Orange déploie des “safety cases” pour (re) connecter Mayotte
La Mutualité sociale agricole solidaire envers les agriculteurs mahorais

Le syndicat d’enseignants SNES-FSU critique la gestion post-Chido
Il demande « des réponses » au ministère
Mayotte placée en vigilance orange fortes pluies et orages
Mayotte est placée en vigilance orange fortes pluies et orages depuis ce jeudi à 16h28 par Météo-France. “Une activité orageuse intense abordera l’île par l’Est et la traversera jusqu’à 19h”, indique le communiqué de la préfecture de Mayotte. Des averses orageuses sont à prévoir pour le reste de la soirée.
Plusieurs recommandations de la préfecture
Les services de l’État recommandent de se tenir informé de l’évolution de la situation, de mettre à l’abri les biens qui pourraient être touchés par une montée des eaux et de se préparer à l’évacuation de son domicile. Il ne faut se déplacer qu’en cas de nécessité, avertir des proches de sa trajectoire, ne pas franchir les ravines et rivières qui peuvent être soudainement en crue ou encore tenir les enfants à distance des caniveaux. Il est aussi recommandé de prévoir des moyens d’éclairage de secours et de faire des réserves d’eau potable, ainsi que d’éviter l’utilisation de téléphones fixes et des appareils électriques. Il ne faut pas s’abriter sous les arbres en raison de la possibilité que la foudre les tape et préférer rester dans son véhicule qui assure une bonne protection. Enfin, il est demandé de ranger ou sécuriser les objets qui pourraient s’envoler avec le vent et de signaler tout départ de feu.
Cyclone Chido : l’aide s’organise du côté des organisations non gouvernementales

Le passage du cyclone Chido à Mayotte, le samedi 14 décembre, a entraîné la mobilisation des organisations non gouvernementales (ONG). Les dons qu’elles ont reçu jusqu’alors ont permis l’acheminement de matériel et de volontaires.
Plus de 22 millions d’euros ont été collectés par la Fondation de France pour venir en aide à Mayotte. Pour organiser le soutien qu’elle peut apporter au territoire, elle est en train de constituer un comité « Solidarité Mayotte” qui doit se réunir au moins une fois par semaine afin d’évaluer les besoins de la population. Ce dimanche, des experts bénévoles du comité “Se préparer et répondre aux crises et aux catastrophes” se sont réunis pour valider des premiers soutiens demandés par des associations locales et nationales. La fondation a ainsi décidé de soutenir un collectif de plusieurs associations pour organiser la distribution de kits d’hygiène, de filtres pour décontaminer l’eau ou encore du matériel pour abriter la population précaire.

“Un soutien à Médecins du monde a également été décidé pour répondre, dans un premier temps, aux besoins d’urgence”, précise l’organisme sur son site. L’association Likoli Dago va également être soutenue par la fondation afin de réaliser un diagnostic de l’habitat des bidonvilles à Majicavo-Koropa, dans la commune de Koungou. Viendra ensuite le temps de la reconstruction : l’organisme a ainsi commencé à discuter avec des professionnels et des associations dans le domaine du bâtiment, comme les Compagnons Bâtisseurs, afin d’organiser l’aide à la construction. En attendant, des représentants de l’organisme doivent venir à Mayotte cette semaine pour organiser l’aide avec les associations locales partenaires.
Cinquante volontaires de la Croix-Rouge envoyés
Du côté de la Croix-Rouge française (CRF), l’aide se mobilise également. Sa plate-forme d’intervention régionale de l’océan Indien (Piroi) est à l’œuvre depuis le début de la crise. Cinq de ses experts, notamment logisticiens, avaient été envoyés à Mayotte avant le cyclone afin de pouvoir agir rapidement. Après le passage de la tempête, un premier envoi de matériel incluant des bâches pour abriter 5.000 personnes a été organisé. Depuis, cent tonnes de matériel, comprenant des kits de reconstruction et d’hygiène, des lampes solaires, ou encore des générateurs ont été acheminées en huit envois, via les ponts aériens organisés par les services de l’Etat entre Mayotte, La Réunion et l’Hexagone. Trois unités de traitement d’eau en capacité de fournir 40.000 litres d’eau potable par jour chacune ont également été livrées.
