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Carburants : l’usine à gaz de l’inflation

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On le sait, le confinement à Mayotte est rendu d’autant plus difficile qu’une grosse partie de la population vit dans des habitations insalubres, dénuées du confort élémentaire. Dans une publication diffusée hier, l’Insee rappelle quelques chiffres parlants. Résumé point par point.

Rachat de Vindemia par GBH : la grande distribution de Mayotte face à la menace d’une concentration inédite

Réunion au sommet ce lundi, entre les différents acteurs économiques et politiques du 101ème département, alors que le rachat de Vindemia, filiale de Casino, par GBH, qui détient 11 magasins Carrefour, doit avoir lieu le 1er juillet. Pour l’instant, ni l’Autorité de la Concurrence, ni le Conseil d’État ne se sont prononcés contre l’opération. Mais après La Réunion, c’est au tour des acteurs mahorais de s’inquiéter de ses conséquences pour la vie économique locale.

Grand mariage / Manzaraka : l’entraide encore privilégiée pour le financement

Le manzaraka, ou grand mariage, est un passage obligatoire pour tout Mahorais souhaitant s'inscrire dans la tradition. Cette cérémonie peut facilement rassembler plus de 300 personnes : colliers de fleurs, mbiwi, mais surtout liasses de billets. Le manzaraka a un coût ! Alors, comment est-il financé ? 

 

Crise ukrainienne, reprise d’activité post-Covid, ruée sur les bouteilles de gaz… Chacune de ces propositions est valable pour expliquer la hausse exceptionnelle des prix du gaz et des carburants à Mayotte ces derniers mois. Les foyers du 101ème département, qui ne peuvent se contenter que d’une remise de l’Etat sur l’essence, n’ont désormais qu’à prier pour que le prix des produits bruts baisse.

D’aucuns soutiennent que les Mahorais sont résignés face à la relative pénurie de gaz et l’augmentation – bien moins relative – de la hausse des prix des carburants. Que nenni ! Sur les réseaux sociaux, les internautes semblent adeptes du dicton « mieux vaut en rire qu’en pleurer ». Des dizaines de mèmes et d’espiègleries viennent fleurir le web mahorais au sujet de l’explosion des prix du gaz et de l’essence. Si le second degré est de rigueur en ligne, la population s’est néanmoins enflammée sur une potentielle hausse des prix. En se ruant sur les bouteilles de gaz disponibles sur l’île au lagon, les consommateurs ont provoqué une pénurie temporaire qui n’aurait jamais dû exister, à l’image des comportements observés dans les grandes surfaces lors des premiers confinements liés à la crise sanitaire. Le manque éphémère a donc été dû à un certain instinct grégaire, et non pas à une quelconque pénurie faisant suite à l’invasion de l’Ukraine par la Russie. À Mayotte, les bouteilles ne sont pas les mêmes que celles de métropole. Quand l’Hexagone doit compter en partie sur le gaz naturel de Russie, l’île au lagon tourne au butane importé des pays membres de l’OPEP, qu’il s’agisse de l’Inde ou de pays d’Amérique du Sud. Cependant, les hausses de prix, elles, sont bien réelles.

+ 25% pour le sans plomb, + 31% pour le gazole

En tout juste 14 mois, de janvier 2021 à avril 2022 plus exactement, les carburants et le gaz ont atteint des hauteurs inouïes. Alors que les prix de vente maximum du sans plomb et du gazole étaient respectivement de 1,39€ et 1,15€ le litre au début de l’année dernière, ils sont désormais à 1,74€ et 1,51€, d’après les publications de la préfecture de Mayotte. Cette explosion représente une hausse de 25% pour le sans plomb et de 31% pour le gazole. « La structure de prix est la même tous les mois, on prend le prix du pétrolier sur les 15 premiers jours du mois précédent, explique Karine Poisson, directrice générale de TotalEnergies Mayotte. Ce qui veut dire qu’à partir du moment où le marché augmente, le prix de base du produit également. Tout est formalisé de façon claire, que ce soit les taxes qu’il peut y avoir au niveau de l’Etat et du fret, ainsi que des marges, qui sont validées par la préfecture et qui sont fixes d’un mois à l’autre. »

