Dahalani M’Houmadi : « Mlézi Maore restera ma plus belle expérience professionnelle »

Après trois ans de bons et loyaux services, le directeur général de Mlézi Maore, Dahalani M’Houmadi s’apprête à quitter ses fonctions. Un départ qui arrive alors que l’association vient de fêter, le mardi 28 juin, sa vingtième bougie. Retour sur son engagement et ses ambitions pour la structure, mais aussi sur les difficultés rencontrées et sur la suite de sa carrière professionnelle.

C’est le cœur lourd, mais le sentiment du devoir accompli que Dahalani M’Houmadi, le directeur général de Mlézi Maore, annonce quitter ses fonctions à la fin du mois. Non sans une pointe d’émotion, il laisse derrière lui une association qui vient de souffler sa vingtième bougie ! « Elle a démarré à deux-trois… Aujourd’hui, elle compte plus de 650 salariés ! Cela montre bien l’engagement, l’investissement et l’implication d’hommes et de femmes dans la lutte contre toutes les formes d’exclusion », félicite Dahalani M’Houmadi, avant d’adresser un hommage particulier au sénateur Thani, « qui a ouvert le bal », et à Roukia Lahadj, « qui a pris le relais et qui a poursuivi le dynamisme enclenché » pour continuer à œuvrer dans tous les domaines, que ce soit la jeunesse, le handicap, les solidarités, l’insertion, ou encore l’accès aux soins.

Si le chemin parcouru est sans aucun doute flatteur, Dahalani M’Houmadi ne se cache pas derrière   ces bons résultats. À l’instar de nombreuses organisations privées et publiques, Mlézi Maore souffre d’un déficit de recrutement afin de faire tourner sa soixantaine d’établissements et de services. « Nous avons plus d’une centaine de postes à pourvoir. » Notamment dans le domaine médical (des médecins, des généralistes, des spécialistes) et dans le paramédical (des infirmiers, des psychologues, des psychomotriciens). Plus étonnant, le secteur social et éducatif (éducateurs spécialisés, assistants sociaux) subit le même sort, « ce qui n’était pas le cas il y a encore quelques années ».

La formation : un travail de longue haleine

Le défaut de la formation locale reste le gros point noir aux yeux de celui qui est encore directeur de Mlézi Maore pour quelques semaines. « La plupart des salariés diplômés arrivent de l’extérieur : de métropole, de la Nouvelle-Calédonie, de Belgique, de la Suisse… » S’ils apportent leurs expertises et leurs expériences, leur présence sur le territoire se limite malheureusement en moyenne à deux ans. « Quand ils partent, nous nous retrouvons avec des trous dans la raquette si nous n’avons pas anticipé ! » Face à ce constat, Dahalani M’Houmadi insiste sur la formation des locaux dans tous les métiers éducatifs et paramédicaux. Malgré la crise de la vocation, en raison de conditions de travail difficiles et d’un salaire relativement peu élevé, les Mahorais « ont envie de bosser dans notre secteur », assure-t-il. Toutefois, il faut savoir prendre son mal en patience puisque cela prend entre un et trois ans pour les rendre opérationnels. « Nos partenaires financiers et nos autorités de tutelle deviennent de plus en plus exigeantes et elles ont raison ! »

Pour remédier à cette problématique sur le long terme, Mlézi Maore travaille en étroite collaboration avec l’antenne mahoraise de l’institut régional du travail social de La Réunion. Actuellement, l’association compte une promotion de dix salariés pour devenir chef de service et une autre du même nombre, en alternance, pour sortir des conseillers en économie sociale et familiale. « Il en faudrait cinquante », admet Dahalani M’Houmadi, conscient que les besoins sont supérieurs. « Il faut donc démultiplier ce travail engagé. » Parmi les pistes engagées, il retient la solution du distanciel pour aller « chercher la compétence là où elle se trouve tout en restant sur place ».

Trois grandes réussites

La professionnalisation des salariés est sans aucun doute la grande fierté du directeur sortant, qui en a fait partir dix sur des formations d’encadrement, qui en a accompagnés quarante sur des fonctions éducatives via la validation des acquis de l’expérience et qui a démarré des formations qualifiantes en apprentissage pour une vingtaine d’autres. « Ça c’est fort car cela nous permet de préparer l’avenir ! » L’autre belle réussite de Dahalani M’Houmadi est l’ouverture du pôle insertion et vie sociale, car il a permis d’ouvrir l’école de la deuxième chance, l’auto-école sociale et solidaire, en attendant le garage solidaire au mois de septembre, mais aussi de lancer de nouveaux chantiers d’insertion comme le maraîchage. « Cela permet à des personnes éloignées de l’emploi d’avoir accès à une rémunération et d’aboutir par la suite à un emploi pérenne. » Pour terminer, la plateforme de soutien à la vie associative permet d’épauler les petites structures locales à monter en compétences dans leurs domaines de prédilection, tels que la culture, la jeunesse, la parentalité, le sport. « Nous ne pouvons pas tout faire tout seul. Nous avons tendance à dire qu’il faudrait dix Mlézi Maore à Mayotte… C’est une première réponse ! »

« Je regarde Mayotte dans une partie centrale de ma tête »

Ne lui reste plus qu’à passer la main, après trois années de bons et loyaux services. « Je suis venu dans un environnement que je ne connaissais pas personnellement, c’était un super challenge et une très belle maison. Ici, nous avons les moyens de nos ambitions », résume celui qui se réjouit d’avoir pu contribuer au développement du 101ème département. Désormais, Dahalani M’Houmadi se projette vers la métropole où il rejoint l’administration, toujours « au service de l’intérêt général ». Un nouveau défi personnel pour savoir s’il se sent capable de se remettre en question. Pour autant, il ne compte pas balayer d’un revers de la main « ma plus belle expérience professionnelle ». Au contraire : « Je garde Mayotte dans une partie centrale de ma tête et dans ma tête. Je serai un défenseur de ses intérêts et un ambassadeur de toutes les pépites du territoire, que ce soit ici ou à l’extérieur. » Bon vent et marahaba !

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