Le samedi 21 décembre, cinquante volontaires de la CRF ont rejoint le sol mahorais pour apporter leurs compétences techniques ou médicales, s’ajoutant au 250 bénévoles et salariés habituellement présents à Mayotte. Les équipes locales arpentent notamment les centres d’hébergement d’urgence et les quartiers informels qui ont subi beaucoup de dégâts. “La CRF a également renforcé ses équipes avec 80 volontaires supplémentaires, incluant des spécialistes de la logistique et de la distribution de biens essentiels”, déclare l’ONG sur son site.
Cyclone Chido : la feuille de route du Département pour éviter une crise généralisée

Le 24 décembre, le conseil départemental de Mayotte a énuméré les multiples urgences pour relever le territoire à différents niveaux, celui de la population, des entreprises et la reconstruction à la suite du passage du cyclone Chido, le samedi 14 décembre.
A la suite de la nomination du nouveau gouvernement, le conseil départemental de Mayotte a détaillé ses « attentes » vis-à-vis de celui-ci et en particulier de Manuel Valls, le nouveau ministre des Outre-mer, qui a promis de se rendre à Mayotte « le plus vite possible ». Pour le président de la collectivité locale, Ben Issa Ousséni, trois crises majeures menacent l’île dans cette période post-cyclonique : « une crise sanitaire ; une crise alimentaire et une crise sécuritaire ».
La première urgence consiste à « protéger et soutenir la population » selon le conseil départemental. Pour cela, il faut mobiliser tous les moyens nécessaires pour répondre en urgence aux besoins vitaux (nourriture, eau, électricité, téléphonie) ; renforcer les équipes médicales et fournir des équipements adaptés pour prévenir une crise sanitaire ; reloger les familles sinistrées, communiquer un plan logistique clair pour la distribution des aides, en précisant le rôle de toutes les forces locales et en prenant en compte les moyens mobilisés par le Département (mobilisation des PMI, CMS et agents départementaux).
Sur le plan administratif et juridique, il s’agit de déclarer l’état de catastrophe naturelle et d’activer les dispositifs de soutien nationaux et européens; couvrir les factures des collectivités locales, identifiées sur Chorus, afin de libérer des fonds pour les opérations d’urgence ; coordonner, avec le Département, l’afflux des aides nationales et internationales et l’acheminement de celles-ci vers Mayotte ; maintenir le couvre-feu aussi longtemps que nécessaire pour assurer la sécurité des biens et des personnes.
L’autre urgence selon le Département est « de relancer et accompagner les acteurs locaux ». Pour la population, il s’agit d’organiser une opération massive de nettoyage de l’île et d’évacuer les déchets non traitables sur l’île vers les pays ou territoires en capacité de les prendre en charge ; de suspendre les échéances des crédits immobiliers pour les propriétaires ayant perdu leurs biens (intervention auprès des établissements bancaires).
Pour les entreprises, il s’agit de mettre en place des dispositifs de sauvegarde des entreprises et des emplois (chômage partiel, suppression ou gel des charges sociales et fiscales) ; de garantir la continuité des soutiens fiscaux existants pour l’économie (CICE, zone franche, etc.), de fournir des dispositifs de trésorerie (prêts d’honneur, avances remboursables) ; d’indemniser les secteurs sinistrés (agriculture, pêche, artisanat) et accompagner leur reconstruction.
Pour les collectivités locales, il s’agit d’accompagner la maîtrise du foncier et d’encadrer la reconstruction pour éviter la réapparition des bidonvilles ; de prendre en charge les pertes financières liées aux marchés publics affectés par la catastrophe ; de mettre en place un plan « urgence retour à l’école » pour garantir une reprise rapide de l’Éducation.
