Les Mahorais et leurs élus réaffirment leur soutien

A Chirongui, jeudi matin, c’était l’union sacrée des élus, syndicats, collectifs locaux et habitants pour envoyer un message de soutien aux autorités. Au même moment, l’association des maires de Mayotte s’est réunie à la mairie de Mamoudzou, pour notamment échanger sur l’actualité. En fin de réunion, les maires, menés par leur président Madi Madi Souf, ont tenu une conférence de presse pour aborder le point majeur de l’actualité : l’opération Wuambushu et l’intensification des opérations de sécurisation. Une manifestation similaire à celle de Chirongui était organisée, samedi matin, à Mamoudzou.

A Chirongui, il était question d’unité derrière l’État. Près d’un millier de personnes ont rejoint la ville du sud de Mayotte, jeudi matin, pour apporter leur soutien à l’opération. Au milieu des chants et des drapeaux bleu-blanc-rouge, l’ambiance est restée bon enfant. Sur le terrain de foot gorgée d’eau, si certains dans la foule se disaient impatients et « prêts à faire à la place de l’État », le message véhiculé restait celui d’être solidaire avec les forces de l’ordre et Gérald Darmanin, le ministre de l’Intérieur et de l’Outre-mer. « Nous avons foi en notre justice, en notre gouvernement pour mener à bien cette opération. Nous sommes là pour la soutenir », confirme Soula Saïd-Souffou. Le conseiller départemental du canton de Sada-Chirongui était l’un des orateurs du jour, aux côtés des responsables de collectifs locaux et des élus qu’ils soient départementaux ou maires. Le discours, bien qu’appelant à rester aux côtés de l’État, s’est fait plus virulent parfois à l’attention « des associations droits-de-l’hommiste », « la république des juges » et surtout des Comores, rendues coupables d’obstruction au plan initial. « Mayotte n’est pas en état d’urgence, Mayotte est en état de siège », affirme l’élu du canton sur l’estrade, galvanisé par la foule.

Réunis autour de la table, au même moment, les élus de l’association des maires de Mayotte et des conseillers départementaux ont échangé sur de nombreux points à l’ordre du jour et notamment sur l’opération de lutte contre la délinquance et contre l’habitat insalubre nommée Wuambushu. Au travers d’une déclaration solennelle, « au nom des élus de Mayotte », le président de l’association des maires de Mayotte et premier magistrat de Pamandzi, Madi Madi Souf, s’est exprimé sur la situation « devenue insupportable ».

« Tous les habitants de Mayotte sont privés de leur liberté »

Au travers de son propos, le président a affirmé que « cette violence grandissante a transformé notre île paradisiaque en enfer sur terre ». Il a également tenu à rappeler que les Mahorais avaient confirmé leur choix de s’ancrer dans la République française en 1974, en 1976, en 2000, puis en 2009, lorsque Mayotte a pris le statut administratif de département français. « Cependant, c’est avec désolation que depuis de nombreuses années, tous les habitants de Mayotte sont privés de leur liberté, de certains de leurs droits les plus primaires », ajoute-t-il.  Pour Zamimou Ahamadi, vice-présidente du conseil départemental, « aujourd’hui, on est Français, ça a été très difficile, même si on est Français, les Comores n’acceptent toujours pas le fait que Mayotte est française. On continue le combat, c’est un héritage notre territoire ».

Par la suite, le président de l’association a fait état de l’entrave à la liberté de circulation sur l’île, « par des coupeurs de route, agressant et rackettant nos concitoyens ». Pour lui, la liberté d’entreprendre est aussi touchée, par les incendies des locaux et matériaux, « sans parler de ce climat délétère qui réduit l’attractivité économique au néant ». En complément, Madi Madi Souf, évoque la liberté « de jouir de nos biens » qui est destituée aux habitants lorsque « notre foncier est occupé illégalement, avec le soutien de pseudos associations droits de l’homme ». Enfin, d’un point de vue sécuritaire, les maires jugent que la liberté « d’être tout simplement en sécurité est de plus en plus annihilée à chaque fois que des personnes sont agressées ».

« Un arrêt des inscriptions scolaires » pour les enfants de clandestins

En fin d’année dernière, les maires s’étaient mobilisés pour alerter les institutions nationales en métropole, afin de mettre en exergue la situation de Mayotte et réclamer « un choc de souveraineté » sur ce petit territoire de 374 km². Pour les maires, « cette opération en est la preuve ». C’est dans ce contexte, que les premiers magistrats des villes de Mayotte ont tenu à rappeler qu’ils « soutiennent toute opération qui permettra de ramener paix et sécurité » et qui permettra aussi au 101e département « de sortir de ce chaos ». Concrètement, les maires mahorais demandent au gouvernement « face à l’insurrection actuelle », de déclarer l’état d’urgence à Mayotte, de suspendre instamment la délivrance des titres de séjours à la préfecture de Mamoudzou, de suspendre tout visas d’entrée sur le territoire en provenance de l’Union des Comores. En complément, les maires de Mayotte vont se réunir pour étudier « la question de l’arrêt des inscriptions scolaires de tous les enfants dont les parents sont en situation de clandestinité », complète le président de l’association.

