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“Les brochettes sont au feu” : les 11 prévenus d’un réseau de passeurs à l’aéroport de Pamandzi jugés ce mercredi

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Une “machine bien huilée”, selon le procureur. Accusées d’avoir facilité le passage de clandestins directement depuis l’aéroport de Pamandzi, 11 personnes comparaissaient ce mercredi au tribunal correctionnel de Mamoudzou. Parmi eux, deux anciens agents de la police aux frontières…

C’est une affaire qui avait fait grand bruit, jusqu’aux oreilles de la direction de la police aux frontières (PAF) à Paris. Un réseau de passeurs, constitué d’au moins huit personnes à l’époque et surtout deux agents de la PAF, agissant directement aux aubettes de l’aéroport de Pamandzi, avait été révélé en février 2019. L’enquête dévoilait alors les ficelles de ce réseau “parfaitement organisé”, selon les dires du parquet : les deux policiers facilitaient le passage de “clients” moyennant des sommes de plusieurs milliers d’euros, en leur fournissant des papiers d’identité appartenant à une tierce personne, et en fermant les yeux au moment des contrôles. Le but étant de les faire embarquer dans des avions à destination de La Réunion ou la métropole.

Ce mercredi, ce sont finalement 11 prévenus qui étaient jugés par le tribunal correctionnel de Mamoudzou pour des faits de corruption, d’aide à l’entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers d’un étranger en france, et d’aide à l’utilisation frauduleuse d’un document d’identité, de voyage ou de séjour par son titulaire. L’infraction courait sur une période de trois ans, de janvier 2016 à février 2019. Ce mercredi, sept d’entre eux étaient présents à la barre. Les passeurs risquaient jusqu’à dix ans d’emprisonnement.

 

Faisceau d’indices à la PAF

 

Quelques temps avant leur interpellation, plusieurs signaux d’alerte avaient déjà commencé à susciter les soupçons des services de la PAF à Paris : à la descente de l’avion, un nombre anormal de passagers se présentaient avec une carte d’identité au nom d’un tiers… laissant imaginer qu’un contrôle peu scrupuleux pouvait être à l’œuvre au départ des passagers, à l’aéroport de Pamandzi. En 2018, premier coup de filet : un voyageur est pris la main dans le sac, son visage ne colle pas avec la photo du document d’identité présenté. Pire, l’un des policiers reconnaît un collègue, qui travaille à l’aéroport. L’enquête permet alors de démontrer que l’agent en question a donné son passeport à une troisième personne qui s’est chargée de le remettre au voyageur clandestin. Les deux prévenus sont condamnés à trois mois de prison avec sursis.

 

Une organisation à trois échelons

 

C’est à ce moment-là que la procédure va prendre une autre tournure”, déroule le président au moment de rappeler les faits. En septembre de la même année, l’agent écroué se présente à la brigade de recherche “en expliquant qu’il souhaite dénoncer l’ensemble du réseau auquel il a lui-même participé”. Les enquêteurs découvrent alors les rouages d’une entreprise rondement menée. Au premier niveau, des “rabatteurs” se chargent de recruter les étrangers en situation irrégulière mais aussi de trouver des “loueurs” de pièces d’identité pour leur faciliter le passage aux frontières. Puis viennent les coordinateurs, chargés de récupérer les informations obtenues par les rabatteurs et de les transmettre aux décisionnaires. À savoir, les deux agents de la PAF, qui, depuis le haut de la pile, donnent le go. Ou non.

 

Lexique garni et chefs de file

 

Le premier, c’est Monsieur B. : “le grand boss” tel qu’il est présenté tout au long de l’audition du dénonciateur. À la barre, ce mercredi, celui qui dépasse d’une tête tous les autres prévenus, cherche toutefois à minimiser son rôle. “C’est eux qui allaient chercher les clients et nous appelaient, nous on ne leur disait pas d’y aller. Même parfois, c’était trop dangereux, on disait “non”, car il y avait trop de risques”, répond à la barre l’homme à l’imposante carrure. “Vous aviez le pouvoir d’annuler”, lui rétorque le juge. Le deuxième agent, Monsieur S., nie lui aussi son rôle de décisionnaire. 37 photos de documents d’identité seront toutefois retrouvées dans son téléphone…“Pour moi c’était quelque chose qui arrivait de manière ponctuelle. Je n’avais pas connaissance de l’organisation, de tout ce monde-là. J’étais pris en étau”, affirme-t-il aujourd’hui.

Pourtant, l’affaire présente toutes les caractéristiques du réseau de passeurs. Pour preuve, ce langage codé utilisé entre les deux têtes présumées de l’organisation. “Voulé”, “poulpe”, “poulet”, ou encore “les brochettes sont au feu”… Un lexique gourmand alimente les nombreux échanges téléphoniques entre les deux agents. Et leurs explications hasardeuses ne satisfont pas vraiment le tribunal. “Moi si je vous envoie “ratatouille”, vous comprenez le message sans que je vous l’explique ?”, cingle le procureur.

 

Une affaire bon marché ?

 

L’autre zone d’ombre ? Les sommes d’argent empochées par ces passeurs. “Entre 2.500 et 3.000 euros par client”, selon l’un des prévenus entendus ce mercredi. Laquelle somme serait alors divisée, Monsieur S. touchant 2.000 euros, Monsieur B. et le rabatteur les 1.500 restants. Pourtant, alors que le “boss” reconnaît une trentaine de passages ainsi orchestrés, il n’aurait gagné que 5.000 euros en trois ans. Une somme ridicule, au regard des risques encourus, qui plus est avec son uniforme ! “Il a fait le choix de minimiser”, souligne d’ailleurs le procureur, au moment de faire ses réquisitions. Au vu des éléments du dossier, le parquet requiert, pour les 11 prévenus, des peines allant de trois de prison avec sursis et trois ans d’interdiction de territoire français, à, respectivement quatre et trois ans d’emprisonnement avec sursis, pour les deux chefs présumés, plus cinq ans d’inéligibilité et d’interdiction d’exercer une activité en lien avec l’infraction.

Les juges seront plus sévères encore : en plus des réquisitions du procureur, Monsieur B. écope de 30 mois de prison ferme, soit encore 17 à effectuer compte tenu de sa détention provisoire, et 5.000 euros d’amende. Monsieur S., qui a déjà passé 12 mois en détention, repart quant à lui avec une condamnation de 36 mois de prison, dont 16 avec sursis et 7.000 euros d’amende. Tous les prévenus sont condamnés a minima à des peines de prison avec sursis. Les carottes sont cuites !

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