Un plan national de reconstruction
Ensuite, le conseil départemental estime que viendra le temps de la reconstruction durable pour bâtir un territoire plus résilient. Pour la population, il s’agit de soutenir la reconstruction des logements privés et accélérer celle des logements sociaux. Pour les collectivités locales, il s’agit de lancer un plan national de reconstruction, sur trois ans, pour renforcer la résilience de l’île ; de mobiliser des architectes, ingénieurs et grandes entreprises pour repenser les infrastructures ; d’élaborer un nouveau contrat d’engagement État-Région pour planifier les grands projets structurants (port, aéroport, fibre optique, mobilité, énergie), sur cinq ans.
L’objectif est « de sortir de la phase d’urgence pour entrer dans la phase de stabilisation, évoquée par le président de la République, dans sa feuille de route pour Mayotte », explique le Département. « Nous attendons du ministre des Outre-mer qu’il s’empare rapidement du plan d’actions annoncé et qu’il engage une collaboration étroite avec nous pour le construire et le concrétiser ensemble. Il est essentiel d’éviter les erreurs du passé et de transformer notre vision de développement pour Mayotte en une réalité concrète, en mobilisant les moyens nécessaires pour atteindre cet objectif », affirme le conseil départemental.
Manuel Valls, « un Chido 2 pour Mayotte »
Il est loin d’être un grand fan de l’ex-Premier ministre, Manuel Valls. Mansour Kamardine, désormais député honoraire de Mayotte, se fait très critique de l’arrivée de l’ex-socialiste au ministère de l’Outremer et n’hésite pas à le comparer à « un Chido 2 pour Mayotte ». Il y voit une menace pour la suppression du droit du sol qu’il défend depuis des années. « Nous, Français de Mayotte, exigeons le droit à la continuité historique. Nous refusons le remplacement de population (en vingt ans, les Mahorais sont passés de 80% de la population de l’île à seulement 30% des habitants). Nous nous opposons à la poursuite des politiques publiques qui se concentrent sur le traitement de l’échec, par manque de volonté, de la maîtrise nos de frontières », défend l’avocat, qui espère que la loi d’urgence pour Mayotte actuellement en préparation comprendra aussi un volet sur la lutte contre l’immigration clandestine. « Cette loi devra traiter la nécessaire maîtrise de l’immigration car il ne peut y avoir de reconstruction de Mayotte sans traiter le nœud gordien de nos difficultés, origine également de l’effroyable situation humanitaire consécutive au passage du cyclone Chido », estime-t-il.
À Kahani, dix jours après le passage du cyclone Chido, « on aide avec les moyens du bord »
Les centres d’hébergement d’urgence de Mamoudzou fermés à partir du 31 décembre

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Manuel Valls rentre au gouvernement, Thani Mohamed Soilihi y reste

La composition du premier gouvernement dirigé par François Bayrou a été donnée, ce lundi soir. Alors qu’il faut gérer l’après-Chido à Mayotte, l’ex-Premier ministre Manuel Valls est le nouvel homme en charge de l’Outremer.
« Nous sommes au tout début de la phase de stabilisation »
La préfecture de Mayotte, les services de l’Etat, Électricité de Mayotte et la Société mahoraise des eaux (SMAE) ont fait un point, ce lundi soir, sur le retour de l’eau, de l’électricité, la rentrée, huit jours après le passage du cyclone Chido. Le préfet de Mayotte, François-Xavier Bieuville, a démenti l’existence de charniers (voir encadré).
L’hôpital de campagne de Cavani accueillera ses premiers patients ce mardi

Afin de suppléer le centre hospitalier de Mayotte (CHM), dans la gestion post-cyclone Chido, un hôpital de campagne est en cours d’installation sur le stade de Cavani. Il devrait accueillir ses premiers patients dès ce mardi 24 décembre et être pleinement opérationnel dès le lendemain.
