir aux Comores et prendre Kenya Airways là-bas. On a perdu de l’argent et ce sont nos confrères qui en ont bénéficié, mais c’est comme ça.
FI : Dans quelles mesures la santé financière de l’agence a été touchée ?
N. E. : Notre situation financière à Mayotte est très délicate, on a pris un coup. Pendant neuf mois, on a remboursé autant que l’on pouvait alors que les ventes étaient rares. En une semaine, on vendait peut-être trois billets. On a pu survivre grâce à nos réserves. On porte nos espoirs sur cette fin d’année où normalement il y a beaucoup de ventes. S’il fallait attendre l’année prochaine pour reprendre les vols, je pense qu’on aurait été dans une situation financière très grave.
FI : Quelle est votre stratégie pour maximiser le nombre de ventes ?
N. E. : On est en train de la peaufiner. Mais de toute façon, si l’on compare aux tarifs qui sont sur le marché, Kenya Airways a des prix très compétitifs. On va miser là dessus. Cependant, il faut savoir qu’avec seulement trois vols par semaine, on ne peut pas brader les prix et on ne pourra pas satisfaire toutes les demandes. On a travaillé longuement avec le siège à Nairobi pour assurer que sur les trois vols, on puisse offrir toutes les correspondances qui sont très demandées à Mayotte. Si la situation s’améliore davantage, on pourra passer à quatre et à partir de l’année prochaine, si tout se passe bien, on va faire une demande pour opérer cinq vols par semaine. On espère que cette fois-ci la situation sanitaire va nous épargner un peu.
La fédération qui comprend 25 associations adhérentes sur le territoire a fêté ses dix bougies. L’occasion de dresser le bilan du chemin parcouru par la structure. Mais aussi de faire le point sur les défis environnementaux qui pèsent encore sur l’île aux parfums. Entretien avec Manuella Grimault, la coordinatrice de MNE.
Flash Infos : Vous venez de fêter les dix ans de Mayotte Nature Environnement. Pourquoi MNE avait été créé en 2011 ?
Manuella Grimault : En effet, Mayotte Nature Environnement est une fédération d’associations qui a été créée en juillet 2011. À la base, ce sont huit associations qui avaient besoin de se regrouper pour travailler ensemble sur des thématiques communes, et pour avoir plus de poids au niveau politique. Depuis le départ, dans les statuts, le but est de protéger l’environnement mahorais, mais en lien transversal avec les associations membres. Le projet stratégique repose sur trois piliers : l’éducation à l’environnement, la valorisation des connaissances et la réparation de l’environnement. L’idée du premier axe est d’informer, de sensibiliser et d’éduquer toute la population mahoraise sans exception ; la valorisation des connaissances vise à en savoir plus sur l’environnement, la biodiversité, les sols, la pollution… Justement dans le but de pouvoir le transmettre ensuite à la population. Quant à la réparation de l’environnement, nous intervenons sur le terrain avec par exemple des nettoyages, des replantations, ou encore par des actions juridiques.
FI : En dix ans, quel chemin a été parcouru par la fédération ?
M.G. : On est passé de huit associations de départ, à 25 aujourd’hui ! Cela a notamment été rendu possible parce que nous avons ouvert les possibilités d’adhésion à d’autres associations, qui ne sont pas environnementales par essence. Par exemple, on va avoir un club de foot qui a décidé d’ouvrir une branche développement durable. C’est d’autant plus intéressant que ces structures n’ont pas l’obligation de le faire, donc il y a une vraie volonté derrière.
En ce qui concerne les projets de la fédération en eux-mêmes, on a aussi eu de belles réussites. Pour l’aspect éducation à l’environnement, nous avons créé le camion pédagogique. Le projet a vu le jour en 2017, c’est un camion entièrement aménagé pour accompagner l’outil pédagogique pour toutes les thématiques environnementales : on peut parler de tortues, de déchets, de développement durable, d’éco citoyenneté, de chaîne alimentaire, de risques naturels… J’en oublie sûrement ! L’idée, c’était aussi d’être à disposition de la population, qui, on le sait, n’est pas toujours très mobile sur le territoire. Cela nous a aussi permis de créer un poste à temps plein d’animateur environnement, depuis 2018. Le camion est déployé dans les écoles la semaine et pendant les vacances scolaires et les samedis, on est plutôt sur des places publiques, à la plage ou sur des événements partout sur le territoire. En dix ans, il y en aussi eu pléthore de chantiers de nettoyage. Mais là où on a davantage progressé encore, je dirais que c’est sur la création de formation pour les bénévoles, notamment la formation tri des déchets. Dans l’idée, c’est de faire aussi de la sensibilisation pendant ces actions, et ne pas juste se contenter du ramassage bête et méchant si j’ose dire.
FI : Et au niveau de Mayotte, des mœurs, mais aussi de l’état de l’environnement, qu’est-ce qui a aussi évolué, selon vous, en dix ans ?
M.G. : Je pense que certaines choses évoluent doucement mais sûrement… Quand on va dans les villages avec le camion notamment, on s’en rend compte. Il y a quelques années, on venait parler d’environnement, et les gens découvraient en même temps qu’on arrivait. Aujourd’hui, ça devient de plus en plus courant que les gens connaissent déjà des choses sur le sujet. Par exemple, sur les tortues, ils savent que c’est une espèce protégée, qu’il ne faut pas la braconner. Le mot corail aussi, avant, on ne l’entendait pas dans les rues. Nous à MNE on a un adage, c’est que plus on connaît les choses, plus on va avoir envie de les protéger. Donc pour nous, c’est déjà une très bonne chose de voir que les gens connaissent les termes autour de l’environnement. Certes, il s’agit pour la plupart, souvent de jeunes. Mais il y a aussi des mamans qui nous surprennent aussi !
Sur l’état de l’environnement, c’est une autre histoire… La déforestation se poursuit sur Mayotte, on a encore beaucoup de brûlis. Nous n’arrivons pas à la stopper. Sur le braconnage de tortues c’est compliqué aussi, même si beaucoup d’actions sont mises en place, notamment ces dernières années, je pense au pacte anti braconnage, il faut espérer qu’on en verra les résultats. Sur l’assainissement ensuite, on est parti de zéro et les élus locaux n’avancent pas assez vite sur ces sujets. De même pour les déchets, on a une société de consommation qui a démarré il y a dix ans avec l’import de déchets non compostables, sans gestion derrière. Toute gestion aujourd’hui est faite avec du retard et elle n’est pas calibrée pour la quantité de déchets. Il faut néanmoins souligner les efforts fournis, notamment avec la création des intercommunalités qui se sont saisies du sujet. La Cadema a fait un beau travail, il y a beaucoup moins de déchets qu’avant, même si ce n’est pas parfait. Il y a aussi les brigades de police pour l’environnement qui se montent. Tout cela dénote de sérieuses avancées, heureusement !
FI : Quels sont selon vous les défis à relever dans les dix prochaines années et les principales menaces qui pèsent sur cet environnement ?
M.G. : Sur les atteintes à l’environnement de façon générale, les principales menaces à Mayotte sont la déforestation, l’assainissement des eaux et les déchets. Il s’agit clairement des trois thématiques primordiales pour assurer un environnement sain, les trois priorités. Après en ce qui concerne MNE, nous allons renforcer l’accueil pour nos associations adhérentes. Pour 2022, nous allons proposer plus d’une dizaine de formations à toutes nos associations adhérentes. Bien sûr, leurs bénévoles sont prioritaires mais nous acceptons tout le monde ! L’éducation à l’environnement est un sujet que l’on décline, plus que jamais, et que l’on renforce d’année en année, pour déclencher un changement de comportement en faveur de l’environnement. Enfin, on a créé un service juridique en 2021. Et pour les années à venir, nous espérons bien voir naître des lanceurs d’alerte environnementaux et accompagner une communauté de lanceurs d’alertes !
Vendredi 22 octobre avait lieu la cérémonie de remise des lettres de félicitations aux cadres d’avenir par le sous-préfet Jérôme Millet à la Case Rocher. L’occasion pour la préfecture de récompenser les jeunes diplômés partis en métropole ou à La Réunion pour se former dans des secteurs dits prioritaires.
Une cérémonie « sans prétention mais non sans ambition », s’est réjoui le secrétaire général adjoint à la préfecture, Jérôme Millet, ravi de remettre vendredi dernier les lettres de félicitations aux nouveaux cadres d’avenir du 101ème département. Le projet cadres d’avenir lancé en 2018 sur l’île aux parfums a pour ambition de promouvoir les talents mahorais en leur offrant un suivi et une aide financière afin de mener à bien leur formation dans des domaines dits prioritaires, en métropole ou à La Réunion. Un dispositif ouvert aux étudiants, mais aussi aux professionnels souhaitant poursuivre leur formation.
