Accueil Blog Page 752

29/08/2008 – Une pièce d’Alain-Kamal Martial présentée dans 27 pays

Avant d'être chargé du département Littérature et Théâtre, puis de devenir directeur du service culturel, Alain-Kamal Martial est avant tout un brillant auteur et dramaturge contemporain. Il contribue beaucoup à la reconnaissance de son île dans le monde, à travers ses œuvres artistiques. Bien qu'il soit actuellement dans l'île, AKM ne manque jamais les grandes occasions nationales.
AKM est sélectionné pour représenter la France à Trait d'Union, un exceptionnel projet de théâtre décidé à l'occasion de Saison culturelle européenne qui se déroule jusqu'en décembre 2008, dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne. Trait d'Union consiste à sélectionner 27 pièces européennes contemporaines, une par pays membre de l'UE, qui seront traduites en langue française, éditées et présentées en lectures publiques.
Initié par Cultures France, l'opérateur délégué des ministères des Affaires étrangères et européennes et de la Culture et de la communication pour les échanges culturels internationaux, ce projet veut faire entendre la diversité et la richesse de l’écriture théâtrale contemporaine européenne, tout en faisant découvrir au public des auteurs de théâtre européens reconnus dans leurs pays, mais encore inédits en France.
 
 

"J'ai beaucoup d'espoir pour cette île. Ses jeunes sauront porter des choses grandes et s'affirmer dans la région et sur la scène internationale"

AKM a été choisi grâce à son texte "Les Veuves", avec lequel il était en tournée internationale dans les centres culturels français en 2007. En apprenant, en avril dernier, qu'il allait représenter le théâtre contemporain français et la langue de Molière dans 27 pays d'Europe, la première réaction que l'auteur mahorais a eu : "je ne croyais pas que ce soit un auteur d'un territoire qui n'est pas encore dans l'Union européenne qui ait été sélectionné pour représenter la France".

L'auteur avoue que cette réaction est presque la même qu'en 2002, lorsque lui a été décerné le 1er Prix du théâtre de l'océan indien pour "Zakia Madi, la chatouilleuse". Mais AKM, fondateur de la compagnie IstaMbul en 2000, ne peut que manifester "une joie et une fierté immense", surtout de voir qu'un auteur de l'Outremer, en l'occurrence lui, "arrive à être mis au centre de l'action gouvernementale". Pour lui, cette opération entre dans la politique française : "A l'occasion de sa présidence européenne, la France tient à rendre hommage à sa langue. Elle a surtout envie de marquer son empreinte et son identité, inscrites dans la pensée littéraire et contemporaine. Une façon de montrer ce qui fait sa grandeur, un pays de traditions littéraire et philosophique".

La participation d'AKM à cette manifestation littéraire d'envergure internationale montre en effet que le travail que les jeunes auteurs mahorais font et en lequel ils "croient" est remarquablement reconnu. "J'ai beaucoup d'espoir pour cette île. Ses jeunes sauront porter des choses grandes et s'affirmer dans la région et sur la scène internationale", est-il persuadé.

 

Au Festival d’Avignon et à l’Odéon, le Théâtre de l’Europe

Trait d'Union s'organise autour de trois cycles de lectures : au Festival d’Avignon, au Festival de la Mousson d’été et à l’Odéon, le Théâtre de l’Europe. Elles feront ainsi découvrir les 27 auteurs, traduits avec l’appui de la Maison Antoine Vitez, de l’Atelier européen de la traduction, publiés par les Editions théâtrales (Paris) et distribués dans les 27 pays membres de l’UE.
Créé par le metteur en scène Michel Didym en 1995, le 13ème Festival de la Mousson d'été commence ce vendredi 22 août. L'auteur mahorais est bien présent de par son œuvre "Les Veuves". Cette pièce sera, jusqu'à la fin du mois, confrontée au public : auteurs, éditeurs, acteurs, traducteurs, directeurs de structures théâtrales, responsables institutionnels, journalistes, universitaires, etc.

Du 11 au 15 septembre 2008, "Anéantissement", qui est un extrait de son dernier écrit "Organique", sera joué sur la scène nationale de Saint-Etienne. Commande de l'Ecole nationale supérieure du théâtre, cette pièce est mise en scène par Jean-Claude Barrouti, directeur de la scène nationale stéphanoise.

 

AKM au Musée du Louvre en novembre

Après "Epilogue des noyés" en 2006, "Epilogue d'une trottoire" d'AKM qui a été présentée en lecture lors du Festival d’Avignon en juillet 2007, sera jouée au CCM Jean Gagnant, les 29 et 30 septembre 2008, dans le cadre des 25èmes Francophonies en Limousin (du 23 septembre au 5 octobre). Plus de trente nations, du monde entier, prendront part à ce festival de théâtre, danse, musique et autres arts sur le thème de la francophonie dans le monde. Mise en scène par Thierry Bédard, artiste associé à Bonlieu, la scène nationale d’Annecy dans le cadre du Centre d’art et de création, avec Marie-Charlotte Biais et Joao Fernando Cabral, "Epilogue d'une trottoire" sera également présentée cet été au Festival d'Avigon puis à Cuba, avec une lecture de l'ensemble des "Epilogues". "Epilogue d'une trottoire" est à paraître aux éditions Acte Sud.

Enfin, l'auteur mahorais sera le 5 novembre prochain à la salle de l'auditorium du Musée du Louvre (Paris) et fera une lecture de ses textes au public.

Rafik

AKM, auteur du" théâtre des énergies"

Alain-Kamal Martial est né le 25 juillet 1974 à de M'zouazia, au sud de l'île. Après l'obtention de son baccalauréat, il se rend en France poursuivre ses études universitaires, notamment à Mulhouse, Bordeaux III, Avignon et à Cergy-Pontoise où il prépare une thèse de doctorat en littérature.

En 2000, AKM crée la compagnie de théâtre IstaMbul qui est aujourd'hui menée par des jeunes mahorais formés. Il a écrit et mis en scène plusieurs de ses pièces, dont "P'pa m'a suicideR", qui a été présentée au Centre dramatique de l’océan indien.

Il entame, depuis 2002, un travail de recherche et de collaboration avec des artistes de l’océan indien et de l’Afrique australe. Il travaille sur un "théâtre des énergies". Il a écrit depuis 2005 une série de textes intitulés "Les Épilogues", joués à la Réunion et en France. Il a progressivement acquis une réputation internationale et ses pièces ont été jouées dans 18 pays différents ces dernières années.

Ses dernières pièces : "17 millions d’enterrements pour une dépouille nationale", traduite en portugais par l’auteur mozambicain Mia Couto, a été jouée au Teatro Avenida de Maputo au Mozambique, "Les Veuves" en tournée internationale depuis 2007 dans les centres culturels français, l’ensemble de ses "Epilogues" sera présenté en lecture cet été au Festival d’Avignon. A la direction du Service culturel de la Collectivité départementale de Mayotte depuis janvier 2008, AKM préfère mettre provisoirement entre parenthèses sa carrière d'auteur.


Distinctions

2001 Premier Prix Défi-jeunes Mayotte 2001, pour "La rupture de chair".
2002 Premier Prix du théâtre de l'Océan Indien, pour "Zakia Madi, la chatouilleuse".
2002 Premier Prix du grand Concours littéraire de l'Océan Indien, pour "Zakia Madi, la chatouilleuse".
2005 Prix Arlequin d'or au 19ème Arlequin de Cholet, pour "P'pa m'a suicideR".
2005 Premier prix du jury littéraire du lycée de Sada, pour "La rupture de chair".

UNE Mayotte Hebdo N°392 – Vendredi 22 août 2008

UNE Mayotte Hebdo N°392 - Vendredi 22 août 2008

Dossier 4 pages

Je viens de …

 > Culture – Alain Kamal Martial représente la france en europe
 > Electricité – la nouvelle centrale à longoni
 >
Spectacle – théâtre & danse toute la semaine

 

Août 2008 – Société – Les « Je viens de… »

 
"Le 'Je viens de…' doit revenir avec un plus social"

La fin des grandes vacances approche et de nombreux "Je viens de…" s'apprêtent à retourner sur leur lieu de résidence habituel. L'anthropologue Mohamed M'trengouéni a bien voulu essayer de nous dresser le portrait-type du Mahorais vivant à l'extérieur et venant passer ses congés auprès des siens à Mayotte. Ces "expatriés" – installés durablement ou étudiant temporairement hors du territoire avec ou sans projet de revenir s'installer ici – ont parfois du mal à trouver leur place dans la vie villageoise et ont parfois une image décalée de leur île.

Mayotte Hebdo : Qui sont les "Je viens de…" ?
Mohamed M'trengouéni : Ce sont des Mahorais qui vivent à l'extérieur de Mayotte, principalement en France métropolitaine et à la Réunion. Deux raisons principales les poussent à partir là-bas. Tout d'abord, il y a ceux qui sont à la recherche d'une vie meilleure. Et puis il y a aussi ceux qui partent pour des raisons scolaires. En fonction de l'objet de leur départ, leur retour est perçu différemment.

Mayotte Hebdo : Quelles sont les raisons qui les amènent à revenir à Mayotte ?
Mohamed M'trengouéni : Je ferai une distinction entre les étudiants et les autres "Je viens de…". Pour la seconde catégorie, ils ne viennent pas simplement pour passer des vacances. Ils viennent pour se marier, ou assister à un mariage, construire leur maison. D'ailleurs, ils ne reviennent à Mayotte que s'ils ont les moyens financiers pour réaliser tout cela. Pour les étudiants en revanche, ils reviennent et essaient de s'écarter de toute la pression sociale qu'engendrent les mariages et les autres activités familiales et culturelles en allant à la plage et en faisant des voulés. Vous remarquerez qu'ils ne font pas des pique-niques mais des voulés, c'est leur façon à eux d'avoir une activité typiquement mahoraise qu'ils pourront raconter à leurs amis qui n'ont pas pu faire le déplacement.

Mayotte Hebdo : Quelle est la perception des "Je viens de…" par ceux qui sont restés à Mayotte ?
Mohamed M'trengouéni : Le "Je viens de…" doit revenir avec un plus social. On considère qu'il a acquis quelque chose en plus, même si là-bas il n'a pas amélioré sa situation professionnelle, il n'a pas suivi de formation. L'effet est symbolique, il a vu un autre monde, il peut le comparer au nôtre. S'il a ramené des diplômes ou amélioré sa situation sociale, cela rejaillit sur le prestige de la famille restée à Mayotte. Cela est d'autant plus vrai s'il réalise quelque chose de concret : une maison, un mariage. C'est une situation compliquée à gérer, car par la suite tout le monde s'attend à ce que ce capital social soit fructifié. De nombreux Mahorais restent deux mois ici puis repartent, car ils n'ont pas les moyens de valoriser leur capital. Pour ceux qui reviennent définitivement, si au bout d'un an ils n'ont rien fait, le jugement social que l'on a d'eux se déprécie. Il faut montrer que tu as fait quelque chose, sinon le prestige acquis se perd.

"Il faut participer aux activités collectives pour obtenir toutes les clés nécessaires à la compréhension de la société et avoir sa place au sein de la communauté"

Mayotte Hebdo : Comment les Mahorais qui ont vécu à l'extérieur font face à ces attentes de leur famille et de leur village ?
Mohamed M'trengouéni : Certains le vivent très mal et se sentent étrangers. Il y a une difficulté à être reconnu pour ce qu'ils ont fait. Ils ont l'impression d'être en retard par rapport à la société mahoraise. Le paradoxe, c'est que certains se disent qu'ils vont repartir pour rattraper ce retard, mais ils ne le pourront pas car pour être complètement intégrés, il faut se conformer aux usages culturels locaux. Ce n'est pas évident quand on a des repères d'ailleurs. Ici les gens ont envie de te connaître, il faut se raconter sur la place publique. La communication est collective, les gens se réfèrent à la communauté pour délivrer une opinion. L'individu n'existe pas en dehors du groupe, contrairement aux sociétés occidentales. L'exclusion commence par l'auto-exclusion. En fait, il faut participer aux activités collectives pour obtenir toutes les clés nécessaires à la compréhension de la société et avoir sa place au sein de la communauté. Cela prend du temps, surtout pour les personnes qui n'ont pas vécu à Mayotte entre l'âge de 10 et 25 ans.

Mayotte Hebdo : Ces deux mondes sont-ils irréconciliables ?
Mohamed M'trengouéni : On ne peut pas les mélanger. Chacun a ses institutions et son organisation. Mais pour moi, c'est un faux débat. Le phénomène des "Je viens de…" est un fait social. On en a une meilleure compréhension si on a vécu à Mayotte et à l'extérieur. D'ailleurs, les "Je viens de…" n'essaient même pas d'expliquer le fonctionnement du monde extérieur à ceux qui sont restés à Mayotte. Cela reviendrait ici à accepter une façon de faire extérieure à la culture mahoraise. Mais le fait d'avoir vécu ailleurs peut enrichir certaines pratiques endogènes. Auparavant, à l'occasion des mariages, il n'y avait pas d'invitation lors des manzaraka. Tout le monde venait préparer et manger. Aujourd'hui, sous l'influence des invitations pour les dîners dansants, il y a aussi des invitations pour les manzaraka. De nombreuses choses peuvent changer en 20 ou 30 ans.

Propos recueillis par Faïd Souhaïli
 

 


Alawa Maore

Littéralement, "Je viens de…" se traduirait "Tsi lawa" en shimaore. Une traduction qui nous fait immanquablement penser au tube de Lathéral "Alawa Maore" ("Il vient de Mayotte"). Dans cette chanson, le lauréat de 9 semaines et 1 jour raconte la vie à Mayotte des sans papiers anjouanais qui font croire à leur famille restée sur leur île natale que leur vie se déroule sans problème, alors qu'ils sont dans une galère totale, poursuivis par la Paf, accomplissant des travaux pénibles et s'entassant à 20 dans un banga.
Pour Mohamed M'trengouéni, le terme de "Je viens de…" traduit une autre réalité. "Il est vrai qu'à une certaine période, les Mahorais de l'extérieur renvoyaient une image décalée de leur vie quotidienne en France et l'enjolivaient. Mais si on devait traduire en shimaore, "Wami de mtru.." (je suis celui qui…, c'est moi qui…) serait plus approprié. En effet, "Je viens de…" est un terme ironique inventé par ceux qui sont restés à Mayotte pour caractériser la vantardise de ceux qui étaient partis et qui se donnaient de l'importance en disant tout connaître. Or aujourd'hui ce n'est plus vrai, avec la télé les Mahorais voient ce qui se passe en France. Tout le monde a la voiture, la maison, en fait ils n'ont plus d'argument pour se valoriser, ils n'apportent plus la bonne parole."

 


M'kaya Ali, 2ème dauphine de Miss Mayotte 2008
Ceux qui agissent et ceux qui traînent

À défaut de venir à Mayotte pour y rester, M'kaya Ali qui vient de la Réunion s'en est retournée mercredi dernier dans cette île où elle demeure depuis l'âge de cinq ans. "Je me sens bien ici !", s'est exclamée l'habitante de la ville du Port avant de partir, à propos du phénomène des "Je viens de…".

Cette année, le séjour de la native de Dzaoudzi n'a pas été tout à fait comme les autres, elle qui débarque sur son île d'origine assez régulièrement. La Mahoraise, inscrite par sa sœur, a vécu cet été la fameuse aventure de Miss Mayotte de l'intérieur en se portant candidate. Cerise sur le gâteau, c'est avec l'écharpe de deuxième dauphine qu'elle regagne la Réunion.
"C'était pour moi une aventure inoubliable où j'ai appris énormément. Une grande solidarité et beaucoup de rigueur de la part de tous les coachs m'ont marqué l'esprit et ont fait que le spectacle final a été une réussite", nous explique-t-elle. Pour commencer cette nouvelle semaine, la jolie fille de Labattoir a accepté de donner son avis au journal sur le phénomène des "Je viens de…", sans pour autant être vraiment certaine d'en faire partie…
"En voyageant on découvre toujours une autre culture, une autre socialisation que celle de la vie locale, donc je pense que c'est toujours bien de partir et de voir autre chose", affirme-t-elle. "Ce n'est pas pour autant que le "Je viens de…" doit se croire meilleur qu'un autre Mahorais, en particulier envers celui qui n'a jamais voyagé. Certains sont conscients de cette opportunité qui leur est donnée que de découvrir ou de vivre en France. Ils en profitent pour réaliser des choses bien. D'autres n'ont pas conscience de leurs chances. Ceux-là passent leur temps à ne rien faire là-bas et ce sont en général eux, à leur retour ou pendant leur séjour, qui se sentent au-dessus des autres", continue la toute nouvelle étudiante en BTS Tourisme.
Celle-ci répond sans hésitation lorsqu'on lui demande à quoi on peut les reconnaître : "leur tenue vestimentaire". Cependant, le vêtement métropolitain n'a plus de secret pour les Mahorais selon elle. "Moi par exemple, je suis habillée comme ça car c'est dans cette culture que j'ai grandi. Mais aujourd'hui, on peut trouver des personnes habillées de cette manière, sans pour autant qu'elles aient voyagé", conclut celle qui rêve d'ouvrir un atelier de confection.
Déjà auteur de quelques créations personnelles, M'kaya veut devenir styliste de mode à l'avenir. Repartie mercredi "avec regret", elle affirme que beaucoup de choses vont lui manquer, "surtout l'aspect naturel et relationnel qui est unique ici. Quand il y a un mariage par exemple, c'est tout le village qui se mobilise, c'est vraiment exceptionnel. Les voulés vont aussi beaucoup me manquer, ce sont des choses qu'on ne retrouve pas là-bas."