« Cet hôpital aura toutes les fonctionnalités d’un hôpital classique avec des capacités chirurgicales, de prise en charge de maternité, de soins traumatiques, un laboratoire », explique François-Xavier Bieuville, le préfet de Mayotte, lors de la visite, ce lundi matin. Les tentes déjà montées, les 90 pompiers et membres de la Sécurité civile (dont une cinquantaine de soignants) doivent désormais installer tout l’équipement. L’Escrim (Elément de Sécurité civile rapide d’intervention médicale) doit commencer à suppléer le centre hospitalier de Mayotte (CHM), qui fonctionne « à 25-30% » selon le préfet, dès ce mardi 24 décembre. Une quarantaine de lits y seront installés, avec la possibilité d’augmenter en fonction des besoins. « Il a vocation à accueillir tous les blessés liés aux cyclones », précise Sergio Albarello. Le directeur de l’Agence régionale de santé (ARS) de Mayotte, ainsi que le préfet, espèrent ainsi que le CHM récupère « son flux habituel » de patients.
4.000 cartes SIM Orange distribuées par La Croix Rouge
EDM et EDF coopèrent pour reconstruire le réseau électrique
Des architectes se mobilisent pour diagnostiquer les centres d’hébergements

Depuis le début de la semaine dernière, une trentaine d’architectes s’activent de façon bénévole pour analyser les risques sur les bâtiments des centres d’hébergement d’urgence et faire remonter les informations aux pouvoirs publics.
La routine est désormais bien établie. Ce samedi, à 9h, comme chaque matin, les architectes se retrouvent à la direction de la rénovation urbaine de la municipalité de Mamoudzou, place Mariage, à Mamoudzou. C’est ici qu’ils ont installé leur cellule de crise. Ici, s’organisent les missions du jour. « Nous, on va à Tsoundzou, deux voitures partent maintenant, une va à l’école élémentaire, une autre à la maternelle », détaille Camille Panaye, architecte. Une trentaine de ses confrères de Mayotte ont créé un groupe pour réaliser des études de diagnostic du bâti des écoles de Mamoudzou où sont réfugiés des victimes du cyclone Chido. « À la Ville, on m’a parlé du besoin de diagnostiquer le bâti, je me suis dit que ça rentrait dans mes cordes et que je pouvais réunir une équipe autour de moi », contextualise Kévan Fatih, directeur adjoint de la rénovation urbaine de Mamoudzou et architecte.
Carte des établissements à la main, grilles d’analyse, l’équipe du jour prépare la prochaine visite. Le lieu où ils se regroupent n’a lui même pas été diagnostiqué comme l’atteste le plafond qui tombe et menace de s’effondrer par endroit. « On regarde les conditions de couchage des personnes hébergées , les risques sur les structures auquel ils sont exposés, mais aussi les risques sanitaires », présente Camille Panaye.
Gilets jaunes sur le dos, trois architectes se rendent à l’école élémentaire de Tsoundzou. Ici, la toiture a bien tenu. Entre 120 et 150 personnes y vivent dont une centaine d’enfants. Le trio d’architectes se renseignent sur les conditions de vie. « Les enfants ont le droit à plusieurs collations par jour, compotes, pain au chocolat, sardines », explique Moinouroi Abdouraquib, personne ressource du centre, agente de la mairie, normalement rattachée au service des finances. Une à deux grandes bouteilles d’eau par jour sont distribuées par famille. « Les toilettes sont bouchées. Les gens vont à la rivière pour faire leurs besoins. La crainte c’est les prochaines épidémies. » « On va demander à faire livrer un bac à eau pour la récupérer et l’utiliser pour les toilettes », leur fait savoir Rémi Noulin, architecte. La communauté d’agglomération Dembéni-Mamoudzou (Cadema) donne aux écoles des cuves d’un mètre-cube. « Cette école a bien tenu, ce n’est pas représentatif des centres. Les autres qu’on a visité, il y a bien plus de dégâts », poursuit le professionnel.