En Hexagone, “93% des étudiants mahorais échouent lors de leur première année”, a confié Daoudou Chaïboudine, chargé de formation au sein de l’association Émanciper Mayotte, partenaire du dispositif. Un échec qui s’explique par « un choc culturel, climatique » pour ces heureux élus qui « peuvent rencontrer des difficultés financières et administratives », a affirmé le sous-préfet. Pour pallier cela, la préfecture s’emploie à accompagner trente étudiants souhaitant se former dans des secteurs prioritaires, en leur octroyant une bourse et un suivi personnalisé. En contrepartie, les futurs cadres s’engagent à retourner travailler à Mayotte afin de participer au développement de l’île.
Un emploi à la hauteur de leurs compétences
Le représentant du gouvernement félicite les étudiants des deux premières promotions revenus sur leurs terres natales. Tous réunis à la Case Rocher, les jeunes diplômés arborent de larges sourires et tiennent fièrement leurs récompenses « manuscrites ». Parmi eux, Abdallah Faizi, titulaire d’un master administration publique parcours gestion des services administratifs de l’université de Nancy, ne tarit pas d’éloges sur le dispositif. “En 2018, après avoir obtenu ma licence au CUFR (centre universitaire de formation et de recherche) de Dembéni, je suis parti pour la métropole en intégrant la première promotion du dispositif cadres d’avenir. J’ai pu bénéficier d’une aide financière et d’un conseiller qui a été là pour moi h24.” Diplômé en septembre 2020 en métropole, il a retrouvé son département d’origine où il a obtenu en janvier 2021 un poste de coordinateur Ateliers et chantiers d’insertion (ACI) au sein de l’association Nayma. Comme lui, la dizaine d’étudiants présents vendredi dernier ont tous trouvé un emploi à la hauteur de leurs compétences et participeront activement au développement de l’île aux parfums.
La conseillère départementale de Tsingoni, Zaounaki Saindou, est la nouvelle présidente de la société immobilière de Mayotte. Le bailleur social gère un parc de 2.100 logements et a pour ambition de quadrupler son patrimoine d’ici 2030. Face à cet enjeu de taille, l’élue va devoir faire preuve de pugnacité pour assurer le développement des constructions aux quatre coins de l’île.
Flash Infos : Depuis ce jeudi 21 octobre, vous êtes pour les sept prochaines années la nouvelle présidente de la société immobilière de Mayotte, un acteur majeur pour le développement du 101ème département. Qu’est-ce qui vous a motivé à vous présenter pour ce poste ?
Zaounaki Saindou : Je me suis portée candidate à cette présidence et ai reçu le soutien de mes collègues et du chef de l’exécutif, Ben Issa Ousseni, pour devenir la représentante du Département au sein de la société immobilière de Mayotte. Le territoire connaît un nombre énorme de logements insalubres, ce qui est tout à fait anormal ! Je souhaite que chaque famille, chaque enfant, puisse dormir dans des conditions décentes. Face à ce vœu, faire partie du conseil d’administration de la SIM me tenait particulièrement à cœur pour pouvoir accompagner ce changement.
FI : Quel sera votre rôle au sein du conseil d’administration ? Aurez-vous un véritable pouvoir décisionnaire ou plutôt un droit de regard sur la politique menée par la SIM ?
Z. S. : J’aurai un pouvoir décisionnaire étant donné que le Département est actionnaire de la SIM. Ma priorité sera d’étendre les projets de construction de logements sur l’ensemble de l’île. À l’heure actuelle, le problème n’est pas de vouloir augmenter le nombre de constructions, mais bien de réunir toutes les conditions pour y parvenir. Malheureusement, ce n’est pas toujours facile d’obtenir un terrain aménageable…
Le nord de l’île affiche un déficit criant au-delà de Dzoumogné. Dans le centre, cela commence tout juste à prendre forme… Tandis qu’une grande partie du sud est vraiment désertée par la SIM alors que les besoins sont multiples ! Face à cet enjeu, le Département jouera son rôle de facilitateur pour mettre à disposition du foncier quand cela sera possible.
FI : Dans sa nouvelle stratégie, la SIM affiche l’ambition de construire la bagatelle de 6.000 logements d’ici dix ans.
Z. S. : Pour l’année 2021, la SIM est en passe de livrer 400 nouveaux logements. La plupart des projets sont déjà dans les starting-blocks ! Après comme le disait le directeur, Ahmed Ali Mondroha, il y a un autre facteur qui rentre en ligne de compte pour pouvoir lancer tous ces chantiers : le manque d’entreprises structurées qui se retrouvent bien trop souvent saturées à cause des autres constructions, telles que les établissements scolaires. Regardez le projet La Renaissance à côté de l’hôpital, toutes les conditions sont réunies pour commencer les travaux, mais fautes d’entreprises, nous sommes en incapacité de le démarrer.
FI : Quelle touche personnelle aimeriez-vous apporter durant votre présidence ?
Z. S. : J’aspire à diversifier l’offre de la SIM, en instaurant l’accession à la propriété pour ceux qui ont la possibilité de pouvoir investir dans l’immobilier, mais aussi la location-vente. La population se montre de moins en moins réticente à l’idée de vivre dans un appartement. Il suffit de voir le taux d’occupation des « immeubles » en Petite-Terre, ça n’a pas l’air de la déranger plus que cela. D’autant plus qu’habiter en hauteur apporte un gage de sécurité supplémentaire.
Département avec les perspectives de croissance les plus fortes, Mayotte est encore en plein développement. À l’occasion du 4ème forum économique, l’économiste et maître de conférences à l’université Paris-Saclay, Olivier Sudrie, a dévoilé quelques pistes de travail pour envisager les contours de l’économie mahoraise à l’horizon 2050.
La croissance ! Voilà ni plus ni moins l’enjeu principal à Mayotte selon l’économiste parisien Olivier Sudrie. Selon lui, seule une croissance régulière et équilibrée permettra le développement de l’île aux parfums. Si la forte démographie du 101ème département français peut constituer une problématique au premier abord, elle peut aussi se révéler comme un atout majeur… Encore faut-il employer tous ces “bras” à bon escient.
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Pour cela, il n’existe qu’une seule solution d’après l’expert : l’investissement ! “Les investissements venus de l’État viennent financer les infrastructures, les services éducatifs ou encore de santé. Mais aujourd’hui, pour arriver à équilibrer l’offre et la demande d’emploi sur l’île et faire progresser durablement le niveau de vie des Mahorais, il faut aussi que les entreprises structurées investissent”, témoigne le maître de conférences à l’université Paris-Saclay. “Nous avons tous les outils en main. Mayotte est le département avec les perspectives de croissance les plus fortes, nous n’avons aucune raison de ne pas y arriver.” Un optimisme qui dénote tant le territoire de Mayotte connaît de fortes inégalités comme le soulignent plusieurs autres intervenants.
Formation et transmission des compétences
Toujours est-il qu’embaucher à Mayotte n’est pas une mince affaire de nos jours ! À en croire la représentante de la Société Batimétal, le recrutement pour des postes demandant des qualifications plus ou moins élevées s’avère difficile. “Après une longue période de recherche de nouveaux employés, nous avons eu recours aux outils numériques pour recruter. Sur les réseaux sociaux, notre annonce vidéo a fait 35.000 vues. Résultat ? Nous n’avons reçu que cinq CV ! Il faut alors prendre en compte le fort taux de chômage du département, mais aussi les difficultés pour les entrepreneurs à recruter.”
Un témoignage qui vient remettre en question les projections idylliques qui ont pu être émises plus tôt lors de la conférence. De plus, comme le précise Jean-Claude Nyumuyantu, enseignant et entrepreneur dans le secteur de l’informatique, l’une des problématiques à Mayotte réside dans la formation et la transmission des compétences. “50% de la population mahoraise a moins de 20 ans. La jeunesse c’est nos jambes. C’est avec eux que nous construirons l’avenir et que nous allons avancer. Leur formation est alors primordiale”, insiste le chef d’entreprise. À ses yeux, les générations doivent travailler main dans la main pour assurer un avenir pérenne à l’île aux parfums. Bien loin de la théorie, c’est sur le terrain et en unissant leurs forces que les institutions mahoraises publiques et privées construiront la Mayotte de demain.
Ancienne directrice de la BGE et de la CRESS de Mayotte, celle qui a failli devenir la première présidente du conseil départemental représente l’avenir politique de l’île au lagon. Dotée d’une volonté hors du commun et de valeurs sociales inaliénables, l’élue de Dzaoudzi-Labattoir compte bien aider les jeunes femmes mahoraises à modeler l’avenir de Mayotte.
Mayotte Hebdo : Revenons tout d’abord sur votre parcours, déjà très riche. En tant que femme, comment vous êtes-vous construite, et quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées ?