Ichirac Mahafidhou
 

 


Saturnin, 37 ans, fonctionnaire à Bourg en Bresse
Planifier un retour définitif à Mayotte

Ce jeune père de famille est originaire de Mayotte où vivent les membres de sa famille et ses proches. Afin de poursuivre ses études, il quitte son île en 1990 pour partir en Métropole et revient seulement en 2001 dans le but de travailler. En 2004, à l'occasion d'une formation il est renvoyé en France mais très vite la vie active lui manque et il intègre la fonction publique. Depuis, il travaille dans un lycée agricole à Bourg en Bresse.
S'il n'a pas l'intention de rentrer au pays pour l'instant à cause de ses ambitions professionnelles, il tient quand même à planifier son retour définitif en demandant une mutation à Mayotte. "Nous avons hâte de nous installer au bled pour y agrandir notre famille", ajoute sa femme, qui elle aussi veut réussir sur le plan professionnel avant de rentrer définitivement. S'ils vivent en France, leurs cœurs restent à Mayotte et ils suivent régulièrement l'actualité de l'île grâce à internet et aux chaînes du câble.
Ainsi, Saturnin note que Mayotte connaît des mutations, surtout sur le plan social comme par exemple avec l'évolution du Smic horaire qui se rapproche progressivement de celui de la Métropole ou encore les voyages, qui sont rentrés dans la culture mahoraise. "Aujourd'hui tout le monde voyage, que ce soient les jeunes ou les vieux". C'est en ce sens qu'il fait aussi remarquer que les mentalités des Mahorais changent "de manière positive mais aussi négative". Et pour cela il donne des exemples et nous dit que c'est à son grand regret qu'il constate que le système de "musada" (l'entraide) qui était le ciment de la société mahoraise, n'existe plus aujourd'hui.
Même si il se sent toujours chez lui à Mayotte, il a toujours une certaine "appréhension par rapport à l'évolution de l'île" et se dit déçu par l'impression qu'il a d'une "espèce de régression de certaines administrations de l'île". Toutefois, le Mahorais est très fier que Mayotte possède de plus en plus des infrastructures qui continuent à se développer sur l'île. D'ailleurs, il ajoute qu'en rentrant sur l'île dans un futur proche, il veut "contribuer au développement de l'île et lui rendre ainsi ce qu'elle m'a donné".

Fatihat Cheick-Ahmed
 

 


Soihadine, 24 ans, technicien informatique
"Je vois des constructions de maisons partout où je passe dans les villages"

Soihadine, natif de Mayotte a vécu à la Réunion pendant près de 14 ans. Parti dans l'île voisine à l'age de 9 ans pour des raisons familiales, il y grandit et fait ainsi toutes ses classes là bas, du primaire au supérieur. Titulaire d'un BTS, le jeune homme est rentré au mois de juin à Mayotte car il a obtenu un poste dans une entreprise locale et a vu ainsi son souhait de retour aux sources se réaliser.
Malgré tout il reste attaché à son ancienne île d'accueil car il avait l'impression de s'être bâti un foyer avec sa mère et ses frères et sœurs, parmi lesquels certains sont aussi rentrés pour travailler dans l'île natale. Soihadine ne connaît pas très bien son île d'origine car il n'est revenu que 2 fois en vacances (en 2002 et 2006) pour assister aux mariages de ses sœurs. Ce qui le marque beaucoup c'est de voir autant de bâtiments construits sur l'île et des infrastructures en tous genres.
"Je suis impressionné qu'en une dizaine d'années Mayotte ait connu un tel développement, par exemple pour les routes et il y a beaucoup plus de voitures ". De plus il remarque que l'immobilier est devenu la priorité des Mahorais : "je vois des constructions de maisons partout où je passe dans les villages". Toutefois il est surpris de la lenteur de l'administration dans l'île et remarque une communication inefficace auprès du public.
Il travaille depuis peu et se dit "dégoûté du comportement de certains patrons d'entreprises ou bien de responsables de services dans les administrations mahoraises", auprès desquels il doit souvent intervenir. "Ils vous traitent comme un moins que rien", nous dit-il avec un soupir. Il ajoute ironiquement à cela qu'il est choqué par la "courtoisie" des automobilistes à Mayotte.
Par ailleurs, il porte un regard critique sur les mentalités de la population mahoraise. "J'ai l'impression qu'il y a une perte d'identité, c'est-à-dire que surtout les jeunes essaient de s'approprier une culture qui n'est pas la leur et renient leurs traditions. Je trouve ça bien dommage." Ce qu'il regrette aussi c'est l'entraide entre les personnes qui existait sur l'île et dont il se souvient. "Les Mahorais sont devenus tellement individualistes."

Fatihat Cheick-Ahmed
 

 


Lattuf, 23 ans, étudiant en droit
Revenir sur l'île à long terme, avec des références et des expériences

Ce jeune homme originaire de Sada est venu à Mayotte pour passer ses vacances d'été auprès de sa famille. Après avoir obtenu son baccalauréat économique et social au lycée de Sada, il s'envole pour la ville de Bordeaux où il habite maintenant depuis bientôt 5 ans. Il connaît très bien l'île car il y a grandi et fait remarquer que Mayotte s'ouvre de plus en plus sur le monde et que c'est une excellente chose, "les Mahorais voyagent beaucoup".
Cet étudiant ambitieux envisage de devenir professeur de droit et revenir sur l'île à long terme, avec des références et des expériences. "Je ne veux pas être un novice mais un professionnel", déclare-t-il en rajoutant qu'il envisage de s'installer ici à long terme et d'y faire sa vie. Mais tout d'abord il a l'intention de poursuivre en 5ème année en droit des affaires et par la suite effectuer un séjour aux Etats-Unis dans le cadre de ses études "pour améliorer l'anglais".
Il constate que les Mahorais évoluent, notamment les jeunes. "J'ai l'impression que de plus en plus les jeunes ont conscience de leur île et veulent participer à son devenir". Mais il déplore que "le CG soit devenu la première entreprise de Mayotte".
Selon lui, les Mahorais devraient avoir beaucoup plus d'initiatives plutôt que de chercher à tout prix à travailler dans l'administration, d'autant qu'il souligne que "ça dort dans l'administration". Lattuf a la volonté de créer une sorte de parrainage pour les nouveaux étudiants qui débarquent en Métropole. L'idée serait que des volontaires les prennent sous leurs ailes pendant un certain temps pour les guider dans les démarches à effectuer à leur arrivée et les intégrer, car il déplore malheureusement que ces jeunes soient laissés pour compte et ne soient pas mieux accompagnés.

Fatihat Cheick-Ahmed
 

 


Opinions sur rue….
Que pensez vous des "Je viens de…"?

Allaoui Azhar Ben, 21 ans, animateur école privée, Pamandzi
"Je viens de…", c’est un terme qu’on emploie vu que quand les élèves partent faire des études en Métropole, ils reviennent en disant : "Je viens de Paris", "Je viens de Marseille"…, voilà. C’est un "truc" qu’on emploie mais ce sont des gens comme nous, ce sont des Mahorais et il n’y a rien qui change. Ils s’habillent comme des Métropolitains avec des marques de bas en haut et j’en passe. Leur hygiène de vie change, ils partent sales mais ils reviennent propres, ils changent de couleurs ou changent d’attitude, de caractère le plus souvent, ils sont autres, ils deviennent généreux pour la plupart. Mais certains ne changent même pas, ils reviennent avec le même caractère et comme on dit en shimaoré, les gens qui reviennent de la Métropole, ils deviennent "guédzé" ("ignorants", ndlr) !


Lavita, 17 ans, Première STC, Petite Terre

Les "Je viens de…", parfois ils sont un peu bizarre. Par exemple, si on se connaissait quand on était petit, en revenant ils se foutent un peu de notre gueule, ils font genre ils ne nous connaissent pas et là, ça nous fait trop la honte. Et leur façon de s’habiller, certaines s’habillent comme des p…, désolée de dire le mot mais c’est grave. Elles viennent ici pour voler les mecs des autres et ce n’est pas bien du tout. En revenant ici, ils font comme si ils étaient les stars de Mayotte.

Attoumani Tava, Pamandzi
Moi je pense que les "Je viens de…" sont des personnes qui se la pètent, pas tous mais la plupart d’entre eux ils se la pètent parce que quand ils partent de Mayotte ils oublient leurs racines. Ils se croient supérieurs à tout le monde, ils croient qu’ils sont les boss. Ils font comme s'ils te connaissent pas alors que ce sont des gars avec qui tu traînais avant… Leur façon de s’habiller, c’est amusant parce qu’on voit qu’à Mayotte il n’y a pas trop de trucs à acheter, alors qu’en Métropole il y a des trucs à acheter, moins chers.

Moussa Abchia, 20 ans, Pamandzi
Ce que je pense des "Je viens de…" ? C’est que dès qu’on arrive à Mayotte on sent que c’est différent de la Métropole. Les modes de vie changent, mais surtout la manière de s’habiller, il y a aussi une évolution dans leur hygiène. Mais c’est normal car Mayotte aussi s’est développée économiquement, les jeunes aussi ont évolué, voilà !

Ben Marouane, 18 ans, Pamandzi
Les "Je viens de…" pour moi, ça dépend. Ils ne sont pas tous pareils. Il y en a qui sont à l’aise parce que c’est leur pays natal, mais il y en a qui veulent se montrer comme quoi ils viennent d’arriver. Certains aussi oublient leurs racines. Au niveau de leur tenue vestimentaire, on sait bien qu’à Mayotte, en Métropole ou quelque soit le pays, on ne s’habille pas de la même manière. Ici aussi ça évolue mais ce n’est pas la même chose, quoi ! Donc quand ils viennent ici ils sont bien habillés, leur tenue s’améliore.

Mistoihi El-Dine, 17 ans, première S, Pamandzi
Le nom de "Je viens de…" pour nous c’est un truc nouveau, parce qu’on considère que si une personne a eu son bac ou est partie depuis longtemps de Mayotte… ce n’est pas une question qu’il se la pète, mais il y a une différence. C’est pour ça qu’on les appelle les "Je viens de…" parce qu’ils vont acheter des nouveaux trucs, des nouvelles fringues, c’est pourquoi on les remarque, en gros.

Saïd Naxies, 17 ans, BEP vente action marchande, Pamandzi
Les "Je viens de…", c’est simple. En fait, quand ils partent et qu’ils reviennent à Mayotte, on dirait qu’ils sont beaucoup plus vantards qu’avant, ils se la pètent de plus en plus et ils ne sont pas comme avant, c’est tout !

M'djassiri Ali Mohamadi dit Bamhé, Tsingoni, éducateur sportif
Il y a un peu plus de présence, plus d'animation dans le village quand ils sont là. Je trouve que les "Je viens de…" participent beaucoup aux activités culturelles et sportives. Ils sont aussi toujours présents dans les grands rendez-vous, comme les mariages. Ils sont engagés en fait, en dehors de quelques-uns qui font ce que les jeunes ne doivent pas copier. Je peux dire aussi qu'avant, les "Je viens de…" étaient bien accueillis quand ils arrivaient, mais ça a changé. Tout le monde peut se permettre de voyager aujourd'hui, c'est sûrement la raison de ce changement de comportement envers eux.

Abassi, 16 ans, Kavani, futur lycéen en 2nd sciences médico-sociales
Moi je m'en vais mardi en Métropole, dans la ville de Toulouse, et tout ce que j'espère c'est qu'on ne me dise jamais que je suis un "Je viens de…" quand je reviendrais. Ce nom à un sens très négatif pour moi. Je n'en serais pas un, c'est sûr. Ça me fait vraiment mal au cœur de voir comment ils se là pètent et se prennent pour ce qu'ils ne sont pas, c'est-à-dire meilleurs que tous. En achetant des habits chers en France, ils croient qu'ils valent mieux que les autres, alors qu'il n'y a aucune différence.

Saïd Fidèle, 16 ans, Kavani, entre en 1ère S au lycée de Mamoudzou
Les "Je viens de…" reviennent avec la grosse tête. Ils racontent leurs histoires, leurs aventures d'une manière… comme s'ils veulent provoquer ou nous blesser, comme s'ils veulent qu'on rêve d'être comme eux ou comme s'ils veulent qu'on les envie. Leur manière de se comporter avec les gens est mauvaise. Il y en a même, s'il fait chaud, qui mettent des pulls et des gros pantalons pour montrer qu'ils viennent de France, qu'ils ont acheté tout ça en France. En tout cas, si eux sont des "Je viens de…", moi je suis un "Je reste !", et bien sûr fier de l'être.

Abidi Moustadirane, 17 ans, Nyambadao, futur cuisinier
Je n'y pense pas vraiment à ces gens là, mais pour moi ils sont gentils. En tout cas ceux que je connais. Il n'y en a quelques-uns dans mon village et ils ont changé. C'était des bad boys avant de partir en France, maintenant ils sont tranquilles. Ils ont peut-être compris l'importance des études. C'est une bonne chose et ça me donne envie d'y aller. Il y a ma sœur à Paris, donc si j'ai l'occasion de faire ce voyage, surtout pour mes études, je n'hésiterais pas.

Assani Mohamed alias Daan, 20 ans, Chirongui, en terminal Bac pro à Sada
Comme la mentalité est différente et que les choses sont plus développées en France, quand les "Je viens de…" reviennent, ils se croient en avance, plus intelligents que ceux qui sont ici. S'il y a une organisation dans un village un peu ratée, ils se disent qu'on est à Mayotte donc c'est normal, c'est sauvage ici, on est encore loin… C'est le genre de propos qu'ils tiennent. Je pense que même si tu as été bien éduqué à Mayotte, tu apprends beaucoup de choses en allant en France, c'est une autre éducation. On reconnaît le "Je viens de…" parle son look et sa façon de s'exprimer. Souvent ça s'entend quand il parle.

Issouf Alidou, mécanicien, 18 ans, Majicavo
Très franchement, la plupart reviennent métamorphosés ! C'est fatal. Si vous en croisez un dans la rue, impossible de ne pas le reconnaître. Déjà ils portent tous des nouvelles fringues, et c'est un vrai plaisir de découvrir des nanas toujours plus sexy à chaque fois qu'elles reviennent. Puis les potes, pour ceux qui n'ont pas trop pris la grosse tête et qui n'ont pas oublié leurs copains d'enfance, il ont toujours un peu de monnaie pour allez boire un coup. Mais quand ils changent, c'est fatal. Surtout les filles ! La plupart se prennent pour des reines et ne vous adressent même plus la parole. Mais il y a quand même de bons cotés. Des fois la famille ramène des cadeaux, ou alors on peut passer commande aux collègues qui rentrent pour qu'ils nous ramènent des fringues ou des baladeurs…

Ahamadi Moussa, 17 ans, Cavani
C'est bizarre, mais dans ma famille, lorsqu'ils reviennent pour les vacances d'hiver, on remarque toujours un changement. Même moi qui ai vécu à la Réunion, j'ai du mal à m'expliquer ce phénomène, encore plus aux autres. Il est vrai que vivre loin de Mayotte, c'est s'éloigner de la tradition, de la famille, de la religion aussi parfois, mais cela n'explique pas tout. Beaucoup développent un complexe de supériorité et oublient leur passé. Je comprends que le fait de s'exiler fasse évoluer les mentalités, et je dirais même que c'est nécessaire car c'est toujours positif d'aller voir ailleurs ce qui se passe.

Salima 17 ans, élève de 2nde, Cavani
Ce que je pense des "Je viens de…" ? Simplement qu'ils se la "pètent" trop. Ils reviennent ici avec leurs nouveaux habits et leurs nouvelles idées, ne restent plus qu'entre eux et ils nous ignorent complètement. Comme si on n'avait jamais existé pour eux, alors qu'on à grandi ensemble. C'est un comportement marqué surtout chez les filles. Mon frère vit à la Réunion depuis 4 ans. Il est marié et a 26 ans. Heureusement lui n'a pas changé. Il est toujours aussi content de revenir à chaque fois qu'il le peut et il donne régulièrement des nouvelles. Si je dois partir un jour pour mes études, je ferais bien attention à suivre son exemple et surtout pas celui des trop nombreux anciens amis qui m'ont déçue.

"Ce sont des vantards, certains se croient supérieurs par rapport à ceux qui sont restés parce qu'ils ont voyagé et vu autre chose, c'est bien d'évoluer mais pas comme ça."

"Déjà il y a un énorme changement de mentalités. Il y en a qui se croient les rois du pays et qu'il faut qu'on leur lèche les bottes. Moi aussi je vais bientôt partir et j'espère ne pas devenir comme ça."

"Moi, les Je viens de… m'impressionnent car je les vois plus autonomes que nous et certains nous disent qu'à l'extérieur de Mayotte c'est beaucoup mieux qu'ici."

"Je suis un Je viens de… et j'en suis fier. De toute façon je m'affirme en tant que tel. D'ailleurs j'ai plus de succès auprès des filles qui sont impressionnées dès qu'elles me voient !"

"Un Je viens de… se voit tout de suite. Pour les filles ce sont des vêtements souvent très colorés avec des bijoux en tous genres et les cheveux avec des mèches ou des tissages. En ce qui concerne les garçons ce sont les grosses lunettes, les piercings sur les oreilles, la casquette à l'envers et bien sûr la démarche…"

"Je suis surpris de voir que certains font semblant d'avoir oublié nos habitudes ici à Mayotte. C'est comme s'ils reniaient leurs origines."

"Moi, en les voyant bien sapés et tout, ça me donne envie de partir aussi."

"Il y en a certains qui n'aiment pas te parler parce qu'ils considèrent que tu n'es pas à la hauteur par rapport à eux."

 
 

 


L’avis d’une "Je viens de…" sur les "Je viens de…"
Salima Charafoudine, 24 ans, Master 2 droit public fondamental à Toulouse, de Chiconi

Je trouve ça vraiment ridicule d’appeler les jeunes Mahorais ou les gens qui se déplacent et quand ils reviennent ici des "Je viens de…". C’est l’évolution de la société, on n’y peut rien. Les jeunes d'ici, quand ils partent en Métropole ils découvrent un autre territoire, un autre mode de vie, ils sont obligés de s’adapter. Ils ne peuvent pas débarquer avec leurs salouvas, leurs boubous et leurs chapeaux comme des extraterrestres, ce n’est pas possible. Déjà que c’est difficile pour un noir de s’intégrer dans un pays comme ça, on est mal vu, on est mal accueilli, c’est une réalité en France, alors que eux, les blancs, je suis désolée mais quand ils viennent ici on les accueille les bras ouverts.
Nous on doit faire beaucoup d’efforts pour s’adapter, pour qu’ils nous acceptent, qu’ils ne nous rejettent pas et c’est comme ça, on y peut rien. Les vêtements d’aujourd’hui ne sont pas les vêtements d’il y a 100 ans, donc on n’a pas le choix en fait. La société évolue comme ça. Et ce n’est pas parce qu’on se met en pantalon qu’on est moins bien élevé qu’une fille qui porte un salouva ou je ne sais quoi. Je veux dire par là que moi je suis en pantalon et t-shirt, mais je fais des études, je fais le Ramadan, je lis le Coran… Après c’est vrai qu’il y a des frimeurs, mais ça aussi c’est la vie, on n’y peut rien.

