Shimé et Marovoanio, promoteurs de la culture linguistique mahoraise

Ce lundi 21 février avait lieu la 22ème édition de la journée internationale de la langue maternelle. Alors que partout en France, les langues régionales s’éteignent les unes après les autres, à Mayotte, les associations Shimé et Marovoanio veulent tenter d’éviter l’irréparable.

“Une langue avec une richesse de ce genre ne se lâche pas !”, affirme Rastami Spelo, président de l’association Shimé. Pour cet amoureux du shimaoré, la préservation du patrimoine linguistique de l’île aux parfums s’avère non négligeable. Après 24 ans de travail acharné, Rastami Spelo garde espoir. “La tâche fut difficile au départ. Nous allions vers une perdition à coup sûr. Puis, nous avons vu l’État et les pouvoirs publics se joindre à notre combat. Aujourd’hui, nous observons une évolution positive et une jeunesse qui revient vers sa langue maternelle”, se réjouit le polyglotte.

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En lien avec l’Éducation nationale, l’association Shimé se donne plusieurs objectifs pour structurer le shimaoré, qui comme l’explique Rastami Spelo, récompensé par le conseil départemental pour son investissement, “n’est pas un dialecte mais bien une langue à part entière”. “Depuis deux ans et demi, nous faisons un travail sur la formalisation du shimaoré”, affirme Gilles Halbout. Graphie, orthographe ou encore grammaire, le shimaoré ne veut plus être considéré comme un patois désuet, mais bien une langue en devenir.

Et le kibushi dans tout ça ?

“Dans les années 1980, 50% de la population mahoraise parlait kibushi. Aujourd’hui, il n’est usité que par 20% des habitants”, avance Toumbou Toibib, trésorier et coordinateur de l’association Marovoanio. Créée en décembre 2021, la structure compte bien porter haut et fort la voix des Mahorais qui s’expriment en kibushi. “À l’heure actuelle, nous parlons kibushi dans dix-sept communes de l’île, pourtant aucune information n’est traduite dans cette langue”, se désole l’une des têtes pensantes de l’association. Handrema, Hamjago, M’tsangadoua, Acoua, M’tsangamouji… Autant de villages où la langue d’origine malgache continue à subsister. Sur les traces et avec l’aide de sa grande sœur Shimé, l’association Marovoanio espère sauver de l’oubli cette richesse linguistique.

Une appartenance régionale

“Nous souhaitons défendre notre langue plutôt que de l’écraser sous la prédominance du shimaoré et du français”, argumente Toumbou Toibib. Bien plus qu’une simple lubie, le membre de l’association explique l’intérêt stratégique du kibushi, “Nous voulons lancer une démarche de revalorisation. De part la proximité de Mayotte avec Madagascar, le kibushi peut avoir à la fois un intérêt économique, diplomatique et culturel. Mais pour cela, il va falloir que nous posions un cadre et une méthodologie pour être opérationnels. » L’objectif de la structure étant une “sorte d’affirmation régionale sans pour autant s’écarter de l’identité nationale française”.

 

Un institut et un conseil académique d’ici juillet

D’ici le mois de juillet 2022, le 101ème département devrait être doté d’un institut des langues et civilisations de Mayotte ainsi que d’un conseil académique des langues de Mayotte. Deux outils qui permettront à l’avenir de structurer et faire perdurer les langues régionales sur l’île au lagon.

 

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