Maymounati Moussa Ahamadi : J’ai eu une enfance des plus classiques à Mayotte, avec des parents qui ne sont pas les plus riches, mais qui mettent en valeur leurs enfants. Nous étions tellement heureux ! Mes deux mamans, celle qui m’a mise au monde et celle qui m’a élevée, nous ont appris à toujours positiver et à se sentir utiles pour les autres, à avancer. J’ai eu la chance d’avoir des parents qui me disaient que le monde n’allait pas changer tout seul, qu’il fallait agir pour changer les choses. C’est la mentalité de ma famille, qui a milité pour une Mayotte française. J’ai fait mes études en métropole, j’y ai vécu pendant 20 ans, mais ma mère m’a toujours dit : « Vous étudiez ici, mais ce n’est pas chez vous ». Pour elle, on prend de la connaissance et des compétences pour en faire profiter son île.
MH : Vous diriez la même chose aux étudiantes et étudiants de Mayotte actuellement en métropole ?
M.M.A. : Oui, d’ailleurs il faut savoir qu’il y a plus d’étudiantes diplômées que d’étudiants. Je n’ai rien contre les mecs, mais la femme couteau-suisse, polyvalente, est déjà habituée à toujours pousser plus loin, plus fort. C’est un besoin de reconnaissance, parce qu’il n’y a toujours pas d’équité, en métropole ou à Mayotte, et que nous sommes donc obligées de travailler deux fois plus pour peser.
En tant que directrice, j’ai par exemple eu beaucoup de mal à faire valoir le fait que je dirigeais, malgré mes compétences. Il a fallu que je le prouve deux fois plus, parce que je n’ai pas de cheveux gris, parce que j’ai un visage qui fait jeune… Ça m’a motivée, parce que j’étais la seule jeune femme dans des réunions composées d’hommes plus âgés. Mais il a suffi d’ouvrir la bouche, de leur dire ce que j’avais à dire et qu’il fallait m’écouter. Si ce territoire donnait une chance à la matriarchie, nous aurions peut-être d’autres changements.
MH : Quelles sont les valeurs qui vous donnent la force de vous engager, les bases sur lesquelles vous vous reposez ?
M.M.A. : Ma première base est mon époux et mes enfants qui me comprennent, y compris la petite de deux ans qui participe à toutes mes réunions en visio ! C’est le noyau dur. Quand on est femme, on fait toujours face des histoires à dormir debout, à des critiques sur notre légitimité, et une base solide permet de nous redonner de l’énergie. Si on se met des barrières parce qu’il y a des difficultés, on ne fera jamais rien dans cette vie.
MH : Conseilleriez-vous à votre fille de s’engager en politique ?
M.M.A. : Je lui conseillerais surtout de s’activer pour elle-même, pas pour une cause bien précise. Qu’on le veuille ou non, on fait de la politique. Mais, quand on le fait pour soi, c’est que l’on a des valeurs, et que l’on s’en sert pour se surpasser. Je me suis engagée en politique pour changer les choses, bien sûr. Mais il n’y a pas que l’action directe, c’est un tout, un combat de mentalité. Il faut donc d’abord penser à soi.
MH : Quels sont vos modèles de femmes, qu’elles soient mahoraises ou non ?
M.M.A. : Mon premier modèle restera toujours ma maman, la base de tout. Et puis, il y a toutes les femmes qui se sont activées pour que Mayotte soit un territoire libre, portées par Zéna Mdéré, Coco Djoumoi, Mouchoula… C’était un réseau d’Amazones mahoraises, éparpillé sur l’île. Ce sont toutes ces femmes de l’ombre, qu’on ne voit pas, qui font partie de ce modèle politique et économique des Chatouilleuses qu’il faudrait faire revenir en le structurant. J’encourage en tout cas toutes les jeunes filles, au collège, au lycée ou dans les réseaux étudiants, à avoir confiance en elles, à aller au bout de leurs rêves et de leurs projets, et à se dire que tout est possible.
MH : Une nouvelle génération de politiciennes mahoraises émerge, vous parliez par exemple avec Hélène Pollozec lors du forum économique. Une solidarité existe-t-elle entre vous ?
M.M.A. : S’il y avait une solidarité, elle se serait exprimée le 1er juillet [lors de l’élection à la présidence du conseil départemental, NDLR]. La solidarité féminine, oui, mais jusqu’à quel point ? Nous avons quand même du chemin à parcourir, même s’il y a beaucoup de respect entre les représentants du conseil départemental. J’espère que les jeunes femmes qui veulent se lancer en politique se serviront de mon exemple pour ne faire qu’une, mais surtout pour retomber dans la réalité, car ce sont 300.000 personnes qui attendent des actions bien concrètes, qui espèrent.
MH : Comment aimeriez-vous voir Mayotte dans cinq, dix ans ?
M.M.A. : Je vois un accès à l’eau, sans les coupures et sans les excuses. Je vois une Mayotte zéro déchets, et nous avons les possibilités de le faire via le recyclage et la valorisation de nos déchets. Je vois plus de sécurité. Je vois également une Mayotte reliée, connectée, car nous n’avons qu’une route pour les voitures, les camions, les gens, les vaches, les bus, les brouettes, les vélos… On ne s’en sortira pas, donc j’espère vraiment qu’on pourra faire Dzaoudzi-Sada en 30 minutes, par exemple, en empruntant d’autres voies. Mais aussi une Mayotte connectée avec les îles des Comores, avec Paris… Une Mayotte où on n’a pas peur. À l’heure actuelle, on a peur, d’avoir une nouvelle compagnie aérienne, d’entreprendre et de concurrencer…
Pour moi, Mayotte dans dix ans, ce sont également tous les enfants qui vont à l’école, et non pas certains en train d’apprendre sous la clim, et d’autres qui mangent la poussière. Des étudiants qui choisissent de rester sur le territoire car l’offre universitaire le leur permet. Des structures destinées à tous les types de handicap, parce qu’aujourd’hui, si l’on est autiste à Mayotte, on est mort et enterré !
MH : Et où voyez-vous Maymounati Moussa Ahamadi dans quelques années ?
M.M.A. : Je laisserai le peuple me porter là où il veut que je sois. S’il me voit utile en tant que présidente du CD, je relève le défi. Si je vois moi-même que mon utilité est beaucoup plus loin, j’irai beaucoup plus loin. Mais l’essentiel est de ne pas abandonner le combat pour que toutes les femmes qui ont envie de faire, de se sentir utiles, aient une image à laquelle elles peuvent se référer. Et une main tendue, car ma porte est grande ouverte. Je suis là, on peut se voir, converser. Je me suis engagée et je resterai engagée pour les Mahorais.
Quelques semaines après le lancement de la campagne et la signature de la charte de l’engagement à lutter contre les violences sexuelles sur mineurs à Mayotte par 10 personnalités locales et 20 représentants d’associations, le collectif dresse un premier bilan à mi-parcours. Parmi les enseignements obtenus grâce à son questionnaire en ligne : 37,2% des personnes interrogées affirment avoir déjà été victimes d’une agression ou d’une tentative d’agression sexuelle.
Statistiquement parlant, on ne sait rien, ou presque, de l’ampleur des violences sexuelles faites aux enfants à Mayotte. Mais la campagne #wamitoo, lancée le 8 septembre dernier et qui court jusqu’au 20 novembre, est doucement en train de lever le voile sur le phénomène. À mi-parcours, le collectif CIDE a publié mercredi un premier bilan de cette “mobilisation thématique trans-partenariale sans précédent sur l’île”, écrivent ses membres dans un communiqué.
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“C’est inédit du fait que c’est la première fois qu’un collectif de 25 associations, soutenu par six institutions, se mobilise depuis huit mois sur un thème très peu abordé, en tout cas jamais abordé de front, ensemble, dans cette société”, note Lydia Barneoud, la représentante du collectif CIDE (convention internationale des droits de l’enfant). Signe que ces efforts conjoints paient, “nous avons même dépassé d’autres départements en termes de sensibilisation et de cohésion sur cette thématique. Ils nous demandent à présent des conseils ainsi que nos outils, en particulier la charte, le questionnaire, la bande-dessinée, et la campagne graphique-audiovisuelle !”, se réjouit l’enseignante, déjà investie depuis de nombreuses années dans cette sphère, notamment au travers de l’association Haki Za Wanatsa.