 


Yazidou Maandhui, étudiant en DEA Littérature anglaise à Toulouse
Un "Je viens de…" sportif, littéraire et engagé

Yazidou Maandhui est étudiant en DEA Littérature anglaise à Toulouse à la rentrée, auteur et dramaturge ayant déjà publié un recueil de poésie "Le palimpseste du silence ou le silence des Dieux" en 2005 aux Editions du Baobab. Il écrit aussi des pièces de théâtre comme "L’Evangile de l’espace et du temps", produite la même année; une commande d’écriture du conseil général ou encore "Epître aux lucioles", présentée cette semaine dans le cadre du festival La Passe en S, jouée par une troupe professionnelle de Toulouse, le Théâtre Extensible, composée de professionnels et de semi-professionnels.
Pour lui, ces quelques semaines de vacances ont été rythmées non pas par les voulés, les mariages ou le tourisme. Ce fut surtout une période dont il a profité pour mettre en avant ses productions artistiques.

Après sa terminale littéraire à Limoges, Yazidou a décroché son bac L dans la Ville rose avant de valider son Deug d’Anglais. Assoiffé de culture, il partira une année avec Erasmus au Pays de Galles d’où il devrait revenir avec une licence en poche. De retour à Limoges, son parcours le mènera jusqu’à décrocher son master, avant de tenter le concours du Capes. Très attiré par les voyages et la découverte, la Métropole et le Pays de Galle ne sont pas ses premières terres d’évasion.
Peu avant de gagner l’Hexagone, ce jeune pamandzien de 25 ans a vécu à l’île voisine de la Réunion où il a passé sa première L. Parallèlement à ses études, Yaz, comme l’appellent ses proches, suivait un cursus sportif en sport études au Creps (Centre régional d’études physiques et sportives) de Saint-Denis en intégrant le pôle espoir judo de l’île Bourbon. Sportivement, cette expérience lui a permis d’atteindre le niveau de champion régional puis d’intégrer le pôle espoir de Limoges.

"Très tôt, en 4ème, j’ai été attiré par l’écriture (…) un plaisir, une passion, une vocation"

Aujourd’hui, le sport demeure pour lui un simple plaisir car c’est surtout dans le domaine littéraire et artistique qu’il s’exprime, puisque "très tôt, en 4ème, j’ai été attiré par l’écriture", nous confie-t-il. Sa "crise d’adolescence" passée, il redécouvrira l’envie et le plaisir de la littérature en première. "On m’a initié à la poésie de Francis Ponge et j’ai découvert le courant postmoderne, alors je me suis remis à l’écriture. J’ai travaillé le style, j’ai essayé de découvrir un peu l’écriture, ce qui s’est soldé en 2005 par l’apparition de mon premier recueil", reconnaît-il aisément.
Pour moi, "l’écriture est devenu un plaisir, c’est plus qu’ une passion, c’est une vocation", dans la mesure où il fait cela parallèlement à ses études. Une gestion pas toujours facile, ce qui fait que Yaz prend son temps pour écrire. "La gestion est plus ou moins aisée, nous dit-il puisque je ne subis pas une quelconque pression, à moins que cela ne soit une commande d’écriture". Plein d’ambitions, il a envie de se faire un nom à travers son écriture en affinant son style pour que "Mayotte soit bien représentée".

Très à l’aise en Anglais où il "excelle", selon ses propres mots, Yaz se prépare au professorat alors que sa passion première voulait le mener à effectuer une seconde théâtre. Mais "une fois à la Réunion, la combinaison des deux était trop difficile". Du coup l’anglais a fini par l’emporter, même si aujourd’hui ces deux aspects se retrouvent avec ses engagements universitaires rythmés par la littérature anglaise et son amour pour le théâtre.
Mais dans ses projets, l’intérêt n’est pas tant de revenir à Mayotte ou de rester en Métropole : "l’important est de trouver ma voie. (…) On ne doit pas se priver d’aller ailleurs, que ce soit aux Etats-Unis ou en Angleterre". Mais il reconnaît tout de même que la culture pourrait le faire revenir à Mayotte "non pas par nationalisme mais pour être plus au contact avec la réalité du terrain".

Après tant d’années à l’extérieur, il constate que Mayotte s’est développée même s’il tient à souligner que beaucoup d’efforts restent à faire, notamment au niveau du renouvellement des générations dans le monde actif. C’est en cela qu’il remarque une "concurrence rude entre nous, jeune génération, qui partons et qui ambitionnons d’avoir le plus de diplômes possible, et l’ancienne génération ou ceux qui n’ont pas eu la chance d’aller très loin dans les études, qui sont là depuis longtemps et qui comptent vraiment garder, qui s’agrippent à leurs places. Du coup, ceci crée un frottement, ce qui fait que les jeunes, on a du mal à s’intégrer".

"Il faut qu’il y ait déjà une clarté par rapport à la Dasu elle-même"

Mais comme tout jeune Mahorais, Yaz remarque ces efforts à faire aussi au niveau de la prise en charge des jeunes qui partent effectuer leurs études hors du territoire. Pour lui, "cet échec est quelque part lié à une mauvaise gestion" administrative. Son expérience réunionnaise lui a montré qu’il est plus facile de réussir à l’île Bourbon qu’en métropole où l’intégration reste difficile et où se débrouiller est un crédo pour des étudiants qui se retrouvent "livrer à eux-mêmes". Il constate par ailleurs un fort manque de communication et d’information : "il faut qu’il y ait déjà une clarté par rapport à la Dasu elle-même", mais pour lui "c’est la bourse souvent versée en retard qui pèse le plus, ainsi que le manque ou plutôt une mauvaise orientation pour des jeunes dont la plupart ne disposent pas de réel projet professionnel".
Pour cet étudiant, la mise en place progressive de formations universitaires ne doit pas permettre de "confiner, empêcher les élèves de partir car on a besoin de partir en Métropole pour aller découvrir. Les empêcher d’aller chercher là-bas et ramener ici serait une sorte de régression (…). Il faut partager la responsabilité de cet échec. Est-ce que les acteurs qui s’occupent des élèves ne participent pas, inconsciemment, à cet échec ?" Pour lui, la base de tout cela serait une réorganisation du dispositif administratif entre les responsabilités de la Dasu et celles du vice-rectorat ; "il faut revoir l’organisation, médiocre, de ces administrations", propose-t-il.

Mais Yaz n’exclue en rien la responsabilité des jeunes Mahorais qui, "une fois en Métropole, se sentent libérés de quelque chose, toujours dans l’outrance, car beaucoup tombent dans l’alcool et dans l’excès", ce qui ne garantit pas forcément le retour sur investissement dans lequel la Collectivité s’est engagée. Il propose aussi de "mettre en avant ceux qui réussissent et publier chaque année des statistiques pour savoir qui réussit, où, quelle filière marche et qu’est-ce qui ne marche pas. Au moins en mettant en avant ceux qui réussissent, on pourrait montrer l’exemple aux primo arrivants qui auraient peut-être plus d’ambition, mais à ceux-là on leur met toujours dans l’esprit qu’ils sont partis pour échouer".
Ce qui le pousse à dire que "quand les conditions sont réunies, quand l’élève a été pris en charge vraiment intelligemment et surtout quand il se prend en main, la réussite est assurée. Mais le dispositif est là justement pour aider ceux qui n’arrivent pas à se prendre en main". Un engagement que Yaz défend et qu’il dégage à chaque fois que l’occasion se présente. Un bon tremplin pour démontrer que la poésie, la littérature ou le théâtre restent aussi un moyen d’engagement et participent à éveiller les consciences.

R.T Charaffoudine Mohamed
 
 

Céline Ahmed Ben Ali, ancienne étudiante en assurance
Diplômée, à la recherche d'un emploi et déçue de Mayotte

Alors que certains rentrent en vacances pour se reposer, voir les familles ou participer aux mariages, d'autres demeurent toujours en Métropole et ont du mal à quitter leur quotidien métropolitain pour, ne serait-ce que venir constater ce qu'est devenu Mayotte. Mais quelques uns s'accrochent vaille que vaille et se laissent séduire par l'envie de rentrer au pays et de servir du peu qu'ils peuvent. Voici l'exemple d'une jeune fille qui, depuis plusieurs mois déjà, s'est décidée de rentrer après un brillant parcours. Mais l'absence d'opportunités professionnelles pourrait la faire retourner à Paris, une issue à laquelle elle n'a pas envie de penser, mais qui demeure toutefois comme l'ultime solution.

Agée de 24 ans, Céline Ahmed Ben Ali a quitté son Chirongui natal après son bac décroché en 2003. A Paris, elle a obtenu un BTS en Assurance avant de valider une licence professionnelle, toujours dans le même domaine. Et c'est avec fierté qu'elle vient de rentrer dans l'objectif de servir son île, surtout après avoir acquis une expérience de deux ans au sein d'un cabinet parisien.
Mais depuis son arrivée, Céline cherche et ne trouve toujours pas. Elle cherche bien sur à travailler dans le domaine des assurances, mais pas seulement : "d'autres domaines aussi m'intéressent, nous dit-elle, sachant qu'à Mayotte il n'y a que trois entreprises évoluant dans le domaine des assurances. Je recherche aussi dans les postes administratifs, juridiques", mais c'est un bilan plutôt décevant qu'elle nous dresse puisque jusqu'alors, sur toutes les demandes adressées, aucune de positive ne lui est revenue. De quoi tirer la sonnette d'alarme;
"Je compte rester jusqu'à janvier sinon je rentre à Paris". Là-bas, elle compte faire un master mais elle sera obligée de passer par une autre licence avant d'effectuer sa formation. "Vue la situation dans laquelle je suis ici, je serais obligée de partir dans cette perspective", à moins que la chance lui sourit d'ici janvier.

Beaucoup de points négatifs sur Mayotte

Sa galère de trouver un emploi lui fait dire que les dispositifs d'aides à la recherche d'emploi sont plutôt décevants : "il n'y a pas d'informations, on ne connaît que l'ANPE, il n'y a aucune structure pour aider les jeunes à trouver leur emploi. Je suis vraiment déçue car on m'a souvent dit que Mayotte a changé, ça a évolué. La famille t'encourage et te dit "ne t'inquiète pas, tu vas trouver car Mayotte est en développement, on cherche des gens qualifiés", alors que ce n'est pas du tout le cas. J'en ai bien la preuve : pour trouver un emploi il faut connaître du monde, mais je pense qu'il faut quand même persister et j'espère que d'ici janvier je trouverais quelque chose. Je me dirais ouf ! Je me serais déjà sortie d'un gouffre.
Sur Mayotte, son état actuel et son évolution, Céline ne voit "que des points négatifs". Quant à la religion, pour elle "l'Islam est compatible avec la République, mais c'est un peu compliqué parce qu'on a l'impression que l'Islam est très présent, mais seulement quand ça nous arrange. L'Islam à Mayotte n'est pas le même que l'Islam en Tunisie ou au Maroc. A Mayotte, c'est un peu particulier et des fois je trouve que c'est un peu hypocrite, notre façon de voir et de vivre l'Islam".
Malgré son pessimisme avoué, Céline conseille à ses concitoyens de "réfléchir à leur façon de contribuer au développement de l'île". Elle tient aussi à dénoncer certains déboires dans l'administration comme "aller cinq fois par jour à la préfecture pour une carte grise" ou les queues interminables à la BFC de Mamoudzou. Une situation "inadmissible" vu l'élan de développement auquel Mayotte aspire. Une conscience qui devrait sans aucun doute lui permettre, elle aussi, de trouver sa place dans cette société qui s'occidentalise et qui oublie souvent ses enfants.

R.T Charaffoudine Mohamed
 

 


Daniel Djadi, bachelor en relations internationales
"Le métier de diplomate me fascine beaucoup"

On parle souvent de l'échec cuisant des étudiants mahorais dans l'Hexagone, mais on parle moins de ceux qui réussissent et qui sont dans ce que le sénateur Soibahadine nomme "les pôles de l'excellence". Voici un exemple, ils se comptent sur les doigts de la main, mais ils existent bel et bien. Agé de 25 ans, Daniel Djadi prépare actuellement un bachelor en relations internationales niveau licence dans une école spécialisée, l'Institut libre d'études des relations internationales à Paris avant d'intégrer le master 1 Affaires internationales, stratégie et négociation.
Son parcours est "assez atypique", car avant les relations internationales Daniel a obtenu une maîtrise de philosophie et trois licences, notamment de philosophie et pluridisciplinaire en vue d'une préparation d'entrée aux écoles de journalisme et instituts d'études politiques. Sa fibre journalistique passée, ce Pamandzien aspire plutôt à évoluer dans les milieux de la diplomatie et des relations internationales. "Le métier de diplomate me fascine beaucoup". Parallèlement à sa dernière année de master 2 l'année prochaine, il préparera un concours organisé tous les ans par le ministère des Affaires étrangères de "secrétaire général cadre Orient", un concours administratif pour devenir diplomate, un milieu où la concurrence est très rude.
Actuellement, Daniel est en stage à la direction des Affaires européennes du conseil général "pour percevoir la réalité locale et pour connaître les besoins de l'économie et de la société mahoraise". Son premier constat est qu'il manque de spécialistes sur tout ce qui concerne les questions européennes. Pour lui, il est impératif de se spécialiser sur l'Europe "dans l'optique de contribuer à la gestion du Fed (Fonds européen de développement) dont Mayotte bénéficie". Il rentre "assez souvent, au moins une fois par an et à chaque fois que je rentre j'essaie toujours de travailler car c'est là qu'on se rend compte vraiment de ce que c'est que le monde du travail, car lorsqu'on est juste étudiant en vacances, on ne se rend pas vraiment compte de la réalité des choses".

"A Mayotte on a peur du mzungu car on ne le connaît pas assez"

Pour sa part, Daniel jette un regard assez morose sur le développement de l'île en constatant beaucoup d'inégalités notamment au niveau salarial : "90% des Mahorais ne gagnent pas bien leur vie, donc je pense qu'un jour ou l'autre ça va péter". Pour lui, ceux qu'on appelle les "Je viens de…" sont des "privilégiés" (…). "On leur accorde une certaine importance, mais quand ils viennent ici ils ont une position assez critique des choses car dans le domaine professionnel j'ai l'impression qu'on se méfie un peu d'eux. Ils sont vus comme une menace car peuvent concurrencer les anciens qui détiennent les postes à hautes responsabilités".
Face à un communautarisme de plus en plus fort des Mahorais vivant sur le territoire national, Daniel conseille aux compatriotes d'être plus ouverts notamment aux mzungus, car "à Mayotte on a peur du mzungu car on ne le connaît pas assez". Quant à l'échec scolaire, il considère que cela est avant tout une question de volonté personnelle, d'encadrement (…). Il n'y a que la persévérance et le combat de tous les jours qui peuvent donner aux gens les moyens de réussir".

R.T Charaffoudine Mohamed
 

 


Nasra, 20 ans, étudiante en communication, Chiconi
Nasra habite à Mayotte depuis 1994. Installée avec sa famille à Chiconi depuis, elle a obtenu son baccalauréat littéraire l'an dernier et a décidé de partir en France pour continuer ses études. Si elle est partie c'est parce que la filière Information communication est inexistante sur l'île. En effet, la jeune fille en stage à Télé Mayotte souhaiterait faire un master Journalisme pour ensuite revenir travailler à Mayotte.
Après un an à l'extérieur, l'étudiante remarque plusieurs petits changements dans l'île au lagon, comme par exemple la fin des travaux du marché de Mamoudzou et se demande quand il sera ouvert. "Par contre les vendeurs ambulants ont disparu", nous dit-elle avec un sourire. Mais pour Nasra il y a des choses dans l'île qui vont trop vite à son goût et craint que cela ait des répercussions négatives sur la société mahoraise : "aujourd'hui Mayotte est devenue une véritable société de consommation et on a tendance à délaisser certaines activités, notamment agricoles ou artisanales".
De plus elle déplore l'état de l'environnement de l'île aux parfums, même si elle note une nette amélioration à ce niveau : "on ne voit plus autant de détritus partout". D'ailleurs elle pense que le sujet de l'environnement devrait être la priorité des politiciens mahorais, car c'est l'écosystème que l'on est en train de détruire.
Elle conclue en nous disant qu'elle pense que Mayotte a encore beaucoup de "route à faire" avant d'atteindre certains de ses objectifs, comme par exemple le tourisme qui pourrait être un véritable secteur dynamique, développé, et qui générerait des emplois et des revenus importants pour la Collectivité.

 


Mina, 17 ans, nouvelle bachelière, M'ramadoudou
Cette jeune mahoraise est en vacances à Mayotte. Cela est devenu un rituel depuis qu'elle est partie en pension à l'âge de 14 ans à l'île de la Réunion. Cette bachelière a ainsi passé 3 ans dans un lycée réunionnais pour préparer un bac STL qu'elle vient d'obtenir avec mention bien.
Elle revient 2 fois par an en vacances pour rendre visite à sa famille : à Noël et en juillet. Elle se dit toujours un peu choquée lorsqu'elle rentre en vacances car elle constate les différences entre la Réunion et Mayotte par rapport aux infrastructures. "Mayotte évolue, mais trop lentement, on a un gros retard par rapport à la Réunion", déclare t-elle.
D'ailleurs elle regrette beaucoup que certains parcours scolaires n'existent pas sur l'île et que les élèves se retrouvent obligés de quitter leurs familles. Cependant, elle ajoute que "les voyages forment la jeunesse et partir m'a forgé dans la tête". Aujourd'hui elle se dit prête à repartir, mais cette fois ci à Lyon pour y préparer un DUT de génie biologique et biochimique.
L'adolescente rêve d'avoir un jour son propre laboratoire d'analyses à Mayotte, mais veut avant cela "voir le monde". Passionnée de chimie, elle veut faire de la recherche dans le domaine médical et pharmaceutique et pense que "Mayotte serait un excellent terrain de recherche car nous sommes dans une zone tropicale, donc avec certaines spécificités".
Sinon Mina est fière de constater que la réussite scolaire soit devenue une priorité pour beaucoup de jeunes mahorais. "Le taux de réussite au bac ne fait que progresser depuis quelques années" et remarque que "les étudiants sont nombreux à partir pour poursuivre leurs études à l'extérieur".

