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Immigration | Bureau des étrangers : la crise s’éternise

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Depuis plus de trois mois, les portes du bureau des étrangers de la préfecture restent partiellement fermées. Placement en rétention, perte d’emploi, impossibilité de remboursement des soins… Cette situation inédite génère des conséquences préoccupantes pour les usagers. Malgré la mise en place d’un « service d’urgence », les retards dans le traitement des dossiers s’accumulent. Un phénomène  qui pousse de nombreux individus sur les routes de la clandestinité dans le silence des autorités.

Tiré à quatre épingles, Benoît revient de son rendez-vous chez l’avocat. « Il est inutile d’attendre devant le bureau des étrangers », reconnaît-il amèrement. Alors que des familles dorment depuis plusieurs semaines devant les portes de ce service, l’homme a décidé de saisir la justice. Son « dernier espoir » pour accéder au titre de séjour et « entamer une vie normale ». Malgré son épuisement moral, sa dignité le pousse à ne pas baisser les bras. Une ténacité loin d’être partagée par l’ensemble des étrangers sur le territoire. « Les gens sont désespérés, abattus, et angoissés. Ils se demandent combien de temps ils pourront encore tenir ».

Originaire de la République Démocratique du Congo, le cas de Benoît pourrait pourtant sembler moins préoccupant que celui d’autres étrangers vivant à Mayotte. Reconnu comme réfugié par l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (Ofpra), l’homme ne peut légalement pas être placé au centre de rétention administrative. Ce qui n’est pas le cas d’autres individus n’ayant pas pu régulariser leur situation administrative en raison de la fermeture du bureau. Sans travail, ni ressources, Benoît ne risque également pas de tomber sous le coup d’un licenciement. Pourtant, la fermeture dite « partielle » de ce service génère des conséquences tout aussi graves dans son quotidien.

« J’ai été torturé durant mon exil », introduit-il avec dignité. « Des organes vitaux ont été touchés et je dois me faire soigner. Or, j’ai besoin du titre de séjour pour bénéficier de la sécurité sociale. En l’état, les droits qui me sont accordés grâce au numéro de sécurité sociale provisoire ne sont que partiels. Pour le reste, je ne peux pas accéder au titre de voyage et encore moins bénéficier d’aides sociales », résume-t-il. Bloqué sur l’île aux parfums à l’instar d’autres réfugiés, l’homme se console comme il peut : « Au moins, je suis loin d’être isolé dans mon malheur ». 

Un phénomène qui s’éternise dans l’indifférence

Ce phénomène trouve son origine à la fin du mois de février. Le bureau des étrangers de la préfecture est alors fermé en raison d’une grève de ses agents. Si celle-ci se termine un mois plus tard, la ministre des Outre-mer indique le 17 mars, en plein mouvement social contre l’insécurité, que « pendant un mois, pour des raisons d’ordre public, le bureau des étrangers de la préfecture sera fermé et la délivrance des titres de séjour se fera sur rendez-vous ». Un mois plus tard, Flash Infos interroge le préfet Dominique Sorain sur ce sujet épineux sur lequel les autorités ne sont pas vraiment bavardes. « Le service des étrangers rouvrira prochainement (…) Cela va nécessiter un petit temps pour redémarrer », lâche-t-il. Deux petites phrases qui provoquent un soulagement chez les usagers.

Moins d’un mois plus tard, c’est la douche froide : « L’ouverture du bureau des étrangers n’est pas encore à l’ordre du jour », confessent les autorités en précisant que les portes « resteront fermées jusqu’à nouvel ordre ». Depuis, plus aucune information n’est officiellement communiquée à ce sujet. Placé en dehors du radar médiatique, l’événement se retrouve relégué derrière une actualité chargée en décasages et en séismes. En parallèle, la situation des étrangers se dégrade et les tensions s’accumulent. « Nous ne demandons pas grand-chose pourtant, si ce n’est régulariser nos situations administratives. Des gens sont malades, certains deviennent fous et d’autres se retrouvent à la rue. Faudra-t-il attendre un mort pour que cette situation évolue ? », s’interroge un ami de Benoît. 

Du bureau des étrangers aux cellules du CRA 

Parmi les fonctions du bureau des étrangers, l’une d’entre elles manque particulièrement à ses usagers : la délivrance du récépissé attestant des démarches d’obtention du titre de séjour pour les étrangers. Un document indispensable lors d’un contrôle d’identité. Ne pouvant plus se rendre au bureau pour accéder à ce document, certains usagers se retrouvent aujourd’hui placés au centre de rétention. « Nous constatons chaque semaine des individus qui se retrouvent ici car ils n’ont pas été en mesure de présenter un récépissé, ou que leur titre de séjour n’a pas été renouvelé », nous indique une source fiable à l’intérieur du CRA. 

Interrogé à ce sujet mi-avril par Flash Infos, Dominique Sorain affirmait « ne pas avoir d’indications à ce sujet », tout en précisant que « cela serait surprenant dans la mesure où la situation administrative des individus placés au centre de rétention est analysée en profondeur lors de leur placement ». Or, « il peut arriver que des agents ne communiquent pas à la préfecture le numéro AGDREF des individus placés au centre de rétention. Celui-ci permet d’attester les démarches administratives entamées par les étrangers. C’est ainsi que certaines personnes se retrouvent placées au centre de rétention alors qu’elles ne devraient pas y être », poursuit cette source.

Face à une diplomatie bloquée avec le voisin comorien, la question de la rétention de ces individus inquiète la section mahoraise du Syndicat de la magistrature. Dans un communiqué du 6 juin, le syndicat interroge les autorités sur leur volonté de prolonger ces rétentions dont l’issue ne peut pas aboutir à un éloignement. « Depuis le début de la grève, en février 2018, le juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Mamoudzou a été saisi à plus de sept cent reprises par la préfecture pour prolonger la rétention de personnes étrangères (…) Il est vain, en l’état actuel des relations avec les Comores, de continuer la politique d’interpellation des personnes étrangères en situation irrégulière puisque celles-ci seront immanquablement libérées », détaille le communiqué. Un phénomène qui est d’autant plus incompréhensible pour les individus vivant depuis de nombreuses années sur le territoire, mais pour qui la fermeture du bureau des étrangers génère un risque de rétention.

Licencié en l’absence de régularisation 

Si la crainte d’un placement en rétention est une inquiétude de taille, perdre son emploi demeure également une source d’angoisse non négligeable chez les usagers. L’absence du récépissé, ou de titre de séjour pour les salariés, plonge leur employeur dans une situation d’illégalité. Consciente du risque, la préfecture a mis en place dès le mois d’avril « un service d’urgence » permettant aux employeurs de faire remonter les cas les plus préoccupants afin de régulariser leur situation et d’éviter leur licenciement. À noter que ce service « se concentre uniquement sur le renouvellement des titres de séjour », insiste-t-on alors du côté de la préfecture. Une activité réduite qui, pour les autorités, justifie le terme de « fermeture partielle » pour évoquer le sort actuel du bureau des étrangers.

Pour Marjane Ghaem, avocate habituée à défendre les droits des étrangers, ce service minimum ne permet pas de pallier l’ampleur de la crise. En témoignent les nombreux clients qui affluent à son cabinet en évoquant la crainte de perdre leur emploi. « Certes, de grosses entreprises ont le temps et les moyens pour s’occuper au cas par cas de la situation administrative de leurs employés. Mais cela est loin d’être le cas de l’ensemble des entreprises, notamment les plus modestes », s’inquiète-t-elle. Elle poursuit : « Un client dormait depuis un mois devant le bureau des étrangers de la préfecture dans l’espoir d’être reçu. L’homme était en CDI, mais son employeur l’avait prévenu qu’il ne serait plus en mesure de l’employer si sa situation n’était pas régularisée. J’ai donc saisi le juge des référés du tribunal administratif », explique-t-elle. En l’absence d’étude sur la crise actuelle, difficile d’estimer le nombre de salariés ayant perdu leur emploi suite à ce phénomène. Du côté de l’association La Cimade chargée de porter assistance aux étrangers, sa responsable Solène Dia affirme voir défiler « chaque semaine des individus concernés par cette problématique ». 

Bureau fermé, soins non remboursés 

Sur le podium des conséquences néfastes engendrées par la fermeture du bureau des étrangers, les difficultés de remboursement des soins médicaux occupent une place honorable. Si l’exemple de Benoît est à ce titre équivoque, sa situation n’a rien d’un cas isolé. Dès le mois d’avril, les infirmiers libéraux alertaient du phénomène par communiqué en indiquant que « le non-renouvellement des titres de séjour prive des individus de droits fondamentaux dont ils jouissaient de plein droit au préalable (…) Ces hommes et ces femmes n’ont plus accès à la médecine de ville, aux médicaments, ne peuvent plus bénéficier de transport en ambulance, n’ont plus les moyens de bénéficier de soins ou de service à domicile », ajoute le communiqué. 

Dans le cadre du « service d’urgence » mis en place par la préfecture, celle-ci expliquait avoir « pris les dispositions adéquates » en restant en lien avec les équipes médicales. Celles-ci ayant la possibilité, une fois encore, de « faire remonter les dossiers les plus urgents pour débloquer les situations au cas par cas ». Une « personne relais » aurait aussi été nommée au sein de l’Agence régionale de santé (ARS) pour faciliter les interactions. Contactée par Flash Infos, l’institution indiquait pourtant le 27 avril qu’« il n’y a pas d’agent nommé au sein de l’ARS OI (océan Indien) pour traiter de situations individuelles de malades »,  tout en précisant que l’agence « relaie auprès de la préfecture les difficultés signalées par les professionnels de santé pour leurs patients en fin de droit risquant de se trouver en rupture de soins ».

Dans une île où la notion de « situation d’urgence » est relative, difficile pour le « service d’urgence » de répondre aux attentes des usagers, pas toujours informés de l’existence dudit service. Pour des individus isolés et intimidés par l’administration, il ne reste plus que les yeux pour pleurer et l’espoir d’une réouverture prochaine du bureau.

Vers un « soulèvement populaire » ? 

Insatisfaits des réponses apportées par les autorités, c’est désormais vers la justice que se tournent les usagers. Payer un avocat n’étant pas à la portée de tous, ces derniers s’organisent tant bien que mal pour faire valoir leurs droits. Dernier exemple en date : la mobilisation de l’Association congolaise de Mayotte, rebaptisée Association des demandeurs d’asile de Mayotte dans l’objectif de centraliser les démarches. « Nous avons décidé de nous unir face à un problème qui nous atteint tous, quel que soit notre statut ou notre nationalité. Tous les étrangers doivent avancer ensemble pour que la situation se débloque », explique le secrétaire général de l’association, se présentant sous le surnom de Junior. 

« Nous nous sommes d’abord réunis pour faire le point car les problèmes de chacun sont vastes entre ceux qui sont arrivés avant et pendant la fermeture du bureau des étrangers. La question d’un soulèvement populaire s’est posée. Mais nous avons décidé d’épuiser d’abord toutes les possibilités institutionnelles avant d’en arriver à ce stade », explique Junior. À plusieurs mains, l’association rédige un courrier adressé au préfet relatant l’ensemble des difficultés éprouvées. « Nous avons mis en copie le Défenseur des droits et la direction de la Convention de Genève pour qu’ils comprennent la gravité de la situation. Nous avons également fait pression auprès de l’association Solidarité Mayotte, chargée d’accompagner les demandeurs d’asile, pour que nos dossiers soient traités auprès de la préfecture. Au final, onze personnes ont été reçues au bureau des étrangers ». Préoccupé par la situation, Romain Reille, le directeur de Solidarité Mayotte, appelle au calme. « Chaque nouvelle arrivée est signalée à la préfecture. Nous sommes en contact permanent et je peux vous assurer que les démarches avancent. Il est capital que les esprits s’apaisent », répète-t-il inlassablement.