¼ ont souhaité témoigner après l’enquête
Le questionnaire mis en ligne sur le site wamitoo.yt a ainsi récolté 495 premières contributions depuis le lancement officiel de la campagne. Il en ressort notamment plusieurs données clé, sur lesquelles les équipes de bénévoles bûchent sans relâche. Preuve de la difficulté à briser le tabou sur ces questions sensibles, 69% des répondant.e.s ont entre 20 et 50 ans et seuls ¼ ont souhaité témoigner à l’issue de l’enquête. Les moins de 15 ans ne constituent que 7,9% des répondant.e.s. Par ailleurs, une très grande majorité sont des femmes (75,9%), lesquelles “sont hautement concernées par les violences sexuelles sur le territoire”, précise encore le rapport.
Sur les violences en elles-mêmes, les résultats de l’enquête sont, là encore, édifiants. La part des victimes, en premier lieu, qui est non négligeable : 37,2% des personnes interrogées ont répondu par l’affirmative à la question, “Avez-vous déjà été victime d’une agression ou d’une tentative d’agression sexuelle ?”. Et si 51,9% ont coché “non”, 10,9% disent ne pas savoir si ce qu’ils/elles ont subi est une agression sexuelle – soit peut-être le signe potentiel d’une méconnaissance de ce qui constitue la nature même d’une violence sexuelle. Parmi eux, 82,05% n’ont jamais parlé ou très difficilement de sexualité avec leurs parents pendant leur enfance.
L’auteur des faits est connu dans la majorité des cas
Parmi les autres données importantes, il faut aussi mentionner les liens de la victime avec le mis en cause. Seuls 16,7% des répondant.e.s affirment qu’il s’agissait d’un inconnu. Un résultat qui colle à peu près avec les statistiques connues au niveau national. Une enquête de l’Ined (institut national d’études démographiques) menée en 2015 montrait ainsi que dans plus de 87% des cas, le/la mineur.e connaissait son agresseur, et qu’il existait même un lien d’amitié ou de connaissance dans 65% des viols. Au niveau de l’enquête #wamitoo, 22,2% ont affirmé connaître l’auteur des faits, 11,3% le désignait comme un membre de la famille proche et un tiers des répondant.e.s (la plus grosse part) évoquent un membre de la famille éloignée.
Il ne s’agit bien sûr là que de données préliminaires, mais qui donnent déjà un aperçu du phénomène des violences sexuelles faites aux enfants à Mayotte. “Nous sommes en train de traiter toutes les occurrences pour chaque question, avec l’aide d’un expert psy. On a déjà fait environ 4/5ème du travail”, explique la porte-parole. “C’est très intéressant, il y a des choses qui se dégagent, qui rejoignent les statistiques nationales, et d’autres qui dénotent de spécificités locales. Ce qu’on voit aussi, c’est que dès que l’on crée un espace de parole, il est investi”, se satisfait-elle. Même si les bénévoles à l’œuvre doivent alors supporter des témoignages particulièrement durs… “Quand on lit ça, on a envie de pleurer pendant trois jours”, résume Lydia Barneoud.
“Un très très bon début”
D’autres données quantitatives et qualitatives seront dévoilées à l’occasion du colloque du 20 novembre au CUFR, qui doit clôturer ces deux mois de mobilisation inédite pour le 101ème département. Au total, 92 acteurs associatifs et plusieurs milliers d’enfants et parents se sont mobilisés pour cette campagne, aux côtés des différents acteurs institutionnels tels que le rectorat, la préfecture, le Département, et la justice. “Nous avons atteint voire même dépassé nos objectifs dans certains domaines, par exemple dans l’Éducation nationale, avoir recueilli 28 fiches actions mobilisant 7.000 enfants, parents et collègues, c’est un très très bon début”, souligne-t-elle.
60.000 euros auront par ailleurs été investis dans cette mobilisation, pour financer notamment les 10 affiches grand format placardées sur les panneaux extérieurs aux abords des grands axes routiers, 40 passages du clip shimaoré et kibushi aux heures de grande écoute et tous les autres supports de communication. Sans compter les 2.500 heures fournies par les bénévoles engagés pour l’émergence et la fabrication de la campagne #wamitoo. “C’est une période charnière, on sent qu’il y a cette volonté de pousser le mur de silence. C’est, qui plus est vraiment porté par les femmes mahoraises qui sont à nos côtés depuis le début, et aussi celles qui nous rejoignent chaque jour depuis le lancement”, salue Lydia Barneoud.
L’ancien président du conseil départemental a été condamné par le tribunal correctionnel pour la vente d’un terrain familial à la commune de Kani-Kéli, qui s’était vu attribuer une subvention de 200.000 euros du Département pour cette opération. Mais cette condamnation ne met pas encore un terme au mandat électif en cours de celui qui est aujourd’hui conseiller départemental de Pamandzi.
Et de deux. Pour la seconde fois en un peu plus d’un an, Daniel Zaïdani a été condamné par le tribunal correctionnel pour des faits qui remontent à l’époque où il était président du conseil départemental. Cette fois-ci, il s’agit de prise illégale d’intérêts pour la vente d’un terrain familial à la commune de Kani-Kéli, moyennant une subvention accordée à la ville par le Département, d’un montant de 200.000 euros…qui auront donc fini dans sa poche. L’ancien chef de l’exécutif local, actuel conseiller départemental de Pamandzi, a écopé ce mercredi d’une peine de 80.000 euros d’amende ainsi que de cinq ans d’inéligibilité.
Une claque pour son avocat, Maître Benoît Jorion, qui avait plaidé la relaxe. “Je suis extrêmement surpris par cette peine alors que le procureur avait lui-même conclu à la relaxe. Et personnellement, j’ai montré que Daniel Zaïdani n’avait non seulement jamais accordé de subvention, mais avait même voulu empêcher l’attribution de subvention”, déclare-t-il à la sortie de l’audience. “C’est vraiment l’incompréhension. On avait un dossier solide, pour montrer justement qu’on n’avait rien à lui reprocher”, ajoute-t-il, indiquant qu’il conseillera à son client de faire appel de cette décision. La peine d’inéligibilité ne devrait donc a priori pas interrompre son mandat en cours.
Le terrain familial sur le banc de touche
Pour rappel, Daniel Zaïdani avait été entendu par la section de recherches de la gendarmerie en décembre 2019, pour répondre de ces faits datant de la période 2015-2017. Lors d’une commission permanente pendant le mandat de l’ancien président du conseil départemental, neuf élus et un élu représenté valident une délibération sur laquelle Daniel Zaïdani appose sa signature. L’article 1 de ce document renvoie à l’attribution d’une subvention à la commune de Kani-Kéli pour un terrain destiné à des lotissements. “Au niveau de la commission permanente, nous avons présenté un certain nombre de rapports qui concernaient tout sauf le terrain de football”, argumente l’intéressé à la barre. D’après le dossier, le titre du rapport mentionnait tout de même le terrain de football, sans qu’un article y soit pour autant dédié.
C’est ensuite au tour des administrateurs de reprendre la main jusqu’au versement de l’enveloppe. En 2015, les services du Département produisent donc une convention, signée par le secrétaire général de l’époque, Jacques Toto. Problème : le terrain de football se glisse alors subrepticement à côté du terrain pour les lotissements ! “Est-ce que Monsieur Toto avait une délégation de signature ?”, demande le président au prévenu. “C’est un problème que vous ne sachiez pas, en tant que président de la collectivité, vous étiez censé être au courant de qui avait une délégation…”
Relaxe pour le procureur
Quoi qu’il en soit, les fonds finissent bien par être versés à la commune, laquelle achète le terrain pour la même somme de 200.000 euros, à Daniel Zaïdani, mandaté par sa famille pour gérer la vente de ce terrain. Mais certaines zones d’ombre persistent. “Il y a une extrême confusion dans ce dossier”, dénonce le procureur, regrettant que l’enquête n’ait pas permis d’entendre toutes les parties prenantes, et notamment le secrétaire général qui a signé la convention. “C’est le reflet d’une procédure incomplète et imparfaite. Donc je n’ai pas d’éléments pour requérir la culpabilité de Monsieur Daniel Zaïdani”, martèle-t-il.
Maître Jorion va plus loin encore et insiste sur le fait que la vente était en cours bien avant le mandat électif de son client. En effet, en 2006, la commune de Kani-Kéli sollicite Daniel Zaïdani au sujet du terrain familial sur lequel elle souhaiterait installer son terrain de football. La mairie obtient une première subvention de 300.000 euros en 2007 et un acte de vente est établi en 2011. Puis, les têtes changent à la mairie, et une nouvelle délibération de la municipalité de 2014 remet le projet sur les rails, à un montant révisé de 200.000 euros qui conduira à la signature d’un avenant à l’acte de vente initial. Entre-temps, Daniel Zaïdani sera élu à la tête de la collectivité… “Je dirais que ce sont les lenteurs administratives que connaît Mayotte qui nous ont conduit à ça”, dira-t-il aux juges en guise de dernière défense. Sans guère de succès… La cour d’appel sera peut-être plus clémente.