UNE Mayotte Hebdo N°390 – Vendredi 08 août 2008

UNE Mayotte Hebdo N°390 - Vendredi 08 août 2008

Rapport du Sénat. Le coût de l'immigration clandestine

62 millions d'euros par a

 > Exclusif – entretien avec Ahamed Attoumani Douchina – 3 pages

08/08/2008 – Une Mahoraise au pays des kangourous

Les étudiants français partent principalement en Angleterre, en Espagne, en Italie ou en Allemagne. Saïdat Subra, étudiante en deuxième année de l'École nationale supérieure d'ingénieurs de Limoges (ENSIL), spécialité eau et environnement, a choisi une destination beaucoup plus lointaine puisqu'elle effectue actuellement un stage de 3 mois à l'Université d'Adélaïde en Australie-Méridionale.
"J'étudie le développement de biofilms dans les canalisations d'adduction d'eaux brutes et leurs impacts sur les paramètres hydrauliques : baisse de débit dans les canalisations, pertes de charges engendrées, augmentation de la rugosité… C'est un projet de recherche pour lequel je dispose d'énormément d'autonomie. À vrai dire, cela me change beaucoup de la manière dont je travaille à l'ENSIL et ça ne peut être que bénéfique pour moi", concède cette Pamandzienne de 22 ans. En plus d'avoir un maître de stage qui essaie d'être le plus disponible possible, elle collabore avec une étudiante chinoise qui effectue un master en génie hydraulique.
 
 

Découvrir la culture aborigène, la faune et les énormes plages

Saïdat Subra n'a pas le fait voyage seule puisque quatre de ses amies de l'ENSIL effectuent également leur stage à Adélaïde. Mais le choix de l'Australie est surtout individuel et un rêve qu'elle caressait depuis longtemps.

"En deuxième année d’école, nous devons effectuer un stage obligatoire de 3 ou 4 mois. Les stages à l’étranger ne sont pas obligatoires, mais sont fortement conseillés au sein de l’ENSIL. Nous avons la chance d’avoir un réseau de contacts assez étendu et dans de nombreux pays. J’ai donc saisi l’opportunité de pouvoir partir a l’étranger et mon choix s’est porté sur l’Australie, car c’est tout simplement un pays qui me fait rêver depuis longtemps et que je voulais découvrir : la variété de ses paysages, leur culture, la culture aborigène, et toutes ces choses particulières à l’Australie que l’on voit à la télé et qui donnent envie d’être vues telles que les kangourous, les koalas, le diable de Tasmanie, leurs énormes plages, les surfeurs et les énormes villes à côté de tout ça.

Et l’autre point très important qui m’a fait choisir ce pays, c’est la langue ! Je voulais absolument aller dans un pays anglophone pour améliorer mon niveau d’anglais ! Je dois passer mon TOEIC l’année prochaine pour obtenir mon diplôme", explique cette ancienne élève de classes préparatoires du lycée Kléber de Strasbourg.
Son séjour ne se termine qu'à la mi-septembre, mais une grande partie de ses attentes a été déjà comblée. Tous les week-ends, elle en profite pour visiter les environs d'Adélaïde et de l'état d'Australie-Méridionale.

 

Les Wallabies ont mis KO les Bleus

Lors de son premier week-end de camping en forêt, elle a eu très froid puisque c'est actuellement l'hiver à Adélaïde. Mais en revanche, elle a perçu des kangourous sauvages et cela l'a vraiment impressionnée. "Je suis allée dans une grande réserve sauvage dans laquelle j'ai été servie question animaux : koalas, diable de Tasmanie, kangourous, wallaby, et autres… J’ai aussi passé un week-end à Sydney pour aller au match de rugby Australie-France dans le stade olympique. La France a largement perdu mais c’était génial. Enfin, j’ai vu plein de choses et ce n’est pas fini", se réjouit-elle.

Au début de son séjour, elle a été impressionnée par tout ce qu'elle voyait. "Tout me paraissait énorme: la ville (1,1 million d'habitants), les bâtiments (pourtant, il n'y a pas de building), les routes, les voitures. Mais quand je suis allée à Sydney (4,2 millions d'habitants étendus sur 12 000 km2), j’ai vite compris qu’en fait Adélaïde ce n’est pas grand du tout."
Ce côté un peu gigantesque de l'Australie ne la choque plus. En revanche, elle apprécie la gentillesse avec laquelle les Australiens ("du moins à Adélaïde, dans les villes comme Sydney, je ne sais pas trop") l'ont accueillie. "Ils te mettent vite à l’aise et sont tout de suite prêts à te faire découvrir et te montrer plein de choses. Même dans la rue ils prennent le temps de t’aider avec un grand sourire. J’ai aussi été surprise par la multitude d’accents différents que l’on rencontre. Je m’y attendais un peu bien sûr, mais bon quand même… Et puis c’est parfois tellement difficile à comprendre ! Et quand en plus ils utilisent l’argot australien, ça devient tout simplement incompréhensible", affirme-t-elle.

 

"Pourquoi se limiter à l'Union européenne quand on peut aller ailleurs ?"

Pour Saïdat, l'expérience d'un séjour international ne peut qu'être bénéfique et elle conseille vivement aux étudiants mahorais qui en ont l'opportunité de partir à l'étranger pour au moins un semestre. En ce qui concerne l'Australie, son conseil est surtout financier. "Je conseille de faire de bonnes économies avant de venir ! Parce que la vie ici est assez chère. Et puis encore plus quand on veut voir beaucoup de choses. Il faut aussi prévoir du temps, car l’Australie c’est énorme !"
En effet, pour relier Perth à Sydney (de l'extrémité occidentale à sa limite orientale), il faut 4 heures d'avion (en comparaison, Perth-Maurice dure 6 heures) et passer 3 fuseaux horaires différents. "Par contre, j’ai le regret d’annoncer que notre cher conseil général adoré refuse pour le moment de soutenir ce genre d’initiative ! Je veux dire que si l’on veut une aide financière du conseil général de Mayotte, il faut que le stage soit effectué dans un “pays non francophone de l’Union européenne”. Pourquoi devoir se restreindre à l’Union européenne quand il est possible d’aller ailleurs ? J’espère que leur politique à ce sujet changera dans un avenir très proche pour encourager les étudiants Mahorais à la mobilité et à entreprendre ce genre d’action."

Faïd Souhaïli

Découvrir l'Australie avec le visa vacances-travail

Le pays des kangourous est une immense île qui ne peut être parcourue en quelques semaines de congés. Depuis le 23 février 2004, la France et l’Australie ont signé un accord créant un programme "vacances-travail" destiné à permettre à de jeunes ressortissants (âgés de 18 à 30 ans) de chacun des deux pays de séjourner dans l’autre, à titre individuel, dans le but d’y passer des vacances, en ayant la possibilité d’y occuper une activité professionnelle salariée et de compléter ainsi les moyens financiers dont ils disposent.
Le visa vacances-travail a une validité de 12 mois maximum et peut être renouvelé une fois si vous avez travaillé dans une ferme pendant trois mois. Le visa vacances-travail ne permet de travailler au maximum que 6 mois chez le même employeur.
La formule est un vrai succès puisque plus de 100.000 visas sont délivrés chaque année aux ressortissants de 17 pays ayant des accords avec l'Australie. Si vous rencontrez un jeune Français dans le bush ou les grandes villes australiennes, il y a une chance sur deux qu'il ait obtenu le visa vacances-travail. Attention des conditions s'appliquent, notamment pouvoir justifier d'avoir la somme de 3.000 euros sur votre compte en banque quand vous arrivez en Australie.

Pour plus d'informations, consulter http:/www.france.embassy.gov.au/parifrancais/WHM%5ffr.html"
sur le site de l'ambassade d'Australie en France.

08/08/2008 – Grand écran à Tsararano

Les Rencontres cinématographiques de Tsararano permettent au public mahorais de découvrir de nombreux films d'Afrique et des îles et de connaître les cinéastes africains selon le thème et les films proposés à chaque édition. Depuis 1996, année à partir de laquelle la manifestation a été reprise par la FCJT, les Mahorais ont eu par cette belle initiative la visite dans leur île d'une dizaine de cinéastes, acteurs et réalisateurs africains et reconnus. "Original et convivial", présentent les jeunes de Tsararano, l'évènement connaît à chaque fois un grand succès, autant par l’organisation que par les visites. "En général le public cinéphile est satisfait de l’organisation car entre des courts, moyens et longs métrages très variés, il peut se restaurer sur place. Cette année encore le resto-banga proposera des brochettes, des plats traditionnels et des boisons à des prix bas."
Le foyer des jeunes de Tsararano sera pendant une semaine très animé. Des ateliers peintures et dessins seront proposés aux petits dans la matinée. La salle d'exposition sera ouverte les après-midi. Et cette année on propose aux visiteurs de découvrir les tableaux de l'artiste peintre Marcel Séjour. Les séances cinéma sont programmées 18h30 à 23h et les courts métrages seront projetés avant 20h. Une vingtaine de films sont à découvrir cette année. Le programme couvre un éventail très large – fictions, films d’animations et documentaires… – et il y en a vraiment pour tous les goûts, avec des découvertes agréables, surprenantes, réjouissantes à n'en pas douter.
L'ouverture des 12èmes Rencontres aura lieu ce samedi après-midi au foyer des jeunes de Tsararano, en présence de nombreux conseillers municipaux et généraux de l'île et de nombreux invités. Les danses traditionnelles seront au rendez-vous sans oublier l'artiste Langa, "le sage de la maison".
 
 

12 années de succès réjouissants

Les premières Rencontres du cinéma d'Afrique et des îles datent de 1994. Elles étaient organisées à Mamoudzou. Il ne s'est rien passé l'année suivante et la seconde édition n'a eu lieu qu'en 1996 à Tsararano, commune de Dembéni, reprise par la Formation culturelle des jeunes de Tsararano (FCJT). Pour marquer le coup et afficher leur enthousiasme pour le cinéma africain et des îles, la FCJT a invité Sarah Maldoror, cinéaste française d'origine guadeloupéenne, réalisatrice, et une des figures de proue du cinéma africain et du cinéma antillais. L'engouement était de mise et en 1997 la 3ème édition était honorée par le célèbre scénariste réalisateur congolais Balufu Bakupa-Kanyinda. Des jeunes motivés étaient invités pendant la durée des Rencontres à participer à la réalisation d'un court métrage avec le réalisateur, de l'écriture au tournage.
C'est à partir de la 4ème édition que les organisateurs ont commencé à thématiser les Rencontres. "Femmes d'Afrique", le premier thème introduit en 1998, était affirmé par la présence de deux femmes réalisatrices : Fanta Régina Nacro (Burkina Faso) et Anne-Laure Folly (Togo).
La 5ème édition en 1999 était elle organisée autour du thème "Cinéma et Jeunesse". Cette année là, les Mahorais ont eu l'occasion de rencontrer et échanger avec deux grandes figures du cinéma africain. Adama Rouamba (Burkina Faso), le premier, fait partie des réalisateurs les plus primés au Fespaco (Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou). Le second est le nigérian Moustapha Alassane, un des pionniers du cinéma africain. A la fois réalisateur, acteur et scénariste récompensé à la première édition du Fespaco en 1969, Moustapha Alassane est le réalisateur de "La Mort de Gandji" (1965), le premier dessin animé africain.

 

Un évènement qu'il faut pérenniser

En 2000, à la veille du nouveau millénaire, la FCJT organisait les 6èmes Rencontres autour du thème "Tranches de vie" avec le retour de l'écrivain et scénariste congolais Balufu Bakupa-Kanyinda qui avait honoré la 3ème édition en 1997. En 2001, la 7ème édition avait pour thème "Cinéma et réalités africaines". Pour des raisons financières, expliquent les membres de la FCJT, cette année-là il n'y a pas eu d'invité. Il faut dire que c'est cette association de Tsararano qui assure toute la manifestation, sa préparation, son organisation, avec le soutien de la population du village et de quelques partenaires, trop peu nombreux.

Il a fallu attendre la 8ème édition de 2002 qui avait pour thème "Films régionaux et d'animation" pour rencontrer Armand Dauphin, festivalier de cinéma à la Réunion qui est d'ailleurs le président de Ekwa, le nouveau festival sud-ékwatorial de cinéma qui s’est déroulé à la Réunion en juin dernier, et Alexander Abela, réalisateur anglais et auteur du film "Makibefo" (2001).
En 2003, l'aventure des jeunes de Tsararano s'est transformée à nouveau en cauchemar, comme en 2001. Pour le même motif financier, ils n'ont pas pu faire venir un invité à la 9ème édition des Rencontres cinématographiques qui avaient pour thème "Cinéma et Culture africaine". La formation des jeunes de Tsararano a fêté les 10 ans des rencontres en 2004. Ce fut l'occasion d'afficher les "Mémoires des Rencontres", le thème de la 10ème édition, et faire venir l'actrice camerounaise Wouassi Félicité. Malheureusement aucun invité n'est venu après elle.

Il faut dire que depuis 2001, la FCJT se bat dur auprès des institutions locales pour pérenniser cette manifestation et ce n'est pas tous les ans qu'elle est soutenue. C'est la raison pour laquelle en 2005 et 2007 nos rencontres cinématographiques n'ont pas eu lieu. La 11ème édition a eu lieu en 2006 sur le thème des "Arts et Réalités africaines". C'est grâce au soutien financier de la mairie de Dembéni, du conseil général et de quelques partenaires privés que les jeunes de Tsararano organisent cette 12ème édition.

 

Faire de Tsararano le fief du cinéma mahorais

Hamada Soihibou, le nouveau maire de Dembéni, présidait la FCJT avant d'être élu premier magistrat de cette commune en mars dernier. Il ne peut que féliciter les organisateurs des rencontres et l'ensemble des partenaires "qui oeuvrent pour la pérennité et la réussite de cette grande manifestation culturelle à Tsararano". "La volonté politique du conseil municipal est de continuer à soutenir cette manifestation par l'amélioration des conditions d'accueil", explique-t-il. Il souhaite pour l'avenir, "la création d'un centre culturel et cinématographique à Tsararano pour l'épanouissement de notre jeunesse".

En 2004, lors des 10 ans des rencontres cinématographiques, les jeunes de Tsararano avaient réalisé un court métrage sur le thème de la polygamie à Mayotte. Ce film a été projeté à Paris et a remporté le quatrième prix sur 120 films en compétition et sur 20 prix décernés. Président de la FCJT pendant des années et connaissant bien le tempérament passionné des jeunes de Tsararano pour le cinéma, Hamada Soihibou n'a pas tort de vouloir leur donner des atouts pour qu'ils s'épanouissent.

Dans l'objectif de sensibiliser la population mahoraise au cinéma, tous les premiers samedis du mois, à compter de septembre prochain, la dynamique Formation culturelle des jeunes de Tsararano a l'ambition de faire des projections à travers toute l'île. Pour atteindre cet objectif, ils veulent mettre en place des ateliers de réalisation et de montage de documents vidéo, des stages de sensibilisation et de formation aux métiers de l'image. Ils espèrent pouvoir organiser un grand festival à travers lequel seront présentés des films réalisés à Mayotte.
Mais en attendant la concrétisation de tous ces beaux projets, les jeunes de Tsararano espèrent accueillir de nombreux cinéphiles cette année. Alors ne manquez surtout pas cette occasion rare, celle de découvrir le cinéma d'Afrique et des îles sur grand écran. Rendez-vous à partir de ce samedi tous les soirs à partir de 18h30 à Tsararano, pour des séances en plein air… Prévoir un pull.

Rafik

PROGRAMME DES 12EMES RENCONTRES

SAMEDI 09 Août 2008
17H30 : SOIREE D’OUVERTURE,
18H30 : UN PAS DEUX PAS: fiction ; 2001 de Guy Désiré YAMEOGO (Burkina Faso),
18H45 : AU DELA DU TEMPS: fiction ; 1999, de Jean-Chris SEMUTAKIRWA (Rwanda)
19H15 : SAFI LA PETITE MERE: fiction ; 2004, de Raso GANEMTORE (Burkina Faso)
20H00 : PAUSE
20H45 : MADAME BROUETTE: Fiction ; 2002, de Moussa SENE ABASA (Sénégal)

DIMANCHE 10 Août 2008

18H30 : LE LOUP ET LA CIGOGNE (série : les fables de la fontaine) de Gaston KABORE (Burkina Faso)
18H40 : SENEGALAIS SENEGALAISE: Doc. 1999 ; de Laurence ATTALI (France)
20H45 : ALMODOU: fiction ; 2000 ; de Amadou THIOR (Sénégal)

LUNDI 11 Août 2008
18H30 : CHAMEAU ET LES BÂTONS (série : fable de la fontaine) de Abderrahmane SISSAKO (Mauritanie)
18H45 : VOYAGE À OUGA: fiction ; 1999, de Camille MOUYEKE (RDC)
20H45 : VIVA LADJERIE: fiction ; 2003, de Nadir MOKANECHE (Algérie)

MARDI 12 Août 2008
18H30 GRENOUILLE QUI VEUT SE FAIRE AUSSI GROSSE QUE LE BOEUF
(Série : fable de la fontaine) de Imunga IVANGA (Gabon)
18H40 : VENDREDI NOIR: fiction ; 2000, de Djingarey MAIGA (Niger)
20H45 : NUIT DE LA VERITE: fiction ; 2004, de Fanta Regina NACRO (Burkina Faso)

MERCREDI 13 Août 2008
18H30 : PRINCES NOIRS DE ST-GERMAIN-DES-PRÉS: fiction ; 1995 ; de Ben DIOGAYE BEYE (Sénégal)
19H00 : AIMÉ CÉSAIRE, LE MASQUE DES MOTS: Doc. 1987 ; de Sarah MALDOROR (France)
20H45 : COEUR ET RAISON: Doc. 1988, de Michel BRUNET (France)
21H10 : UNE MINUTE DE SOLEIL EN MOINS: fiction 2002 ; de Nabil AYOUCH (Maroc)

JEUDI 14 Août 2008
18h30 : ROUES LIBRES: Fiction ; 2001 de SIDIKI BAKABA (Côte d’ivoire)
20h45 : SAFI, LA PETITE MÈRE: Fiction ; 2004, de Raso GANEMTORE (Burkina Faso)
21h15 : VIE PLATINEE: Fiction 1987 ; de Claude CADIOU (France)

VENDREDI 15 Août 2008
18h30 : MADAME BROUETTE: Fiction, 2002 ; de Moussa SENE ABASA (Sénégal)
21h00 : Aimé Césaire, LE MASQUE DES MOTS: Doc. 1987 ; de Sarah MALDOROR (France)
21h40 : LA GENESE

Ce programme vous est communiqué sous toute réserve de modification *

Tarifs
Carte d’accès au foyer pour l’après-midi (avant 20 heures) : 2€ euros
Carte d’accès au foyer pour le soir (après 20 heures) : 2€
Carte d’accès au foyer pour les enfants (moins de 14 ans) : 1€
Carte d’accès pour toute la durée des rencontres : 20€

Formation culturelle des jeunes de Tsararano – FCJT – BP 31 – 97660 Dembéni
Tél. : 02 39 24 86 03 – Fax : 02 69 61 94 29 / 02 69 62 18 74

Juillet 2008 – Voyages – Ile Maurice

Caudan, le front de mer
L'antre de la consommation mauricienne

Depuis 1996, les Mauriciens se baladent sur un front de mer sublime dans leur capitale Port-Louis. Un lieu de villégiature piétonnier, ombragé, fleuri, où se croisent touristes et locaux venus remplir leurs sacs de vêtements de marques, voir un film au cinéma, tester une machine à sous au casino ou se promener entre amis ou en familles, avant de boire un jus de fruits frais, manger une glace ou dans l'un des innombrables restaurants.

