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« La France et l’Europe ne doivent pas laisser les Mahorais seuls en première ligne »

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Après des déplacements en Martinique, en Guadeloupe, en Guyane, et à La Réunion, Marine Tondelier, la secrétaire nationale du parti Europe Écologie Les Verts (EELV), était à Mayotte du 17 au 19 avril. Avec nous, elle revient sur sa visite, les enjeux d’immigration, les enjeux environnementaux, et les élections européennes qui se tiennent du 6 au 9 juin prochain.

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Marine Tondelier a rencontré des étudiants, et a notamment abordé la question de l’absence de logement du Crous sur le territoire.

Flash Infos : Il s’agit de votre première visite à Mayotte. Pourquoi était-il important pour vous de venir ?

Marine Tondelier : Il faut savoir que j’ai décidé, il y a quelques années, de ne plus prendre l’avion – car je n’en ai pas besoin dans ma vie quotidienne pour aller voir ma famille, contrairement aux habitants des îles, qui ont le droit de sortir de leur île. Je m’étais toujours dit qu’en tant que secrétaire nationale d’Europe Ecologie Les Verts (EELV), si je devais reprendre l’avion, ce serait pour aller dans les territoires d’Outre-mer, pour aller écouter ses habitants. Je suis venue à Mayotte avec beaucoup d’humilité, c’est-à-dire que je n’allais pas descendre de l’avion en disant : « comme je viens d’arriver depuis dix minutes, je vais vous expliquer ce qu’il faut faire parce qu’évidemment, j’ai tout compris en lisant des notes dans l’avion » (Elle rit). Je venais pour me rendre compte par moi-même, pour échanger avec un maximum de personnes sur place et pour nouer des relations de travail, qu’on pourrait prolonger dans le temps. Parce qu’on n’est pas venus juste pour deux ou trois jours. Nous sommes venus sur le territoire pour commencer le travail au service de Mayotte, au service de celles et ceux qui voudraient travailler avec nous sur place, avec les gens qui voudraient par exemple rejoindre les Écologistes pour qu’on puisse avancer ensemble et avoir une vraie présence sur Mayotte, afin de défendre les habitants et leur cadre de vie.

F. I. : Comment votre visite s’est-elle déroulée ? Quels acteurs avez-vous rencontrés ?

M.T. : On a rencontré beaucoup de monde. Plusieurs associations environnementales comme Hawa Mayotte, Mayotte Nature Environnement et les Naturalistes. On a rencontré aussi des étudiants, les Jeunes Agriculteurs. Nous sommes allés au bidonville de Kawéni et à la maternité. On a rencontré des militants, on a vu Solidarité Mayotte et Mlezi Maore. En se baladant, on a aussi voulu discuter avec les gens qu’on croisait pour pas être enfermés dans un programme institutionnel.

F. I. : En mars, vous avez interpellé dans une lettre le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer, Gérald Darmanin, sur la suppression du droit du sol. Que pensez-vous des différents projets de loi pour Mayotte qui vont être présentés début juillet au conseil des ministres ?

M. T. : Nous on considère que : soit Mayotte, ce n’est pas la France, soit Mayotte, c’est la France. Et c’est le cas aujourd’hui. Il n’y a pas à y avoir de droit dérogatoire. Les citoyens de Mayotte ne sont pas des citoyens de seconde zone. Il faut les aider et les accompagner dans leurs difficultés, qui sont réelles et notamment au sujet de l’immigration. On n’a pas des œillères, on ne dit pas que ça n’existe pas et que tout va bien. Mais on pense que la France et l’Europe doivent prendre leurs responsabilités, intervenir et ne pas laisser les Mahorais seuls en première ligne pour gérer ce problème. L’Europe doit prendre sa part. Il y a des choses que j’ai vu sur certains territoires d’Outre-mer, en particulier à Mayotte, que personne n’accepterait dans l’Hexagone. Donc il faut qu’on aide ce territoire. Je pense qu’il ne faut pas se tromper de problème. Quand les gens viennent à Mayotte, ce n’est pas une question de nationalité, mais de fuir la pauvreté aussi. Tant qu’il y aura cette différence de niveau de revenu entre Mayotte et les territoires voisins, les gens continueront de venir. Dire que changer tel article dans tel code va arrêter cette situation, c’est se moquer des gens. Ça ne règle pas le problème de fond. Deuxièmement, il y a d’autres exceptions que j’ai pu constater sur place qui sont intolérables. Le fait que le Smic soit 20 % moins élevé qu’en Hexagone, que tous les minima sociaux soient moins élevés, alors que quand on va au supermarché, tout est 30 % plus cher pour l’alimentation c’est incompréhensible. Évidemment qu’il faut un projet de loi sur Mayotte et des politiques urgentes. Mais j’ai l’impression, parfois, que tout le cinéma que fait Gérald Darmanin avec les mesures est contre-productif.