Dans le cadre du 4ème forum économique de Mayotte, Guillaume Basset, délégué aux Territoires d’industrie auprès du ministre de l’économie et des finances et de la ministre de la cohésion des territoires, a présenté le programme national de reconquête industrielle « Territoires d’industrie » lancé, le 22 novembre 2018, par le Premier ministre. Un label qui fait encore défaut au 101ème département.
L’industrie à Mayotte : oui, mais sous quelle forme ? Alors que l’écrasante majorité des produits consommés et achetés à Mayotte proviennent de l’importation, la création d’une filière industrielle dans le secteur de l’agroalimentaire ou encore de l’économie bleue pourrait bien pallier les manques du territoire.
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Le hic ? Sur les 146 “Territoires d’industrie” français qui bénéficient grâce à ce label d’un soutien prioritaire à des projets industriels, le 101ème département manque à l’appel. Et pour cause, l’île au lagon ne disposant pas encore d’un bassin industriel comparable aux autres circonscriptions… Or, ce programme de “reconquête industrielle par les territoires”, lancé officiellement par le Premier ministre le 22 novembre 2018, a d’ores et déjà permis de faire remonter 1.800 projets. Son objectif : favoriser une dynamique entrepreneuriale autour de l’industrie en associant un élu local et un industriel afin de mobiliser les acteurs publics et simplifier la vie des porteurs de projet.
Des atouts à faire valoir
Une manne qui pourrait donc bien profiter à Mayotte, qui a elle aussi de nombreux atouts, selon Guillaume Basset, délégué aux Territoires d’industrie auprès du ministre de l’économie et des finances et de la ministre cohésion des territoires. Grâce à sa situation géographique privilégiée dans le canal du Mozambique, elle pourrait devenir l’une des places fortes de l’industrie de l’océan Indien. “Mayotte est le seul département qui n’a actuellement pas de projet financé. Nous sommes désireux d’accompagner le premier projet à Mayotte et pouvoir labelliser le 101ème département territoires d’industrie « , affirme Guillaume Basset.
Par ailleurs, le programme s’inscrit au cœur du plan France Relance présenté par le gouvernement, le 3 septembre 2020. Avec 400 millions d’euros d’ici 2022 à l’échelle nationale, le “fonds d’accélération des investissements industriels dans les territoires” permettra de financer les projets industriels les plus structurants en France métropolitaine et dans les départements d’Outre-mer. “1.400 projets sont déjà inscrits au titre du plan de relance avec des extensions de sites et des modernisations, mais aussi le financement de nouveaux équipements pour les industriels”, détaille le délégué aux Territoires d’industrie. À l’occasion du premier jour du 4ème forum économique de Mayotte, le ministère a lancé une bouteille à la mer et attend avec impatience la mobilisation des porteurs de projet mahorais afin de développer la filière industrielle sur l’île aux parfums.
À l’occasion du 4ème forum économique de Mayotte, le directeur de l’agence d’attractivité et de développement touristiques est revenu sur l’élaboration de la nouvelle stratégie marketing pour faire du 101ème département une destination inédite dans la région océan Indien. Entretien avec Michel Madi.
Flash Infos : Le 17 septembre dernier, le comité départemental du tourisme est officiellement devenu l’agence d’attractivité et de développement touristiques de Mayotte dans le cadre de l’évolution du contexte législatif et organisationnel du secteur touristique mais aussi en raison de la nécessité de réussir la mise en œuvre des objectifs et des actions du schéma régional de développement du tourisme et des loisirs, validé en octobre 2020. Concrètement, qu’est-ce que cela change ?
Michel Madi : Avant, le comité départemental du tourisme était uniquement cantonné sur de la promotion touristique, qui est désormais du ressort des offices de tourisme. Avec l’abandon de certaines missions, telles que l’accueil, l’information touristique et l’animation du territoire, qui nous étaient confiées par le conseil départemental, notre principal bailleur de fonds, l’agence nous ouvre d’autres champs de compétence. Nous développons cinq métiers pour apporter une plus-value : l’observation touristique ; l’ingénierie en termes d’accompagnement de projets et d’aménagement ; le marketing territorial pour brasser d’autres domaines que le tourisme, à l’instar de l’économie et de l’environnement ; l’attractivité ; le conseiller de séjour pour produire une offre sur-mesure lorsqu’un tour opérateur veut monter un programme sur l’île.
FI : Aujourd’hui, l’agence d’attractivité et de développement touristiques souhaite prendre de la hauteur par rapport à la précédente structure en place. Comment comptez-vous vous y prendre alors que l’offre touristique n’en est encore qu’à ses balbutiements ?
M. M. : C’est justement le type de travail que le comité du tourisme ne pouvait pas entreprendre par le passé. Avec l’agence, nous sommes en train de mettre en place une stratégie marketing qui va nous donner les clés et les outils pour aller chercher le touriste à l’extérieur du territoire. Et en parallèle, nous développons une stratégie d’offres qui inclut des activités touristiques et de loisirs mais aussi de la qualité et de la formation que nous n’avions pas auparavant. Lorsqu’une offre existe, encore faut-il pouvoir accompagner nos opérateurs en termes de montée en gamme de leur produit.
Nous allons donc mener ces deux missions en lien avec notre environnement régional et concurrentiel. Maurice, c’est le tourisme de luxe, La Réunion, c’est ce que nous appelons du tourisme pays, les Maldives, c’est une île paradisiaque… Mayotte doit aussi trouver son positionnement. Comme je le disais, nous sommes en train de travailler sur le plan marketing qui sera ensuite adopté par les offices de tourisme pour qu’il y ait une cohérence dans le développement touristique de Mayotte.
FI : Justement, face à cette concurrence régionale, comment Mayotte peut-elle tirer son épingle du jeu pour convaincre le touriste de venir sur son territoire plutôt qu’à Madagascar ?
M. M. : Nous avons des pistes qui ne sont pas encore arrêtées. L’objectif est d’être opérationnel sur toutes ces stratégies en début d’année prochaine ! Sur le plan marketing, nous savons comment nous devons nous différencier de la concurrence régionale. Cette différenciation viendra de l’offre que nous allons développer et proposer, en mettant en avant ce qui fait la particularité de Mayotte : la culture, l’identité, le lagon, la gastronomie… Il faut valoriser toutes ces ressources et tous ces atouts !
FI : D’où votre participation au salon IFTM Top Resa, qui s’est tenu à Paris-Porte de Versailles du 5 au 8 octobre, pour enclencher la machine ?
M. M. : Il était en effet important d’être présent pour nous montrer et faire parler de Mayotte. Il était intéressant de mettre en lumière notre nouvelle dynamique auprès des partenaires. Nous avons eu l’opportunité d’expliquer la mise en place de l’agence et la montée en opérationnalité des offices de tourisme. Et croyez-moi, notre logo et notre identité ont fait sensation à Paris !
FI : Qui dit brassage plus large, dit structuration de la filière hôtelière pour accueillir le grand public. Cela sous-entend d’inciter les pouvoirs publics à engager la construction d’infrastructures…
M. M. : Exactement, c’est tout le travail que nous faisons en ce moment même ! Pas plus tard que la semaine dernière, j’étais sur le terrain pour rencontrer les intercommunalités et les offices de tourisme. Très prochainement, nous allons prendre part à un séminaire avec les élus du Département pour leur rappeler leur importance en termes de support, d’aménagement du territoire et de finances publiques. Après nous avons en tête, à chaque fois que cela sera possible, de proposer une offre portée par un privé pour avoir une viabilité économique, synonyme de création d’emplois.
FI : Pensez-vous réellement que le tourisme puisse devenir une véritable plaque tournante de l’économie mahoraise ?
M. M. : Totalement ! Tout simplement parce que des destinations comme Maurice sont arrivées à maturité et se demandent comment elles vont repositionner leur produit. Avec le Covid-19, les touristes cherchent des produits identitaires, ancrés localement, et non plus simplement du luxe et des plages… D’une certaine manière, notre retard peut aujourd’hui être vu comme un avantage. Nous avons tous les éléments en notre possession pour mettre en place notre destination touristique et l’offre souhaitée en fonction de notre stratégie. Le développement et l’activité touristiques à Mayotte, en tant qu’activité économique porteuse, sont devant nous !
L’avocate du premier magistrat de la commune a soulevé la nullité de la procédure pour violation des principes du procès équitable et des droits de la défense. Tout au long de l’enquête préliminaire, Assani Saindou Bamcolo ne pouvait pas savoir précisément ce qui lui était reproché, a-t-elle démontré. Son client a ainsi obtenu gain de cause.