Le Caudan, le front de mer de Port-Louis, vibre d'une frénésie intenable. Des milliers de personnes se bousculent auprès des centaines de magasins de vêtements, des bijouteries et autres commerces, formant une mêlée métissée originale. Indiens, Asiatiques, Européens, Africains, tous les descendants métissés ou pas de ces peuples qui sont passés puis restés dans l'île Maurice emplissent les rues de leur énergie. C'est le jour de la grande braderie au Caudan. La semaine prochaine, les modèles de la nouvelle saison arrivent des usines textiles situées plus dans le centre de l'île, au milieu des champs de canne. Alors tout doit partir et tout partira.
C'est une sorte de carnaval consumériste qui défile dans ces 9 hectares où prennent place six imposants bâtiments de trois étages. Les Mauriciens peuvent venir prendre une revanche sur ces établissements qui vendent des produits de marques à des prix quasiment égaux à ceux pratiqués à la Réunion, alors que le salaire de base mensuel ne dépasse pas les deux cents euros. Pendant la braderie, les prix tombent. Sept euros la chemise Cerruti, dix euros le pantalon de chez Harper's, des Nike dernière mode à 75 euros, etc.
"On se croirait à Monaco", s'enthousiasment des touristes à la vue de cet ensemble architectural. Les palmiers et autres arbres soigneusement entretenus, tout comme toutes ces fleurs colorées, ces bancs agréables, ces allées ombragées, ces patios, ces places et placettes, ces colonnades, ces galeries marchandes, ces fontaines donnent à l'endroit un cachet unique.
Le front de mer de Port-Louis est en effet sublime, d'une propreté et d'une organisation toutes britanniques. Des canons anciens visent l'horizon aujourd'hui pacifié, vestiges d'un passé où les marines européennes se battaient pour la domination des mers du globe. Des bancs ombragés accueillent les flâneurs un temps. Il y fait bon se promener sur la corniche en face du premier port de transbordement de l'ouest de l'océan Indien, déguster des plats du monde entier sous l'égide du père de la nation, le docteur Seewoosagur Ramgoolam, dont la statue orne une immense esplanade.
L'impression qui en ressort, hors de la beauté du site et du rêve de voir un jour une telle structure dominer le lagon mahorais, est celle d'une économie très dynamique qui crée des écarts importants au sein de la population. Pour s'en convaincre, à cinq cent mètres du Caudan, le marché pittoresque et historique de Port-Louis accueille des personnes bien plus modestes et propose des produits bien moins clinquants.

 

Exister aux yeux du monde, lui ressembler aussi

Le Caudan ne représente pas l'arbre qui cache la forêt pour autant, il est plus un marqueur de la volonté d'ouverture de l'île Maurice, de son ambition à s'élever économiquement, à exister aux yeux du monde, à lui ressembler aussi, en reprenant des codes "occidentaux" partagés pourtant aussi bien en Inde qu'au Japon ou au Trocadéro à Paris. Beaucoup de jeunes affichent des styles tirés non pas des derniers clips de rap, mais plutôt de ceux de musique électronique type tecktonic.
Les cheveux sont noyés sous des tonnes de gel, des crêtes iroquoises sont posées sur des têtes minces, les jeans serrés sont portés aussi bien par les filles que par les garçons. L'upper class (la haute bourgeoisie) se devine dans le port de sac Vuitton et des lunettes de soleil du dernier chic hiltonien*. Les talons des bottes ou bottines sont hauts, les chevilles minces pressent le pas, le sourire s'absente. Pour cette jeunesse, le Caudan est "the place to be", là où tout se joue, les amours, la sociabilité en marche, la popularité à acquérir ou à perdre.
Un curieux mélange si on y rajoute les nombreux touristes. Une cohabitation d'un genre nouveau où pour une fois les deux populations ont trouvé un terrain d'entente, celui de la consommation. Même si on est loin de l'authenticité mauricienne, il s'agit d'un vrai lieu d'échange entre touristes et Mauriciens. A ce titre, le Caudan possède une énergie et un intérêt plus grand que les Halles de Paris, ou Camden Town à Londres.
C'est une belle vitrine de l'économie mauricienne qui connaît une croissance ininterrompue de 6% par an depuis plus de dix ans. "Voilà l'effort d'une nation, d'un gouvernement qui a choisi de faire payer sa population en limitant les salaires, mais en investissant l'argent ainsi dégagé dans des infrastructures collectives d'envergure. Maintenant, les salaires vont pouvoir s'accroître. L'économie est plus stable, elle pourra supporter l'élévation des coûts et Maurice pourra continuer son développement. C'est encore une fois la récompense du travail et d'une volonté politique commune", s'enthousiasme un chroniqueur de Mayotte.
Pendant ce temps, les Mauriciens candidats à l'émigration se multiplient, désireux d'aller trouver du travail ailleurs et de rêver revenir au pays dans une à deux décades.

Gérôme Guitteau

* de Paris Hilton, l'héritière déjantée des hôtels Hilton.

 


 

Un peu d'histoire
Port-Louis est créée en 1775, ex-nihilo par Mahé de La Bourdonnais, gouverneur des Mascareignes, archipel comprenant la Réunion, l'île Maurice et Rodrigues. Il décide d'y établir la capitale de l'Isle de France (Maurice) et une structure administrative, des services publics, une église, le tout à l'abri de remparts. Il baptise sa capitale Port-Louis en hommage à Louis XV, roi régnant.
La capitale devient rapidement la cité majeure de l'océan Indien, mais une épidémie de malaria provoque alors l'émigration de ses élites et riches commerçants. La ville s'anime de nouveau après l'arrivée du chemin de fer Port-Louis/Mahébourg, dans la seconde moitié du XIXème siècle. Mais ce sont les activités portuaires de la Compagnie des Indes Orientales au XVIII° s. qui sont le moteur et non plus la vie fastueuse de la capitale.

Pourquoi le nom Caudan ?
Le nom du Caudan waterfront vient d'un personnage : celui de Jean Dominique Michel de Caudan, venu à l'ancienne Isle de France de son Languedoc natal. Saunier de métier, il créa une saline près d’une anse au sud-ouest de Port Louis, en 1726. Cet espace est connu actuellement comme le Jardin Robert Edward Hart, situé sur la route d'entrée au Caudan waterfront.
Lieu chargé d’histoire, l’actuelle péninsule appelée le Caudan fut créée autour d’un îlot corallien fossile, abritant au fil des 250 dernières années une poudrière, un observatoire météorologique et astronomique, des quais et chantiers maritimes, des entrepôts, des petites entreprises diverses et à présent un grand centre commercial, inauguré le 25 novembre 1996.
Il s'agit d'un ensemble architectural harmonieux. Quelques vieux murs en basalte ont été préservés. C'est notamment le cas de l'ancien bâtiment du bureau des docks, qui a été transformé en musée du timbre et du patrimoine. Les neuf hectares du Caudan waterfront comprennent six bâtiments : le Pavillon, regroupant des magasins, des cafés et le cinéma, l'Observatoire, englobant les espaces de restauration ; le Casino, à l'apparence originale d'un bateau pirate ; le Labourdonnais, hôtel de luxe et le Barkly wharf, bâtiment central, réunissant divers commerces (textiles, services, loisirs, marché artisanal). Il abrite aussi le comptoir d'information du Caudan.
Tous ces services sont pourvus d'importants parkings (environs 600 places). Navigateurs et plaisanciers peuvent accoster directement au Caudan, grâce à une marina. Les magasins du Caudan waterfront regroupent de grandes marques internationales du vêtement, de la chaussure et autres accessoires, mais aussi des produits et des collections originales de créateurs locaux. Le Craft market, propose l'artisanat local et régional en guise de souvenirs. Les braderies et expositions régulières ont acquis une forte popularité et contribuent à l'animation permanente qui règne au Caudan.
Le centre commercial vient d'ouvrir fin décembre 2007 une nouvelle aile de 55 magasins et une vingtaine de kiosques commerciaux, avec plus de 440 place de parkings. Des travaux visant à étendre encore cette zone d'activités sont en cours.

 


Shopping
Les bonnes affaires pour de bonnes marques

Le textile est peut-être en crise sur l'île Maurice, mais nous pouvons encore réaliser de bonnes affaires. Au centre de l'île, Floréal, Quatre bornes et Curepipe sont les trois villes qui bénéficient le plus de la présence des usines… et des magasins d'usines.

Armani, Dolce and Gabanna, Kenzo, Hugo Boss, Prada… Si vous voulez vous prendre pendant quelques instants pour une star faisant ses emplettes, sans (trop) vous ruiner, l'île Maurice s'y prête particulièrement. Floréal, Quatre bornes et Curepipe sont trois villes mitoyennes du centre de l'île, là où il pleut le plus. Tout autour, des usines textiles travaillent pour les grandes marques occidentales, du travail de qualité. Une partie, 5 à 10%, de la production est autorisée à la vente sur place.
Les usines ont installé à côté leurs magasins où les prix défient donc toutes catégories… par rapport à ceux pratiqués hors de l'île. En effet, il ne faut pas espérer obtenir un jean Armani pour 20 euros ou un polo D&G à 5 euros. Les prix correspondent à un shopping "normal" à la Réunion, mais là ce sont des marques prestigieuses que vous achetez avec la qualité qui va avec. Il existe peu de contrefaçons. Toutefois, il est de bon ton de se méfier. Vérifier que vos vêtements possèdent les étiquettes des composants. Ralph Lauren a connu quelques soucis sur l'île.
Pour obtenir des vêtements pas chers, il reste les marchés. Un ou deux jours par semaine, ils s'étendent dans les principales villes avec des centaines d'échoppes, comme le grand marché de Quatre bornes qui mêle textile et nourriture. Il y a aussi des galeries marchandes spécialisées dans les vêtements "hors taxe", sur les principaux axes, dans ces villes du centre de l'île. Il suffit de demander à votre chauffeur ou à l'hôtel.
Attention aussi aux vendeuses qui débordent de charme et de prévenance. Si vous rentrez dans un magasin vous sortirez obligatoirement avec quelque chose d'acheté, au pire il vous restera la possibilité de marchander. N'hésitez surtout pas ! La limite des magasins est très fluctuante : de moins 50% à moins 10%. Le passage par ces villes du centre mérite le détour. Les fringues présentées appartiennent à la saison la plus récente, ce sont les dernières productions, que l'on verra en vente dans les belles boutiques de Paris ou des capitales européennes et dans les pages de pub des magazines.
Le retour victorieux à Mayotte est assuré. Pour les hommes, même si vous ne connaissez pas Dolce & Gabanna, votre femme connaît et saura se montrer reconnaissante. Des personnes ont essayé avec des vêtements en cachemire, l'effet est le même. Reconnaissance absolue… au moins pour deux jours. Etant donné la proximité géographique et culturelle avec l'Inde, l'île Maurice possède aussi beaucoup de magasins qui proposent du pashmina* ou du cachemire**. Un textile particulièrement solide et soyeux : "Un pull en cachemire t'en achètes un, tu l'as pour dix ans", témoigne une mère de famille.
Dans le genre "achat qui dure", les diamants, qui sont éternels, du groupe Adamas dont l'usine de taille est à moins de deux kilomètres de Floréal, sont aussi une bonne occasion de cadeaux. Une petite exposition sur les diamants et une boutique Mont Blanc sont aussi à voir sur place. Bon, vu les prix, il faut être sûr de soi mais là encore de bonnes affaires sont à réaliser.

Gérôme Guitteau


* Pashmina, "la laine la plus légère et la plus chaude au monde", provenant des chèvres pashmina du Tibet.
** Cachemire, laine de poils très fins issus d'une race de chèvres de la région du Cachemire, entre le Pakistan, la Chine et l'Inde. Elle peut être produite ailleurs.

 


Casino
Pas royale, l'île Maurice

L'île Maurice est connue pour son lagon, ses hôtels, ses commerces et autres usines textiles et aussi ses casinos où se rencontrent des touristes riches à millions. Ce dernier côté de l'île franco-anglo-créole est loin d'atteindre sa réputation.

Les mains moites, le cœur qui palpite, la pupille qui se dilate, la fièvre du jeu prend petit à petit possession de quelques touristes dans l'avion. Les autres voyageurs regardent ces énergumènes surexcités avec joie, imaginant qu'ils sont comme eux impatients de goûter aux plages de sable blanc de l'île Maurice, de plonger dans les innombrables grottes du lagon des Mascareignes. Que nenni ! Plage, soleil, gorgones ne sont pas au programme de ces étranges passagers venus s'enfermer pendant quatre jours dans les casinos de l'île. Roulette, black jack, machines à sous… Voilà les mots qui font fantasmer nos touristes, rassérénés de vivre dans la seule île de l'océan Indien qui ne possède pas de casino : Mayotte.
Il existe six maisons de jeux à Maurice détenue chacune à 51% par l'Etat : à Curepipe, à Flic-en-Flac, le Grand casino du domaine à Pailles, le casino de Port-Louis sur le Caudan waterfront, à Poste de Flaq et à Trou aux Biches près de Grand baie. Franchement, il n'y en a qu'un qui vaille le déplacement : le Grand casino du domaine à Pailles.
Dans une ambiance de plantation coloniale : meubles rustiques, éclairages tamisés, accueil en calèche, luxe suranné, quatre très bons restaurants (italiens, chinois, créoles, indiens); vous êtes accueillis en prince. Les roulettes ne sont pas électroniques mais en bois, les croupières sont magnifiques. Tout pour passer une bonne soirée malgré une éventuelle déveine. La grosse déception de ce tourisme ludique concerne l'absence de tables de poker dans ce haut lieu du jeu. Alors que le monde entier est pris par ses différentes variantes, aucune n'a franchi la barrière de corail mauricienne, à part la version caraïbéenne surnommée ici "Oasis". Une telle variante ne mérite pas d'être évoquée plus longuement.
Didier Chabaud*, propriétaire des deux casinos Ti'Vegas basés à Grand baie et à Quatre bornes, beaucoup plus modestes que les six détenus par l'Etat, a senti le bon coup. Il vient d'ouvrir depuis juin, plus ou moins officiellement, les premières tables de cash en poker hold'em no limit. Avant cette ouverture, il a organisé un tournoi à 250 euros l'entrée afin de sensibiliser tout le monde aux règles de ce jeu.
La fine fleur de Maurice était présente. Une mixité joyeuse d'Indiens, de Chinois, de Corses et de touristes sud-africains a joué pendant plus de six heures pour 12.000 euros de gains attribués au gagnant. Le niveau de jeu n'est pas excellent, les gens jouent au poker comme aux autres jeux de casino. La technique, la lecture du jeu sont inexistantes. Une déception… qui se transforme en grande joie lors des parties de cash game**.Mais bon, l'île Maurice est loin d'être l'eldorado du joueur.
Les casinos réunionnais se sont mis au poker et offrent donc plus de diversité dans les jeux et dans les mises. Rappelons que la Réunion représente l'un des départements français où Porsche fait son plus gros chiffre d'affaires. De quoi faire rêver tous les joueurs amateurs, non ?

Gérôme Guitteau

* Rens : 00230 454 3220/8800
**Ce sont des parties où de l'argent est misé sur chaque donne.

 


Marchés mauriciens, "les soldes" au quotidien

Le magnifique jardin botanique de Pamplemousses, le centre-ville de Port-Louis et son front de mer, les hôtels luxueux de Flic-en-Flac et de Grand Baie ou encore les plages de sable blanc et ses couchers de soleil… L’île Maurice comporte de nombreux sites reconnus, à visiter. Mais s’il y a bien une chose à côté de laquelle il ne faut absolument pas passer, ce sont ses marchés. Mouvementés du matin au soir, il y fait bon à découvrir de nouveaux fruits et légumes et à y faire – certainement – les meilleures affaires de la région.

Lorsque l'on s'infiltre dans un marché mauricien, il est difficile d'en ressortir les mains vides tant les affaires sont intéressantes. Le prix et la qualité répondent à l'appel de – pratiquement – tous les produits alimentaires et vestimentaires. Un tour dans un marché nous apprend également le sens des affaires des commerçants des lieux. Ils se connaissent, s'entraident, s'arrangent entre eux, et font en sorte que le client de passage obtienne finalement ce qu'il désire. Quand un marchand ne détient pas la bonne taille ou la bonne couleur, il vous invite à patienter quelques instants, à vérifier si d'autres articles seraient susceptibles de vous intéresser et abandonne son espace… L'air de rien, son voisin le surveillera pour lui.
Quelques minutes, parfois quelques secondes plus tard, le temps de se faufiler à grands pas dans la foule quotidienne et le voilà de retour avec le bon article. C'est seulement après vous avoir emballé l'article en question dans un sachet souvent bleu ou jaune qu'il propose son prix, car pour lui, c'est déjà dans la poche, et ceci avant même que vous l'ayez salué. Pour les clients les plus "difficiles", les commerçants acceptent de négocier le prix. S'ensuivent de longues minutes d'échanges, de discussions, de négociations. En jugeant sur l'apparence du client et constatant qu'il n'est pas du coin, de la ville, voire du pays, et considérant donc qu'il est ici pour consommer, les marchands les plus malicieux jouent la carte du pouvoir d'achat, et un peu celle de l'émotion.