Transmettre les besoins
En plus de diagnostiquer les bâtiments, les architectes font remonter les besoins en termes de santé à l’Agenre régionale de santé (l’ARS) et la Croix Rouge.« Si une personne a une maladie chronique, par exemple une maman diabétique, mais qu’elle n’a plus son traitement, on transmet l’information. » Les architectes aident les associations de santé, ces dernières n’ont pas assez de personnel pour aller maintenant dans tous les centres. Dans l’école élémentaire, une petite fille a mal au ventre, « on va faire remonter l’information. Nous n’avons pas le droit de donner des médicaments », précise Kévan Fatih.
Alors que l’équipe a pour l’instant visité onze centres d’hébergement, celui de Tsoundzou 2 est le mieux tenu. «Parce qu’il y a moins de gens, la toiture est restée et c’est propre », détaille Camille Panaye. Sur d’autres sites qui peuvent accueillir jusqu’à 2.000 personnes, des familles ont le droit qu’à une bouteille d’eau par jour et par famille. En même temps que de notifier « le poteau tombé là », les vérifications serviront aussi au rectorat de savoir les moyens à mettre en œuvre pour les travaux.
Une fois le tour du bâtiment terminé, les architectes reviennent dans les locaux de la direction urbaine pour faire la synthèse de leur évaluation. « Nous l’envoyons ensuite au rectorat, à l’ARS, à La Croix Rouge. »
Ben Issa Ousseni exprime “sa gratitude” à toutes les personnes qui aident Mayotte

Cyclone Chido : dans le nord de Mayotte, la sensation d’être délaissés
L’eau des rivières et des puits
Peu de morts selon les habitants
L’hôpital fortement endommagé, fonctionne en mode degradé
Durement éprouvé par le cyclone, le Centre hospitalier de Mayotte fonctionne de manière dégradée depuis le passage du cyclone Chido. Endommagés, plusieurs parties de l’hôpital sont fermées.
Une semaine après le cyclone, les séquelles du CHM sont encore bien visibles, bâtiments aux toits soufflés dont il ne reste que la charpente, préfabriqués éventrés, amas de bois au sol. Aussitôt après la catastrophe, il a fallu tout mettre en oeuvre pour assurer un service minimum. Un groupe électrogène de secours a rapidement été branché pour alimenter l’hôpital. Les informaticiens ont tout de suite été mobilisés pour rétablir les logiciels. L’informatique tient un rôle indispensable “pour gérer les évacuations sanitaires, les entrées aux urgences. Si les systèmes informatiques ne fonctionnent pas, c’est tout l’hôpital qui ne fonctionne pas”, renseigne Rodrigue informaticien aux infrastructures réseaux de l’établissement. Alors que le data center de Mayotte où sont stockées les données du Centre hospitalier de Mayotte a pris l’eau , les équipes des services informatiques s’activent nuit et jour pour permettre de retrouver le fonctionnement pré cyclone. “Une cellule de crise a été montée, nous dormons sur place”, explique-t-il.
Dans la maternité, l’aile qui accueillait les femmes enceintes hospitalisées a été fermée car il n’y a plus d’électricité. Les sage-femmes utilisent la lampe torche de leur portable pour étudier les dossiers. “Entre 40 et 50 % du service n’est pas fonctionnel, les chambres sont endommagées”, détaille Roger Serhal, chef du service de chirurgie obstétrique. Quinze lits sont actuellement disponibles au lieu de 35 habituellement. Conséquence, le personnel peut prendre en charge moins de patientes. Une situation problématique alors que le CHM est la plus importante maternité d’Europe, en 2023 elle a enregistré 10.200 naissances.
Au-delà des services de traumatologie, des urgences ou encore de chirurgie, celui de médecine polyvalente est aussi débordé. “Nous avons doublé le nombre de lits”, souligne Dimitri Kornblum, médecin du service. Une situation qui est le résultat d’un manque d’accès de soins, la plupart des dispensaires ont été fermés pendant plusieurs jours. “Désormais sans toit, des personnes ne peuvent pas être soignées chez elles”.
