La prise en charge des élèves primo-arrivants par le rectorat pour une meilleure insertion

Savoir lire et écrire français dans l’école de la République est un idéal qui n’existe pas dans les écoles mahoraises. Nombreux sont les enfants scolarisés qui ne maîtrisent pas la langue de Molière. Une partie d’entre eux sont ceux que l’on appelle les primo-arrivants, c’est-à-dire des étrangers qui suivent leur scolarité en France. Le rectorat de Mayotte a mis en place tout un dispositif permettant de suivre ces enfants grâce au centre académique pour la scolarisation des élèves allophones nouvellement arrivés, plus connu sous l’acronyme CASNAV. S’ils sont évalués pour connaître leur niveau, les professionnels analysent également leurs comportements afin de s’assurer que ces enfants ne soient pas un danger lorsqu’ils intègrent les établissements scolaires.

L’élève accusé d’avoir poignardé son camarade au collège de M’Gombani lundi dernier est un primo-arrivant. Il s’agit d’un enfant comorien âgé de 12 ans qui est arrivé dans l’établissement quelques semaines après la rentrée. Les spéculations vont bon train concernant ce jeune garçon. Enfant harcelé par ses camarades ? Élève ayant des lacunes à l’école ? N’aurait-il pas réussi à s’intégrer ? Beaucoup de questions restent pour l’instant sans réponses, et ses motivations ne sont toujours pas connues. Il est cependant exclu à titre conservatoire du collège. Et après l’effervescence qu’a généré son acte, se soulève la problématique de la prise en charge de ces jeunes qui arrivent, souvent des pays voisins, et qui doivent être absolument scolarisés. Le recteur de Mayotte, Gilles Halbout, se veut rassurant : ses équipes mettent tout en œuvre pour permettre aux primo-arrivants de s’insérer au mieux dans leur nouvel environnement.

Flash Infos : Quand les enfants étrangers arrivent à Mayotte et qu’ils doivent être scolarisés, de quelle manière sont-ils pris en charge par le rectorat ?

Gilles Halbout : De manière générale, ils sont pris en charge par le centre académique pour la scolarisation des allophones nouvellement arrivés. Tous les rectorats en ont un ! Ces équipes sont chargées de l’accueil et du suivi des enfants détectés avant de les inscrire à l’école. Ils sont évalués : nous regardons par exemple s’ils n’ont pas de problèmes comportementaux et de troubles psychologiques, en collaboration avec les associations et l’agence régionale de santé. L’objectif est qu’ils rentrent très rapidement dans des structures éducatives adaptées quand il n’y a pas de souci.

Le Casnav se rend sur le terrain à la rencontre des familles et de ces enfants pour faire ces évaluations et les orienter. Nous développons en même temps les enseignements de français en tant que langue seconde pour ceux qui ne le parlent pas. Mais nous sommes très vite dépassés par le nombre et c’est aussi une population qui est difficile d’accès. C’est pour cela que les associations nous aident.

FI : Une fois que le travail du CASNAV est fait et que les élèves sont scolarisés, ces enfants sont-ils encore suivis ?

G.H : À l’intérieur des établissements scolaires, le travail continue avec tout le dispositif de la mé-diation sur la langue française. Mais à Mayotte, il y a aussi des jeunes qui ne viennent pas d’arriver, qui sont là depuis longtemps et qui ont aussi des difficultés d’apprentissage. Donc nous utilisons la deuxième partie de la mission du Casnav, c’est-à-dire l’apprentissage du français quand ce n’est pas la langue première pour des enfants qui ne sont pas des primo-arrivants.

FI : Les jeunes passent des tests d’évaluation mais sont parfois placés dans des classes qui ne sont pas à leur niveau. Pour quelles raisons ?

G.H : Ils passent des tests de niveau, même si la logique dans l’Éducation nationale est d’orienter les élèves selon leur âge. Un jeune de 15 ans ne peut pas être en primaire… Nous militons plus pour travailler par groupe de compétences. Il peut y avoir des niveaux très hétérogènes dans une classe et les enseignants ont du mal à avancer car ce n’est pas évident de gérer l’hétérogénéité. En plus, cela tire tout le monde vers le bas, parce les difficultés ne sont pas traitées. L’enseignant essaye de faire comme il peut, mais globalement il ralentit les uns et ne comble pas les lacunes des autres !

FI : Ils sont orientés selon leur date de naissance, mais comment pouvez-vous être sûrs qu’ils ont l’âge annoncé ?

G.H : Nous ne pouvons pas faire des tests osseux aux élèves ! Nous prenons les informations qu’on nous donne… Nous pouvons émettre des doutes, et lorsque c’est le cas nous les faisons remonter, mais cela prend du temps pour vérifier les informations. Il y a vraiment un souci de suivi alors que l’âge est important. Toutefois, ce n’est pas à nous de certifier l’âge. D’autant plus que les représentants légaux ou les parents sont souvent absents. Nous les voyons à l’inscription, mais ensuite c’est difficile de les revoir. Pour y remédier, nous mobilisons énormément nos assistantes sociales sur ce sujet.

FI : Finalement quel est l’objectif du rectorat ? Est-ce seulement de scolariser en masse ces enfants qui arrivent ?

G.H : Non ! C’est aussi d’être vigilant sur leur suivi de santé et social. Nos services sont toujours en alerte, nous nous assurons qu’il y ait un référent, un parent… À la sortie de l’école, nos personnels n’ont pas à suivre les enfants, mais à l’intérieur, nous sommes vigilants. Il est vrai que beaucoup de choses remontent : malheureusement, nous ne pouvons pas tout traiter !

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