12.093.000 euros et des brouettes. C’est la somme totale des différents marchés publics entachés d’irrégularités sur lesquels aurait dû s’expliquer le maire de Koungou Assani Saindou Bamcolo ce mercredi. On lui reprochait notamment d’avoir, au cours d’un mandat électif, porté atteinte à la liberté d’accès ou à l’égalité des candidats dans les marchés et d’avoir procuré des avantages injustifiés entre 2014 et 2016. Coup de théâtre : le premier magistrat de la commune ressortira blanchi de l’audience, le tribunal ayant validé la nullité soulevée par son avocate, Maître Josée Israël.
En cause : une procédure mal menée qui a conduit, selon l’avocate au barreau de Paris, à une violation du droit à un procès équitable. Un droit défini notamment par l’article 6 de la convention européenne des droits de l’Homme (CEDH), laquelle garantit que “toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle”. “Ces principes s’appliquent dès le tribunal de police”, a rappelé Maître Israël, en se basant sur plusieurs jurisprudences.
1.800 mandats issus d’un tableur Excel
Or, dans ce dossier “extrêmement complexe, dans une matière extrêmement complexe”, celle des marchés publics, plusieurs défaillances ont entaché le droit du maire à un procès équitable. Le délai raisonnable notamment “commence à être dépassé”, reconnaît le ministère public, puisque les faits datent de cinq ans en arrière. Mais c’est aussi sur la prévention que l’avocate a fondé sa requête en nullité. “Monsieur Bamcolo n’a jamais eu accès à ce dossier dans le temps de l’enquête”, insiste Maître Israël. Une atteinte aux principes du contradictoire et du respect des droits de la défense. Lors d’une garde à vue de quatre heures, pas moins de 96 mandats auront par ailleurs été présentés au prévenu. “C’est comme passer une seconde par marché”, image-t-elle.
Au total, ce sont 1.800 mandats qui figuraient au dossier, pour deux infractions, “sans que l’on sache quel marché correspondait à quelle infraction”, note également le procureur. Pire, ces marchés semblent en réalité issus d’un maigre tableur Excel transmis par la chambre régionale des comptes et “copié collé”, sans date ni pièce, “sans même savoir comment le tableau avait été réalisé”, poursuit l’avocate. “On ne peut pas vous demander aujourd’hui de citer toutes les personnes concernées par ces marchés, on ne peut pas vous demander de rechercher les pièces… Sauf à vous convertir en juge d’instruction et à refaire l’enquête”, conclut-elle.
Débuté en 2000, le projet hôtelier construit à deux pas de la plage de Hamaha à Kawéni vient enfin d’ouvrir ses portes. Un établissement inédit de 18 chambres qui offre de nouvelles opportunités aux clients. Retour sur une aventure qui ouvre un nouveau chapitre pour l’activité touristique de l’île, avec Tedd Le Bihan, le gérant.
Flash Infos : Après des années d’attente, vous venez d’ouvrir l’Hôtel Hamaha le 27 septembre dernier. Une histoire que vous avez vu débuter alors que vous n’aviez qu’une dizaine d’années…
Tedd Le Bihan : Tout commence à la fin des années 90 lorsque mon père se prend à l’idée de construire un hôtel. S’ensuivent un petit croquis sur le coin de table et divers échanges avec la préfecture et la ville, qui aboutissent à une autorisation d’occupation en 2000. Un an plus tard, tout le monde tombe d’accord sur l’achat du foncier, soit la zone des pas géométriques, avec la condition sine qua non de sortir de terre un projet hôtelier. Force est de constater aujourd’hui que nous avons respecté les besoins de l’époque. Le premier coup de piquet intervient en 2004. Les travaux avancent relativement bien jusqu’en 2008, année de la crise des subprimes qui marque un coup d’arrêt.
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Les bâtisses sont alors laissées un petit peu en stand-by… Et l’absence de sécurité sur le site laisse la part belle aux squatteurs qui ont fait des choses innommables ! Cela ne ressemblait plus à rien. Mais nous avions toujours l’idée derrière la tête de continuer le projet. Et l’opportunité de le reprendre intervient fin 2016 avec la réception d’une enveloppe de 182.374 euros dans le cadre du fonds européen de développement régional. Mais mon père décède fin 2017… Que faire à ce moment ? J’ai pris la décision de reprendre le flambeau. Depuis, nous avons dépensé énormément d’argent, d’énergie et de sueur pour finalement ouvrir officiellement l’établissement le 27 septembre dernier.
FI : Entre l’idée de départ et l’ouverture officielle, vingt ans sont passés. Quand vous repensez à tout le chemin parcouru, quel sentiment vous habite ?
T.L.B. : C’est assez particulier comme sensation. J’ai toujours été très fier de ce projet, fier que ce soit porté par mon père à un âge où j’en étais incapable ! Il a participé au développement de Mayotte, au-delà même de cet hôtel. Il a fait partie des pionniers économiques de l’île. Je suis fier de mes équipes et de toute ma famille qui m’ont accompagné durant toute la durée des travaux. Et quand nous voyons le résultat, nous pouvons dire sans rougir qu’il s’agit d’un produit qui a du charme.
FI : En reprenant le projet en cours de route, quelles touches personnelles avez-vous pu donner pour apporter votre signature ?
T.L.B. : Malgré toutes ses énormes qualités, mon père n’avait en aucun cas le sens de l’organisation (rires). À la suite de son décès, j’ai dû repartir d’une feuille blanche ! Nous avions l’ossature principale, mais je me suis occupé de tout le reste : j’ai commencé à sélectionner les équipements, l’agencement intérieur, les coloris, les cheminements piétons, les types de VRD et les réseaux divers, le type de station d’épuration, l’adduction d’eau… Et pour le jardin, j’ai pu compter sur la main verte de ma mère.
Mais s’il ne fallait retenir qu’une chose pour résumer ma signature, j’évoquerais la conservation d’un Baobab. Il menaçait de se casser la figure ! La seule solution était de le couper. Sauf que nous y étions énormément attachés. Le jour où les équipes de bûcheronnage sont venues, je leur ai demandé de rebrousser chemin. C’était la meilleure décision puisqu’il renaît de ses cendres. Ma plus grande fierté est de ne pas l’avoir abattu. Même si je n’oublie pas le choix du mobilier qui est parfaitement en adéquation avec le style, les chambres, l’environnement… Et les couleurs, qui s’intègrent dans le paysage et qui dénotent une certaine forme de standing.
FI : Vous faites également de la restauration sur place. Comment comptez-vous vous y prendre pour vous démarquer des autres établissements ?
T.L.B. : L’idée est de proposer deux salles deux ambiances avec d’un côté l’hôtellerie de charme et de l’autre la restauration avec un thème Côte d’Azur. En ce qui concerne la cuisine, nous sommes en train de peaufiner les plats avec mes partenaires, qui ont déjà fait leur preuve par le passé. Je n’ai aucun doute sur le fait que nous allons réussir à faire saliver tous nos clients !
FI : L’offre hôtelière dans le 101ème département est encore relativement restreinte. Mayotte a besoin d’investisseurs comme vous qui se lancent dans ce type d’aventure.
T.L.B. : C’est important de féliciter les acteurs touristiques. Avec cette ouverture, j’ai conscience de ce que mes confrères ont enduré pour y arriver. Chapeau à eux ! Ils ont tous le mérite d’exister. Aujourd’hui à Mayotte, il n’y a pas de concurrence entre nous. C’est plutôt une confrérie. L’objectif est de travailler en bonne intelligence ensemble. L’offre ne répond pas encore aux besoins actuels, mais quand nous voyons tous les projets en construction et en réflexion, cela va s’étoffer petit à petit.
À notre échelle, nous restons une « petite » structure avec nos 18 chambres (voir encadré). Je ne fais pas partie de ceux qui vont réellement changer la donne en termes de capacité. Maintenant, j’aimerais apporter ma pierre à l’édifice avec ce nouveau produit et montrer quelque chose de différent. De toute façon, le futur va parler de lui-même car nous allons nous agrandir assez rapidement face à la demande. Cette offre en devenir sera palliative, car il manque cruellement des logements pour du moyen et de la longue durée, à savoir entre une semaine et un mois. Rendez-vous fin 2022, début 2023 pour vous dévoiler des informations complémentaires ! Il y a trois phases de projets qui vont durer entre 10 et 20 ans selon les moyens financiers.
FI : Quels types de clientèle visez-vous ?
T.L.B. : Nous commençons déjà à recenser les besoins. Principalement, notre demande se tourne vers les professionnels, comme les intervenants techniques et les cadres qui se rendent sur Mayotte pour des durées bien spécifiques. La situation géographique facilite leur travail puisque nous sommes très centralisés.
Même si nous sommes situés en pleine ville, nous avons également une clientèle locale, qui n’a plus à parcourir 25 kilomètres d’un côté ou de l’autre pour se divertir et se reposer. Sans compter le tourisme affinitaire : les visites de la famille et de proches peuvent entraîner une mise au vert chez nous.