Un risque d’épidémie
Surtout, le médecin craint les prochaines semaines : “Nous allons voir des décompensations de personnes avec des maladies chroniques car elles n’auront plus accès aux soins et à leurs médicaments”. Plus inquiétant, après le saccage du cyclone, le “risque d’une épidémie se pose”, selon le soignant. En cas de famine ou de dénutrition, la population est plus susceptible de “faire des infections sévères”, le manque d’eau potable présente également une menace, la population se retrouve à consommer des eaux stagnantes. “Le choléra pourrait revenir”, craint-il. Pour soulager le CHM, un hôpital de campagne vient de s’installer au centre de Mamoudzou, il compte 90 soignants qui assureront des soins en en traumatologie, réanimation et néonatologie.
Au dispensaire de Kahani, on soigne les patients dans le noir

Ce n’est que quatre jours après le passage du cyclone Chido que le personnel du dispensaire de Kahani, à Ouangani, ont enfin pu accéder à des groupes électrogènes. L’établissement subit également des coupures d’eau et des pénuries de médicaments.
“Le soir, on s’occupe des patients avec les frontales pendant deux heures, puis on doit coincer des lampes de poches entre notre cou et notre épaule pour continuer quand elles n’ont plus de batterie”. Cette scène ubuesque, c’est une infirmière du dispensaire de Kahani qui nous la décrit, ce vendredi matin. Là-bas, le générateur de secours est tombé en panne le jour du cyclone, samedi dernier. “On chargeait les lampes frontales avec les ordinateurs portables qui avaient encore de la batterie”, décrit Sarah*, une autre infirmière de l’établissement de santé situé dans la commune de Ouangani. Ce n’est que mercredi, soit quatre jours après le passage de Chido, que deux petits groupes électrogènes ont été amenés. Si cela a pu permettre de brancher des lampes et des appareils médicaux, ce n’est pas suffisant pour les besoins de l’établissement, qui a mis en place des cycles d’alimentation en attendant que le véritable générateur adapté soit fini d’installer.
Le dispensaire n’est pas non plus alimenté continuellement en eau, subissant de nombreuses coupures. Les soignants s’en sont résolus à récupérer de l’eau de pluie, et font des réserves dès qu’elle revient un peu au robinet. Pendant ce temps, la citerne d’eau potable fuit depuis la tempête. Un médecin a même tenté de la reboucher avec un fruit à pain, illustration du manque profond de moyens dont le dispensaire dispose.
“30 secondes d’autonomie”
Côté communication, le personnel n’a pu véritablement établir le contact avec le Centre Hospitalier de Mayotte que mardi soir, ne possédant qu’un téléphone satellite avec “30 secondes d’autonomie”, nous indique-t-on. Ce vendredi matin, les membres du personnel ayant du réseau avec Orange s’occupent de faire le lien. “La police municipale n’est toujours pas venue nous voir”, indique Adrien Cussac, médecin chef du dispensaire, ce vendredi matin.
Un véritable isolement ressenti par l’ensemble de l’équipe, dont la plupart travaille chaque jour depuis le passage du cyclone. Ce jour-là, la permanence de soin transformée en accueil d’urgence a immédiatement été inondée au moment de la tempête. “Le premier patient arrivé était un père qui s’est profondément blessé au pied en allant chercher ses enfants. Il s’est effondré devant nous. À peine pris en charge, il est reparti à la recherche de ses enfants”, raconte le médecin chef, présent chaque jour à son poste depuis la catastrophe. “Nous n’avons pas eu de mort ici. Nous avons pu assurer la médecine aiguë. Désormais, la médecine classique reprend, mais nous avons beaucoup de personnes qui se blessent en reconstruisant leur case avec les tôles ou les clous”, ajoute celui qui a réorganisé le service en suivant les protocoles de gestion de flux de Médecins Sans Frontière. Pour l’heure, il n’y a pas de cadre administratif pour l’épauler et le dispensaire n’a pas assez de médicaments pour tout le monde, notamment d’antibiotiques.