Pour Junior et ses semblables, l’avancée de leurs dossiers grâce aux pressions judiciaires prouve plusieurs choses : « Déjà, nous avons compris qu’il fallait se mobiliser et être solidaires pour avancer. Attendre une réaction des autorités ne sert à rien », introduit-il. Ensuite, « le bureau des étrangers fonctionne bel et bien, mais de façon réduite ». Une information confirmée par Solène Dia de la Cimade qui reconnaît que « des convocations ont repris de façon isolée depuis environ un mois ». Seulement, « beaucoup d’individus nous expliquent être recalés à l’entrée de la préfecture malgré leur convocation bien qu’ils s’y rendent à l’heure dite ». De quoi jeter de l’huile sur le feu d’une situation déjà explosive. 

Conscient de l’image négative potentiellement véhiculée par un soulèvement d’étrangers, Junior tente pour l’heure de « contenir la colère de chacun (…) mais cette situation ne pourra pas durer indéfiniment », prévient-il. « Déjà que nous endurons le racisme et les discriminations au quotidien, si en plus nous devons rester malades, sans travail ni revenus, ce n’est pas tenable », ajoute-t-il avant de conclure : « Tôt ou tard, les gens n’auront plus rien à perdre ».

Des perspectives inquiétantes 

Face à l’absence de justification de la part des autorités, le bal des suppositions n’a pas fini de faire danser les usagers. Parmi les sources interrogées, certains témoignent « d’une volonté politique insufflée par un climat de tension envers les étrangers à Mayotte ». Une politique qui interroge de par son coût. Les placements au centre de rétention administrative étant onéreux pour l’État, comment comprendre la volonté de poursuivre ce phénomène en dépit de la crise diplomatique actuelle avec l’Union des Comores ?  « Cette politique entraîne un véritable gâchis de moyens humains et financiers puisque policiers, greffiers, avocats et magistrats sont contraints de travailler sans relâche pour une efficacité inexistante », témoigne à ce titre la section mahoraise du Syndicat de la magistrature.

Au vu des ajournements accumulés avant la fermeture partielle de ce service, le ralentissement actuel de son activité ne peut que générer de nouveaux retards. « Plus on attend, plus la reprise sera difficile », résume Solène Dia de la Cimade. Encore faut-il espérer que cette réouverture soit envisagée dans un futur proche. Interrogée sur ce point, la préfecture n’a pas souhaité s’exprimer.

 

 

 

Un arrêté de péril aux Hauts-Vallons

Pas de péril immédiat mais la situation reste préoccupante. La mairie de Koungou a pris cette semaine un arrêté dit de « péril ordinaire » concernant les bâtiments de la résidence Canellia Palm, située dans le quartier des Hauts-Vallons. En effet, des fissures et des soulèvements de carrelages sont apparus dans ce complexe – où résident plusieurs centaines d’habitants – depuis le début du phénomène d’essaim de séismes à Mayotte. Ces dégâts nécessitent un étayage dans certaines zones. Cet arrêté municipal, à ne pas confondre avec l’arrêté dit de « péril imminent » qui signale un danger immédiat, permet à la personne qui le prend – en l’occurrence le maire – d’imposer au besoin la réalisation de travaux et d’interdire temporairement ou définitivement aux résidents d’habiter les lieux. De son côté, le syndic de copropriété a demandé par voie d’affiche aux locataires de ne pas stationner ou circuler dans les coursives durant les secousses, de couper l’eau en cas d’absence prolongée et de faire remonter toute information concernant les dégâts constatés dans leurs logements. Enfin, les résidents sont invités, le cas échéant, à faire une déclaration de sinistre auprès de leur assurance. Sur le document du syndic, on peut lire qu’une issue alternative a été aménagée pour faciliter l’évacuation en cas de besoin : « Nous avons laissé le portillon jardin ouvert pour laisser une échappatoire possible depuis le RDC et R+1 sur la recommandation de la DEAL (Direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement de Mayotte NDLR) et de la mairie de Koungou. « 

Séismes | « On ne peut pas annuler un examen national »

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Une réunion entre proviseurs a été organisée ce mercredi par le vice-rectorat, à l’approche du baccalauréat. Les modalités d’organisation et les consignes ont été arrêtées, prenant en compte l’essaim de séismes qui frappe actuellement Mayotte. Les épreuves sont maintenues.

« Tous les jours, il y a des secousses et on ne remet pas tout en question », souligne Nathalie Costantini. Mardi après-midi, le vice-recteur a participé à la réunion organisée par l’Udaf (Union départementale des associations familiales) de Mayotte, consacrée à l’essaim de séismes. Elle a tenu à rassurer les familles quant à la tenue des traditionnelles épreuves du baccalauréat. « On fera toujours les choses au bénéfice de vos enfants ».

Et l’activité sismique ne doit pas être vue comme une « opportunité » pour les lycéens de ne pas passer le baccalauréat. « S’il y a vraiment un séisme fort, un temps supplémentaire sera octroyé pour les candidats s’ils doivent sortir ou se mettre sous les tables. » Mais s’il y a des tremblements de terre mineurs, « les élèves doivent continuer à plancher (…) Il n’y aura pas de temps supplémentaire donné à chaque personne qui va sortir », dans ce cas précis.

Un plan B est également sur la table. « Si au moment de donner les sujets (…) ou au bout de 15 minutes, il y a une grosse secousse, de la panique, que l’épreuve est perturbée, il y a des sujets de secours prévus qu’on pourra utiliser (…) Une épreuve perturbée pourra être reprogrammée ».

« Une épreuve dans l’épreuve »

Et le vice-recteur de préciser que les correcteurs auront « un regard bienveillant » en cas de séisme. « S’il y avait une grosse secousse qui a une incidence sur la concentration des élèves, cela sera consigné dans le PV d’examen ». Nathalie Costantini considère finalement que l’essaim de séismes est « une épreuve dans l’épreuve ». « Le ministère est au courant » de la situation dans le 101ème département. « On ne peut pas annuler un examen national », d’autant que rien ne permet d’affirmer que les secousses se seront définitivement arrêtées à la même période l’an prochain.

C’est dans ce contexte que le vice-rectorat a réuni mercredi tous les proviseurs pour « revoir avec eux les modalités d’organisation et les consignes qui vont être passées aux élèves de terminale ». Le diplôme national du brevet est également maintenu. « Les CAP ont terminé leurs examens et les BTS sont en train de les terminer », précise Nathalie Costantini.

Pilier fendu et fissures

Le vice-recteur doit en parallèle gérer les dégâts occasionnés par les séismes dans plusieurs établissements scolaires. Le collège de Dembéni est le principal point noir. « Il y a un vice de construction. Il va devoir être reconstruit. Avec les secousses, le bâtiment se fragilise davantage. Nous avons condamné les deux étages. Maintenant, mais aussi à la rentrée, nous allons réaffecter les élèves ». Les 13 salles encore accessibles, situées au rez-de-chaussée, sont prévues en priorité pour l’accueil des élèves de troisième.

Une déformation du sol au sein du collège de Passamaïnty a obligé à interdire l’accès à un espace restreint en extérieur. Au collège de Tsingoni, « quelques fissures ont été constatées dans certaines salles mais les experts ont déclaré qu’il n’y a pas de risques sur la structure. Il n’y a donc aucune salle fermée mais elles devront être régulièrement vérifiées pour prévenir tout risque », précise le vice-rectorat. Un étai va être installé dans l’une des classes.

Au collège de Labattoir, « après le passage des experts et suite à leurs recommandations, certaines salles doivent faire l’objet d’une observation quotidienne après que des fissures ont été constatées. Ces salles pourront être étayées si les fissures progressent », ajoute le vice-rectorat.

Au collège de Koungou, un pilier s’est fendu de haut en bas. Douze salles sont fermées. « Les aménagements horaires impactent tous les élèves mais cela n’a aucune incidence sur le bon déroulement des cours », affirme le vice-rectorat. Enfin, au collège de Labattoir, les persiennes ont bougé. « On va les étayer, mettre des planches derrière », indique Nathalie Costantini.

« Tous les établissements construits depuis 2008 respectent les normes sismiques. Des anciens établissements, notamment une panoplie dans les années 2000, sont des établissements tout béton » qui posent davantage de problèmes avec les tremblements, reconnaît le vice-recteur.

 

Séismes | Vidéos, cellule psychologique : l’État veut rassurer

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L’essaim de séismes se prolonge et avec lui l’inquiétude d’une partie de la population. L’Union départementale des associations familiales (Udaf) de Mayotte a organisé mardi après-midi une réunion avec des acteurs locaux et l’un des experts envoyés sur l’île, Olivier Galichet, pour obtenir et diffuser des informations fiables sur le phénomène en cours. De nouveaux outils de sensibilisation et de surveillance des habitations vont voir le jour.

« Nous sommes dans une psychose », s’alarme le président de l’Union départementale des associations familiales, Nizary Ali. Alors que les familles se tournent vers la structure pour signaler leurs inquiétudes face à l’épisode sismique en cours, l’Udaf a organisé mardi après-midi une réunion avec des associations, le service social du centre hospitalier de Mayotte, le vice-recteur ou encore une représentante de l’Agence régionale de santé. Le tout en présence du lieutenant-colonel Olivier Galichet de la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises. C’est l’un des trois experts arrivés vendredi à Mayotte pour notamment « mieux communiquer auprès de la population des informations scientifiques ». Objectif de la rencontre : permettre à l’Udaf et à ses partenaires d’obtenir des éléments fiables sur le phénomène afin de les relayer aux familles.

Depuis leur arrivée, les missionnaires ont notamment planché sur la mise à jour de la foire aux questions diffusée par la préfecture. Des schémas et vidéos « pour expliquer qu’il n’y aura pas de tremblement de terre catastrophique » à Mayotte devraient rapidement voir le jour, informe Olivier Galichet. L’île aux parfums est secouée en raison de l’activité d’une « faille qui fait environ 10 kilomètres de long. Sur les séismes [puissants] de type Japon, les failles font 200 kilomètres voire plus. » L’énergie libérée est bien plus importante et de facto le séisme atteint une magnitude beaucoup plus élevée. À Mayotte, « il n’y aura pas un séisme majeur qui va tout faire tomber ». Un agrandissement de la faille, s’il se produit, prendra des millions d’années.

Une fiche d’observation des fissures

Il n’empêche. Le 101ème département fait face à un « événement inédit. Ça n’est pas une grosse catastrophe mais c’est nouveau, même au niveau de la sécurité civile. Dire qu’il faut surveiller tous les jours les fissures, ça n’a jamais été fait nulle part dans le monde, je pense. » Une fiche d’observation des fissures devait être mise en ligne dès ce mardi sur le site internet de la préfecture. Ainsi, les particuliers pourront être acteurs de leur sécurité alors que « les services, quels qu’ils soient – mairies, État, associations – ne peuvent pas envoyer des gens partout » pour surveiller la solidité des habitations. « S’il n’y a aucune fissure dans la maison, il n’y a pas de raison qu’elle tombe. Si ça commence à s’écarter suffisamment, si je peux passer un crayon dedans, il faut que je prévienne les autorités », résume Olivier Galichet. D’autant qu’un tremblement de terre légèrement supérieur au record enregistré le 15 mai (5.8 de magnitude) n’est pas écarté. Les pompiers mahorais vont être « formés pour voir si une fissure est dangereuse ou pas », révèle Olivier Galichet.