 

Le pouvoir d'achat des Mauriciens, la raison principale des bas prix

Toujours très poli, courtois, avenant, mais surtout intelligent pour la plupart, ils s'arrangent pour que vous ressortiez de ces quelques mètres carrés avec ce fameux sachet : "Allez, vous savez que c'est un bon prix. Là d'où vous venez, vous paieriez trois ou quatre fois plus cher, n'est-ce pas ? Quel que soit le coût, vous savez que vous faites une bonne affaire. Nous, nous n'avons pratiquement aucun bénéfice sur ce que l'on vend !", peuvent-ils déclarer en gardant le sourire.
Au final, les commerçants finissent généralement par céder à la somme imposée par le client, même si celui-ci demeure beaucoup moins cher que le prix initial. Les produits doivent partir, il leur faut vendre pour vivre. Et c'est ainsi tout au long de la virée au cœur des marchés. La différence des prix entre Maurice et Mayotte est vaste. La cause vient directement du salaire de base des Mauriciens qui tourne dans les 7000 roupies (120 euros). Sachant que le Smic à Mayotte vient d'augmenter depuis peu, le salaire de base mahorais lui est d'environ 900 euros, soit sept fois plus élevé.
Les commerçants de Maurice ne peuvent donc se permettre d'accroître le prix de vente de leurs marchandises, étant donné que leur clientèle reste très largement la population locale. Les marchés de Maurice, c'est avant tout une promenade à ne pas manquer tant les couleurs et les odeurs se mélangent, tant l'ambiance est bonne à vivre et tant les choses à découvrir sont nombreuses : produits locaux, textiles, mais aussi nombreux articles d'Inde, de Chine, fruits et légumes frais d'Afrique du Sud… C'est aussi, incessamment et incontestablement, les coins des bonnes affaires.

Ichirac Mahafidhou
 

Jardin de Pamplemousses
Au bonheur des botanistes

Si Maurice est connue partout dans le monde pour ses hôtels luxueux et ses magnifiques plages de sable blanc, un autre genre d'attraction contribue à la renommée de l'île et attire tous les jours touristes et résidents : le jardin botanique de Pamplemousses situé à une quinzaine de km au nord de Port-Louis. Un des plus riches jardins botaniques du monde par la quantité, la variété et l'âge de ses arbres.

Véritable havre de paix, contrastant entre l'agitation des marchés de Port-Louis ou de Quatre Bornes et des plages bondées de Flic en Flac, le jardin botanique de Pamplemousses est le lieu idéal pour vous ressourcer dans le calme à Maurice. Les Mauriciens y viennent en masse pour marcher tranquillement sous plus de 80 espèces de palmiers ou d'un nombre incalculable d'arbres tropicaux.
Les grandes personnalités tels que l'ex-président sud-africain Nelson Mandela ou la reine Elizabeth II ont planté le leur. Les origines du jardin remontent à 1736, lorsque l'un des premiers gouverneurs français Mahé de la Bourdonnais y installa son domaine et le nomma "Mon Plaisir". Mais c'est à l'intendant Pierre Poivre en 1767 que l'on doit l'introduction de nombreuses espèces végétales venant des quatre coins du monde. L'attraction la plus courue est le bassin des nénuphars. Des oiseaux s'y posent comme sur un plateau alors que les fleurs rose fushia renvoient des reflets rivalisant avec ceux du soleil. Mais on peut aussi flâner autour du grand bassin avec ses kiosques, du bassin aux lotus Il y a aussi les talipots, ces palmiers qui ne fleurissent qu'une fois tous les 35 à 70 ans… et meurent. Le coin des épices est aussi remarquable avec le giroflier et le muscadier, amenés là par Pierre Poivre en 1770 des Molluques, puis le cannelier de Ceylan et le 4 épices des Caraïbes.
Le jardin botanique comporte également un parc à cerfs et un parc à tortues qui raviront les enfants. Aujourd'hui, le jardin botanique porte le nom de Sir Seewoosagur Ramgoolam, le père de la nation mauricienne. Un monument funéraire a été édifié en son honneur au sein du parc où il a été incinéré.

Faïd Souhaïli
 

 


Histoire
Les historiens pensent que les premiers visiteurs de l'île Maurice furent les navigateurs phéniciens qui l’auraient abordée lors de la première circumnavigation autour du continent africain, commandité par le pharaon d’Égypte Néchao II, vers l’an 600. Les marins arabes visitèrent Maurice régulièrement à partir du Ve siècle et lui donnèrent le nom de Dina Arobi. Ce n'est qu'au début du XVIe siècle que des navigateurs portugais commencèrent à circuler dans la région.
Des Portugais s'y installèrent pour la première fois en 1505. Elle figure malgré tout sur des cartes arabes datant d'avant la découverte par les Portugais, sous le nom de Cirné. L'île est occupée puis colonisée par les Hollandais à partir de 1598. Elle est baptisée Maurice en l'honneur du prince hollandais Maurice de Nassau. Les Hollandais sont les premiers à introduire des esclaves sur l'île, les esclaves les plus nombreux sont amenés d'Afrique et de Madagascar. Leurs descendants, plus ou moins métissés, constituent la population dite créole. Il existait aussi dès cette époque des Indiens esclaves, présents dans l'île aux côtés des premiers Européens, et des Indiens libres de niveau social non négligeable. Les Hollandais apporteront aussi les cerfs de Java, qui sont aujourd'hui chassés.
En 1715, Maurice passe sous le contrôle de la France, quand Dufresne d'Arsel la revendique, et est renommée Île de France. L'île est prise par les Britanniques en décembre 1810 après une défense du gouverneur général Isidore Charles Decaen. En août de la même année eut lieu l'unique victoire navale de Napoleon : la bataille du Grand Port. L'île est officiellement rattachée à l'empire britannique en 1814, date à laquelle elle retrouve son ancien nom.
L'indépendance a été obtenue le 12 mars 1968 par le scrutin du 7 août 1967. Le pays est resté depuis membre du Commonwealth des nations, bien qu'il devînt une république le 12 mars 1992. Grâce à une démocratie relativement stable ponctuée d'élections libres et régulières et à un bilan positif au niveau des Droits de l'Homme, le pays a su attirer des investisseurs étrangers importants et dispose d'un des revenus par tête les plus importants d'Afrique.

Politique
L'île Maurice a un système juridique de droit mixte. S'y appliquent le droit d'origine française et notamment le code civil, et la common law anglaise. La procédure judiciaire correspond aux règles de procédure anglaise en grande partie, avec toutefois une certaine variante. La hiérarchie des tribunaux est ainsi du sommet au plus bas : le comité judiciaire du Conseil privé de la Reine, puis la cour suprême de Maurice (comprenant une juridiction de première instance et d'appel) et les tribunaux de magistrats.
Le système politique et institutionnel correspond à un régime parlementaire.
Le chef de l'État de Maurice est le Premier ministre. Le Président n'a pas de pouvoir décisionnel, mais symbolise à l'étranger la République de Maurice. Il est élu pour une période de cinq ans par l'Assemblée nationale. Le Parlement est constitué d'une unique chambre. Des 70 membres de l'assemblée, 62 sont élus directement par un scrutin populaire (3 pour chacune des 20 circonscriptions et 2 représentants de Rodrigues), tandis que 8 sont désignés pour représenter les minorités ethniques. Leur choix dépend des résultats des élections. Le Parlement est dirigé par le Premier ministre, chef de la majorité parlementaire et un conseil des ministres. Le régime fonctionne d'après le modèle britannique appelé "westministérien".
Le pays compte 225 prisonniers pour 100.000 habitants, soit un taux élevé au regard des autres taux constatés dans le monde.

Géographie
La formation de cet archipel résulte d'éruptions volcaniques sous-marines qui se sont produites il y a des millions d'années. L'île Maurice elle-même s'est formée autour d'un plateau central, dont le point le plus élevé, le Piton de la petite rivière noire, culmine à 828 mètres dans le sud-ouest. Autour de ce plateau, on distingue assez facilement le cratère Kanaka des nombreuses montagnes qui l'entourent.
Le climat, de type tropical, est tempéré par les alizés du sud-est. Il y a deux saisons : la saison sèche de mai à novembre – appelée également hivernage, et la saison humide de novembre à mai – appelée saison cyclonique.
Située dans le nord-ouest, Port-Louis est la capitale de l'île et la plus grande ville. Les autres villes importantes sont Curepipe (au centre), Vacoas-Phœnix, Quatre Bornes, Rose-Hill et Beau-Bassin. Mahébourg (au sud-est) n'est pas une grande ville, néanmoins c'est la plus proche de l'aéroport international de Plaisance-Sir Seewoosagur Ramgoolam.

Les districts de Maurice
L'île Maurice comprend 10 districts :
1. Rivière Noire
2. Flacq
3. Grand Port
4. Moka
5. Pamplemousses
6. Plaines Wilhems
7. Port-Louis
8. Rivière du Rempart
9. Savanne
10. Rodrigues

Rodrigues, les îles Agaléga et les écueils des Cargados Carajos (également appelés Saint-Brandon) constituent les dépendances de Maurice. L'archipel des Chagos (Diego Garcia) et l'île Tromelin sont revendiqués par Maurice.

Économie
Depuis son indépendance acquise en 1968, Maurice a connu une évolution économique fulgurante. L'île est passée d'un statut de pays à bas revenus, dont l'économie reposait sur l'agriculture (la canne à sucre), à un statut de pays dit émergent, aux revenus intermédiaires dont l'économie diversifiée repose sur des secteurs industriels et financiers en pleine croissance et sur le tourisme. Durant cette période, la croissance annuelle a été de l'ordre de 5% à 6%. Ce résultat remarquable se traduit par une amélioration de l'espérance de vie, une baisse de la mortalité infantile et un grand développement des infrastructures.
La canne à sucre est plantée sur 90% environ de la surface cultivée, et constitue 25% des revenus du commerce extérieur. Une sècheresse historique a cependant endommagé durement la récolte sucrière de 1999. La stratégie de développement du gouvernement est axée sur les investissements étrangers. Maurice a attiré plus de 9000 sociétés offshore, dont beaucoup se consacrent au commerce en Inde et en Afrique du Sud. Maurice est aussi un pavillon de complaisance. Le secteur bancaire a réalisé plus d'un milliard de dollars d'investissements. Les performances économiques dans la période 1991-99 sont restées fortes, avec un taux de chômage limité.
Cependant, l'économie mauricienne risque de recourir à une forte restructuration dans les années à venir. En effet, les réformes de l'Union européenne concernant le marché sucrier vont lourdement affecter l'exportation du pays. Ainsi, d'autres secteurs restent à développer pour constituer de nouveaux piliers de l'économie, les services informatiques avec notamment les centres d'appels.
L'île compte par ailleurs énormément sur l'industrie touristique pour générer davantage de richesses et créer des emplois. En 2006, l'île Maurice a accueilli 788.000 touristes, dont la majorité vient de France. Il existe actuellement 99 hôtels en opération dans le pays, dont 42 avec plus de 80 chambres. Pour attirer davantage de touristes, le pays a commencé à libéraliser l'accès aérien et des lignes comme Corsairfly peuvent maintenant desservir la destination. Prochainement, ce sera au tour de Virgin Atlantic.
La construction de villas de luxe vendues sous le Integrated Resort Scheme (IRS) est appelée à devenir un nouveau pôle de croissance économique. Grâce à ce nouveau type d'aménagement combiné à l'ouverture du pays aux étrangers, Maurice amorce une nouvelle ère de développement, qui porte déjà ses fruits en terme d'investissements étrangers directs et d'emplois créés et qui est appelé à changer la face du pays, à plus long terme.
L'IRS a bien vite suscité l’intérêt de dizaines de promoteurs locaux et étrangers ; pour preuve les autorités ont reçu plus d’une vingtaine de projets de ce type représentant des investissements de Rs 100 milliards et avec un potentiel de création de 12.000 emplois. Au total, rien qu’avec ces projets, plus de 1.700 villas de luxe devraient voir le jour dans les deux à cinq prochaines années.

Cybercité
Le développement de la Cybercité voulue par le gouvernement de Paul Bérenger, située à Ébene au sud de la capitale, doit permettre le développement du secteur des technologies de l'information. Le but final étant de faire de cette dernière une "Cyber île" et donc de trouver une alternative à l’activité sucrière menacée par les accords internationaux. Les activités possibles grâce au décalage horaire de GMT +4 ont ainsi permis l'émergence de centres d'appels et de sites de Disaster recovery.
Le câble sous-marin Safe devait offrir au projet son assise technique mais des dysfonctionnements au sein du BPML en charge de la Cybercité, suivis du manque d’un doublon tel que Maurisat (solution mutualisée satellite) sur le site et en général sur l’île Maurice pouvant sécuriser les connexions vers l’international ont réduit l’engouement de certaines sociétés intéressées par une délocalisation d’une partie de leurs activités à Maurice, d'autant qu'il y a eu de nombreuses pannes en 2006 imputées à Mauritius Telecom ou à ses fournisseurs.
Depuis 2006, avec la signature d’un accord pour le déploiement du câble sous-marin Eassy, Maurice est en passe de rattraper cette lacune mais repousse au minimum à 2008-2010 l’échéance sécuritaire du projet.

Démographie
La population de l'île Maurice est le résultat de plusieurs vagues d'immigration, d'abord les colons français, ensuite les esclaves venus d'Afrique, les Chinois comme commerçants et finalement les Indiens amenés de gré ou de force dans l'île pour travailler dans les champs de canne à sucre.
La constitution de Maurice ne mentionne aucune langue officielle pour le pays. Néanmoins l'anglais est utilisé par l'administration. Par contre, le français est le plus utilisé dans le monde des affaires. Teinté d'apports des deux langues européennes, le créole est la langue maternelle de plus de 90% de la population. Diverses langues orientales sont également parlées, parmi lesquelles le créole mauricien, le bhojpuri (mélange de créole et d'hindi), l'hindi, l'ourdou, le tamil et le hakka, un dialecte chinois.
Ces dernières langues sont parlées par les descendants des immigrants venus d'Inde et de Chine. La plupart des Indo-Mauriciens sont des hindous et constituent 70% de la population. Les autres religions pratiquées sont le christianisme, l'Islam et le bouddhisme. Le reste de la population est d'origine chinoise, africaine, française ou métisse.
Le français est en progression, mais le créole adopte de plus en plus de mots anglais.

Culture
La cuisine mauricienne est un mélange de cuisines indienne, créole, chinoise et européenne. De même, le séga mauricien est une musique aux influences diverses.
En 1847, Maurice devint le cinquième pays dans le monde à émettre des timbres postaux, après la Grande-Bretagne en 1840, la Suisse et le Brésil en 1843, les États-Unis en 1846. L’île Maurice aura été le troisième territoire au monde à émettre des timbres et le premier autorisé à le faire par l’empire britannique dont elle était une colonie en 1847. Les deux types de timbres, la série des Post office (le Red penny et le Blue penny), sont parmi les plus célèbres et les plus chers timbres du monde.
Au moment de sa découverte, l'île Maurice abritait une espèce d'oiseau dodu qui ne volait pas et était auparavant inconnu. Les Portugais l'appelèrent le dodo ("simplet"), en raison de son apparence nonchalante. Cependant, en 1680, pendant la période hollandaise, cette espèce avait complètement disparu. Dans les livres d'histoire la disparition du dodo a longtemps été attribuée aux abus des colons hollandais qui les attrapaient facilement et les mangeaient. Mais les études récentes démontrent plutôt que c'était dû aux prédateurs qui dévoraient leurs œufs. Le dodo est devenu l'emblème de Maurice.
Le 9 septembre, un pèlerinage rassemble chaque année entre 100.000 et 200.000 Mauriciens, pas seulement de foi catholique, au tombeau du bienheureux Jacques-Désiré Laval (1803-1864), à Sainte-Croix, dans la proche banlieue de Port-Louis.
Il existe une fameuse déclaration de Mark Twain, souvent citée pour décrire la beauté incomparable de l'île : "Dieu créa d'abord l'île Maurice, puis s'en inspira pour faire son paradis terrestre".

Principaux artistes et auteurs mauriciens
* Gaëtan de Rosnay
* Linley Marthe
* J.M.G Le Clezio
* Malcolm de Chazal
* Khal Torabully
* Loys Masson
* Edouard J. Maunick

UNE Mayotte Hebdo N°389 – Vendredi 11 juillet 2008

UNE Mayotte Hebdo N°389 - Vendredi 11 juillet  2008

Lamu – Tanzanie – Ouganda – Kenya – Maurice – Handréma …

Voyager

 > Internet haut débit – les câbles eassy et lions d'ici 2000
 > Loisirs – vol au dessus du lagon
 > Portraits – la mangrove, les padzas et l'ylang

UNE Mayotte Hebdo N°388 – Vendredi 04 juillet 2008

UNE Mayotte Hebdo N°388 - Vendredi 04 juillet  2008

Résultats du Baccalauréat

Star'Bac 2008

 > Session au Conseil Général – le président resserre les boulons
 > Athlétisme – hafidou au championnat du monde en pologne
 > 25e course de pneus ce samedi

UNE Mayotte Hebdo N°387 – Vendredi 27 juin 2008

UNE Mayotte Hebdo N°387 - Vendredi 27 juin 2008

Les 100 jours de Jégo – Entretien avec le secrétaire d'état: La consultation en avril 2009 – Pas de loi de programme pour Mayotte – La piste longue en 2012-2015

Mayotte aux fraises

 > Interview du député – "pour un département pur et dur"
 > Projet académique 2008-2011 – améliorer le niveau en français
 > Surfing day – tous les plaisirs de la glisse

27/06/2008 – Projet académique 2008-2011 – 1er objectif : améliorer le niveau en français

Il est sommairement baptisé "Le projet". Le document sur lequel repose les orientations pédagogiques du vice-rectorat pour les trois prochaines années est en passe d'être terminé après une année scolaire de réflexion et de travaux. Au mois de novembre dernier, un séminaire regroupant les cadres de l'académie à l'IFM avait amorcé les réflexions sur les quatre thèmes, quatre objectifs préalablement définis, appelés "ambitions".
"Faire progresser les résultats des élèves : au cœur des apprentissages, la maîtrise de la langue," est l'ambition la plus importante qui fait reposer toute la base de l'enseignement sur la maîtrise de la langue. C'est l'enjeu principal de l'éducation dans l'île. "Préparer les élèves à leur future citoyenneté," le 2ème thème, regroupe aussi bien les actions envers les parents d'élèves que les opérations d'éducation à la santé ou à l'environnement. "Rendre plus efficientes l’orientation et l’insertion des élèves dans un contexte insulaire", ou comment élever le niveau des élèves post-bac et leur assurer une insertion réussie dans le monde du travail. Et enfin "Développer les systèmes d'appui et de pilotage académiques," la partie qui concerne le projet d'une meilleure organisation générale.
Lors du séminaire de départ, un groupe par ambition s'est chargé de définir trois à quatre programmes d'action, ou mesures pour réaliser ces ambitions. Ces programmes ont été transmis à tous les établissements scolaires et écoles dans lesquels tous les personnels étaient appelés à élaborer des fiches actions, soit la traduction des programmes en actions concrètes de terrain, avec description de l'objectif, acteurs, publics visés, moyens nécessaires, source de financement, etc.
 
