Les Evasan au coeur de la stratégie de l’ARS

Alors que le nombre de nouveaux cas continue de grimper, l’Agence régionale de santé mise sur les évacuations sanitaires pour soulager les équipes médicales de Mayotte. Et se préparer à faire face à la vague. 

Mayotte arbore toujours cette couleur rouge vif sur la carte et risque bien de la garder. Alors que le 101ème département est de ceux qui restent sous cloche cette semaine, le nombre de nouveaux cas poursuit sa triste ascension : 38 de plus ce lundi, pour un total de 1061 personnes contaminées par le Covid-19 sur l’île. Un nouveau décès est à déplorer, et le bilan s’établit désormais à 12 morts. En outre, 50 patients sont hospitalisés au CHM, dont 10 en réanimation et 29 en médecine. “Pour rappel, il y a de cela trois semaines, nous étions à une vingtaine de personnes hospitalisées en médecine, là nous approchons des trente, et cette situation est préoccupante”, souligne Dominique Voynet, la directrice de l’ARS, lors du point bi-hebdomadaire de l’autorité sanitaire. 

À part le seuil symbolique des 1000 cas franchi ce weekend, la situation reste sensiblement similaire à celle de la semaine dernière, note toutefois l’ARS. Le virus circule toujours activement sur l’île et aucune zone n’est épargnée. “Il y a beaucoup de cas dans tous les villages de Mamoudzou, et l’on constate l’apparition de nouveaux cas dans d’autres villages”, ajoute Dominique Voynet. Pas de répit pour l’ARS donc, qui continue de s’armer pour faire face à la “vague”. Le pic épidémique, lui, est toujours prévu autour du 20 mai. 

Des premiers patients Covid évacués 

En attendant, l’ARS ne compte pas rester les bras croisés. “Nous sommes en train de réorganiser le système de santé”, développe la responsable. Objectif : avoir suffisamment de place à l’hôpital pour accueillir cette vague. “La mécanique des évacuations sanitaires est en train de monter en puissance”. En clair, il faut se préparer à manquer de lits. Pour rappel, la colorisation des départements en vue du déconfinement dépend de trois indicateurs : la circulation active du virus, la tension hospitalière sur les capacités en réanimation, et la couverture des besoins en tests estimés. À Mayotte, deux au moins de ces critères peuvent être remplis. 

C’est pourquoi le 101ème département compte sur son voisin, plutôt épargné en comparaison : La Réunion. Les évacuations sanitaires ont repris à un bon rythme. Si elles concernaient d’abord des patients non-Covidpour soulager les services de médecine et de réanimation, depuis vendredi, même les patients atteints du virus peuvent y être envoyés. “Avant le confinement, on tournait à environ 150 personnes évacuées par mois : nous voudrions atteindre ce chiffre-là, ce qui nous permettra d’être plus à l’aise”, précise 

Dominique Voynet, qui annonçait jeudi dernier avoir envoyé sept patients non-Covid à La Réunion. Elle en annonce ce lundi cinq autres, ceux-là positifs au coronavirus et transférés vendredi. 

Un nouvel avion sanitaire en vue 

Équipées pour faire face à une épidémie de Covid-19, qui s’est révélée moins sévère que celle que nous connaissons à Mayotte, les équipes médicales à La Réunion ont “encore plus de moyens” que d’habitude pour assurer leur rôle de soutien à leurs confrères mahorais du CHM. Toutes les précautions sont d’ailleurs prises pour éviter une propagation du virus : désinfection des avions, des ambulances, tests des patients au départ et 48h plus tard, etc. Pour l’instant, les avions d’Air Austral assurent ces évacuations, ainsi qu’un avion privé qui a été affrété pour les cas Covid ou les urgences. Mais ils devraient être bientôt rejoints par un avion sanitaire, dont la directrice de l’ARS espère passer commande cette semaine, annonce-t-elle. “Cette commande, c’est une procédure accélérée rendue possible par l’état d’urgence sanitaire, qui nous permet d’obtenir l’avion pour trois mois à Mayotte. À partir de là, nous pourrons faire des statistiques, évaluer les coûts que cela représente, pour peut-être pérenniser son usage après la crise”, détaille l’ancienne ministre. Un hélicoptère sanitaire, affrété sur le Mistral la semaine dernière, est quant à lui sur le point d’arriver à Mayotte, “pour nous aider à faire face au pic”. 

Mayotte en manque de bras 

Mais tout ce matériel ne remplacera jamais les forces vives qui soignent tous les jours les patients au CHM. Preuve en est avec l’installation d’un hôpital de campagne militaire – celui-là même qui était venu en renfort dans le Haut-Rhin – qui devrait bientôt prendre ses quartiers dans un service du CHM. “Je suis embêtée, nous avions prévu ces espaces pour autre chose”, s’inquiète Dominique Voynet, qui rappelle aussi que “nous n’avions pas demandé cet hôpital, nous avons demandé des renforts en personnel”. La réserve sanitaire ne semble pas suffire pour renouveler les équipes de médecins et infirmiers urgentistes et réanimateurs, et le laboratoire commence lui aussi à manquer de bras pour effectuer tous les tests demandés. La directrice de l’ARS compte aborder le sujet avec son ministère de tutelle, et insister sur l’importance de “renouveler les personnels déjà en poste”. “Il serait anormal d’avoir un service de réanimation épuisé et un service militaire bien doté et qui mobilise des efforts hospitaliers”. Tant que tout ce beau monde ne se marche pas sur les pieds ni sur les fils des respirateurs…

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