L’essaim de séismes pouvant « durer quelques mois voire plus, il faut s’habituer à vivre avec ça. Il faut accompagner les gens, qu’ils se préparent chez eux », poursuit le lieutenant-colonel, lui-même réveillé par les tremblements de terre nocturnes. Depuis le début de l’épisode sismique, il y a près de quatre semaines, une quinzaine d’habitants a été transportée à l’hôpital pour des crises d’angoisse. L’Agence régionale de santé (ARS) a constaté qu’après chaque secousse d’ampleur, le Samu recevait une dizaine d’appels en lien avec l’événement. 

L’Agence régionale de santé qui travaille à la mise en place d’une véritable cellule psychologique, avec « plusieurs niveaux proposés », développe Geneviève Dennetiere, médecin responsable de la cellule de veille et de gestion des alertes sanitaires à l’ARS. Le service de psychiatrie du centre hospitalier de Mayotte pourrait rapidement faire « une communication sur la gestion du stress ». Des interventions sont envisagées par l’ARS lors de réunions publiques dans les communes. Enfin, un numéro vert pourrait être mis en place, avec « une prise en charge psychologique » et la possibilité d’évoquer des « aspects techniques ».

Des années d’études scientifiques

La réunion de l’Udaf a également été l’occasion d’évoquer le volet hébergement d’urgence, même si une puissante secousse est écartée. La Croix-Rouge dispose en Petite-Terre de tentes et de shelters (des abris plus spacieux). L’association possède huit autres sites de stockage de matériels mobilisables dans l’océan Indien. La sécurité civile peut également dépêcher du matériel à Mayotte. En parallèle, les maires ne l’ayant pas encore fait sont invités à finaliser leur plan communal de sauvegarde, qui précise notamment les sites d’hébergement d’urgence.

Le lieutenant-colonel Olivier Galichet a tenu à rappeler qu’un tsunami n’est pas possible avec cet essaim de séismes, compte tenu du mouvement tectonique observé. De prétendus forages pétroliers, parfois envisagés comme une cause des secousses sur les réseaux sociaux, sont écartés pour expliquer l’essaim de séismes. Les sismologues, qui vont jusqu’à « surveiller la terre pour savoir s’il n’y a pas d’essais nucléaires qui se font » sont formels : les tremblements de terre sont liés au mouvement de plaques tectoniques. Un phénomène volcanique, à la marge, n’est pas exclu, précisaient toutefois les experts vendredi dernier lors d’une conférence de presse.

L’essaim de séismes « va faire l’objet d’études scientifiques pendant des années. Oui, les scientifiques vont envoyer un bateau sur place mais c’est une étude à long terme », expose Olivier Galichet. Les trois experts, quant à eux, regagneront la métropole jeudi. Ils continueront de suivre la situation à distance.

 

 

 

Ordre public | Les mouringués mis au tapis

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Après une série de débordements en marge de plusieurs mouringués, le maire de Mamoudzou a pris un arrêté interdisant ces combats. Entrée en application ce week-end, cette décision rassure les forces de l’ordre mobilisées en nombre pour l’appliquer. Pour autant, difficile d’endiguer une pratique aussi solidement ancrée dans les habitudes culturelles locales. Parmi les solutions sur la table : un encadrement des combats pour en éviter le caractère sauvage. 

« À compter de ce jour, il est strictement interdit d’organiser une manifestation publique de boxe +mouringué+ sur tout l’ensemble du territoire de la commune de Mamoudzou ». L’arrêté est clair et émane directement du maire de Mamoudzou, Mohamed Majani. Prise le 24 mai, cette décision est officiellement entrée en application ce week-end suite à une série de débordements violents et  s’appliquera « durant tout le mois de ramadan », selon Nassuf Eddeni Daroueche, chargé de la sécurité à la mairie de Mamoudzou. « C’est la première fois qu’une telle décision est prise », reconnaît-il. « Cela s’est décidé après que plusieurs élus de proximité nous ont remonté une crainte des habitants de voir ces rassemblements dégénérer en violences. Ce qui s’est confirmé après celles survenues à M’tsapéré vendredi », justifie-t-il. 

 

Une série de débordements 

 

Pour le porte-parole du syndicat Alliance police nationale Mayotte, Thierry Lizola, cette nouvelle résonne comme un soulagement. « Alliance police nationale Mayotte soutient l’arrêté du maire qui est conforme à la réalité des policiers. C’est un acte de sagesse. N’oublions pas qu’un collègue a perdu un œil en marge de ces rassemblements », rappelle le policier en référence aux affrontements survenus dans la nuit du 23 mai. Loin d’être réservés aux forces de l’ordre, les actes de violence en marge des mouringués se sont depuis poursuivis pour atteindre un pic ce week-end. « À l’issue d’un mouringué vendredi à M’tsapéré, des jeunes de Kawéni ont jeté des pierres et dégradé des véhicules.  Dès samedi, munis de l’arrêté municipal, nous sommes intervenus à M’tsapéré sur la place de la Mosquée afin d’interdire ces rassemblements de jeunes », rembobine le directeur adjoint de la sécurité publique Stéphane Demeusy. Pour mener à bien cet objectif, policiers et gendarmes ont été assistés par « l’ensemble des collectifs des localités de Mamoudzou afin de déloger plus de 250 jeunes », indique Stéphane Demeusy. 

Mécontents de ne pouvoir pratiquer leurs sessions de combat hebdomadaires, certains jeunes ont attaqué des membres de ces collectifs. Résultat : un individu dans le coma, générant ainsi un épisode de vengeance particulièrement virulent dès le lendemain matin. Selon nos informations, près de 200 à 300 personnes étaient présentes lors de la destruction de deux bangas abritant les auteurs supposés de ces violences. Une femme a également été conduite au CHM après avoir reçu des coups de bâton à la tête suite à son refus de quitter les lieux. 

 

Interdire une tradition ? 

 

Présents dans tout l’océan Indien et même jusque sur le continent africain, les mouringués s’inscrivent comme une tradition indissociable du patrimoine culturel mahorais. Au-delà de son caractère violent, ces événements sont aussi vécus par la population comme des rassemblements festifs et conviviaux. Un phénomène qui pousse les forces de l’ordre à dissocier cette pratique de ses débordements. « Il ne s’agit pas de criminaliser les mouringués sur le long terme mais plutôt de poursuivre les efforts mis en place dans lutte contre la délinquance », nuance le chargé de la sécurité à la mairie de Mamoudzou. 

D’un point de vue logistique, « nous allons effectuer dans les prochains jours des patrouilles dynamiques aux abords des zones où sont généralement pratiqués des mouringués. Si besoin est, nous occuperons également certaines places comme nous l’avons fait ce week-end », projette le directeur adjoint de la sécurité publique. Également sur la table : la volonté de « cibler les organisateurs » afin de décourager les sympathisants. 

Conscient que la répression à elle seule ne pourrait suffire à endiguer ce phénomène, Thierry Lizola plaide de son côté pour un encadrement de cette pratique : « Nous regrettons que les mouringués soient sauvages et non encadrés. Aujourd’hui, nous sommes face à des mouvements de bandes qui prennent en otage les festivités durant le mois de ramadan pour s’affronter », déplore-t-il.  À l’instar de La Réunion où le mouringué est reconnu comme une pratique sportive et bénéficie d’un encadrement, Mayotte pourrait bien emboîter le pas dans un désir de cohésion sociale. « Encadrer ces combats est une piste à explorer », admet Nassuf Eddeni Daroueche qui précise cependant que « cette initiative doit venir de la société civile. Même si la mairie est prête à accompagner ce type de démarches. Cela pourrait se faire dès le prochain ramadan. »  En attendant, l’homme mise sur les « tournois de ramadan » pour remplacer les combats par des matchs de foot ou de basket dès la semaine prochaine. En espérant que les aficionados du combat de rue ne déploient pas de nouvelles stratégies pour poursuivre leur passion à l’abri des gyrophares.  

 

Couteau sous la gorge d’un enfant

Vendredi dernier, en remontant l’escalier qui mène au parking de la plage de Jiva-Hamjago, dans la commune de Mtsamboro, un groupe de trois femmes et de deux enfants sont agressés par deux hommes qui s’étaient cachés derrière des containers. L’un deux saisit l’un des enfants et lui place un couteau sous la gorge, réclamant les sacs de plage. Les deux agresseurs ont ensuite pris la fuite avec leur butin.

Tremblements de terre | « Le gros séisme, je pense qu’on l’a déjà eu »

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Trois experts sont arrivés vendredi à Mayotte pour accompagner les services de l’État dans la gestion de l’essaim de séismes. Près de 850 tremblements de terre ont été enregistrés depuis trois semaines, faisant une vingtaine de blessés légers. « On n’aura pas de big one de magnitude 7 ou 8 », rassure un spécialiste du Bureau de recherches géologiques et minières.

Une rafale de secousses. Les Mahorais ont découvert vendredi une nouvelle caractéristique de l’essaim de séismes qui frappe Mayotte depuis plus de trois semaines, avec une succession impressionnante de tremblements de terre en matinée. Rien qu’entre 6h18 et 7h24, 13 secousses de magnitude supérieure à 4 se sont produites, dont deux de 5,2. Jusqu’à 13h20, ce sont 36 séismes supérieurs à 4 qui ont été répertoriés, pour près de 850 tremblements de terre recensés depuis le début de l’épisode sismique.

C’est dans ce contexte qu’une mission extérieure est arrivée dans l’île aux parfums le même jour. Bastien Colas, en charge d’un programme Planification et appui à la gestion des crises au Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), Mendy Bengoubou, sismologue à la Direction générale de la prévention des risques et le lieutenant-colonel Galichet de la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises vont passer « quelques jours » dans le 101ème  département, précise le préfet Dominique Sorain. « Il n’y a pas encore de limite précise à leur séjour. »

Alors que l’essaim de séismes a fait 19 blessés légers en trois semaines, dont 6 vendredi (une moitié de crises d’angoisse pour autant de chutes dans les escaliers), selon le délégué du gouvernement, les experts se sont montrés rassurants vendredi, lors d’une conférence de presse.

« 5,8, pour l’instant, c’est le pic sismique (…) On aura peut-être un 5,9 ou un 6 mais on est relativement borné du point de vue de la tectonique et de l’historicité au niveau de l’ensemble des Comores », affirme Bastien Colas. « Le gros [tremblement de terre], je pense qu’on l’a déjà eu. On peut avoir un peu plus gros mais on n’aura pas de big one, de magnitude 7 ou 8 qui va se produire (…) La magnitude d’un séisme est liée à la longueur de la faille. On n’a pas identifié dans l’arc comorien des longueurs de failles qui auraient pu générer des séismes supérieurs à 6. »

Une activité tectonique voire volcanique

« À partir des plus gros événements, on est capable de reconstituer l’origine des tremblements de terre » actuels à Mayotte, poursuit le spécialiste. « Il s’agit de ruptures le long de plans de failles situés à environ 60 km au nord-est de Mayotte (…) Tout cela est lié à la tectonique des plaques au sens large. On a des interfaces entre différentes plaques et des relais qui peuvent se faire (…) Il peut y avoir des conjonctions (…) avec des phénomènes volcaniques (…) On sait qu’on a du tectonique. On n’a pas d’élément pour préciser le volcanique (…) L’essaim peut être en lien avec un écoulement magmatique en profondeur (…) Ce serait une responsabilité partielle dans la mécanique d’essaim qui se met en place (…) On n’est pas du tout dans l’optique de la création d’un volcan », développe Bastien Colas.

