Choléra : « Si on me propose le vaccin, je le prends tout de suite »

À M’tsapéré, dans la commune de Mamoudzou, plusieurs personnes ont aperçu des médecins venus pour vacciner la population contre le choléra, alors qu’un foyer actif de la maladie avait été identifié dans le village. Si certains ont bénéficié de la vaccination, d’autres semblent peu au courant de l’incidence de la bactérie dans leur quartier. Reportage.

« On a vu un groupe d’une dizaine de médecins monter là-haut [jeudi]. » Assis à l’angle de la rue des Ambassadeurs, à M’tsapéré, ce vendredi, Ismael* affirme que plusieurs personnes dans le quartier, où un foyer actif du choléra a été confirmé par Santé publique France le 27 juin, ont été vaccinées contre la maladie. Entre le 19 et le 25 juin, six cas avaient été identifiés dans le village. Selon nos informations, du personnel de la réserve sanitaire a tourné dans M’tsapéré la semaine dernière pour proposer à la population de s’immuniser contre la bactérie, dont la propagation sur le territoire mahorais est particulièrement favorisée par l’utilisation de l’eau souillée des rivières. « Moi, je vois souvent des gens qui utilisent l’eau de la rivière en bas pour cuisiner, alors que d’autres font leurs besoins dedans », s’alarme Kamal, un habitant de ce quartier de Mamoudzou, en faisant référence au cours d’eau que surplombe le pont à côté de la mosquée. Alors, quand on lui a proposé le vaccin, il n’a pas hésité : « Il y avait un stand l’autre jour, où ils donnaient des pastilles, à côté du pont justement ».

Asma* aussi s’est faite vacciner à côté du pont. « C’est important, car certaines personnes n’ont pas de symptômes et on peut quand même l’attraper, j’espère que cette maladie va partir », raconte-t-elle. En remontant la rue des Ambassadeurs, à la recherche de potentiels médecins et en demandant aux passants s’ils ont aussi vu un groupe remonter la rue, tous ceux présents le jeudi confirment avoir vu un cortège passer, mais beaucoup sont moins bavards lorsqu’on leur demande si une épidémie de choléra est crainte dans le village. « [Jeudi], ils étaient là, [mercredi] aussi, mais je n’ai pas vu de gens inquiets », indique le vendeur d’une épicerie. À la pharmacie de M’tsapéré, on nous explique également que très peu de clients en parlent. « Ici, les gens ne veulent pas s’exposer, c’est un sujet tabou », commente Kamal.

« Ça m’inquiète vraiment beaucoup »

Après avoir cherché un stand ou du personnel médical faisant du porte-à-porte dans une bonne partie du village, notre route est guidée par les habitants au pont de M’tsapéré. Là, pas de médecins, mais James, en train de faire cuire des brochettes sur le bord de la route. « J’ai vu des médecins passer, je savais qu’ils allaient vacciner contre le choléra, mais comme on ne m’a pas dit de venir, je n’y suis pas allé », regrette celui qui aurait aimé pouvoir bénéficier du vaccin. « Moi, ça m’inquiète vraiment beaucoup. C’est une maladie très grave et contagieuse, si on me propose le vaccin, je le prends tout de suite. »

« Moi, je pense qu’ils devraient vacciner plus, tous ceux qui sont volontaires par exemple », estime Kamal, qui a l’impression de revivre les débuts de la pandémie de Covid-19. La semaine dernière, nos confrères de l’Express ont révélé que la stratégie de vaccination allait être élargie dans les prochaines semaines, et devrait bénéficier à 40.000 personnes, d’après un avis du Haut conseil de la santé publique (HCSP) publié le 26 juin. Un changement d’approche qu’ils qualifient de « discret ». Une discrétion dont témoignent les habitants de M’tsapéré que nous avons rencontrés, personne n’étant précisément au courant de ce qu’il se passe dans leur quartier.

214 cas de choléra recensés sur le territoire

Santé publique France a compté quatre nouveaux cas de choléra entre le 26 juin et le 2 juillet, portant à 214 le nombre total de cas recensés à Mayotte depuis le 18 mars. Parmi eux, 193 cas ont été acquis localement et 21 ont été importés. On compte un foyer actuellement actif à Passamaïnty, dans la commune de Mamoudzou, avec 36 cas depuis le 18 mars. Aucun nouveau cas n’a été signalé à Koungou depuis le 6 juin. Depuis l’arrivée de la maladie sur le territoire mahorais, quatorze cas graves ont nécessité une hospitalisation en réanimation et deux décès de cas confirmés ont été enregistrés.

Journaliste à Mayotte depuis septembre 2023. Passionnée par les sujets environnementaux et sociétaux. Aime autant raconter Mayotte par écrit et que par vidéo. Quand je ne suis pas en train d’écrire ou de filmer la nature, vous me trouverez dedans.

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