Coopération : l’économie sociale et solidaire veut s’étendre dans l’océan Indien

La chambre régionale de l’économie sociale et solidaire (Cress) de Mayotte accueille la première délégation ESS de l’océan Indien. L’idée : réunir des représentants de Tanzanie, des Comores, du Mozambique et du Kenya pour porter des projets à l’échelle régionale.

« Dans un contexte de relations tendues avec nos pays voisins, comme les Comores, l’ESS est un outil de diplomatie économique. » C’est ainsi que Kamal Youssouf, le directeur du Cress, présente le projet nommé BusinESS OI, porté par la chambre régionale de l’économie sociale et solidaire (Cress) de Mayotte. Ce « cluster » de l’ESS à l’échelle de l’océan Indien ambitionne de porter des projets interrégionaux. Depuis juillet 2021, la Cress – dont l’une des missions est « d’animer la coopération régionale à travers l’économie sociale et solidaire » – noue des liens avec des organisations au Kenya, au Mozambique, aux Comores et en Tanzanie. Parmi elles, l’instance de représentation des coopératives du Mozambique, l’association des gouvernements locaux tanzaniens, l’organisation des entreprises de l’ESS kenyane, l’accélérateur d’entreprises à impact kenyan ou encore l’association comorienne Maeecha, qui milite pour la protection des droits de l’enfant. Depuis lundi 21 novembre, leurs représentants sont réunis à Mayotte pour continuer à échanger et commencer à lancer des initiatives.

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Pour Kamal Youssouf, directeur de la chambre régionale de l’économie sociale et solidaire de Mayotte, qui porte le projet BusinESS OI, l’ESS est aussi « un outil de diplomatie économique entre les territoires ».

Des débouchés sur les autres territoires

« L’association RTME, basée à Acoua, qui transforme le manioc en farine, a besoin de nouvelles sources d’approvisionnement. A Mayotte, ce produit coûte cher et on n’a pas de quantités suffisantes pour répondre aux besoins du marché. Grâce aux relations nouées avec les autres pays de l’océan Indien, nous allons pouvoir acheminer du manioc des Comores ou de Tanzanie », indique l’homme à la tête du Cress. Selon lui, ces deux pays manquent de débouchés sur leurs territoires et n’ont pas de structure de valorisation comme celle qui existe à Mayotte. Des partenariats qui pourraient également permettre de favoriser la mobilité décarbonnée. En Petite-Terre, la société Mobhelios, qui propose des vélos électriques en location, envisage de lancer une offre de motos électriques ainsi que des bornes de recharges pour les voitures. « Les Comores sont notamment intéressées pour dupliquer ce type de projet », poursuit le directeur. Un troisième projet concerne le Banga au chocolat à Combani. « L’idée est de créer des ponts entre nos cinq territoires pour alimenter la chocolaterie en matière première ou créer ce type de structures dans les autres pays. »

« Dix millions d’euros n’ont pas été utilisés »

En janvier prochain, un réseau d’incubateurs devrait voir le jour. L’idée est de créer une structure d’accompagnement mahoraise, connectée à une seconde à Moroni, et à d’autres entités au Kenya, au Mozambique et en Tanzanie. « Les incubateurs pourraient ainsi permettre à des porteurs de projet de créer une structure sur un autre territoire, en levant les freins techniques ou réglementaires mais également en mobilisant des financements sur les autres territoires », indique Kamal Youssouf.

Le volet financier est d’ailleurs l’une des premières motivations du projet BusinESS OI, financé par le conseil départemental et le programme Interreg V Océan Indien, qui vise à renforcer l’insertion régionale de Mayotte et de La Réunion dans l’Océan Indien, via des financements du fonds européens de développement régional (Feder). « Ces cinq dernières années, ce programme nous allouait une enveloppe de douze millions d’euros. Mais dix millions n’ont pas été utilisés. » En cause, notamment : l’absence de cadre légal commun. Le premier objectif du projet est donc de définir une base commune. D’autant que d’autres financements de l’Etat Français pourraient être mobilisés dans les quatre pays partenaires de la zone. « Ce sont des pays qui sont dans le périmètre des financements européens et du conseil départemental de Mayotte, c’est pour cela qu’ils ont été sélectionnés. Et sur ces territoires, d’autres fonds pourraient être débloqués via les ambassades françaises. »

 

Novembre, mois de l’économie sociale et solidaire

La Cress de Mayotte organise la sixième édition du mois de l’économie sociale et solidaire à Mayotte. Un événement qui « constitue une vitrine des initiatives des acteurs du territoire ». Depuis le début du mois, de nombreux événements ont permis de valoriser l’ESS sur l’ensemble du territoire. Ce vendredi 25 novembre, l’école des colibris à Dzaouzdi anime un après-midi parents-enfants. Le 26 novembre de 8h à 16h, Mayotte Nature Environnement organise une formation au nettoyage de sites à Mamoudzou. Dimanche 27 novembre, de 9h à 12h le nettoyage du quartier Montlegun est organisé à Koungou. Puis le 28 novembre 2022 de 9h à 17h, la médiathèque de Bandrélé accueillera la troisième édition de Mayotte acteur de son développement, qui vise à accompagner les entreprises mahoraises à monter en compétences. D’autres événements sont organisés. Tout le programme est sur cress-mayotte.org

 

Un secteur regroupant 2.836 emplois en 2021

Selon la loi du 31 juillet 2014, l’ESS est « un mode d’entreprendre et de développement économique, adapté à tous les secteurs d’activité ». Cette économie vise l’intérêt collectif, l’implication des citoyens, le respect de l’environnement et la proximité des territoires. A Mayotte, le secteur représentait 2.836 emplois en 2021, répartis dans 290 établissements. 14 % sont des structures privées et 83 % des associations. Au total, elles représentent 30 millions d’euros de masse salariale brute annuelle.

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