L’expert se montre également rassurant, concernant d’éventuels mouvements de terrain. « On se posait la question. (…) Les niveaux d’accélération sont tellement bas que ce ne sont pas des choses attendues. » L’éboulement d’un rocher vendredi 25 mai à Majicavo est à imputer à l’épisode pluvieux et non pas à un séisme, selon lui.

Pas de risque non plus avec la sismicité actuelle d’un effondrement de Petite-Terre, qui repose sur un édifice volcanique. « Des glissements anciens qui ne sont pas datés et tout un tas de cicatrices » ont été suspectés sur la structure par le BRGM par le passé, à l’occasion d’une étude. « Ce n’est pas un scénario qui nous inquiète », insiste Bastien Colas. « Les falaises de Petite-Terre qui sont immergées sont déjà assez loin de la zone épicentrale. »

Et d’ajouter : « Pour améliorer la localisation des séismes, il va falloir améliorer le réseau d’observation. On a globalement des stations positionnées au sud-ouest » de la zone sismique. « Pour localiser un épicentre, il faut entourer la zone de l’épicentre par des capteurs, pour mieux estimer l’évolution du phénomène. » Actuellement, une station dans les locaux du BRGM à Mamoudzou enregistre et transmet les vibrations du sous-sol en temps réel. Deux autres stations collectent aussi les mouvements mais il faut « aller récupérer la donnée toutes les semaines. » 

Le 18 juin, le BRGM va installer un nouvel appareil en Grande-Terre. Il s’agit d’un sismomètre large bande, qui va permettre de recueillir de nouvelles bandes de fréquence. Un second appareil du même type est envisagé. « C’est la Ferrari des capteurs. C’est une station très sensible », commente la sismologue Mendy Bengoubou. Pour compléter ce dispositif, le BRGM peut compter sur des stations à Madagascar, au Kenya et depuis mercredi aux Comores. L’installation d’hydrophones, des stations en mer, se dessine également, pour acquérir un nouveau type d’ondes. « Aller voir sur place, pourquoi pas, mais pour aller voir quoi ? », s’interroge Bastien Colas, alors que de nombreux Mahorais réclament une exploration sous-marine. « À partir des enregistrements de stations, on peut avoir les informations qu’il nous faut pour préciser les localisations, les magnitudes, le type de séismes et savoir s’il y a des écoulements de fluide », met-il en exergue.

Vers des inspecteurs de diagnostic d’urgence

Les experts en mission à Mayotte vont également se concentrer sur les dégâts provoqués dans les constructions. « Les bâtiments sont tous à peu près fissurés. Il faut bien identifier là où il pourrait y avoir des risques », souligne le préfet. Les services de l’État évoquaient il y a quelques jours une soixantaine de bâtiments endommagés, mais un seul a nécessité à Mamoudzou une consolidation d’ampleur. « Il n’y a pas eu de recrudescence de signalements depuis », précise Dominique Sorain. « Mayotte est concernée par l’autoconstruction qui ne passe pas forcément par des architectes, des entreprises (…) Ce sont des défis que nous avons (…) Il y a un effort gigantesque à faire en matière de mise en sécurité et de construction de bâtiments », reconnaît le représentant de l’État.

Ainsi, Mendy Bengoubou va sillonner l’île aux parfums pour constater l’ampleur des dégâts. Actuellement, deux cabinets d’étude proposent des expertises payantes pour s’assurer de la solidité des constructions. Il n’est « pas exclu que des inspecteurs de diagnostic d’urgence fassent le tour des bâtiments » aux frais de l’État, à l’issue de la mission. La démarche est « courante après des séismes, lorsqu’ils ont été très importants », précise la sismologue. « Il y a pour l’instant un niveau d’endommagement situé dans le niveau 1 d’une échelle qui va jusqu’à 5 », ajoute Bastien Colas.

Malgré tout, l’État se prépare à un scénario catastrophe, semble-t-il improbable. Les services de secours de Mayotte sont en alerte et ceux de La Réunion et de la métropole en pré-alerte. « Un exercice a été fait en début d’année pour recenser l’ensemble des moyens qu’on pourrait envoyer », rappelle le lieutenant-colonel Galichet, officier de liaison avec le ministère de l’Intérieur.

La mission des trois experts vise aussi à « voir les améliorations éventuelles à apporter en termes de communication, de culture du risque, de sensibilisation », évoque Mendy Bengouhou.

 

 

Point sur les dernières activités sismiques

Durant la nuit du 1er  au 2 juin et durant la journée du 2 juin, l’activité sismique « reste notable avec d’assez nombreuses secousses modérées enregistrées », note la préfecture de Mayotte. « Un séisme fortement ressenti à 10h42, estimé à 5,2, est localisé dans la zone de l’essaim précédé par un événement de magnitude 4,5 à 6h16. Un séisme évalué à 5 par les centres de mesures internationaux a été ressenti (dimanche) à 9h13 à Mayotte. L’activité sismique reste toujours anormale et perdure, y compris dans la plage de magnitude des séismes pouvant être ressentis à Mayotte. L’essaim est donc toujours en cours », rappelle la préfecture.

 

Graffiti : une histoire mahoraise

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C’est une histoire belle, récente, et loin d’être terminée : Celle du graffiti dans l’île aux parfums. Bien qu’encore réservée à une poignée d’individus, leurs réalisations sont parmi les plus visibles sur le territoire. Un travail généralement apprécié par la population comme par les pouvoirs publics qui sollicitent de plus en plus ces artistes. Une belle histoire donc, qui conserve néanmoins son caractère subversif, et son lot de polémiques.  

« Voilà ! là il a une bonne tête mon maki ». Sur le terrain de boules proche du stade de Cavani, un artiste au look remarquable fait cracher ses bombes de peinture. Dreads interminables, pendentif africain et tee-shirt aux couleurs de la Jamaïque, le graffeur s’attelle à sa mission du jour : Dessiner un maki jouant à la pétanque. Pourquoi cet animal ? « C’est en quelque sorte ma signature », introduit-il. « Le maki est un emblème de Mayotte. Tout le monde peut se reconnaître dans cet animal, que vous soyez noir, m’zungu ou autre ». 

Cet artiste, c’est Papajan. Personnage bien connu des Mahorais, notamment dans le quartier de Cavani où il s’exerce régulièrement. Malgré son statut officieux d’ambassadeur du graffiti mahorais, l’homme de 45 ans, qui en parait vingt de moins, préfère se définir comme « un artiste », plutôt qu’un « graffeur ». « J’ai toujours aimé la peinture. Avant même de m’intéresser au graffiti en tant que tel, je peignais déjà sur les toiles et sur les murs », rembobine-t-il sourire aux lèvres. A fin des années 2000 l’homme découvre le graffiti grâce à une association incontournable dans le milieu du Street-Art mahorais : Hip-Hop évolution

Bien que concentré sur la danse, l’association accorde également une grande importance au graffiti qui demeure l’une des disciplines les populaires du hip-hop. « Lorsqu’Hip-hop évolution a commencé à organiser des battle de break danse à Mayotte, j’ai pu rencontrer des graffeurs étrangers et m’intéresser à cette discipline. En ramenant des bombes et des artistes, ils ont introduit des pratiques qui n’ont depuis jamais quitté le territoire », se souvient Papajan. Parmi ses rencontres : le graffeur Dezer dont les œuvres sont particulièrement visibles sur l’île. « A Mayotte il y a beaucoup de murs et palissades dégueullasses, donc beaucoup de choses à embellir. Les gens aiment la couleur. Tu peins un mur puis les gens te demandent de peindre le leur. C’est assez facile », apprécie l’artiste.  Un constat qui fait échos à une veille pratique mahoraise : l’embellissement des bangas avec le maximum de couleurs pour attirer le regard.

 

Mes galères de graffeurs dans l’océan indien 

En dépit de l’engouement provoqué par les interventions d’Hip-hop évolution, difficile pour le graffiti de pénétrer les habitudes des Mahorais. En cause notamment : la difficulté pour se fournir en bombes. « Pendant longtemps, on importait des bombes comme on importe du cannabis : en les cachant du mieux possible dans le fond sa valise. Ces dernières étant sous pression, il est en effet illégal de les faire transiter par avion sans déclaration ». Une galère bien connue d’un autre monument du graffiti dans l’océan indien ayant officié à Mayotte: Jace, l’artistes aux petits personnages sans visages appelés « gouzous ». « A la Réunion dont je suis originaire, nous avons longtemps fait office d’apprentis sorcier question peinture. On se débrouillait du mieux possible en bricolant des bombes et des couleurs avant que des magasin spécialisés fassent leur apparition », explique-t-il. Aujourd’hui, Papajan a réussi a décrocher une subvention lui permettant de commander des bombes en masse. Sa dernière folie ? « J’ai commandé une palette entière de bombe pour 2000 euros auxquels s’ajoutent 2000 euros de frais d’importation. Cela me permet de ne jamais être en galère tout en revendant ces bombes à d’autres artistes ».

Malgré cette difficulté, l’histoire du graffiti à Mayotte continue de s’écrire, notamment grâce aux commandes initiées par les pouvoirs publics. L’une des plus emblématiques : la peinture d’une fresque à la prison de Majicavo par Jace en 2014. « C’est quelque chose de fort de se dire que son œuvre va être vue tous les jours par ces hommes, parfois pour le reste de leur vie », explique l’artiste. Pour autant, cette volonté des institutions de récupérer un art populaire via des projets rémunérés n’est pas du goût de tout le monde. « C’est toujours difficile pour artiste que d’être dicté dans son travail par une institution. Mais en l’absence du statut d’intermittent du spectacle à Mayotte, les graffeurs n’ont pas d’autres choix pour vivre de leur passion », analyse Sophie Huvet administratrice bénévole à Hip-hop évolution.

Quand la jeunesse prend le relai 

A des kilomètres de cette vision du graffiti se trouve son visage le plus subservif : « le vandal ». Une pratique employée généralement par la jeunesse pour marquer son influence dans le quartier sans aspect esthétique. « Le graffiti est bien souvent utilisé par des petites bandes pour revendiquer des territoires », analyse Thierry Lizola porte parole du syndicat Alliance Police à Mayotte. 

Mais fort du travail de sensibilisation mené par ce qu’il est désormais convenu d’appeler « les anciens du graffiti », la jeunesse s’approprie également le graffiti dans d’autres aspects moins polémiques. En témoigne le travail mené par  le lycéen Ahmed Issouf  Naïsse 19 ans. Financé par Hip-hop évolution, le jeune garçon mène chaque semaine des actions pour embellir les rues de son quartier de Mandzarisoa avec d’autres jeunes. « A force d’accompagner Dezer sur le terrain j’ai commencé à me passionner pour le graffiti, et Hip-hop évolution m’a aidé à monter ce projet. Dezer c’est mon modèle, Sophie : presque une seconde mère », explique celui qui rêve de devenir pompier. Pompier le jour et graffeur la nuit ? « Pourquoi pas… Mais il faudra que je fasse attention à ne pas me faire choper ». 

 

Séismes | Des « scientifiques spécialistes en sismologie » à Mayotte

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Alors que l’essaim de séismes se poursuit sur l’île aux parfums, Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre de l’Intérieur, a annoncé mardi soir le « déploiement prochain d’une mission d’expertise interservices composée notamment de la sécurité civile et de scientifiques spécialistes en sismologie ».

L’activité sismique se poursuit dans le 101ème département. Mayotte a encore tremblé mercredi matin, avec notamment deux secousses très rapprochées, à 8h53 et 8h54. Le plus fort des deux tremblements était d’une magnitude estimée à 5,3 voire 5,4 par le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM). D’autres séismes ont suivi, conduisant entre autres à l’évacuation une dizaine de minutes du tribunal de grande instance de Mamoudzou.