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Seulement, si l’on observe les courbes, elles sont en hausse exponentielle depuis quelques semaines. Même sur le petit caillou de l’hémisphère sud qu’est Mayotte, la guerre menée par la Russie en Ukraine depuis le 24 février a donc un effet, que l’on pourrait qualifier de papillon. « La crise en Ukraine pèse évidemment beaucoup sur le cours du pétrole mondial, continue Karine Poisson. Cela nous met dans une situation où la parité euro-dollar nous est aussi moins favorable, puisque le dollar augmente. Mais il y a aussi le post-Covid qui provoque une reprise d’activité, et donc beaucoup plus de demande, face à moins d’offre de l’autre côté. » Quant à la bouteille de gaz de 12 kilos, elle est passée de 22,50€ en janvier 2021 à 29€ en avril 2022, ce qui correspond à une hausse de 29%. Des dépenses superflues pour les Mahoraises et les Mahorais qui, faut-il le rappeler, vivent avec un PIB par habitant de 9380€ en moyenne (Insee, 2015) contre 32967€ en France, et dont 77% se situent au-dessous du seuil de pauvreté.

Ressentiment réunionnais

La situation est donc dramatique pour les ménages de l’île aux parfums, qui doivent faire face à « l’odeur de l’essence » ces derniers mois. Autre motif de grogne sociale : les différences de tarifs existant entre Mayotte et le département voisin de La Réunion. De l’autre côté de Madagascar, « au 1er février 2022, le prix de la bouteille de 12 kg était de 20,33 euros à La Réunion et de 25,43 euros à Mayotte, soit un surcoût à Mayotte de +25,43 %. Au 1er avril, le prix de la même quantité de gaz est de 22,96 euros à La Réunion et de 29,00 euros à Mayotte, soit un surcoût de +26,31 % », comme le rappelait Mansour Kamardine dans une publication du Journal officiel datée du 12 avril. Le député mahorais a notamment demandé au gouvernement « ce qui explique une augmentation plus importante des prix à Mayotte qu’à La Réunion. Il lui demande également ce qu’il entend mettre en œuvre pour réduire les différences de prix de plus de 26% au détriment des habitants de Mayotte. Il lui demande enfin s’il va décider d’une inspection des services de l’État sur les coûts d’importation des hydrocarbures par les opérateurs économiques ainsi que leurs marges sur ses produits. »

Quant aux différences de tarifs à la pompe entre l’île Bourbon et celle au lagon, Karine Poisson les résume en une « question de coût d’accès au produit ». « Les lignes de fret maritime ne sont pas du tout les mêmes pour La Réunion et Mayotte, déclare-t-elle. Nous avons un pétrolier par mois, qui vient pour remplir les stocks, mais ce coût d’approvisionnement est beaucoup plus élevé qu’à La Réunion. Sur le reste, c’est-à-dire les taxes et les marges, elles sont globalement les mêmes. » Bien que les explications de TotalEnergies, en situation de monopole à Mayotte, paraissent logiques, il est compliqué pour un ménage qui voit son budget diminuer de les admettre. Fort heureusement, les Mahorais ne semblent pas encore décidés à fouler le pavé comme ce fut le cas en 2011, lors des manifestations contre la vie chère, ayant en partie dégénéré en émeutes. Mais, alors que la France est sur le point d’élire son prochain président de la République, il faudra que ce dernier se retrousse les manches au sujet des carburants, et plus généralement du pouvoir d’achat. Au risque de voir les ronds-points refleurir en jaune, et les rues s’embraser une nouvelle fois de la colère populaire.

 

Retrouvez l’intégralité du dossier consacré à l’inflation dans le Mayotte Hebdo numéro 996.

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