 

Des formations spécifiques pour l'enseignement du français

Au final, ce ne sont pas moins de 205 fiches qui sont remontées au vice-rectorat, qui se charge actuellement de les synthétiser pour n'en garder qu'une quarantaine. Ce n'est pas une surprise, 52% des fiches proposées correspondent à la 1ère ambition : la maîtrise de la langue. 26% concernent l'ambition 2, la citoyenneté. "J'ai choisi d'organiser cet évènement à l'école de Koungou Baobab pour montrer l'importance du terrain," explique M. Cirioni qui a tenu conférence de presse… au milieu d'une classe de CP en plein cours.
"La contribution de tous les acteurs de l'éducation permet de mettre en place un programme le plus efficace possible." Au-delà du monde enseignant, les responsables de la politique de la ville, les associations de parents d'élèves et tous les autres acteurs liés à l'éducation ont été conviés dans les groupes de réflexion.
Dans ce domaine très important de la maîtrise de la langue, l'équipe du vice-recteur a annoncé des formations spécifiques qui s'adresseront aussi bien aux enseignants venant à Mayotte qu'aux locaux. Elles porteront sur les techniques d'enseignement du français, qui s'inspirera du FLE (français langue étrangère) pour tenir compte du fait qu'il n'est pas la langue maternelle des élèves. "Elles concerneront tous les enseignants et pas seulement ceux de français et de lettres", précise le vice-recteur.
L'IFM prévoit également de former les futurs instituteurs à utiliser tous les supports et toutes les disciplines pour faire travailler le français, pour sortir des outils traditionnels, également de travailler avec les maîtres déjà en place pour renforcer leur niveau de français et d'enseignement du français.

 

Suivre les étudiants en Métropole

Dans le domaine de la réussite et de l'insertion des étudiants, le vice-rectorat travaille énormément sur l'orientation, pour envoyer les plus à même de réussir en Métropole. Des conventions existent déjà avec les académies de Nantes et Toulouse pour l'accueil et le suivi des étudiants mahorais, des conventions similaires doivent être signées avec Clermont-Ferrand, Rennes et Bordeaux.
Un travail est en cours pour la prise en charge des élèves qui échouent au bac professionnel. "Il est impossible de prendre ces élèves en redoublement car nous manquons cruellement de terrains de stages à Mayotte, nous sommes arrivés à saturation, explique M. Cirioni. Mais comme ils gardent leurs notes pendant 5 ans et n'ont que les domaines dans lesquels ils ont échoué à repasser, nous envisageons des formations pour qu'ils réussissent à terme."
De nombreuses autres propositions dans tous les domaines sont actuellement à l'étude, les fiches action seront efficientes dès la rentrée et guideront l'action de l'éducation nationale à Mayotte pour les trois prochaines années.

Hélène Ferkatadji

UNE Mayotte Hebdo N°387 – Vendredi 27 juin 2008

UNE Mayotte Hebdo N°387 - Vendredi 27 juin 2008

Les 100 jours de Jégo – Entretien avec le secrétaire d'état: La consultation en avril 2009 – Pas de loi de programme pour Mayotte – La piste longue en 2012-2015

Mayotte aux fraises

 > Interview du député – "pour un département pur et dur"
 > Projet académique 2008-2011 – améliorer le niveau en français
 > Surfing day – tous les plaisirs de la glisse

27/06/2008 – A propos de Mayotte – « L’Etat sera neutre dans la campagne électorale »

Pour notre île, le secrétaire d’Etat a rappelé que "le territoire a développé une demande de départementalisation" qui se ponctuera par le référendum d’avril 2009. "Nous avons nommé un ‘Monsieur Mayotte’ qui porte aujourd’hui la feuille de route de cette départementalisation parce que j’ai souhaité que nous ayons un discours clair vis-à-vis des Mahorais et que la départementalisation soit connue d’eux dans ses aspects positifs, mais aussi dans ses obligations nouvelles. C’est une révolution dans la vie politique de Mayotte que d’aller vers la départementalisation, que de créer un état civil, que de créer un droit du sol, que de mettre fin à un certain nombre de pratiques coutumières pour pouvoir prospérer dans le cadre de la départementalisation".
Il a aussi ajouté que "l’Etat sera neutre dans la campagne électorale, mais dira de façon claire les avantages et les obligations nouvelles qui vont peser sur le territoire pour que les Mahorais puissent choisir en toute connaissance de cause et que le calendrier d’application de cette départementalisation soit à la fois progressif et adapté et qu'il réponde aux besoins locaux. Mayotte est aussi frappée, a-t-il soutenu, par un phénomène migratoire lourd".
Yves Jégo n’a pas manqué d’évoquer sa récente visite aux Comores qu’il qualifie lui-même d’"assez originale", avec Alain Joyandet, le secrétaire d’Etat à la Coopération. Une mission ayant permis d’installer le Groupe de travail de haut niveau qui s’est réuni début juin à Paris et qui "travaille sur un accord formel entre la France et l’Union des Comores pour que ces questions de coopération, ces questions de migration soient traitées d’une façon un peu différente".
 
 

"On devrait avoir à l’échelle 2012-2015 une piste d’aviation et un aéroport qui permettent ces liaisons directes"

Interrogé par nos soins sur la venue d’Air France dans la région avec un plan de desserte des îles de la zone sauf Mayotte, le secrétaire d’Etat à l’Outremer a souligné que "nous sommes dans une économie libre" et que "la compagnie Air France est soumise aux règles de la concurrence mondiale. (…) Mais il y a pour Mayotte un préalable, sur lequel j’ai apporté lors de mon dernier déplacement des réponses en signant le Contrat de projets de Mayotte, qui est l’extension de la piste qui aujourd’hui ne permet pas dans les conditions actuelles les liaisons Europe-Mayotte.

Ces travaux devraient débuter d’ici 2010 et donc on devrait avoir à l’échelle 2012-2015 une piste d’aviation et un aéroport qui permettent ces liaisons directes. Si dans le même temps les Mahorais se sont emparés de l’atout touristique pour en faire un atout fort – et je crois que c’est un des axes de son développement – on peut parier qu’il y aura des dessertes réelles directes, mais il y a un combat que nous menons là, qui est celui à la fois du prix des billets d’avion et le prix des billets d’avion est lié aux dessertes et au nombre de dessertes. Nous sommes persuadés que le seul moyen de faire baisser durablement les prix c’est de favoriser la concurrence.

Nous avons déjà pris un certain nombre de dispositions de suppression d’obligation de service public, de mobilisation de compagnies pour qu’on puisse faire de ce projet une réalité pour les habitants. Et ceci est un combat européen. Mayotte sera desservie quand la piste sera capable d’accueillir des avions qui viennent directement de la Métropole; ça c’est une réalité physique qu’on ne peut pas surmonter", a précisé Yves Jogo.

 

"Collectivité ou département ?", telle sera la question

Enfin, concernant la loi programme qui visiblement ne contiendra pas grand-chose pour Mayotte, le secrétaire d’Etat a une nouvelle fois rappelé qu’une loi spécifique à Mayotte sera adoptée, mais "attendons que les Mahorais se soient déjà prononcés. Si Mayotte devient un département, bien évidement la loi sera fondée sur les attributs d’un département. Si Mayotte choisit de rester Collectivité d’Outremer, il n’y pas d’autre choix. Qu’il n’y ait pas de confusion car le choix qui sera offert aux Mahorais est clair : ou on reste une Collectivité d’Outremer dans le cadre de la République française ou on devient un département français. Et évidemment selon le choix, la ‘Loi Mayotte’ viendra décliner un certain nombre de mesures qui seront différentes et ce sera certainement après le référendum et pas avant".

Et si certains ont toujours des doutes concernant des sujets clefs liés notamment au développement de l’île, ce jour de présentation du bilan des 100 jours d’Yves Jégo aura au moins permis de lever un autre doute, car nous avons ainsi la certitude que pour la première fois de leur histoire, les Mahorais seront appelés à se prononcer sur le statut de département d’Outremer. Nous aurons le choix entre ce nouveau statut et l’actuel. Certains s’y voient déjà mais encore faut-il que les Mahorais l’approuvent.

R.T Charaffoudine Mohamed

23/06/2008 – 2.093 candidats au baccalauréat

A Mayotte, ils sont cette année 2.093* candidats toutes séries confondues à se présenter, soit 15% de plus que l'année dernière, un chiffre qui va aller augmentant pendant encore longtemps. Cette année le cadet des candidats est âgé de 16 ans, le plus ancien de 33 ans.
"Les démocraties populaires et leur évolution (1948-1989)" pour l'histoire, "L'organisation du territoire des Etats-Unis" en géographie, l'anglais, les mathématiques… Les épreuves se poursuivent jusqu'au mardi 24 juin pour les 673 candidats au bac général et les 957 candidats des séries technologiques, jusqu'au vendredi 27 pour les 463 candidats aux séries professionnelles. Pour les deux premières catégories, les épreuves se déroulent aux lycées de Mamoudzou, Sada, Petite Terre, Kahani, Kawéni et à la Cité du Nord. Les candidats au bac pro se présentent dans leurs propres établissements.
105 enseignants pour les bacs généraux et 154 pour les technologiques sont mobilisés pour les corrections des épreuves, centralisées à Mamoudzou et Petite Terre, ce qui permettra, comme l'an dernier, de donner les résultats quelques jours avant la Métropole. Ils devraient être rendus publics samedi 28 juin après les délibérations.
 

Faire mieux que l'an dernier

L'an dernier, le taux de réussite de 52,7% était assez décevant car plus bas que les résultats de la cuvée 2006. Une baisse que le vice-recteur imputait en grande partie aux mauvais résultats du nouveau bac technologique STG, 39,6% d'admis contre 57% en 2006 pour son ancêtre le bac STT. Espérons que cette année enseignants et élèves seront mieux armés pour les épreuves de cette section. Le bac général était le seul en hausse avec un taux de réussite de 68,1% contre 63% l'année précédente. Le bac pro baissait de près de 4 points, à cause surtout du résultat très faible de la section vente : 21,4%.

A côté de nos deux mille candidats, 11.196 élèves de première se présentent aux épreuves anticipées de français et de biologie (pour les ES et L) et 3.651 au épreuves du brevet des collèges, qui aura lieu du 24 au 27 juin.

Hélène Ferkatadji

*Chiffre des inscrits et non des présents à l'examen

Examen jusqu'au soir

La plupart des lycéens passant le bac sont confiants pour les résultats finaux, ceux-ci paraîtront le 28 juin. Uniquement le matin, seulement l'après-midi et parfois lors des deux demi-journées, ils passent épreuve par épreuve, les matières qu'ils préparent depuis un an et plus.
"L'anglais, pour l'étudiant de Hajangua Saïd Rakibou, a été la matière la plus difficile pour le moment. Plusieurs de mes collègues disent la même chose." Son ami Absoirou Hardani, est sûr que "les révisions répétées au CDI vont payer. Pour l'instant tout se passe bien pour moi, je n'ai pas vraiment eu de surprises dans les épreuves que nous avons passées. Il y avait tout ce que j'ai révisé". Ces deux élèves de dix-huit ans, tout comme beaucoup d'autres étudiants, attendront impatiemment de voir les résultats.
"Nous savons à peu près ce que nous voulons faire par la suite, mais notre avenir dépendra entièrement de l'issue de notre examen". Jusqu'à la tombée de la nuit quelques fois, les étudiants profitent de tout le temps qui leur a été attribué pour répondre au mieux aux épreuves. Les transports scolaires arrivent à 19h et ramènent les élèves, il en sera ainsi jusqu'à la fin des épreuves.

Ichirac Mahafidhou

Le bac en 2007

1.820 candidats dont
618 en filière générale
882 en filière technologique
320 en filière professionnelle
52,7% de réussite

23/06/2008 – Les agents publics mobilisés pour être intégrés

Mardi matin dans l'hémicycle du conseil général, ce n'était pas les élus locaux mais les représentants syndicaux qui étaient à la tribune. Devant quelques 200 grévistes, les représentants du SE CGT Mayotte, du Sima Snudi FO, de la Cisma CFDT conseil général et de la CGTMa conseil général ont uni leurs voix pour demander aux pouvoirs publics une intégration plus rapide des agents de la fonction publique territoriale de Mayotte à la fonction publique de droit commun. Au cours de cette assemblée générale, il a également été question de la titularisation de tous les contractuels, de l'indexation des salaires à 2,15 et de la retraite des agents publics.
La loi-programme pour l'Outremer du 21 juillet 2003 a étendu à Mayotte les trois fonctions publiques de droit commun – hospitalière, territoriale et d'Etat – et précise qu'à l'horizon du 31 décembre 2010, l'ensemble des agents publics en activité seront intégrés ou titularisés dans l'une ou l'autre de ces trois fonctions publiques. Or, pour l'instant, les intégrations et les titularisations dans la fonction publique représentent moins de 10% des effectifs concernés, et l'intersyndicale estime que le 31 décembre 2010, il n'y aura pas plus de 30% des personnels qui seront intégrés ou titularisés.
"A ce jour, le conseil général ne dispose pas de plan d'intégration de ses agents, pas plus qu'il n'a engagé d'actions concrètes pour accompagner ceux-ci auprès du gouvernement", peut-on lire dans l'exposé des motifs des propositions de modification de la loi-programme signé par l'intersyndicale. "Bien que tout le monde reconnaisse la cherté de la vie à Mayotte, les conditions de travail et le pouvoir d'achat des personnels sont loin d'être les soucis premiers des pouvoirs publics, aussi bien nationaux que locaux".
 
 

4.000 agents au CG, seuls 5% sont intégrés…

Le principal problème demeure le fait que les agents recrutés après la loi Girardin du 21 juillet 2003 ne sont pas couverts par le texte. "Ces contractuels sont exclus du processus d'intégration car ils ne peuvent pas passer le concours professionnel interne, contrairement à leurs collègues d'avant 2003. Ils ne peuvent pas non plus passer le concours externe car ils doivent avoir un niveau supérieur au bac, ce qui n'est pas le cas pour la plupart d'entre eux", explique Kamiloudine Djanffar, secrétaire général adjoint de la CGTMa conseil général.
Sur les 4.000 agents qui relèvent du conseil général, 3.000 peuvent prétendre à l'intégration mais ils ne sont pour l'instant que 5% à être dans ce cas, ce qui pose un autre problème concernant les prochaines élections internes au CG. En effet, le 6 novembre 2008, toutes les collectivités territoriales élisent leurs représentants à la Commission administrative paritaire qui gère les carrières des agents, et au Comité technique paritaire qui organise le fonctionnement de l'administration.
"Il n'y aurait que 5% des agents qui pourraient voter. On refuse l'accès à la fonction publique de ces fonctionnaires", précise Issa Mohamed El Anrif, le secrétaire général de la Cisma CFDT conseil général. "Ce sont des "sous-fonctionnaires" car par rapport aux critères, leurs salaires autour de 1.000 euros les empêchent d'être intégrés".
L'intersyndicale réclame la prise en compte de la rémunération globale, et pas seulement de la rémunération brute, pour calculer l'indice qui permet d'entrer dans les cadres d'emploi et les grades. Dans l'exposé des motifs aux propositions de modification de la loi Girardin, on peut lire que "les conditions d'intégration et de titularisation (niveau minimum de rémunération, concours réservés, prise en compte partielle de l'ancienneté) imposées par les décrets d'application de la loi excluent du dispositif la grande majorité des agents de la Collectivité départementale et des communes et démotivent nombre de contractuels qui, une fois titularisés, voient leurs carrières gelées pour une moyenne de 10 ans".

 

Des retraites à 250 ou 300 euros

L'intersyndicale réclame également l'indexation des salaires à l'inflation, ce qui est le cas dans les collectivités territoriales d'Outremer… sauf Mayotte. "Les expatriés métropolitains bénéficiaient de cette indexation jusqu'en 2004 car le préfet avait le pouvoir exécutif. Elle demeure encore aujourd'hui, à hauteur de 24% de l'indice terminal du grade des administrateurs. Et les indemnités d'éloignement ou de déménagement sont aussi une indexation déguisée. Nous souhaitons que l'indexation des salaires à 2,15 soit généralisée à tous les agents publics de Mayotte", a déclaré M. El Anrif.

Enfin, les revendications de l'intersyndicale ont rejoint celles du mouvement de grève nationale concernant la retraite des fonctionnaires. Pour avoir une retraite à taux plein, il faut cotiser 40 ans et la pension versée représente 75% de la moyenne des 6 derniers mois de salaire. Mais à Mayotte, certaines personnes atteignent l'âge de la retraite avec une rémunération de 800 euros et n'ont pas forcément cotisé assez longtemps, ce qui explique qu'il y ait des retraites à 250 ou 300 euros.
"Nous souhaitons que soit fixé le même minimum garanti qu'à la Réunion, environ 700 euros, majoré de 50% sur le principe de l'indexation, ce qui fait une retraite minimum à 1.000 euros… Je pense que c'est raisonnable", estime M. El Anrif. Les différentes propositions de l'intersyndicale vont être transmises au président du CG, aux communes et au préfet dans les prochains jours.