F. I. : Justement, l’année dernière, EELV avait condamné l’opération Wuambushu. C’est aussi le cas cette année ?

M.T. : Wuambushu, ou plutôt « place nette », c’est contre-productif, ça crée de la violence, ça crée de l’insécurité. Il n’y a pas plus de reconduites aux Comores qu’avant. Parce qu’évidemment, quand ils décasent, ils préviennent avant, donc les gens ne sont pas là. Ils détruisent juste des logements qui, certes, ne sont pas des logements de qualité, mais qui permettaient au moins à certaines personnes, et parfois même à des Mahorais, pas seulement des étrangers en situation irrégulière ou régulière, d’avoir un toit sur la tête. Un toit que l’État ne leur procure pas, alors que quand on est citoyen français, on a un droit au logement opposable. Et qu’est ce que fait l’État ? Il paye des bulldozers pour aller détruire leurs habitats de fortune. Alors qu’il y a une épidémie de choléra naissante, on disperse des gens sans eau potable, c’est irresponsable, cela met les gens en danger. C’est du cinéma. Normalement, au cinéma, quand il y a un film qui marche très bien, on fait le numéro deux. Là, Gérald Darmanin fait ça, mais avec Wuambushu 1 qui était loin d’être un succès.

F. I. : Face à une problématique environnementale qu’est la gestion de la ressource en eau, une usine de dessalement va être construite à Ironi Bé. Plusieurs associations environnementales ont dénoncé ce projet pour son impact sur le lagon, et dont le caractère urgent lui permet d’être dispensé de certaines procédures. En tant qu’écologiste, que pensez-vous de cette situation, réglant une problématique environnementale en en créant une autre ?

M. T. : Je vais commencer par dire que quand on est un être humain sur cette planète, on a droit à l’eau potable. Et aujourd’hui, à Mayotte, les 38.000 mètres cubes disponibles d’eau potable par jour, ça ne suffit pas. Donc moi, je peux vous dire comment on devrait faire pour un projet écologique idéal, ce que je peux aussi vous dire, c’est qu’évidemment, tout ça doit être mis au regard de l’impératif que chaque Mahorais ait un accès dans les plus brefs délais à une eau potable de qualité. La deuxième chose est que cela pose plusieurs questions, notamment sur l’impact du rejet de saumure. Je comprends le caractère d’urgence, mais je ne veux pas qu’on dise que comme c’est urgent, on va faire n’importe quoi, quitte à le regretter après. Si tous les poissons du lagon meurent, comment font les pêcheurs ? Si on continue avec les réseaux d’assainissement qui ne vont pas, les déchets qui ne sont pas gérés comme il le faudrait, à la fin, c’est l’île de Mayotte qui va être rendue inhabitable. Et l’habitabilité de l’île de Mayotte ne tient pas à cœur qu’aux écologistes. Donc il faut en prendre soin. Aussi, si vous ouvrez une usine de dessalement, qui fonctionne à l’électricité, que le réseau n’est pas près adéquat et que ça se traduit par des coupures pour la population, c’est aussi compliqué. Mais j’imagine évidemment que les autorités ont ces problématiques là en tête, je pense par contre que les décisions doivent être prises de manière transparente et éclairée avec les études nécessaires. Mayotte est le bien commun de tous ceux qui habitent cette île.

F. I. : La gestion de la crise de l’eau a montré un manque d’anticipation des pouvoirs publics, la collecte des déchets ne montre pas ses résultats à certains endroits… Comment demander à la population de s’investir quand les gestionnaires sur le territoire ne montrent pas toujours l’exemple ?