Ces nouvelles secousses interviennent au lendemain de plusieurs annonces, par la ministre auprès du ministre de l’Intérieur. Interrogée à la Chambre haute par le sénateur mahorais Thani Mohamed Soilihi, Jacqueline Gourault a annoncé que « des échanges sont en cours au niveau interministériel pour préparer le déploiement prochain d’une mission d’expertise interservices composée notamment de la sécurité civile et de scientifiques spécialistes en sismologie ».

Par ailleurs, bien que peu probable, l’État se prépare à une forte secousse, conduisant à des dégâts d’ampleur. « Notre état-major de zone et de protection civile de l’océan Indien a dépêché au cours de ces derniers jours une mission de reconnaissance pour anticiper une éventuelle projection de renforts et préparer le plan d’intervention », a précisé la ministre.

« Il est à prévoir que cette activité perdure sans à ce stade pouvoir en donner une durée précise (…) Quelques dégâts matériels font tous l’objet d’expertises, notamment dans les écoles de Longoni et de M’gombani. L’État mobilise aussi l’ensemble de ses services pour y répondre », a ajouté Jacqueline Gourault.

Peu avant, le sénateur Thani Mohamed Soilihi avait souligné que « cette activité [sismique] (…) dont l’intensité et la durée demeurent incalculables terrorise légitimement la population. La propagation de rumeurs sur les réseaux sociaux alimente la panique générale entraînant ainsi la saturation des standards des lignes de secours. La population, peu informée sur la conduite à tenir en pareille situation, préfère passer la nuit dehors (…) Eu égard à la précarité de l’habitat, les dégâts commencent à se faire sentir (…) Les habitations privées sont (…) touchées. S’il appartient aux propriétaires de mandater un expert pour faire constater les dommages subis, peu de familles ont en réalité les moyens financiers de faire réaliser cette expertise et le cas échéant de se reloger », s’est désolé le parlementaire, qui a souhaité une mobilisation immédiate de « moyens exceptionnels pour mieux diagnostiquer le phénomène, accompagner les familles les plus modestes mais également pour que collectivement, État, Département et communes soient mieux préparés à faire face à une crise majeure ».

À noter que la préfecture a mis en place une adresse mail (seisme@mayotte.pref.gouv.fr) « afin d’apporter des réponses aux questions que se posent encore les habitants sur ce phénomène (…) Cette adresse ne se substitue pas à la nécessité des habitants de signaler aux mairies les dégâts constatés sur les bâtiments et dans les sols« , a indiqué la préfecture par voie de communiqué mardi soir.

 

 

Séismes | Des salles de classe fermées par précaution

« À titre de précaution », des salles de cours ont été fermées dans des établissements du premier et du second degré, en raison de dégâts causés par l’essaim de séismes. À M’tsamboro, par exemple, le maire a décidé de fermer huit salles de classe ce lundi.

« Il n’y a aucune raison que les parents n’envoient pas leurs enfants à l’école », rassure le directeur de cabinet du vice-rectorat, Didier Cauret. Alors que l’essaim de séismes a causé quelques dégâts dans les établissements scolaires, le responsable indique que trois à quatre salles de classe ont été fermées dans les établissements secondaires de Dembéni, Koungou et M’gombani. À Dzoumogné, un périmètre de sécurité a été établi autour de la cheminée d’une ancienne usine sucrière, mais aucune salle de classe n’a été fermée. À Dembéni, une salle polyvalente a été condamnée, en plus de trois salles de cours. C’est l’établissement le plus impacté par l’essaim de séismes. « Ils ont réorganisé les emplois du temps et utilisent des ateliers pour les salles devenues indisponibles », détaille le directeur de cabinet. Aucun cours n’a été supprimé dans les établissements du secondaire.

« À chaque doute, on fait venir l’un des deux cabinets d’expertise », poursuit-il. Près de la moitié des établissements du secondaire ont été passés au crible, en raison de l’essaim de séismes. Les experts peuvent passer à chaque nouvelle secousse d’ampleur sur certains sites.

Pas de cours dans des écoles

Côté écoles primaires, le vice-rectorat n’était pas lundi soir en possession de toutes les informations. À Bandrélé, trois salles de classe ont été fermées par le maire. À Ouangani, un bâtiment entier de l’école maternelle Barakani 2 a été fermé mais il ne comporte qu’une salle de classe. 

« Il se peut qu’on soit entré en rotation pour accueillir les élèves dans des écoles qui n’y étaient pas », imagine-t-il, en attendant d’avoir toutes les remontées de terrain. Il faut dire que, du côté des établissements primaires, « on est plutôt dans l’accompagnement. On a demandé à nos directeurs d’école et nos inspecteurs de signaler aux mairies d’éventuels dégâts. Ce sont les maires qui appellent la préfecture. »

Puis le directeur de cabinet de préciser que, lors des précédents séismes, deux ventilateurs sont tombés à Doujani et un néon à Passamaïnty dans des établissements scolaires.

À M’tsamboro, des fissures présentes sur les murs ont condamné huit salles de classe à fermer pour un temps, ce qui représente plus de 150 élèves mais « les cours ont bien lieu », assure le directeur général des services (DGS) de la mairie de la commune, Assadillah Abdourahamani. Pour pallier le manque de structures, l’école a mis en place un fonctionnement en rotation. « Certains ont cours le matin quand d’autres viennent à l’école l’après-midi. Nous attendons encore les conclusions du bureau d’étude, qui est en charge de vérifier la solidité des bâtiments, pour ouvrir à nouveau les salles aux élèves ». La mairie devra débourser entre 800 et 1 000 euros pour connaître la décision des experts. Les conclusions devraient arriver cette semaine, espère le DGS. La situation est semblable à Koungou puisque les deux écoles primaires de la commune ont également été fermées, ce lundi, par arrêté municipal.

Dimanche soir, la préfecture a indiqué par voie de communiqué que dans le premier degré, « certaines classes ou certaines écoles ont fait l’objet de fermeture temporaire à titre de précaution, notamment à Acoua, Bandrélé, Chiconi, Koungou, Mtsamboro, Mamoudzou, Ouangani ». 

D’autre part, la commune de Chiconi a pris les devants en lançant depuis plusieurs semaines un projet d’installation d’un sismomètre dans le collège. « Le projet est en cours de réalisation », indique Frédéric Tronel, le directeur régional du Bureau de recherches géologiques et minières. Le capteur permettra de mesurer les mouvements du sol. 

 

Décès d’une fillette

À Combani, dimanche, une enfant de 4 ans est décédée après être tombée dans les latrines, alors qu’elle était sous la surveillance de sa grande soeur. Suite à sa disparition, la famille a appelé la gendarmerie puis les pompiers. La dalle des latrines a été cassée au marteaupiqueur, ce qui a permis de retrouver le corps de la fillette.

Hommage | Le sénateur Adrien Giraud rejoint le « panthéon mahorais »

Les hommages se multiplient depuis le décès jeudi soir à l’âge de 81 ans de l’ancien sénateur de Mayotte Adrien Giraud. Il a su « se dresser, résister et mobiliser pour maintenir, avec succès, notre liberté collective », déclare notamment le député Mansour Kamardine.

L’ancien sénateur de Mayotte Adrien Giraud est décédé jeudi soir au centre hospitalier de Mayotte à l’âge de 81 ans. Membre du groupe Union centriste au Sénat, il était directeur de société hôtelière de profession. Il avait été secrétaire de la commission des Affaires sociales durant son mandat de sénateur. Il avait également présidé le MDM (Mouvement pour le développement de Mayotte). 

Depuis l’annonce de son décès, les hommages se multiplient dans le 101ème département. « Mayotte perd (…) un de ses enfants terribles qui, lorsque tout semblait compromis, a su, avec quelques autres, se dresser, résister et mobiliser pour maintenir, avec succès, notre liberté collective. Il fait partie du panthéon mahorais des défenseurs résolus de Mayotte française et de la départementalisation », déclare le député du parti Les Républicains Mansour Kamardine, par voie de communiqué. « Il aura montré le chemin aux nouvelles générations », souligne également le parlementaire sur son compte Twitter.

Un héros pour le maire d’Acoua

Ahmed Darouechi, le maire d’Acoua, « au nom de l’ensemble des élus et de toute la population de sa commune, présente ses condoléances les plus attristées à la famille du sénateur Adrien Giraud qui a, pendant douze années, exercé les fonctions de conseiller général d’Acoua. Le souvenir indélébile de ses services exceptionnels rendus au canton d’Acoua et à Mayotte toute entière restera à jamais gravé dans la mémoire de tous les Mahorais. Qu’il repose à jamais en paix avec tous les autres héros de notre département », rend hommage l’élu.

Le Conseil économique social et environnemental de Mayotte (Cesem) salue de son côté un « homme de dialogue, militant de la première heure pour l’accès de Mayotte au statut du Département au sein de la République française (…) Le Cesem tient à saluer sa mémoire et sa disponibilité pour le combat de Mayotte Département et en faveur du développement du territoire. »

« C’est avec beaucoup de regret que la ville de Mamoudzou a appris le décès de Monsieur Adrien Giraud, un grand Homme, qui a œuvré pour le combat de +Mayotte Française+ », met de son côté en exergue le maire de Mamoudzou, Mohamed Majani.

« Mayotte perd un grand homme qui unissait la capacité d’action et de réalisation. Adrien Giraud s’est engagé durant toute sa vie pour l’amélioration des conditions de vie des Mahoraises et des Mahorais », salue le président du Conseil départemental, Soibahadine Ibrahim Ramadani. « Par son courage et par sa détermination, il était un ardent défenseur de la départementalisation et de l’ancrage de Mayotte dans la République. » Le Département a mis en place des rotations gratuites de la barge pour les piétons, dimanche, afin que les Mahorais puissent participer aux cérémonies funéraires, qui ont eu lieu à l’église Saint-Michel de Dzaoudzi.

 

Immigration clandestine | Un sous-préfet d’un nouveau type

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Le nouveau sous-préfet en charge de la lutte contre l’immigration clandestine, Julien Kerdoncuf, a présenté hier à la presse ses missions. Il a également répondu aux questions relatives à la suspension des reconduites à la frontière et à la fermeture partielle du bureau des étrangers. 

 

Julien Kerdoncuf est unique en son genre. Il occupe en effet le seul poste en France de sous-préfet en charge de la lutte contre l’immigration clandestine, spécialement créé pour Mayotte, une promesse de la ministre des Outre-mer Annick Girardin. Arrivé sur le territoire il y a une dizaine de jours, le jeune énarque, ancien directeur de cabinet du préfet de l’Ain et ayant travaillé à l’étranger, a rencontré la presse mahoraise pour exposer ses missions.

« Je suis ici pour muscler le dispositif de lutte contre l’immigration clandestine », a-t-il déclaré lors de ses propos liminaires. Le sous-préfet a ensuite détaillé ses trois missions principales : la coordination des différents acteurs de la lutte contre l’immigration clandestine afin « d’avoir une vision globale », a complété le préfet également présent lors de ces échanges ; le renforcement du travail partenarial avec les élus et la société civile et notamment en termes de partage d’informations ; et un « travail en profondeur » consistant à opérer sur l’ensemble des problématiques liées à l’immigration clandestine (habitat illégal, marchands de sommeil, reconnaissances frauduleuses de paternité, etc.) « Il ne s’agit pas que de s’occuper des reconduites à la frontière, mais il faut agir sur tout l’écosystème », a expliqué Julien Kerdoncuf qui a affirmé vouloir « trouver une solution durable » et des « réponses concrètes ». 

