L’humain au cœur des ateliers de cartographie expérimentale

Au lycée de Dembéni, lundi 4 avril, les secondes en filière baccalauréat professionnel métiers de la mode et des vêtements ont participé à un atelier de cartographie expérimentale. Une intervention atypique animée par Florence Troin et Philippe Rekacewicz, chercheurs, géographes et cartographes.

“Nous travaillons sur un projet de cartographie sensible et émotionnelle”, explique Philippe Rekacewicz, géographe, cartographe et chercheur à l’université d’Helsinki. Tout autour du globe, celui-ci anime des ateliers qui ont pour objectif de réintégrer l’humain dans les cartes, comme ce lundi, dans les établissements de Kawéni et Dembéni. “À Mayotte, nous avons l’exemple de l’immigration. Mais si l’on s’arrête aux informations factuelles que l’on retrouve habituellement sur une carte, on ne dit rien de la tragédie humaine et du vécu de ceux qui effectuent cette traversée”, détaille l’universitaire.

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Des CP aux doctorants, la méthode est la même, projeter sur une carte quelque chose qui parle de soi. “Les élèves peuvent cartographier leurs vies, leurs rêves. Ils indiquent un lieu, un itinéraire, choisissent des symboles, des couleurs et des échelles qui font ressortir ce qui comptent pour eux et ainsi voir l’espace sous un angle différent”, continue Philippe Rekacewicz. Une démarche qui demande de la réflexion, de l’abstraction et beaucoup d’imagination.

Les petites mains au travail

Pour Amina, Anfia et Anfouzati, toutes les trois en seconde, cet exercice offre la possibilité de voyager. “On m’a demandé de cartographier mon vœu le plus cher. Ce que je souhaite c’est d’aller à Tahiti, voir leur culture, leurs danses, leurs maisons, leurs fleurs”, s’extasie Amina, le sourire aux lèvres et la tête dans les nuages. Pour sa camarade Anfia, le paradis a un visage très différent. “J’ai collé des cartes des Etats-Unis et de Dubaï car ce sont des endroits où j’aimerais aller, car jusqu’à présent, je n’ai visité que les Comores, Mayotte et la métropole”, affirme la jeune fille. Très concentrée, la classe prend des chemins très différents et couche sur papier leurs plans d’avenir.

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“Ce que j’aime avec ces interventions, ce sont les résultats des élèves. Qu’il y ait un effet de groupe et des cartes similaires ou des résultats très hétéroclites, nous voyons beaucoup de productions touchantes”, témoigne Florence Troin, géographe, cartographe et chercheuse pour le CNRS à l’université de Tours. Spécialisée en cartographie des récits, l’intervenante s’émerveille devant les histoires racontées par les élèves au travers de leurs créations. “On déconstruit totalement les standards de la sémiologie graphique pour s’approprier notre carte”, explique-t-elle.

Une démarche éminemment humaine qui donne aux nouvelles générations la chance de réfléchir aux hommes qui se cachent derrière ces vastes territoires couchés sur papier.

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