Concernant l’opération Wuambushu, qui a débuté depuis quelques jours sur le territoire, les maires de Mayotte en sont « extrêmement fiers et encourageons à aller encore plus loin dans le temps et plus vite », affirme le maire de Mamoudzou, Ambdilwahedou Soumaïla. Ces opérations de démolition de bidonvilles, « nous les avons demandées, nous les avons souhaitées », réaffirme-t-il. Pour le premier magistrat de Mamoudzou « un bidonville, ça n’a pas lieu d’être en France, donc pas à Mayotte ». Interpellé sur le fait que certains habitants s’étonnaient d’un manque d’informations de la part des premiers magistrats des communes, le maire du chef-lieu a expliqué que, pour lui, « c’est au préfet de donner les détails ». Il a également souligné que « nous encourageons nos populations à nous alerter » et à ne pas faire justice soi-même. « Tous les maires soutiennent cette opération. Il n’y a jamais eu de convention à signer entre un maire et le préfet concernant l’opération Wuambushu », rappelle le président de l’association des maires.

Pour cette première semaine compliquée où les Comores ont bloqué l’arrivée de ses ressortissants (voir par ailleurs), le jeudi n’a pas été le seul jour où la mobilisation a été massive. Ainsi, samedi matin, à Mamoudzou, un millier de personnes sont venues chanter La Marseillaise et clamer leur soutien à l’opération qui doit initialement durer deux mois. « Nous continuerons l’opération Wuambushu autant de temps qu’il faudra », a prévenu toutefois Gérald Darmanin, sur Europe 1.

Un sondage montre 75% de Français favorables

L’institut de sondages a fait une étude auprès de 1.000 personnes pour savoir s’ils avaient entendu parler de l’opération Wuambushu. Deux tiers d’entre elles affirment que « oui », cela descend à 43% pour celles qui affirment « oui, précisément ». Dans le sondage commandé par la chaîne de télévision LCI et en date du vendredi 28 avril, il est aussi question d’opinions. Et elles semblent assez favorables aux autorités. 75% des personnes interrogées se déclarent favorables à l’opération en cours (dont 37% tout à fait favorables et 38% plutôt favorables). Quant à son efficacité, 58% des sondés estiment qu’elle le sera dans la lutte contre la délinquance, 53% dans la lutte contre l’immigration clandestine. Selon les affinités politiques, des différences sont notables. Les partisans d’Ensemble (70% pour la lutte contre la délinquance, 55% pour la lutte contre l’immigration illégale), Les Républicains (69%,58%), le Rassemblement national (73%,69%) et dans une moindre mesure La France insoumise (59%,53%) y voient un moyen de permettre de lutter contre la délinquance et l’immigration illégale. Ce qui n’est pas le cas des proches du Parti socialiste (45%,41%) ou d’Europe écologie-Les Verts (41%,48%).

La cour d’appel renouvelle sa confiance à Catherine Vannier

Présidente du tribunal judiciaire de Mamoudzou, Catherine Vannier est très critiquée pour être la juge ayant signé la décision empêchant l’opération de démolition de cases en tôle dans le quartier Talus 2, à Majicavo-Koropa. Certains y voyant un lien avec le passé de la magistrate qui a été vice-présidente du syndicat de la magistrature classé à gauche politiquement. En effet, celui-ci avait exprimé « ses plus vives inquiétudes » au sujet de l’opération. Il n’en faut pas plus pour Mansour Kamardine, député Les Républicains de la deuxième circonscription de Mayotte, pour affirmer : « Quand on est juge, on se respecte, et en premier lieu on respecte son serment de magistrat, en particulier de rendre des décisions empreintes de neutralité ». Face aux critiques, ce vendredi, le premier président de la cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion a défendu le travail des magistrats et fonctionnaires du tribunal judiciaire de Mamoudzou et la chambre d’appel de Mayotte en qui « il renouvelle sa confiance ». « Dans un état de droit, la critique à l’encontre d’une décision de justice relève de l’exercice des voies de recours et non de la mise en cause personnelle de l’auteur de la décision », fait remarquer Alain Chateauneuf. « Il ne faut pas mettre en cause le travail des juges. Si on n’est pas d’accord, on fait appel », rappelle également le procureur de la République, Yann Le Bris, qui apporte son soutien à la présidente du tribunal.

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