Dans cet objectif, un état-major « élargi » – déclinaison pour la lutte contre l’immigration clandestine du traditionnel état-major de sécurité – se tiendra à la fin de cette semaine et réunira, outre les acteurs classiques et entre autres, la Dieccte pour les aspects liés au travail illégal, la Direction des finances publiques mais aussi l’Agence régionale de santé pour les questions sanitaires et l’établissement de statistiques. En outre, d’ici l’été, un groupe d’enquête sur l’immigration clandestine sera créé, pour mener des « enquêtes sensibles et d’envergure », a indiqué le préfet, Dominique Sorain, pour remplacer l’ancien GIR (Groupe d’intervention régional). Pour les autres annonces, Julien Kerdoncuf a préféré laisser planer une forme de « suspense », selon ses propres termes. 

Pas d’enveloppe spécialement allouée à l’ensemble de ces missions, si ce n’est ce qui a d’ores et déjà été détaillé dans le plan présenté par la ministre des Outre-mer le 15 mai dernier, à savoir, entre autres, l’arrivée d’un troisième escadron qui pourra être affecté à des missions de lutte contre l’immigration clandestine, des renforts d’effectifs du côté de la police aux frontières et l’arrivée en septembre de deux intercepteurs neufs mais qui ne gonfleront pas la flotte, qui seront « en substitution pour maintenir le niveau opérationnel de l’unité » composée de sept navires, a précisé le préfet.

« Le travail continue »

Interrogé sur les actions de lutte contre l’immigration clandestine alors que l’Union des Comores refuse de réadmettre ses ressortissants expulsés depuis deux mois, Julien Kerdoncuf a confirmé « que les éloignements étaient suspendus » mais a réaffirmé que « le travail continue ». Ainsi, 6 000 obligations de quitter le territoire français (l’OQTF est une décision préfectorale obligeant l’étranger en situation irrégulière à quitter le territoire par ses propres moyens dans un certain délai) ont été délivrées depuis le début de l’année. « Le jour où on recroise [l’individu ayant fait l’objet d’une OQTF], le document administratif a déjà été rédigé, on gagne du temps », a assuré Julien Kerdoncuf. En attendant, des individus retenus au centre de rétention administrative (CRA) ont été relâchés, ayant atteint le délai maximal de rétention prévu par la loi, a admis le préfet. 

Cependant, depuis le début de l’année, 4 800 personnes ont été éloignées même si le chiffre global annuel en 2018 devrait être « en retrait » par rapport aux années précédentes en raison de la crise diplomatique. « C’est mathématique », a déclaré Julien Kerdoncuf. Dès qu’une issue est trouvée au conflit diplomatique, « on reprend le travail. En attendant, on s’y prépare (…) On est dans les starting-blocks », a assuré le sous-préfet. « Par définition, le travail diplomatique ne peut pas vraiment être médiatisé (…) Il se fait en coulisses » mais ce travail se poursuit, a-t-il promis.

Le mystère du bureau des étrangers

Julien Kerdoncuf rencontrera les élus « pour préciser leurs attentes » la semaine prochaine et devrait également échanger avec le Collectif et l’intersyndicale à l’origine du mouvement de lutte contre l’insécurité. S’il admet « comprendre l’exaspération des Mahorais », il les incitera à ne « pas agir en dehors de tout cadre juridique » et à se rapprocher de leur mairie, de la police et de la gendarmerie. « Mais tout ne sera pas possible », a-t-il encore averti, notamment lorsque les personnes incriminées par des villageois sont en situation régulière : « On ne pourra pas intervenir » dans ces cas-là, a-t-il déclaré. 

Enfin, sur la question de la fermeture partielle du service des migrations et de l’intégration de la préfecture, Julien Kerdoncuf est resté très évasif : « Le bureau des étrangers n’est ouvert que sur rendez-vous pour les renouvellements et aucune première demande n’est reçue aujourd’hui », sans préciser les raisons de cet état de fait et renvoyant au secrétaire général de la préfecture Éric de Wispelaere pour toute autre précision.

 

 

 

 

À l’assaut des reconnaissances frauduleuses de paternité

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Venu pour présenter le nouveau dispositif destiné à lutter contre les reconnaissances frauduleuses de paternité, le procureur de la République a hier longuement rencontré les membres du Codim au sein des locaux de la mairie de Kani-Kéli.

Il s’était à l’origine déplacé jusque dans le sud, à la mairie de Kani-Kéli, pour présenter le nouveau dispositif destiné à lutter contre les reconnaissances frauduleuses de paternité. Le procureur de la République, Camille Miansoni, a tout d’abord visité les locaux des services d’état civil en présence du maire de la commune puis a symboliquement participé à l’accrochage d’une affiche de sensibilisation trilingue (en français, shimaoré et arabe) en présence du directeur adjoint de la police aux frontières de Mayotte. Cette affiche devrait bientôt être visible « dans toutes les mairies, toutes les maternités et les grands services qui accueillent du public », a promis Camille Miansoni. 

Une opération de sensibilisation nécessaire puisqu’une loi de 2011 condamne désormais la reconnaissance d’un enfant « aux seules fins d’obtenir, ou de faire obtenir, un titre de séjour ou le bénéfice d’une protection contre l’éloignement, ou aux seules fins d’acquérir, ou de faire acquérir, la nationalité française ». Le contrevenant risque 5 ans d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende et davantage, s’il est prouvé que l’infraction est commise en bande organisée (10 ans d’emprisonnement et 750 000 euros d’amende). « Ce que je suis venu dire, c’est que c’est fini », a martelé le procureur qui a ajouté : « Personne ne pourra plus dire : je ne savais pas que c’était sanctionné ».

Le nouveau dispositif initié par le parquet et la police aux frontières consiste en la mise en place d’un schéma de signalement des fraudes soupçonnées efficient, des mairies et des maternités jusqu’au ministère public, avec des formations, notamment d’officiers d’état civil. Depuis le début de l’opération (en fin d’année dernière), ce sont 11 procédures qui ont été enregistrées, selon le procureur de la République. L’une d’entre elles a d’ailleurs fait l’objet d’une garde à vue hier et implique un couple dont la femme serait intermédiaire et aurait permis de reconnaître 5 enfants. « Il y a des réseaux, des organisations avec une dimension financière », a encore alerté Camille Miansoni.

Rencontre inopinée

Invité à prendre part à des échanges informels avec une partie de la population s’étant déplacée spécialement pour le rencontrer, le procureur de la République a longuement discuté hier avec une quinzaine de membres du Codim (Comité de défense des intérêts de Mayotte, groupe ayant notamment participé aux opérations de décasages de 2016, NDLR), s’étant également présentés comme des « délinquants du carrefour N’gwézi » (un des barrages du Sud les plus farouchement tenus durant le mouvement social, NDLR). Un chouïa désarçonné au début, le procureur de la République a réfuté le qualificatif de « délinquants » face aux ex-barragistes, en appelant à leurs responsabilités de citoyens et de pères et de mères de famille. 

Alors que les échanges, courtois, ont tourné autour de l’immigration clandestine et de ses corollaires (habitats et emplois illégaux, etc.), Camille Miansoni a condamné ceux qui cherchent à se faire justice eux-mêmes. « On ne supprime pas de la délinquance en faisant de la délinquance », a-t-il déclaré, conviant les habitants en colère à se rapprocher de la gendarmerie en cas d’incident. « Je ne suis ni contre les gendarmes, ni contre vous », a insisté une habitante remontée : cette dernière se serait fait agresser, aurait porté plainte auprès de la gendarmerie mais cette plainte serait restée sans effets, selon elle. Après avoir promis de se pencher sur ce cas particulier, le procureur a demandé à ce que les Mahorais « aient confiance dans les institutions ». « On a besoin de vous », a-t-il assuré, interrogeant à la ronde : « Il y a eu un meurtre à Sohoa, pourtant, on n’a pas de témoignages, c’est bizarre, non ? ». Silence dans la salle, d’abord. « On a fait des listes de gens qui hébergent des clandestins (…) et rien n’a été fait », a ensuite rétorqué un membre du Codim.

Le procureur a également dû répondre aux remarques sur l’habitat illégal, expliquant que lorsque les personnes sont en situation régulière sur le territoire, il peut être long de reloger ces familles, souvent avec enfants, et qu’il fallait rester confiant dans le travail de l’État.

Enfin, les mots « guerre civile » ont largement été employés au cours des échanges : « Nos aînés se sont battus (…) Tant que les Mahorais n’auront pas ce qu’ils veulent, on continuera à marcher », quitte à ce qu’il y ait des morts et que les Mahorais fassent des « sacrifices », affirme un membre du Codim ayant activement participé au mouvement de lutte contre l’insécurité. « La guerre civile, (…) personne n’en sort gagnant », a averti Camille Miansoni. « Il faut tout faire pour éviter cette extrémité ».

 

 

Séismes | Plus de 700 secousses

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« L’enjeu, c’est d’acculturer la population à ce risque »

Une sensibilisation aux consignes de sécurité lors de séismes a été organisée lundi matin à Bandrélé, au douzième jour d’une série de tremblements de terre à Mayotte, en présence du directeur de cabinet du préfet. L’État se prépare à une éventuelle magnitude supérieure à celles observées mais se veut rassurant, alors qu’une partie de la population dort toujours à la belle étoile.

« À 6 [de magnitude], on aurait effectivement plus de dégâts », reconnaît Étienne Guillet, directeur de cabinet du préfet lors d’une discussion à bâtons rompus avec des habitants. Il a participé lundi matin à Bandrélé à la demi-journée de sensibilisation auprès de la population sur les consignes de sécurité à adopter en cas de catastrophe naturelle et notamment de tremblement de terre. Elle était pilotée par la Croix-Rouge au douzième jour de l’essaim de séismes qui frappe Mayotte et alors que la nuit de lundi à mardi a été marquée par trois séismes rapprochés (entre 3h47 et 4h05 dont le plus fort de 5,5 de magnitude), ressentis par une grande partie de la population.

Un dispositif d’urgence

« On se prépare » à un éventuel tremblement de terre de magnitude supérieure à celles enregistrées, évoque Étienne Guillet. Tentes et médicaments sont prêts à être envoyés depuis Paris et La Réunion, en cas de catastrophe. Des personnels de secours seraient également mobilisés. « Pour le moment, on n’appuie pas sur le bouton. On n’a pas de raison de le faire », rassure le directeur de cabinet du préfet.

« On est dans un phénomène d’essaim de séismes avec des magnitudes limitées à 5,8 (…) Je ne dis pas que c’est la plus haute qu’on aura [mais] ce n’est pas prévu qu’on aille au-dessus. Ça ne fait que 30 ans qu’on étudie le système [sismique] à Mayotte (…) On est dans des microphénomènes à l’échelle géologique », indique le sous-préfet. « Il y a eu plus de 700 secousses en 10 jours, avec une majorité en dessous de 3 [de magnitude], non ressentie par la population ». Le phénomène est « lié a priori au rift est africain » et à « un glissement de plaques. Il n’y a pas de subduction donc pas de risque de tsunami (…) C’est potentiellement une plaque qui se scinderait », détaille-t-il.

Des propos qui ne rassurent pas tous les habitants de Bandrélé, parfois radicaux dans leurs mesures de protection. « Avec ma mère et les voisines, on dort carrément dehors depuis une semaine », livre Sara, 25 ans, malgré les propos rassurants des autorités. « Ça me perturbe. On n’a pas l’habitude. » À la suite du séisme conséquent de mardi dernier (5,8 de magnitude), de nombreux habitants avaient déjà dormi à la belle étoile.