FI : Petite particularité : vous avez un accès privé à la plage… Un site qui jouissait d’une fréquentation douteuse il n’y a encore pas si longtemps.
T.L.B. : Il y a encore quelques années, la réputation de la plage n’était pas au beau fixe. Mais entre l’énergie dépensée et la présence des ouvriers, une partie de la population est désormais rassurée. Aujourd’hui, l’affluence est purement familiale et la plage est immaculée, d’une propreté rare. Les acteurs publics ont répondu présent juste avant l’ouverture. La communauté d’agglomération Dembéni-Mamoudzou a mis en place une stratégie pérenne de nettoyage qui est en parfaite adéquation avec nos besoins.
FI : Actuellement, vous employez 11 personnes en équivalent temps plein. Dans un milieu comme l’hôtellerie, vous n’êtes pas sans savoir que la compétence prime. Face à une telle exigence, l’ouverture de l’école Vatel doit vous réjouir…
T.L.B. : Absolument ! Il faut savoir qu’une belle chambre l’est à partir du moment où le service est au même niveau. Il ne sert à rien d’avoir un superbe établissement si le service n’est pas au rendez-vous. L’idée est de s’entourer de réels professionnels, qui connaissent leur métier. Après, c’est très complexe car l’offre sur les formations était très succincte, voire même inexistante, avant l’ouverture de l’école Vatel. En deux jours seulement, nous avons déjà tous pu prendre conscience de leurs compétences. Alors, je n’imagine même pas dans trois ans, à la fin de leur cursus. J’accueillerai les étudiants en stage à bras ouverts. Sachant que la présélection a été rude, nous aurons tout de suite des stagiaires de haut niveau ! Ce qui nous évitera de faire de la formation continue.
FI : Alors que vous venez d’ouvrir, vous nourrissez déjà de grandes ambitions. Envisagez-vous par exemple de proposer des tours opérateurs et des déplacements par voie maritime ?
T.L.B. : Tout à fait ! En premier lieu, l’emplacement nous le permet. L’accès à la mer est très proche de nos bâtiments. Est prévu d’y installer sur le domaine maritime un ponton flottant pour relier la Petite-Terre et Mamoudzou en triangulation. Évidemment, cela implique la police du ponton, les demandes d’autorisation et les financements qui sont normalement acquis. Il ne me reste qu’à cibler le bon fournisseur. Cela nous ouvrira des portes sur les prestations nautiques potentielles : nous pourrions nouer des partenariats avec les opérateurs ou même d’en proposer avec nos propres moyens. Nous sommes ouverts à toutes les possibilités !
18 chambres de 95 à 195 euros la nuit
L’Hôtel Hamaha dispose de 18 chambres avec le même niveau de finition et d’équipements : l’Hippocampe sous mansardes au R+2 (95 euros TTC la nuit), la Tortue de 30m2 avec une petite terrasse de 12m2 (160 euros la nuit) au R+1 et la Baobab au rez-de-jardin, avec 40m2 de surface habitable et une terrasse de 24m2 composée d’une piscine privative à la disposition du client (195 euros la nuit). Toutes possèdent un minibar, un coffre-fort, la climatisation, la télévision avec Canal Satellite, Internet et le wifi filaire.
Les horaires sont les mêmes que dans l’hôtellerie internationale : le client récupère sa clé à 14h et la rend à 11h le lendemain pour permettre la plage horaire du ménage. Le client peut prendre un petit-déjeuner continental sur place, pour lequel il faut compter 12 euros. Tedd Le Bihan souhaite proposer un English Breakfast à partir du 1er novembre, synonyme d’ouverture du restaurant.
Depuis quelques semaines, l’insécurité à Mayotte a atteint un autre niveau. Les mairies sont devenues les cibles des délinquants. Le dernier exemple en date est celle de Ouangani. Les véhicules du maire, de sa femme et d’un autre élu de la municipalité ont été incendiées. Des actes qui poussent la commune à renforcer sa politique de sécurité.
Trois voitures brûlées en moins de 48 heures… C’est le triste constat que fait la municipalité de Ouangani ! Le jeudi 14 octobre, le véhicule du maire de la ville et celui de sa femme ont été calcinés dans un incendie et tout porte à croire qu’il ne s’agit pas d’un accident. « Nos voitures étaient garées côte à côte, et bizarrement il y en avait une troisième à côté qui n’a pas été brûlée même si elle est un peu touchée. Je ne suis pas enquêteur, mais selon ce que j’ai vu, il s’agit d’un acte délibéré et criminel », déclare Youssouf Ambdi El Haddaoui, le maire de Ouangani. Ce dernier a aussitôt porté plainte, mais c’était sans savoir qu’un évènement similaire allait se reproduire quelques heures plus tard.
Dans la nuit de vendredi à samedi, l’automobile de l’élu chargé de la sécurité à Ouangani a subi le même sort. « Mon voisin m’a appelé dans la nuit, vers 1h45, pour me prévenir que ma voiture était en feu. Nous avons rapidement contacté les pompiers et la gendarmerie », raconte Fahar-dine Bourhane Saïd, l’élu en question. Suite à cela, la voiture de la police municipale a été caillassée. Des actes répétés et ciblés qui laissent penser à une stratégie d’intimidation. « Je ne vais pas m’hasarder à des soupçons qui ne seraient pas fondés. Chacun y va de son commentaire, mais je préfère laisser la justice faire son travail », rétorque le maire de Ouangani. Place toute de même aux interrogations… Personne n’arrive à expliquer ces évènements, qui font écho à l’incendie de la mairie de Koungou il y a de cela quelques semaines. « Je me suis posé plusieurs questions pour savoir à quoi c’est dû. Il y a un an, nous avions mené une opération de démolition de bangas à Kahani donc je ne sais pas si c’est lié à cela. C’est peut-être dû aussi à ma prise de position par rapport à Koungou, je ne sais pas… », s’interroge le premier magistrat de la ville. Il trouvera peut-être des réponses à l’issue de l’enquête, mais pour le moment il doit penser à la suite, et notamment à la sécurisation de son territoire.
Couvre-feu et augmentation des effectifs de la police municipale
Ces récents événements ont poussé les agents de la mairie de Ouangani à exercer un droit de re-trait du vendredi 15 au lundi 18 octobre en guise de solidarité envers leurs élus et collègues. Ils veulent « dénoncer ce climat d’intimidation et de menace permanent ». De son côté, l’édile a voulu riposter rapidement en instaurant un couvre-feu dans sa ville. « Nous avons échangé avec le préfet et nous avons décidé de mettre en place le couvre-feu dans la commune jusqu’au 24 octobre pour éviter que ce genre de choses se répètent ! Pour le moment, il est respecté », se console Youssouf Ambdi El Haddaoui. Les forces de l’ordre seront également plus présentes à Ouangani, mais cette solution n’est que temporaire.
La commune est consciente qu’elle doit renforcer sa politique en matière de sécurité. Pour cela, elle va explorer plusieurs pistes, en commençant par le renforcement des effectifs de la police municipale. « À Ouangani, nous n’avons que quatre agents de la police municipale assermentés, plus les médiateurs qui doivent assurer la sécurité de plus de 10.000 habitants. Nous avons l’intention d’augmenter l’effectif et nous espérons arriver à dix policiers municipaux d’ici le milieu de l’année 2022 », annonce le maire de la ville. Cette hausse permettrait aux agents d’effectuer des rondes 24h/24, comme le souhaite Youssouf Ambdi El Haddaoui. Multiplier le nombre de poli-ciers est une chose, mais cela ne résoudra pas tous le problèmes ! Selon, Fahardine Bourhane Saïd, il est indispensable de mener un travail de fond avec la population. « Nous allons mettre en place le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance. Nous allons faire travailler nos services sociaux pour connaître un peu mieux notre population et relever leurs difficultés. Nous ne pouvons pas l’abandonner », souligne l’élu en charge de la sécurité.
« Le niveau de violence à Mayotte est déjà son maximum »
Mairie de Koungou, représentants de la commune de Ouangani… Les délinquants de Mayotte semblent avoir trouvé de nouvelles cibles en s’attaquant directement aux autorités. Mais ont-il des limites ? « Le niveau de violence à Mayotte est déjà son maximum et je ne sais pas jusqu’où ça peut aller. Tous les jours, il y a de nouvelles choses et nous avons l’impression de ne pas avoir encore atteint le pic de violence », déplore le maire de Ouangani. Pourtant les réunions de crises s’enchaînent dans le département, mais aucune solution ne semble assez efficace pour mettre fin à cette vague de violences qui persiste depuis maintenant dix ans.
