Les caillassages des ambulances sur l’axe Dzoumogné-Mamoudzou semblent devenir monnaie courante. Samedi soir, le conducteur d’un de ces véhicules de secours a pris une pierre en pleine figure, poussant le personnel soignant à exercer un droit de retrait ce lundi.
Chamou a trente ans de métier dans les guiboles. Et ce lundi 21 février, l’ambulancier de Dzoumogné n’hésite pas à le dire : “Je veux changer de poste. Qu’ils me mettent à un autre poste dans l’hôpital, je sais pas, peu importe, jardinier, ou alors je peux ramasser les papiers par terre.” Tout sauf continuer à conduire les patients du centre médical de référence (CMR) à Mamoudzou en pleine nuit, la peur au ventre.
Difficile de lui en vouloir : samedi soir, Chamou a pris un caillou dans la figure alors qu’il transportait une sage-femme et une dame sur le point d’accoucher. Alors qu’il passe devant la pharmacie à Koungou, une pierre traverse le parebrise et l’atteint à la tempe. Le sang coule. L’homme met sa main et exerce une pression sur la blessure. De l’autre, il tapote sur son téléphone pour joindre le 15. “Personne n’est venu, donc j’ai continué tout seul jusqu’à l’hôpital de Mamoudzou”, souffle l’agent, encore sous le choc. “Aujourd’hui, ça ne saigne plus, mais j’ai mal, j’ai du mal à bloquer mes dents pour manger.”
Huit agressions à Dzoumogné
En tout, ils sont déjà quatre ambulanciers à avoir vécu des situations similaires depuis le début de l’année 2021. Des caillassages sans raison apparente qui prennent pour cible leur véhicule de secours, alors même qu’ils transportent des patients. “J’ai déjà deux collègues qui se sont mis en arrêt, parce que psychologiquement, ça ne va plus”, raconte Zarouki, lui-même victime d’un jet de pierre fin janvier, tandis qu’il filait vers la commune chef-lieu pour une urgence.

Un premier protocole à moitié réalisé
Or, si la situation semble s’exacerber ces dernières semaines, elle n’est en réalité pas nouvelle. Déjà, l’année dernière, le syndicat avait recensé cinq agressions, qui avaient poussé le personnel soignant du centre périphérique de Dzoumogné à exercer un premier droit de retrait. Et tous les points du protocole de sortie de crise n’ont, depuis, pas été remplis, fait valoir Mouayad Madjidi. La mise en conformité de l’éclairage à l’intérieur du site ? “Faite à moitié”. Le rehaussement des clôtures ? Pas terminé. Les caméras de surveillance ? “Elles ont bien été installées, mais impossible de savoir si elles enregistrent quelque chose”, déblatère-t-il.
Plus de moyens de protection

Le pire, pour ces agents ? Même en portant plainte, rien ne change. “À la gendarmerie, on m’a dit qu’il fallait aussi que le CHM porte plainte, car il s’agissait de leur véhicule. J’en ai averti immédiatement le cadre d’astreinte. Quinze jours plus tard, je n’ai toujours pas de nouvelle !”, s’exclame Zarouki, lui-même habitant de Dzoumogné et qui était allé jusqu’à retrouver les jeunes responsables de son caillassage pour les dénoncer aux autorités. Sans succès. De quoi remettre en cause sa vocation ? Pas pour l’instant. Mais, “moi, demain, si je suis de garde, je mets mon casque de moto…”, lance l’ambulancier de 43 ans. Paré pour la bataille.






