« Tous les jours, il y a un gros coup de flippe », déplore Isabelle Carcy, une autre habitante de Bandrélé. « Toutes les nuits, on est réveillés. Ce qui est inquiétant, c’est la fréquence des séismes », poursuit-elle, sifflet à la main, offert lors de l’initiation. « L’enjeu, c’est d’acculturer la population à ce risque », fait savoir Étienne Guillet. Le vice-rectorat a organisé des interventions dans tous les établissements scolaires pour rappeler les bons gestes en cas de séisme (voir notre brève, NDLR). L’intervention menée par la Croix-Rouge est appelée à s’étendre à d’autres communes.

Un « catakit » présenté

Lundi matin, 18 membres de l’organisme ont été mobilisés à Bandrélé. Une plaquette a été préparée de concert avec la préfecture, détaillant les gestes à adopter avant, pendant et à l’issue d’un tremblement de terre. Elle a été adaptée au phénomène singulier de l’essaim de séismes, pouvant durer quelques jours ou davantage. Le « catakit », un kit à prévoir en vue d’une catastrophe, a aussi été détaillé à la population par la Croix-Rouge (couverture de survie, trousse de secours, lampe, etc.). 

« Il y a des équipes de formateurs avec du matériel en mairie qui apprennent certains gestes essentiels : lors d’un arrêt cardiaque, pour faire des dégagements d’urgence, etc. », livre Houlam Haladi, chef d’intervention secourisme et responsable territorial du soutien psychologique à la Croix-Rouge. En parallèle, deux autres équipes ont sillonné les rues de Bandrélé pour aller directement à la rencontre des habitants, en compagnie d’Étienne Guillet.

« On a la peur dans le ventre qui s’est installée », livre dans ce contexte Murielle Lignon, professeur au collège de Dembéni. Ce dernier, qui a un problème de malfaçon initiale et dont les structures avaient été consolidées, a fait l’objet de plusieurs diagnostics depuis le début de l’essaim de séismes. « Pour l’instant, les fissures n’ont pas bougé », précise Étienne Guillet. Au sein du même établissement, « les enfants sont terrifiés. Des élèves se mettent sous les tables au moment des tremblements », affirme un personnel du collège.

Quelques fissures ont été observées sur des bâtiments depuis le début de l’épisode sismique. L’un d’eux, aux Hauts-Vallons, a fait l’objet d’une expertise, déclare le directeur de cabinet du préfet. Il invite la population à faire remonter tout dégât en mairie et les propriétaires à faire un diagnostic des bâtiments fissurés. Deux entreprises le proposent à Mayotte. À Sada, une famille a été hébergée par la mairie, après que la gendarmerie a constaté des fissures dans l’habitation. « Il y a des maisons qui sont entre guillemets mal construites » malgré les normes sismiques en vigueur, affirme Étienne Guillet. Aucun dégât majeur n’a toutefois été constaté.

 

Risques naturels | Des explications sur les séismes qui touchent Mayotte

Docteur en géophysique, Jean Roger a notamment travaillé sur l’étude des risques de tsunamis à Mayotte. Il apporte son expertise sur le phénomène sismique qui touche actuellement l’île.

Flash Infos : L’expression « essaim de séismes » est largement répétée pour expliquer les nombreux tremblements de terre qui sévissent actuellement à Mayotte. Que veut réellement dire cette expression ?

Jean Roger : Un essaim de séismes, c’est simplement une succession de séismes survenant au même endroit. Il est impossible d’en déterminer la durée à l’avance.

F.I. : Concrètement, dans notre cas, que se passe-t-il ?

J.R. : Il existe, entre l’Afrique et Madagascar, ce qu’on appelle la ride de Davie. C’est un endroit où la matière qui constitue la plaque océanique est créée. Pour résumer grossièrement, la création de cette matière amène Madagascar et le continent africain à s’éloigner l’un de l’autre, ce qui entraîne un étirement de la plaque océanique. C’est cet étirement de la plaque qui est à l’origine des séismes ressentis actuellement. C’est comme si vous preniez de la pâte à modeler et que vous tiriez dessus : certains endroits vont se déchirer.

F.I. : Est-il possible de savoir combien de temps ce phénomène va durer ?

J.R. : Non, la sismicité ne peut pas être prédite. On connaît les différentes failles, les différentes plaques océaniques mais il est impossible d’anticiper les secousses sismiques. Pourtant, beaucoup de scientifiques tentent de déterminer des signes précurseurs, en étudiant par exemple l’alignement des planètes, mais rien n’a été établi.

F.I. : Pourquoi les secousses ne sont pas ressenties de la même façon par tout le monde ?

J.R. : Il y a certaines zones où les ondes résonnent davantage, notamment les zones marécageuses. Donc, selon si l’on habite sur une ancienne mangrove asséchée, au pied d’une montagne ou en hauteur, le séisme sera ressenti différemment. On appelle cela les effets de site.

F.I : Quels sont les risques concrets d’assister à Mayotte à un séisme suffisamment puissant pour faire d’importants dégâts ?

J.R : « Mayotte se situe en zone sismique modérée, il n’y a pas de grosse faille à proximité et historiquement ce n’est pas une région où les séismes sont fréquents. Il faut aussi noter que les dégâts causés par un séisme ne sont pas liés qu’à sa magnitude. Ce qu’on appelle les phénomènes induits par un séisme, comme les glissements de terrain ou les tsunamis, peuvent provoquer davantage de dégâts. »

F.I : Doit-on redouter un tsunami à Mayotte ?

J.R : « Non, il ne peut pas y avoir de tsunami généré localement. De plus, dans le monde, il n’a jamais été noté de tsunami provoqué par un séisme de magnitude inférieure à 6. »

F.I : Pensez-vous que la population mahoraise a suffisamment été informée des comportements à adopter lors d’un séisme ?

J.R : « Non, je déplore le peu de réactivité de la préfecture et des institutions étatiques pour communiquer auprès des habitants et leur expliquer les consignes de sécurité. Les gens se sont imaginés plein de choses ; on les a laissés paniquer et sortir de chez eux lors des différents tremblements de terre, alors que la consigne est de rester chez soi ! »

 

F.I : Même dans le cas de personnes vivant dans des habitations fragiles, inadaptées à un séisme ?

J.R : « Les maisons ne s’écroulent que rarement en vertical, mais tombent plutôt comme un château de cartes. Il y a plus de chances que quelque chose nous tombe dessus si l’on sort que si l’on reste à l’intérieur. »

 

Annonces ministérielles | Le Collectif réagit au plan pour Mayotte

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Les 53 mesures du plan pour Mayotte ont été dévoilées mardi après-midi par la ministre des Outre-mer, Annick Girardin. Au sein du collectif à l’origine du mouvement de lutte contre l’insécurité, entre ceux qui avaient opté pour la politique de la chaise vide et ceux qui avaient choisi de dialoguer malgré tout avec la ministre, les réactions différent.

« On ne peut pas construire dans la peur ! », Maoulida Momed, porte-parole du mouvement contre l’insécurité, reprend la phrase prononcée par la ministre des Outre-mer, Annick Girardin, pour exprimer son mécontentement suite à l’annonce, ce mardi, des mesures du plan de rattrapage pour Mayotte. « Il y a des choses intéressantes […] mais on ne peut pas parler de développement sans la sécurité ! », affirme Maoulida Momed, qui juge les différentes mesures de renfort des forces de l’ordre insuffisantes. « Nous attendions plus de fermeté à la frontière », déclare-t-il, estimant que « les Mahorais sont laissés pour compte » et qu’il n’y a eu « aucune volonté d’entendre ce que nous avions à dire ».

Deux sons de cloche 

Autre discours chez les membres qui avaient participé, malgré la consigne du Collectif et de l’intersyndicale de ne pas dialoguer avec la ministre, à la réunion préalable à l’annonce des mesures, mardi matin, en compagnie d’Annick Girardin. Saïd Mouhoudhoiri en était ressorti « confiant ». Les détails du plan de rattrapage sont désormais connus, et il s’en dit relativement satisfait. Saïd Mouhoudhoiri se réjouit qu’enfin un « gouvernement décide de faire un diagnostic et, dans la foulée, propose des choses concrètes ». Dans le plan d’actions proposé, il note « des efforts, qui sont les bienvenus », même s’il déplore des mesures trop « timides » au sujet de l’insécurité, ainsi qu’un « manque de fermeté vis-à-vis des Comores ».

Concernant le statut de Mayotte et la question d’une éventuelle Communauté de l’archipel des Comores, Safina Soula Abdallah, également membre du Collectif, se dit « plus rassurée qu’il y a quelques semaines ». Au sujet de la lutte contre l’immigration clandestine, champ de revendications central du Collectif, elle considère l’arrivée du nouveau sous-préfet spécifiquement chargé de cette question, Julien Kerdoncuf, comme « une très bonne chose ». Elle appelle tout de même à la vigilance. « Tant que l’on n’a pas travaillé avec ce nouveau sous-préfet, on ne peut pas tirer de conclusions ».

L’heure est maintenant à la concertation. « Il faut que l’on se mette d’accord avant toute nouvelle action », assure Saïd Mouhoudhoiri, qui admet que des discussions « musclées » ont eu lieu au sein du Collectif. Avec une partie « apaisée » par les annonces de la ministre (« Hors de question de reprendre les barrages », affirme Safina Soula Abdallah), et une autre qui a l’impression de ne pas avoir été écoutée, le Collectif continuera-t-il à faire front commun ? « On s’est fixés jusqu’à samedi pour analyser en profondeur les mesures et voir comment nous allons réagir », conclut Maoulida Momed.

 

Séismes | Le record de 1993 battu

Depuis plusieurs jours, de multiples séismes frappent l’île dont un hier soir particulièrement important, estimé à 5,7 voire 5,9 de magnitude.

Un séisme, relativement important, a frappé Mayotte mardi soir à 18h48. D’une magnitude estimée à 5,7 voire 5,9 selon différents observatoires, il a fait trembler l’île pendant de longues secondes. Il s’agit du plus fort tremblement de terre enregistré depuis jeudi et le début de l’épisode d’essaim de séismes. C’est même un record pour le 101ème département depuis que les tremblements de terre sont mesurés. Il avait au maximum subi jusqu’à présent un séisme de magnitude 5,2, le 1er décembre 1993.

La crainte a parfois gagné les réseaux sociaux, en marge de l’épisode sismique de mardi soir. « J’avais la trouille », dit une internaute. « Faites vos sacs de survie car nous ne connaissons pas la suite », s’alarme une autre. « Un volontaire pour aller à 10 km de Pamandzi pour nous prévenir de la prochaine secousse ? », s’amuse une Mahoraise. Preuve d’une forme de panique qui semble s’installer chez une partie de la population mahoraise : des habitants de Bandrélé ont dormi sur la place publique de la commune dans la nuit de lundi à mardi, affirme une consœur journaliste sur Twitter. 

Lundi soir, l’île avait été touchée par un autre tremblement de terre important, de magnitude 5,1. « L’activité sismique s’était poursuivie à raison de plusieurs séismes par heure durant la nuit [de lundi à mardi] », a indiqué la préfecture dans un communiqué mardi. Quatre secousses plus importantes que les autres ont été enregistrées : à 23h56, 00h02, 00h42 et 01h48 mais de magnitude inférieure à 4.0. Entre 02h00 et 08h30 aucune secousse significative n’a été enregistrée. L’activité sismique a repris à partir de 08h30, « mais là encore avec des magnitudes limitées », déclarait avant le séisme de mardi soir la préfecture. Aucun dégât ne nous avait été rapporté mardi soir, en lien avec ce dernier épisode sismique.

Depuis le début du phénomène d’essaim de séismes jeudi 10 mai, la journée du lundi 14 mai a été « la plus active avec une vingtaine de séismes de magnitude supérieure à 3.0 », soulignait également la préfecture. Le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) estime que l’activité sismique va durer encore plusieurs jours. Des secousses ressenties par la population sont encore possibles. 

