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Deux mois avec sursis pour Balahachi

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Mercredi s’est tenu le procès du contrôle d’identité qui a dérapé le 1er octobre, impliquant le syndicaliste Ousséni Balahachi. A l’issue de plus de quatre heures de débats, il a été relaxé pour deux des trois chefs d’accusation et condamné à deux mois d’emprisonnement avec sursis pour rébellion. Il est sorti du tribunal sous les vivats de la foule venu le soutenir.

Si elle s’est déroulée dans un calme relatif, l’audience de mercredi lors de laquelle était jugée le syndicaliste Ousséni Balahachi, accusé de rébellion, d’outrages et de violences envers quatre gendarmes a été très médiatisée et suivie par plus de 200 personnes sur site, à l’intérieur et à l’extérieur du tribunal. 

Durant plus de quatre heures, les débats ont été vifs et toujours divergents, les versions n’arrivant jamais à concorder. Ils opposaient quatre gendarmes – défendus par Maître Rahmani – à Ousséni Balahachi, entouré de pas moins de quatre avocats – Maîtres Ahamada, Andjilani, Souhaïli, Mabadali.

Inlassablement narrée dans ses moindres détails, l’altercation du 1er octobre à Tsingoni entre les forces de l’ordre et le syndicaliste a donné du fil à retordre au président d’audience Daniel Rodriguez. 

Manque de respect pour l’un

Pour Ousséni Balahachi, soumis ce jour-là à 8h du matin à un contrôle d’identité routinier alors qu’il emmenait son fils en taxi à l’hôpital en présence de son épouse, les gendarmes lui ont manqué de respect puis l’ont violemment jeté à terre. Pourtant, il n’aurait pas refusé de se soumettre au contrôle d’identité mais passant son passeport par la vitre du bus afin de le remettre à l’agent, celui-ci serait tombé par accident. Selon le prévenu, demandant « gentiment » au gendarme de le ramasser, ce dernier lui aurait intimer l’ordre « de manière agressive » de venir le récupérer lui-même et de sortir du véhicule. Avouant être relativement énervé en raison de l’attitude supposée de l’agent, Balahachi serait sorti et aurait été brutalement « attrapé » par un gendarme, plaqué contre le véhicule puis jeté à terre. 

Rébellion pour les autres

Pour les gendarmes, tous solidaires dans leurs propos, le prévenu aurait refusé de se soumettre au contrôle et de sortir du véhicule et les aurait invectivés. « Ce n’est pas vrai », s’insurge le syndicaliste aux côtés, à la barre, du militaire qui maintient aussi mordicus sa position. Pour le gendarme qui effectuait le contrôle, Balahachi aurait jeté violemment son passeport par terre et lui aurait dit : « Ramasse mon passeport tout de suite », provoquant l’hilarité des passagers. Interloqué, l’agent lui aurait dit « Pardon ? », et Balahachi aurait réitéré son ordre en ajoutant : « Tu n’es qu’un gendarme, je ne sortirai pas pour toi ». Selon les militaires, après lui avoir demandé plus de six fois de sortir alors qu’il « était debout, s’énervait et gesticulait », il aurait été extrait du bus, effectivement plaqué contre le véhicule puis maîtrisé à terre. « Ça vous arrive de ramasser des pièces d’identité tombées par terre ? », demande le président de séance à un gendarme. « Bien sûr », répond l’agent. « Et vous le faites ? », « Oui, quand c’est bien demandé », affirme sûr de lui le gendarme.

Lors de l’interpellation, Balahachi aurait porté des coups de pied au niveau du gilet pare-balles dont il resterait des « preuves matérielles », des traces, a insisté le ministère public dans son réquisitoire.

David contre Goliath

A la barre, la vision de Balahachi, homme de moins d’1m60 plutôt frêle, à côté du gendarme l’ayant maîtrisé, vigoureux gaillard d’1m80 environ, suscite l’interrogation du président d’audience. Le prévenu représentait-il vraiment un danger au point d’user la force pour le maîtriser ? Pour le gendarme, Balahachi l’aurait agrippé au col et serait rentré « dans sa zone intime », geste déclencheur d’une procédure de maîtrise. Ce n’est pas la morphologie qui détermine l’action mais l’attitude de la personne, ici « très virulente », argue encore le militaire. 

Une vidéo ayant largement circulé sur les réseaux sociaux et montrant uniquement la maîtrise au sol a été diffusée lors de l’audience. On y voit l’interpellation et on entend distinctement le mot « abruti(s) » qui, selon les gendarmes, aurait été prononcé par Balahachi. L’absence de témoins (seules l’épouse de Balahachi et une supposée passagère qui se serait spontanément présentée aux gendarmes le lendemain) a compliqué la tâche des magistrats.

« Bavure »

Pour la défense, plusieurs faits plaident en faveur du prévenu. Son casier judiciaire vide, tout d’abord, alors que ses activités militantes l’exposent de fait à de nombreuses confrontations avec les forces de l’ordre. Son combat, ensuite, pour « plus d’Etat à Mayotte » et donc davantage d’effectifs des forces de l’ordre. « Pour quelle raison aurais-je manqué de respect aux gendarmes ? », demande Balahachi qui rappelle son attachement à la République et à ses valeurs. « L’instruction a été à charge », accuse un avocat, et la comparution immédiate pour un « primo-délinquant » est une véritable « violence », dénonce un autre. Les quatre ténors du barreau, qui parlent de « bavure » et d’usage « disproportionné » de la violence, exigent la relaxe pour les trois chefs d’accusation.

Le motif premier de l’altercation a été retourné par l’avocat des gendarmes : pour quelle raison des agents arrivés il y a deux mois sur le territoire, qui ne connaissent pas Balahachi, auraient-ils voulu s’en prendre à lui ? Des militaires qui, d’ailleurs, effectuent une soixantaine de contrôles par semaine, sans jamais que des problèmes de ce type ne se présentent. Pourquoi des agents en service, « toujours au contact de la population », s’énerveraient-ils si on leur demande gentiment de ramasser un passeport, se demande également le ministère public, dans son réquisitoire. Maître Rahmani demande 1 500 euros de dommages et d’intérêts pour les trois gendarmes ayant supposément subi des outrages et 2 000 euros pour celui qui aurait subi des violences.

« Délire de toute-puissance »

Le parquet, dans son réquisitoire, évoque « les leviers de pression » et « la capacité de mobilisation » de l’entourage du syndicaliste, « surpris » de voir tant de monde à l’audience dans un « contexte local très tendu (…) et qui n’est pas normal ». Pour Pablo Rieu, « ce sont eux (les collectifs et l’intersyndicale) qui font la loi maintenant » : exactions, contrôles policiers, etc. Des actions qui auraient provoqué chez Balahachi un « délire de toute-puissance ». Pour les trois chefs d’accusation, le ministère public requiert 8 mois d’emprisonnement avec sursis.

Le président a tranché : deux mois avec sursis pour rébellion, relaxe pour outrages et violences, 100 euros de dommages et intérêts et 100 euros de remboursement de frais d’avocat pour chacun des gendarmes.

Balahachi a d’ores et déjà porté plainte pour violences et ce, même si aucun jour d’ITT ne lui a été délivré suite à l’interpellation incriminée. Il est sorti du tribunal acclamé par ses soutiens, organisant même une quête pour le syndicaliste.

 

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