Reste le coût d'une telle mesure, qui pour l'instant n'est pas évaluée, faute d'un véritable travail de fond sur la question. Comme le remarque M. El Anrif, "l'excellence administrative, pour reprendre le mot du président du CG, résulte de l'action concertée des agents publics. Nous devons les sensibiliser pour que notre combat soit compris et défendu. S'ils ne sont pas capables de se mobiliser pour leurs salaires, ils ne seront pas capables de se mobiliser pour l'action administrative".

Julien Perrot

UNE Mayotte Hebdo N°386 – Vendredi 20 juin 2008

UNE Mayotte Hebdo N°386 - Vendredi 20 juin 2008

Clandestins – Cannbis, Démentèlement d'un réseau. 3 violeurs en série arrêtés par la police

Trafics

 > Conseil Général – 4000 agents en attente d'intégration
 > Petit déjeuner Mayotte Hebdo – Vincent Dufau et Abdullah Hariti
 > Education – un lycée pour 800 élèves à chirongui

 

Juin 2008 – Archéologie – Des vestiges urbains du XIVe siècle

On passe devant sans jamais le remarquer, sans comprendre l'importance de ce qui semble être un reste de muret écroulé, le long de la CCD1. Pourtant, encastré dans la terre, se trouve à Acoua le vestige d'un ancien rempart de ce qu'était la cité d'Acoua. Selon les estimations, ce rempart date du XIVe/XVIe siècle. Découvert dans les années 90 lors de travaux dans le village, ce rempart a suscité l'intérêt de Martial Pauly, habitant d'Acoua et professeur d'Histoire à la Cité du Nord, mais avant tout archéologue de formation. Depuis, il n'a cessé de fouiller les environs et peut aujourd'hui affirmer que l'ancienne cité s'étendait sur 3 hectares, sans compter le village des esclaves. On trouve des restes du rempart tout au long du site, très bien préservé car enfoui sous une large couche de terre depuis bien longtemps. Derrière une maison, M. Pauly a retrouvé les vestiges d'une des portes de la cité. "Cette découverte permet de recueillir beaucoup d'informations sur les populations vivant ici entre le 13e et le 17e siècle, c'est le seul site qui délivre autant d'information" se réjouit l'archéologue qui pense qu'en retirant 20 à 30cm de terre un peu partout on trouverai encore plus de vestiges.
Un peu plus haut dans le village, au milieu des habitations, Martial Pauly, aidé de quelques uns de ses élèves motivés et intéressés, a découvert les vestiges d'une ancienne habitation, qu'il nous fait visiter. La largeur de chaque mur, une coudée, correspond aux techniques de maçonnerie universelles, issues du Moyen-Orient, la construction très sommaire renvoie complètement aux descriptions des maisons à Anjouan.

 

Les nobles habitaient des maisons en dur

Aubaine du chercheur, la latérite, cette terre rouge si présente sur l'île, a recouvert et protégé les pierres, gardant intactes les fondations de l'habitation. Les matériaux utilisés pour la construction sont des blocs de corail et de basalte, avec des enduits pour uniformiser le tout. A certains endroits, l'archéologue a retrouvé des restes de la toiture effondrée, une toiture plate qui tenait avec des chevrons en bois de palétuvier. Aux abords de l'habitation, deux sépultures qui indiquent le rang social des occupants des lieux : l'inhumation chez soi était un privilège aristocratique. Toute cette découverte apporte énormément à la recherche sur l'histoire de Mayotte. "Il y a encore quelques années, on pensait qu'il n'y avait jamais eu d'habitations personnelles en dur à Mayotte, rappelle Martial Pauly. Cette découverte remet beaucoup de choses en question."
Le chercheur a retrouvé de nombreux détails dans cette habitation, un four domestique, la fosse recouverte de chaux qui servait de latrines, les restes presque intactes d'un banc, un "baraza", appuyé contre un des murs de la cour,…il a aussi trouvé un fragment de tablette de corail qui servait à faire le m'sindzano, ce qui montre que c'est une pratique très ancienne. Maintenant que l'habitation a été presque entièrement dégagée, il s'est s'attaqué à la deuxième partie des fouilles : ce qu'il y a en dessous. L'équipe de Martial Pauly a déjà creusé à 150cm pour trouver des vestiges, ils y ont trouvé un autre niveau de sol avec des restes d'habitations en végétal et en sable, une découverte qui montre l'urbanisation progressive de la société. Là encore, la couche de latérite importée au 15e siècle pour niveler la cour à tout conservé. En dessous, on y trouve des vestiges de cases qui ont pu être datés du 14e siècle. Des charbons provenant d'un incendie, restés intactes, ont pu être datés au carbone 14 par le CNRS de Lyon, entre 1320 et 1410. Cette datation permet de montrer que le développement de l'urbanisation dans l'archipel s'est fait exactement en même temps que celui de la côte swahilie. "Ces techniques de constructions étaient inconnues des malgaches du 14e siècle, annonce le chercheur, c'était plutôt les bantous qui utilisaient le torchis."

 

Une cité dominée au 14e siècle par des malgaches islamisés

Entre les deux types d'architecture, l'équipe a retrouvé plusieurs céramiques, fruit du brassage de population que connaît Mayotte à partir du 13e siècle, plusieurs poteries sont très ressemblantes de celles faites sur les hauts plateaux malgaches aux 14e 15e siècles.
Les découvertes de M. Pauly se recoupent avec les légendes qui circulent encore au village. On sait par exemple qu'un chef du village avait pour nom Bakar Karuna Marona. Le prénom Bakar signale l'influence arabe, Karuna signifie "celui qui lit le Coran" et Marona vient du terme "Marinh", les trafiquants d'esclaves. L'aristocratie de la cité d'Acoua était donc composée de malgaches islamisés ayant prospéré grâce au commerce des esclaves. On appelait ces nobles qui régissaient l'île avant la mise en place du sultanat les "fani". L'enseignant en Histoire quitte Mayotte à la fin de l'année scolaire, il regrette qu'il n'y ait aucun suivi archéologique ici. "Le hasard de cette découverte (il habite à 50 mètres des vestiges de la cité) montre qu'il y a sûrement des dizaines de sites de ce type encore inconnus." Avant on départ il prépare avec la direction des affaires culturelles de la préfecture une exposition sur les techniques de construction anciennes en dur, éclairées par les fouilles d'Acoua. La préfecture l'a beaucoup soutenu en lui donnant toutes les autorisations nécessaires et en participant financièrement à ses fouilles, pour l'envoie des échantillons au laboratoire du CNRS de Lyon. Le chercheur rêve à la création d'un poste d'archéologue à Mayotte, qui lui permettrait de pousuivre ses fouilles sur les sites non explorés, notamment Tsingoni, l'ancienne capitale du sultanat aujourd'hui recouverte par les habitations modernes.

Hélène Ferkatadji

Chronologie du peuplement de Mayotte
VIIIe siècle. Premières traces d'occupation humaines à Mayotte et aux Comores. Migrations austronésiennes (malgaches) et apport en population bantoue. Deux possibilités évoquées : soit ils sont venus d'eux-mêmes sur l'île, soit les malgaches les ont fait venir, ce qu'ils font avec certitude au Xe siècle.
IXe – XIe siècle. Vestiges découverts à Dembéni. Principale production la métallurgie. Le fer est exporté jusqu'en Inde. Prend fin au XIIe siècle. A Partir du IXe siècle des marchands arabes et perses séjournent sur l'île, introduction de l'Islam. La plus ancienne évocation musulmane aux Comores vient de Al-Idrissi, un géographe arabe du XIIe siècle. Les populations qui dominent la société sont islamisées. La plus ancienne mosquée connue est à Anjouan dans la cité de Sima.
A partir du XIIIe siècle, arrivée de nouveaux groupes, création d'une nouvelle aristocratie, les "fani", essentiellement des malgaches islamisés, les "antalaotra", mais aussi des Swahilis, des arabes et des Omanais. L'architecture est d'ailleurs inspirée du sur de l'Arabie. "fani" désigne ceux qui ont le pouvoir. Epoque de la mise en place des réseaux de traite d'esclaves, des malgaches des hautes terres. Le pays est composé d'une multitude de petits royaumes toujours en guerre, les esclaves sont acheminés jusqu'à la côte Nord Ouest de Madagascar et de là sont envoyé sur la côte swahilie et vers les régions sud arabiques : Djedda, Oman, … Les Comores sont un jalon dans la traite, les esclaves y transitent et contribuent à la mise en valeur et au peuplement de l'île. Exemple, les poteries du XIVe siècle trouvée à Mayotte sont voisines de celles des hauts plateaux malgaches.
XIVe siècle. Grande prospérité de l'île. Constructions domestiques en dur, mosquées, maisons aisées. Processus d'urbanisation dure jusqu'au XVIIe siècle, donne naissance aux médinas qui ont subsisté dans les autres îles.
1498, Vasco de Gama explore l'Océan Indien, il est suivi des hollandais, des anglais, français,…
XVe siècle, instauration du sultanat dans les Comores.
XVIIIe déclin de Mayotte, plusieurs raisons évoquées : catastrophe naturelle, épidémie, … mais surtout, c'est l'époque des "sultans batailleurs". A partir de 1740 Anjouan tente régulièrement de s'emparer de Mayotte, affaiblie par de nombreuses querelles internes dans l'aristocratie mahoraise. A partir des années 1790, les Comores sont envahies par des pirates malgaches qui vident Mayotte de ses habitants. A l'arrivée des français en 1841, la population a été divisée par quatre, les témoignages mentionnent de nombreuses ruines. Le sultanat s'est isolé à Dzaoudzi après les razzias malgaches sur la capitale Tsingoni.

UNE Mayotte Hebdo N°385 – Vendredi 13 juin 2008

UNE Mayotte Hebdo N°385 - Vendredi 13 juin 2008

Découverte Archéologique

Acoua, an 1320

 > GTHN France-Comores – le président douchina raconte
 > Elections – 4 communes retournent aux urnes
 > Education – un sentier sous-marin pour découvrir le lagon
 > Mayotte Eco – 44 talents récompensés

13/06/2008 – Un sentier sous-marin pour découvrir le lagon

Ce sentier sous-marin destiné aux nageurs en palmes, masque et tuba est le fruit d'un travail réalisé tout au long de l'année par la classe, entraînée par le professeur d'EPS M. Pineda. L'objectif est de créer des ressources personnelles en relation avec leur projet de vie, et bien sûr faire découvrir le lagon et les merveilles qu'il renferme au plus grand nombre.
Chaque balise est une bouée remplie de béton qui sera posée par le fond sur le platier et sur le récif frangeant par une autre classe à la rentrée. Il a été décidé de les poser au fond pour ne pas gêner la pêche au djarifa, souvent pratiquée sur cette plage. Lors de randonnées palmées avec les élèves, les enseignants accrocheront sur chaque bouée une ficelle terminée par un flotteur, pour qu'elles soient visibles de la surface. Chacune d'elle signalera quelque chose de précis à voir : un poisson spécifique qui fréquente cette zone, des coraux remarquables, un milieu comme l'herbier, etc. Elles comporteront chacune un numéro, en prévision de la seconde partie du projet.
Cette seconde partie est le volet touristique du projet. L'année prochaine, les enseignants feront travailler une autre classe à la création de panneaux explicatifs sur la plage, peut-être d'un faré et surtout de plaquettes, plastifiées, pour être emportées lors de la nage et qui correspondront chacune à une balise.
 
 

Le soutien des"bulles solid'air"

Déjà élaborées par les 28 élèves de 3e2, les plaquettes ne sont pas encore réalisées. Toute l'année, la classe très motivée s'est scindée en plusieurs groupes de travail : un groupe photo dirigé par M. Prunier qui a réalisé un diaporama, un groupe vidéo piloté par un élève de Terminale, Mikidadi Chanfi, un groupe pour la création des balises et un autre pour la réalisation des plaquettes.
Ce projet d'action éducative a permis aux élèves de réaliser plusieurs sorties dans l'île, deux sessions de nage en palmes, masque et tuba à Sazilé et à M'tsanga fanou, ainsi qu'une sortie sur la formation de l'île de Mayotte avec balade au lac Dziani. Une partie des élèves a appris à nager lors de ces sorties. "Beaucoup d'entre eux ne connaissaient pas tous ces sites, ils ont découvert une autre vision du lagon, une autre utilité que la pêche", raconte M. Pineda.
Mercredi, en attendant l'heure du départ pour la plage, les 3e2 se sont répartis dans toutes les classes de 5ème pour leur présenter leur projet et discuter avec eux du lagon, du développement durable, de la pêche et des espèces protégées. Pour l'occasion, ils sont assistés de plusieurs visiteurs arborant tous le même t-shirt sur lequel on voit un hérisson fraterniser avec une tortue, sous l'inscription "bulles solid'air, Mayotte 2008".
Ces nouveaux venus qui vantent les merveilles du lagon de Mayotte appartiennent à l'association "Grand'air", qui regroupe des étudiants de l'université de la Réunion amateurs de sports de pleine nature. "Les membres de l'association partagent une passion pour les sports de nature avec un objectif de développement durable, de préservation de cette nature, explique Michel son fondateur. Il y a aussi une dimension conviviale, une volonté de partage. Nous aimons nous associer à des actions en cours. Nous avons eu connaissance du projet de sentier sous-marin par la cellule EPS, nous venons nous y associer en apportant du matériel et en aidant les élèves à communiquer auprès des 5èmes."

 

Un baptême de plongée pour couronner le projet

Les douze membres de l'association venus dans l'île pour 10 jours ont réalisé une première action en se joignant à Oulanga na nyamba pour une nuit de prévention du braconnage sur la plage de Papani. Aujourd'hui, ils emmènent les élèves du projet sentier sous-marin faire un baptême de plongée, grâce à du matériel prêté gratuitement par le club de plongée Rêve Bleu, leur partenaire depuis la première visite.
Ce sera l'occasion pour les étudiants de l'association de terminer leur niveau 1 ou 2 de plongée entamé à la Réunion avec l'association. Samedi, la veille du départ, le groupe ira à Ngouja, où ils étaient déjà allés l'an dernier, pour voir l'évolution de l'herbier, des tortues et le sentier mis en place par Oulanga na nyamba. Ils envisagent d'y venir une fois par an, pour suivre l'évolution de cette plage menacée par l'afflux de touristes s'il est incontrôlé.

Hélène Ferkatadji

13/06/2008 – GTHN franco-comorien – « C’était une opportunité qu’il ne fallait pas rater »

Mayotte Hebdo : Monsieur le président, pour la première fois des élus mahorais ont participé à des discussions diplomatiques entre la France et l'Union des Comores. Quelle est votre impression et quel est le rôle de ce GTHN ?
Ahamed Attoumani Douchina : Le GTHN a pour objectif essentiel de créer des conditions d'échanges entre Mayotte et les Comores. Dans le même esprit, il y a des échanges qui se font entre Mayotte et Madagascar et il y aura des échanges qui se feront entre notre île et Maurice. Tout cela se fait dans une dynamique de coopération régionale dans laquelle je m'inscris totalement. J'ai déjà eu l'occasion de dire que Mayotte vit dans un environnement géopolitique où il n'y a pas intérêt de s'isoler en ignorant la présence des autres et par conséquent d'être ignoré des autres. Le travail de ce groupe est de faciliter les échanges a priori difficiles entre les Comores et Mayotte. Vous remarquerez que je fais bien la distinction entre les deux entités et que je pose le préalable implicite d'une reconnaissance par nos interlocuteurs du choix de société que les Mahorais ont fait, à savoir notre appartenance à la France.
 
 
Mayotte Hebdo : Concrètement, comment les choses se sont passées ?
Ahamed Attoumani Douchina : La participation des Mahorais à ce GTHN était une opportunité qu'il ne fallait pas rater, parce que jusqu'alors les discussions entre l'état français et l'état comorien en termes de relations bilatérales et même en terme de coopération régionale se déroulaient sans nous. Notre participation à côté des représentants du gouvernement français et de notre diplomatie nous ont permis non seulement d'être témoins de ce qui pouvait se dire, mais aussi d'intervenir pour défendre la position de Mayotte.

Mayotte Hebdo : Quelle a été l'attitude des autorités comoriennes ? Dans quel climat se sont déroulées les discussions ?

Ahamed Attoumani Douchina : La réunion du 4 juin a permis de mettre en place des rencontres futures. Il y aura un groupe de tête comprenant une partie française et une partie comorienne. Celui-ci supervisera deux sous-groupes : un chargé des conditions de circulation des biens et des personnes entre les Comores et Mayotte et vice-versa, et l'autre chargé de la coopération entre les deux entités. Les groupes se rencontreront d'une manière plus ou moins fréquente, tantôt à Moroni, tantôt à Mayotte. Mon sentiment général de ce que j'ai vécu est le suivant. J'ai rencontré des interlocuteurs sérieux et soucieux d'établir des dialogues respectueux, responsables et surtout adultes. Dans ces conditions, les élus mahorais sont tout à fait disposés à dialoguer.

Mayotte Hebdo : La semaine dernière, Sarah Mouhoussoune regrettait dans nos colonnes le fait que vous soyez parti à Paris avec deux conseillers généraux sans avoir réuni l'ensemble des élus. Elle estimait que votre manière de procéder était incorrecte, quelle réaction cela vous inspire ?

Ahamed Attoumani Douchina : Le problème de Sarah Mouhoussoune est qu'elle pense être la seule habilitée, la seule compétente à représenter le conseil général dès qu'il s'agit de discuter avec les Comores. Je peux comprendre son engagement dans ce domaine bien précis. Mais je devais aller à Paris avec deux élus et je peux vous assurer qu'ils ne sont pas membres de mon parti puisque M'hamadi Abdou est du MDM et Ibrahim Aboubacar du PS. Je les ai choisis pour leur maturité et leur expérience et surtout pour leur vision objective.

Propos recueillis par Faïd Souhaïli

Mayotte Hebdo de la semaine

Mayotte Hebdo n°1116

Le journal des jeunes