Lors des propos liminaires de son discours mardi, avant le tremblement de terre de 18h48, la ministre des Outre-mer, Annick Girardin, a cherché à rassurer : « Il [cet essaim de séismes] ne présente a priori pas de risque de dégâts sur terre ni de tsunami en mer et ne dépasserait pas jusqu’à présent le niveau 5 sur l’échelle du BRGM. Par précaution, j’ai demandé à la préfecture de produire une information journalière sur l’évolution du phénomène et d’anticiper tout risque prévisible pour la population. »

Plan pour Mayotte | 125 actions et 1,3 milliard d’euros pour l’île

La ministre des Outre-mer a annoncé mardi en Petite-Terre les détails du plan de rattrapage et de développement pour Mayotte. Infrastructures, santé, éducation : les mesures annoncées sont chiffrées à 1,3 milliard d’euros, hors ressources humaines, mais certains projets étaient déjà connus de longue date.

« Je veux que cette crise soit l’amorce d’un avenir meilleur pour Mayotte. C’est notre devoir, c’est notre responsabilité », a déclaré la ministre des Outre-mer, mardi après-midi, en Petite-Terre. Au troisième et dernier jour de son déplacement, Annick Girardin a révélé le contenu du plan de rattrapage et de développement pour Mayotte devant un parterre d’élus, de représentants de la justice, de la gendarmerie ou encore de la police. Elle a détaillé devant eux une partie des 53 engagements pris, regroupant près de 125 actions « pour améliorer la vie quotidienne à Mayotte ». Le plan a été chiffré par l’exécutif à 1,3 milliard d’euros. Il comporte des projets annoncés avant le mouvement social contre l’insécurité. Un comité de suivi, « avec toutes les parties prenantes » et animé par le préfet sera instauré ; tout comme un site internet baptisé « Transparence Mayotte » qui verra le jour d’ici la fin de l’année et qui sera « dédié au suivi des engagements ».

Côté insécurité et lutte contre l’immigration clandestine, au cœur de la « grève générale » de ces dernières semaines, seulement quelques nouveaux engagements ont été annoncés par rapport aux mesures décidées en mars. En l’espèce, la « création d’une compagnie départementale d’intervention de la police nationale » et « l’amélioration des observations radar pour lutter contre l’arrivée des kwassas ». En somme, pas de nouvelle annonce d’envergure concernant la lutte contre l’immigration irrégulière mais Annick Girardin promet de faire un « constat d’ici à la fin de l’année pour évaluer les moyens nouveaux nécessaires ». Aucun chiffrage n’a encore été réalisé sur les nouveaux moyens attribués pour la sécurité et la lutte contre l’immigration irrégulière.

La CMU en 2022

Sur le plan de la santé, les moyens dédiés à la prévention « seront augmentés de 50% cette année et doublés à hauteur de 15 millions d’euros à partir de l’année prochaine. Un effort de près de 200 millions d’euros sera consenti pour investir et moderniser l’hôpital », poursuit Annick Girardin, avec 20 millions d’euros dédiés dès cette année à des travaux urgents de modernisation du CHM. La couverture maladie universelle (CMU) sera mise en place dans le 101ème département en 2022. La ministre promet également « un vrai système de consultations programmées à l’hôpital » et d’exempter « totalement de ticket modérateur les personnes à faibles revenus ».

Le gouvernement prévoit également un plan de rattrapage des équipements sportifs à hauteur de quatre millions d’euros et l’extension et l’alignement durant le quinquennat d’une demi-douzaine de prestations sociales « dans le champ du handicap, de la parentalité, du logement, de la restauration scolaire (…) Je ne veux pas exclure non plus de durcir les conditions d’accès à ces prestations (…) afin d’éviter d’en faire des accélérateurs d’une immigration que nous cherchons à maîtriser. »

« Nous allons travailler sur la création, en loi de finances 2019, d’un fond de développement social » pour accompagner des « structures et services qui font cruellement défaut à Mayotte : (…) crèches, établissements pour personnes âgées, services à la personne, aides aux parents, offre culturelle et de loisirs aux enfants hors de l’école… », poursuit Annick Girardin.

500 millions pour l’éducation

En termes d’éducation et de formation, la ministre évoque « un effort important (…) indispensable en faveur des constructions scolaires. Sur le quinquennat, [il y aura] près de 500 millions d’euros d’investissements, soit environ le double que lors du quinquennat précédent (…) Plus de 500 recrutements seront opérés [dans l’Éducation nationale], dont 150 en plus de ce qu’impose la progression des effectifs ». 

L’habitat insalubre concerne par ailleurs « un tiers des Mahorais », selon Annick Girardin, alors que la « production de logements sociaux demeure très faible. Ce n’est pas acceptable » pour la ministre qui annonce un objectif de construction de « 400 logements en 2018 » qui sera revu à la hausse « chaque année du quinquennat ». Les crédits de la politique du logement social passeront cette année de 20 à 30 millions d’euros.

« Je n’occulte pas le sujet de l’allongement de la piste » de l’aéroport, déclare Annick Girardin, qui indique qu’une « mission sera conduite dès cet été [pour] compléter les quelques interrogations » qui se posent encore. Une autre mission sera menée concernant le développement du port de Longoni.

« Tout ne s’arrête pas avec ce plan »

Côté transports, « l’État a décidé de mobiliser plus de 110 millions d’euros au cours des quinze prochaines années [dont] près de 40 millions d’euros sur le quinquennat pour financer aux côtés des collectivités un ambitieux programme de transport », celui en commun compris. « L’effort financier de l’État pour l’entretien des routes (…) y compris les routes départementales » sera augmenté. Concernant les volets eau, assainissement et déchets, le gouvernement va débloquer « près de 150 millions d’euros au cours de la période 2018-2020 pour accompagner la programmation des investissements des collectivités. Cela permettra par exemple de créer cinq stations d’épuration au cours des trois prochaines années. »

Côté économie, « l’intégralité du CICE (…), qui sera supprimé à compter de 2019 (…), sera restituée [aux entreprises] sous la forme d’un mécanisme simple ». La ministre assure que le gouvernement ne reviendra « pas sur la départementalisation ». À noter également la mise en place d’une direction régionale de Pôle emploi en 2019.

« Tout ne s’arrête pas avec ce plan. L’avenir de Mayotte doit nous conduire à regarder au-delà même du quinquennat (…) Le plan proposé aujourd’hui n’est donc qu’une étape (…) nécessaire mais pas suffisante pour améliorer durablement la vie de nos concitoyens. Il manque aujourd’hui une vision à plus long terme », reconnaît, en guise de conclusion, la ministre.

Réactions des élus

Satisfaite « dans l’ensemble » des annonces de la ministre des Outre-mer, la députée Ramlati Ali (LREM) regrette que son cheval de bataille, la piste longue, n’ait pas fait l’objet d’annonces plus fortes. Beaucoup moins acquis à la cause de la ministre, Mansour Kamardine, député LR, regrette qu’Annick Girardin « [ait] repris pour l’essentiel des mesures annoncées par le Premier ministre (le 19 avril, en présence des élus de Mayotte, NDLR) » et a déclaré « être resté sur sa faim ». En outre, il demeure toujours sceptique quant aux dénégations du gouvernement concernant le projet de « Communauté de l’archipel » : « Je veux entendre que le projet est enterré », tempête-t-il. 

Le sénateur Thani Mohamed Soilihi est « satisfait à 75% » : « Ce n’est pas un mécontentement, c’est de la vigilance », précise-t-il, se demandant dans quelle mesure il sera possible de consommer les crédits alloués – notamment ceux concernant les créations de postes – sans mesures incitatives pour renforcer l’attractivité du territoire.

Enfin, le président du Conseil départemental, Soibahadine Ibrahim Ramadani, juge les annonces « encourageantes » même si elles ne sont pas « complètes, comme l’a dit elle-même la ministre des Outre-mer ». Le président de la collectivité se réjouit particulièrement du « début de réponse en ce qui concerne les prestations sociales pour les personnes les plus fragiles », mais également des mesures concernant les infrastructures (entretien des routes départementales, soutien au transport collectif, etc.) et de l’accompagnement de l’État dans le projet (cher à Soibahadine Ibrahim Ramadani) de toilettage institutionnel.

 

Visite ministérielle | Le plan pour Mayotte dévoilé aujourd’hui

Depuis son arrivée dimanche, la ministre des Outre-mer ne cesse de ménager ses effets. Après deux jours de rencontres avec les acteurs locaux, elle devrait enfin annoncer aujourd’hui les mesures du plan de développement pour Mayotte, promis suite au dernier mouvement social.

Mayotte est suspendue aux lèvres de la ministre des Outre-mer, Annick Girardin, qui devrait annoncer aujourd’hui l’ensemble des mesures du plan de développement pour l’île, promis suite au dernier mouvement social. Si la délégation interministérielle a travaillé en local pendant plusieurs semaines, la ministre est revenue sur le territoire depuis dimanche afin de « peaufiner » ces mesures en rencontrant une dernière fois les acteurs locaux et avant de faire des annonces aujourd’hui dans la journée.

En attendant, elle s’est rendue hier sur le hub de transport scolaire de Chirongui – où transitent plusieurs milliers d’élèves chaque jour – bénéficiant, comme l’ensemble des établissements du second degré de l’île, du dispositif de sécurisation qui a été renforcé depuis la dernière visite de la ministre des Outre-mer.

Ainsi, un travail multi-partenarial entre les services de l’État et des collectivités (Conseil départemental et communes) permet à de nombreux intervenants d’être présents sur site chaque jour afin de sécuriser les abords des établissements scolaires. Ce lundi matin, la ministre a rencontré les différentes équipes – les gendarmes et les réservistes, les équipes mobiles de sécurité (EMS) du vice-rectorat, les agents de médiation du Conseil départemental mis à disposition de Matis, etc. – et les a félicitées du travail accompli. Elle a également assisté à une fouille des sacs ainsi qu’à des contrôles d’identité des élèves montant dans les bus et a échangé avec ces derniers sur leurs attentes. Venue « un mois et demi après [sa] mise en place pour voir comment cela fonctionne », la ministre a déclaré que « la question de la sécurité à Mayotte est importante et elle est prise au sérieux par l’État ».

Une présence importante

Ce dispositif se veut dissuasif : « Quand un jeune veut en découdre avec d’autres, il va rencontrer sur son chemin des EMS, des médiateurs, des services civiques, des APS (agents de prévention et de sécurité, NDLR), des personnels d’établissement, etc. », explique le coordinateur des EMS et conseiller réserve de la gendarmerie. Une partie de ces équipes mobiles de sécurité a d’ailleurs été formée par la gendarmerie et est désormais habilitée à porter des matraques, seulement pour la défense. Le volet sensibilisation du dispositif est très important, avec des actions de prévention à destination des parents (notamment sur le contenu des sacs de leurs enfants) et des élèves. Une des forces de ce dispositif, insiste le vice-recteur, réside dans sa flexibilité : selon les informations récoltées par les forces de l’ordre et le vice-rectorat, le planning de déploiement est décidé au dernier moment et est ainsi peu prévisible. 

« Aucun incident grave » n’a été constaté sur ce hub depuis la mise en place du dispositif, se réjouit le proviseur des deux lycées de Chirongui (général et professionnel). Avant cette visite, la ministre s’est rendue sur le site des logements sociaux de Chirongui, les premiers en accession à la propriété à être collectifs. « On rentre dans les priorités qui vont être annoncées », a-t-elle déclaré de manière énigmatique

 

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