M. T. : C’est une question très juste. J’ai toujours été absolument en désaccord avec les politiques qui disent que les citoyens doivent faire ceci, doivent faire ça. « Il faut couper l’eau du robinet, il faut éteindre le wifi, il faut, il faut, il faut. » C’est vrai qu’il y a une responsabilité de chaque habitant de cette planète, mais la première responsabilité, est celle de la société dans son ensemble. Et est-ce que les pouvoirs publics organisent une société où il est possible, même, d’être écologiste, où ces comportements sont encouragés et valorisés, ou est-ce-que, comme c’est le cas aujourd’hui, les autorités elles-mêmes ne prennent pas leurs responsabilités ? Aujourd’hui, quand vous habitez à Mayotte, de fait, c’est compliqué. Et les autorités ont une lourde responsabilité dans la situation environnementale de Mayotte. Je ne parle pas que de la santé des petits oiseaux, mais de l’impact sur chaque habitant qui est incommodé par l’échec de l’assainissement, de la gestion des déchets et de leur impact sur l’environnement et sur la santé. Il y a la question des moyens qui sont mis par l’Etat sur ce département… Car si c’est un département comme les autres, alors on s’en occupe. Il faut une égalité, non pas juste une égalité de moyens donnés, mais une égalité réelle, c’est-à-dire qu’il y a des départements français où il faut mettre les bouchées doubles car on part de plus loin. Mais il faut aussi que ça suive localement. On le sait, tout est plus difficile sur une île et c’est pour cela qu’on ne peut pas laisser Mayotte et ses habitants livrés à eux-mêmes et être juste obsédé par les opérations comme « place nette » de Gérald Darmanin, qui se prend pour Walker Texas Ranger, en menant une grande opération de communication qui n’améliore pas le sort des habitants sur place. Je trouve ça très méprisant, en fait, comme attitude.

F. I. : Les élections européennes approchent. Qu’est-ce que des députés EELV au Parlement européen pourraient faire concrètement pour Mayotte ?

M. T. : D’abord, je veux dire que je n’aime pas le mot « outre-mer ». Parce que pour les habitants de Mayotte, l’outre-mer, c’est l’Hexagone, donc tout est très relatif. Et en Europe, c’est pire. En Europe, les territoires comme Mayotte sont appelés les régions ultrapériphériques. Nous, au parti Écologistes, on veut mettre les Outre-mer au cœur de l’Europe. Il faut en faire plus pour ces territoires que pour les autres, car on a une dette envers eux, je n’ai pas peur d’utiliser ce mot. Il faut être lucide et honnête là-dessus. Sur la question migratoire par exemple, je pense que l’Europe doit être beaucoup plus investie pour aider Mayotte. Ce n’est pas à Mayotte de supporter seule le fait d’être près des Comores et que vu le niveau de vie là-bas, les gens aient envie de venir.

Concernant l’agriculture, je trouve que le système n’est pas juste pour les Outre-mer. Car ce sont les plus gros agriculteurs qui ont beaucoup d’argent de ce système, les petits agriculteurs ont plus de mal à avoir des subventions. Pour nous les petits agriculteurs doivent être davantage aidés. Ce sont eux qui produisent ce que les Mahorais mangent tous les jours, et on en a besoin que les Mahorais mangent des produits cultivés à Mayotte parce que cela fait vivre les agriculteurs, ce sont des circuits courts et parce que c’est moins cher en évitant de payer l’octroi de mer et les marges de la grande distribution. Donc il faut vraiment aider les petits agriculteurs mahorais. C’est important et c’est ce pourquoi nous nous battrons au Parlement européen.

F. I. : Comment comptez-vous convaincre les Mahorais de voter pour les Écologistes aux européennes ? Sachant que le parti a fait de très faibles scores aux dernières élections (4,36% aux Européennes de 2019) et qu’il n’y a pas d’antenne EELV sur le territoire ?

M. T. : 71 % des habitants de Mayotte n’ont pas voté aux dernières élections européennes. Quand je vois comment l’Europe aujourd’hui, telle qu’elle est conçue, abandonne Mayotte, je ne peux que le comprendre. Ce qu’on dit, c’est que chaque bulletin vert mis dans l’urne le 9 juin, sera pour une certaine vision de l’Europe, plus juste, différente et renforcée. Nous, quand vous mettez un bulletin vert dans l’urne, c’est très cohérent. Vous savez pour quoi vous votez : pour des écologistes, que ce soit en France, en Allemagne, ou ailleurs en Europe. La semaine dernière, juste avant l’arrivée de Marine Le Pen à Mayotte, son allié d’extrême-droite allemand, l’AFD, a dit qu’il fallait restituer Mayotte aux Comores. Alors que Marine Le Pen dit « Mayotte c’est la France, c’est super ». Donc concernant les habitants de Mayotte qui vont mettre un bulletin pour Marine Le Pen dans l’urne, je me demande vraiment pour quoi ils vont voter, parce que cela enverra au Parlement européen des gens qui vont siéger dans un groupe où une partie dit « Mayotte c’est la France » et l’autre partie « Mayotte doit être restituées aux Comores ». Ça devrait les interroger.

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