“2024 fut pour Mayotte une année de défis” estime la directrice de l’IEDOM

L’institut d’Emission d’Outre-Mer (IEDOM), qui représente la Banque de France sur le territoire, a organisé une conférence ce mardi sur les tendances générales de l’économie mahoraise en 2024. Elles font apparaître une conjoncture économique perturbée sur l’année, contraire aux prévisions. Florence Mar Picart, directrice de l’IEDOM Mayotte, fait le point.

Flash Infos : Que faut-il retenir de l’économie mahoraise en 2024 ?

Florence Mar Picart : Il est à retenir que l’année 2024 fut pour Mayotte une année de défis, elle a commencé avec deux mois de barrages et s’est finie avec le cyclone Chido. Entre temps, évidemment, une activité relativement soutenue d’un point de vue économique, mais une année difficile peut-on dire à analyser dans la mesure où elle s’est terminée dans les derniers jours avec une impossibilité pour les entreprises locales de reprendre leurs activités suite au cyclone. Donc, nous dirons un indice de conjoncture des affaires sur l’île qui était bien repartie après les barrages mais qui finalement avait chuté de 10 points en fin d’année compte tenu de l’absence de perspectives pour les entreprises après Chido de pouvoir se projeter économiquement.

“2024 fut pour Mayotte une année de défis” estime la directrice de l’IEDOM
Contrairement à une certaine idée reçue sur l’île, l’IEDOM estime que les banques locales soutiennent bien l’activité économique des entreprises.

F.I. : Il est question de beaucoup de projets qui vont sortir de terre prochainement, d’une commande publique assez conséquente pour relancer l’économie, quelles sont réellement les perspectives pour l’avenir immédiat ?

F.M.P. : La croissance économique à Mayotte est soutenue par deux facteurs, la consommation des ménages et effectivement la commande publique. En 2024 il y a une inflexion sur la consommation des ménages qui a été assez marquée, mais la commande publique est restée soutenue. Aujourd’hui, nous pouvons affirmer avoir dépassé la phase d’urgence suite au cyclone, maintenant nous allons nous engager dans une phase de reconstruction comme l’a dit le président de la République, Emmanuel Macron, donc tout ce qu’on espère au niveau de l’IEDOM, c’est que Mayotte puisse être reconstruite et que cela puisse apporter des opportunités aux entreprises implantées sur ce territoire, dans le cadre de cette reconstruction qui est soutenue par l’Etat et le Département.

F.I. : Les entreprises enregistrent une absence d’activité de 2,5 à 3 mois en 2024, quel est l’impact réel sur l’économie locale ?

F.M.P. : Ce qui est clair c’est que nous avons eu une baisse du chiffre d’affaires forcément dans la mesure où les entreprises n’ont pas pu travailler et réaliser le chiffre d’affaires qu’elles espéraient. En tous les cas, dans l’enquête de conjoncture que nous menons auprès des entreprises, nous constatons une baisse de 10 points de notre indicateur. Cela signifie naturellement une baisse du chiffre d’affaires ! Pour l’instant nous n’en avons pas connaissance, il va nous falloir patienter jusqu’à recevoir les bilans et l’analyse qui en sortira, ce qui ne sera possible qu’après le 30 juin 2025.

F.I. : Vous avez fait état de trésorerie artificielle pour les entreprises locales, à quoi faites-vous allusion précisément ?

F.M.P. : Le point que vous soulevez a effectivement été évoqué au cours de notre conférence de presse. En effet, à la fin de l’année 2024, nous nous sommes aperçus que l’existence d’encours de trésorerie dans les banques au niveau des entreprises relativement importants. Nous les qualifions d’artificiels en ce sens qu’ils sont probablement différés, beaucoup d’entreprises ayant bénéficié en fin d’année de reports, notamment d’échéances bancaires, de reports d’échéances sociales ou fiscales. Aujourd’hui une trésorerie existe dans certaines entreprises, mais à la reprise effective, ces différents paiements bancaires ou fiscaux vont sensiblement diminuer ces encours de trésorerie actuellement disponibles.

F.I. : Il y a une idée reçue à Mayotte selon laquelle les banques locales n’accompagnent pas assez les entreprises, qu’en est-il vraiment ?

F.M.P : Sur l’année 2024, les chiffres démontrent une augmentation des encours bancaires, notamment sur les entreprises, les banques locales soutiennent effectivement l’effort d’investissement et l’effort économique auprès des entreprises mahoraises. Simplement, je dirai qu’il est impératif que les entreprises qui rencontrent des difficultés de financement auprès de leurs banquiers, structurent mieux leurs dossiers avant d’aller se présenter à eux, c’est indispensable ! Quand elles sont toutes petites, elles peuvent par ailleurs se faire aider, et de toutes les façons, en cas de difficultés de financement, il faut savoir que nous à l’IEDOM sommes médiateurs du crédit et nous pouvons intervenir en cas de nécessité dans ce cadre-là. Mais de toutes les façons, au niveau économique, le monde bancaire sur la place est relativement dynamique au même titre que les entreprises qui restent implantées sur l’île.

F.I. : Le prêt à taux zéro annoncé par le gouvernement, s’annonce pour beaucoup comme étant le sesame, comment cela va-t-il se passer ? Qui y a droit et qui n’en a pas ? 

F.M.P. : En réalité, il s’agit d’un prêt à taux zéro Mayotte, parce que c’est un dispositif qui existe ailleurs, ici il s’agit de quelque chose de particulier mise en place pour l’île compte tenu de la situation qui a suivi le cyclone Chido. Toutes les banques locales ont signé la convention avec le Fonds de Garantie Habitat Social de Mayotte, donc désormais chaque citoyen peut s’adresser à son banquier, tout en sachant qu’il y a des conditions à remplir en vue d’obtenir ce prêt. Il vise à la reconstruction de l’habitat pour les particuliers. Tout un chacun peut s’adresser à son banquier, il suffit de se présenter auprès de votre guichet et vos conseillers bancaires vous recevront pour examiner votre éligibilité et vous expliqueront les conditions d’attribution de ce prêt.

Journaliste politique & économique

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