Un constat qui pousse chacun à se demander pourquoi les mesures qui découlent de ces rencontres ne donnent pas le résultat escompté. « Je n’ai pas la réponse ! Et j’invite tout le monde à s’interroger pourquoi ça ne marche pas », répond tout simplement Youssouf Ambdi El Haddaoui. Il est cependant sûr d’une chose : « Mayotte est en train de nous échapper. Il faut que tout le monde se ressaisisse pour rattraper ce qui est rattrapable. Nos ancêtres se sont battus pour Mayotte française, nous devons nous battre pour la reconquête de Mayotte. »
Le principal syndicat étudiant, présent dans la plupart des universités de France, s’est installé à Mayotte à la rentrée 2021. La présidente Iman Mahmouti revient sur le contexte de cette création et les ambitions de la nouvelle section locale.
C’est une première. L’Union nationale des étudiants de France (Unef), principale organisation étudiante dans l’Hexagone, a été créée à Mayotte à la rentrée 2021. Dans un post sur son nouveau compte Facebook en date du 14 octobre, la jeune section locale présente ses objectifs en ces termes : “Enfin un moyen pour nous étudiants mahorais de pouvoir défendre nos intérêts étudiants, améliorer nos conditions de vie étudiante, développer et rendre plus attractive la vie étudiante à Mayotte”.
“L’Unef est présente dans presque la totalité des universités de France et des Outre-mer, et elle permet d’informer les étudiants, de défendre leurs droits et leurs intérêts et d’organiser la solidarité entre nous”, rappelle Iman Mahmouti, la présidente de ce nouveau syndicat étudiant à Mayotte. Parmi les champs d’accès de l’organisation : l’accès aux aides sociales, aux études supérieures ou encore la lutte contre les discriminations.
Mais c’est un contexte bien particulier qui a conduit un petit groupe d’une promotion de Droit au centre universitaire de formation et de recherches (CUFR) à prendre attache avec le bureau national de l’Unef en vue d’une implantation locale. “L’année dernière, nous avions connu des difficultés dans la communication des résultats de nos examens”, retrace l’étudiante. “Nous avons alors pensé à créer une section locale pour empêcher que cela se reproduise. L’Unef est le meilleur filet de sécurité.”
58,5% de boursiers
Aujourd’hui, la nouvelle section a plusieurs priorités pour les étudiants de Mayotte. Dans son viseur : les questions de mobilité, de logement, de vie de campus… Mais aussi le système d’aide sociale, jugé “insuffisant” pour la jeune structure. “Nous avons à Mayotte 58,5% de boursiers, ce qui prouve bien l’existence d’une population étudiante précaire. D’autant plus que, pour certains, les revenus des parents dépassent juste de quelques euros le plafond annuel, et ceux-là ne peuvent pas prétendre à une bourse”, déroule Iman Mahmouti.
Sans compter ceux pour qui le soutien des parents n’est pas forcément acquis. “Nous pensons que l’aide ne doit pas être en fonction des revenus des parents mais de la situation réelle de l’étudiant.” Une idée défendue par le syndicat national au travers notamment de l’allocation d’autonomie, une aide universelle calculée en fonction du bénéficiaire. Cette aide pourrait constituer un vrai coup de pouce, particulièrement dans le 101ème département, juge la présidente de l’Unef Mayotte. “Les étudiants ont besoin de vivre, de s’acheter des vêtements, mais aussi de passer leur permis, qui est un facteur d’émancipation important. On le voit avec le retrait des bus scolaires : la mobilité étudiante est un gros enjeu ici”, poursuit-elle.
Pour une université de plein exercice
L’autre dossier que la vingtaine de bénévoles entend désormais suivre de près : la mise en place d’une université de plein exercice. “C’est aberrant qu’en 2021, les étudiants de Mayotte dépendent encore d’une autre université pour se former !”, s’insurge Iman Mahmouti. Fort heureusement, le passage à un INU (Institut national universitaire) semble sur de bons rails. “Son premier contrat d’établissement 2020-2025 lui permet à présent d’envisager son évolution institutionnelle pour devenir Institut National Universitaire (INU)”, soulignait le CUFR dans un communiqué à l’occasion des dix ans de sa création. “C’est bien, nous serons vigilants à ce que ces engagements soient respectés”, assure la jeune femme.
Bien sûr, la nouvelle section ne se limite pas à défendre les intérêts des seuls 1.800 étudiants du campus de Dembéni, et entend bien représenter “la totalité des étudiants à Mayotte, qu’ils soient en BTS, en prépa, à la fac”. “Nous souhaitons signifier au recteur et au ministère de l’enseignement supérieur qu’il est grand temps de considérer la situation des étudiants de Mayotte”, lance Iman Mahmouti.
Dans le monde de la plongée, le nom de Gaby Barathieu est déjà bien connu depuis plusieurs années. Aujourd’hui, le photographe sous-marin, à travers son association scientifique Deep Blue Exploration, lance un projet inédit visant à étudier les coraux de Mayotte et leur capacité à trouver refuge à des profondeurs encore très méconnues.
Le projet a vu le jour à 120 mètres de profondeur, là où seuls quelques plongeurs parviennent à descendre. Parmi eux, Gaby Barathieu s’est installé à Mayotte il y a cinq ans. Il n’en est jamais reparti. Depuis, il arpente la zone crépusculaire dite mésophotique, où la lumière du soleil peine à percer l’eau et où l’être humain ne peut demeurer que quelques dizaines de minutes. Dès lors, près de trois heures de décompression sont nécessaires, rendant l’exercice particulièrement délicat.
Au gré de ses explorations, Gaby Barathieu découvre une vie sous-marine très largement méconnue, tant les recherches sont rares à cette profondeur. Alors, en 2017, le photographe sous-marin, nommé le meilleur de cette année-là, crée Deep Blue Exploration, une association à visée scientifique, qui œuvre pour la découverte et l’étude des peuplements coralliens à différentes profondeurs. Avec son appareil, il immortalise des espèces que jamais personne avant lui n’avait observées à travers les eaux du globe.
Quatre ans plus tard, soit il y a quelques semaines, Deep Blue Exploration dévoile un projet d’ampleur intitulé CORCOMA pour parfaire la connaissance des récifs mahorais et surtout, leur évolution au fil du temps, jusqu’à 120 mètres de profondeur. “La plupart des données scientifiques concernent des zones situées jusqu’à 30 mètres sous la surface de l’eau”, commente Gaby Barathieu. “Au-delà, il faut des moyens techniques très importants…”
Ainsi, l’équipe de dix personnes, composée de plongeurs et de scientifiques, sera chargée d’installer différentes stations de recherche, dont la première sera située dans la passe en S, naturellement. Là, seront mesurés tous les facteurs qui agissent sur la vie des coraux : température de l’eau, salinité, réaction des animaux au stress, génétique… Tout en modélisant en 3D la surface et le volume des récifs tous les six mois. “Il s’agit dans un premier temps de dresser un état des lieux, ce qui n’a jamais été fait, pour ensuite suivre les coraux à long terme.”
Ces coraux, Gaby les connaît déjà partiellement, pour les avoir observés et photographiés régulièrement depuis cinq ans. “À Mayotte, il y a des endroits dévastés, notamment au bord des villes, mais d’autres zones débordent encore de vie !” Mais un jour, alors qu’il plonge à 80 mètres de profondeur dans un secteur qui lui est déjà familier, il découvre un récent phénomène de blanchissement des coraux. “J’étais très étonné : la première cause du blanchiment, c’est le réchauffement des eaux. On l’observe généralement en surface, car il y a peu de variations de température en profondeur”, développe le plongeur aguerri.
Dans ces mêmes profondeurs, les connaissances scientifiques manquent encore. Alors, le projet CORCOMA revêt un second objectif : “voir si les espèces récifales peuvent descendre plus bas pour s’installer dans d’autres zones refuges en cas de pollution ou de réchauffement des eaux.” En d’autres termes, étudier comment et dans quelle mesure la biodiversité corallienne est capable de s’adapter face à un environnement soumis à de nombreux risques et parfois même, menacé de disparition. “Encore une fois, comme peu de plongeurs descendent à 120 mètres, c’est un phénomène qu’on connaît très mal aujourd’hui.”
Le projet, soutenu par l’office français de la biodiversité et la Deal, pourra également compter sur l’appui d’Héloïse Rouzé et Michel Pichon, deux des biologistes ayant participé au projet Under the Pole qui, en 2019, a permis d’identifier l’espèce de corail la plus profonde jamais observée, à 172 mètres, en Polynésie française. Une découverte inédite, puisque jusqu’alors, la communauté scientifique estimait ce type de corail ne se développait qu’entre 30 et 40 mètres, venant soutenir l’hypothèse d’une zone refuge pour les coraux de surface, et un espoir supplémentaire de les préserver.