Edito. Ce que j’en pense…

Il y a des besoins immenses, d’établissements scolaires, de mobilisation des ressources en eau, de voies de circulation pour désengorger Mamoudzou, d’aménagement des villes et villages avec des espaces publics indispensables, d’urbanisation moins anarchique, de valorisation des patrimoines naturels, humains, historiques, culturels…

Mayotte a des atouts à valoriser. Alors des bâtiments sortent de terre. Il était temps diront certains. Ça continue diront d’autres. En tout cas le bâtiment, par grands à-coups, va et vient. Et là ça va mieux.Il y a encore besoin de milliers de logements, pour que chacun puisse disposer d’un logement plus digne, et de centaines de salles de classe pour suivre la croissance démographique qui continue son explosion. Il y a besoin de zones d’aménagements concertés, de zones d’activités artisanales ou commerciales dans les villages. Il y a besoin d’avoir des plages propres et aménagées, vivantes. Il serait temps !

On a encore entre 15 et 17 naissances par jour sur l’île (une salle de classe à construire et ouvrir tous les deux jours !), avec des pics certains mois à 600 naissances! Ça fait du monde à loger, éduquer, soigner, transporter, encadrer, et un jour à qui proposer un emploi ! … On est très loin de répondre à ces besoins grandissants.Très loin. La violence gagne du terrain chaque jour. Alors, que des bâtiments sortent de terre, c’est une belle nouvelle pour commencer l’année, avec le bâtiment d’Aziz Sam qui se termine aux Hauts vallons, le plus grand bâtiment privé de Mayotte.

Avec la ZAC du Soleil levant de la Sim, le futur siège de la CSSM par CBO Territoria, qui deviendra le plus grand bâtiment de Mayotte,avec l’hypermarché de la Sodifram au Baobab, avec des collèges, des lycées…Oui, Mayotte avance, son visage pour les prochaines décennies est en train de se dessiner. Il y a bien toujours des centaines de maisons qui se montent le weekend,avec des clandestins, sans plan, sans permis, sans aucun respect des normes, sans prévoir de place de parking, avec les escaliers ou les murs mordant sur le goudron de la rue… Et les responsables ne disent rien… Par manque de courage, par faute professionnelle que personne ne leur reprochera. Alors ils laissent faire. Ils laissent ce sale travail aux suivants, quand il sera trop tard.

Les problèmes surgiront en effet plus tard, quand il y aura des voitures à garer et des conflits de voisinage, des secours à laisser passer dans ces rues trop étroites,des camions-poubelles qui ne pourront pas desservir ces quartiers… C’est comme ça. Alors que l’on est en train de construire et pourrait faire appliquer simplement les règles, on laisse les problèmes s’entasser, pour les suivants… On mange bien,on profite de l’instant présent, on voyage beaucoup, tout va bien… Alors oui, Mayotte avance, mais elle recule aussi trop souvent. Le déficit du conseil départemental est revenu à la face de l’île, violemment. Près de 50 M€ que la Chambre régionale des comptes dénonce vigoureusement. Mais ça s’arrête là.

Alors qu’il faut cofinancer les projets pour les fonds européens et le Contrat de plan. C’est inquiétant, avec à peine 10 % des fonds engagés à ce jour. Avec un salaire moyen au conseil départemental de 3 450 €, personne ne veut que ça change dans les bureaux. Surtout pas de vague…

Et c’est pareil dans les communes. Si encore le travail était fait, tant mieux pour eux ! Mais avec 70 à 80 % d’agents de catégorie C, sans encadrement suffisamment sérieux, les projets n’avancent pas. Les barges sont trop régulièrement à l’arrêt, à l’image de l’île, beaucoup trop de magnégné, à l’image du marché boui-boui, de ses vendeuses de brochettes insalubres et de ses toilettes… en plein air, à l’image du stade de Cavani à l’abandon…

À l’image de ses bidonvilles qui se répandent autour des villes et des villages. Au lieu de se mettre au travail sur ces chantiers importants, urgents, certains, qui y trouvent tellement bien leur compte, réfléchissent plutôt à savoir comment maintenir cela, poursuivre l’indexation de 10 % par an pour les deux prochaines années. La solution est simple : il suffira de continuer à augmenter l’octroi de mer et les impôts locaux.

Les prix vont évidemment augmenter, alors les entreprises, les artisans vont augmenter leurs tarifs, les loyers vont suivre… et la vie chère sera hypocritement dénoncée, pour cacher encore l’incapacité, l’incompétence à résoudre les problèmes, à créer des richesses et de l’emploi à Mayotte, alors qu’il y a des entrepreneurs encore motivés, des investisseurs pas complètement dégoûtés, des cadres compétents, des agents dynamiques, mais tellement seuls ou mis de côté.

Alors oui, Mayotte avance, il y a de l’espoir, mais aussi beaucoup d’inquiétudes pour cette année 2016.

Laurent Canavate

Mayotte Hebdo vise à contribuer au développement harmonieux de Mayotte en informant la population et en créant du lien social. Mayotte Hebdo valorise les acteurs locaux et les initiatives positives dans les domaines culturel, sportif, social et économique et donne la parole à toutes les sensibilités, permettant à chacun de s'exprimer et d'enrichir la compréhension collective. Cette philosophie constitue la raison d'être de Mayotte Hebdo.

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