Une cellule de crise le jeudi avant Chido
Adrien Cussac affirme que c’est grâce à une cellule de crise organisée par des urgentistes le jeudi pendant la nuit, avant le cyclone, qui permet encore au dispensaire de tourner. “Du matériel, des médicaments, un urgentiste et un réanimateur ont été envoyés dans chaque dispensaire la veille du cyclone”, indique celui qui attend une première livraison de médicaments depuis le passage de Chido ce vendredi. Le stockage de pharmacie générale à Longoni ayant subi des dégâts, ils n’ont pas pu être ravitaillés avant.
Si le flux n’est pas si important que cela au dispensaire, les conditions actuelles de travail rendent la mission du personnel extrêmement difficile. Certains patients ont dû être renvoyés à domicile, faute de matériel, même si un suivi reste assuré.
Dans l’Ouest, des habitants s’organisent pour offrir du réseau internet à la population

Alors que le réseau mobile ne revient qu’au compte goutte dans l’ouest de l’île, des habitants partagent leur antenne Starlink avec la population, pour leur permettre de donner des nouvelles et rester informés.
« Ça c’est mon quotidien depuis dimanche », décrit Thomas Jacinto, en désignant l’attroupement présent sur la place Sicotram, à Chiconi, à côté du front de mer. Ce jeudi, une centaine de personnes est présente pour profiter d’une connexion internet. Car Thomas Jacinto et Amandine Aubert ont Starlink, un dispositif créé par Elon Musk permettant d’accéder à internet directement avec une connexion satellite. « On a pensé à rentrer l’antenne pendant le cyclone, puis elle a dû résister à la pluie », indique son propriétaire, qui n’a plus de toit. Ce jeudi, installé sur le toit de leur voiture, l’antenne est alimentée par le groupe électrogène de l’épicerie Amboirou-Market, qui en retour peut faire payer ses clients par carte.
L’idée de partager gratuitement leur accès à internet est venue dès dimanche à ces habitants, voyant que l’ouest de l’île restait sans communication. Cet après-midi-là, Thomas Jacinto a noté 200 connexions de personnes venues pour rassurer leurs proches restés sans nouvelle depuis le passage de Chido. « C’était un moment intense, on était coupé du monde depuis plus de 24 heures », explique-t-il. « C’était un déluge de larmes et de rires, la place était chargée en émotion », raconte Amandine Aubert, qui a eu la sensation que les minutes duraient des heures pendant cette coupure.
Jusqu’à 400 connexions mardi
Le couple a décidé de revenir chaque après-midi. 300 connexions ce lundi, 400 le mardi, de gens parfois venus de Combani pour se connecter. « Maintenant ça permet aux gens de s’informer et de moins rester dans le brouillard », explique Thomas Jacinto. Pour éviter que le réseau sature et les mouvements de foule, il a néanmoins instauré un système de rationnement à environ 100 connexions par sessions. Les bienfaiteurs restant tout l’après-midi sur place, chacun peut profiter du réseau sur une session de une heure, puis le mot de passe change pour permettre aux autres d’en bénéficier. Une logistique qui fonctionne bien pour l’instant, chacun respectant cette routine. Ce jeudi après-midi, Safia* est venue de Mangajou : « Je voulais donner des nouvelles à mes proches ». Une autre habitante vient aussi pallier le manque de réseau. « J’ai un peu de connexion avec Orange maintenant, mais ça ne marche pas très bien, alors je suis venue ici », indique-t-elle. Thomas Jacinto est heureux de voir la place Sicotram occupée : « Ça met un peu de vie, les gens sont rassemblés. »
Le même type d’initiative s’est lancé à Sada. Etienne Mouillet, détenteur également d’une antenne Stralink tourne dans la zone depuis lundi pour en faire profiter la population. “C’est nécessaire pour tout le monde. Surtout les premiers jours, il n’y avait rien pour pouvoir avertir les familles”, explique-t-il. Le problème était de pouvoir l’alimenter en électricité. Il l’a d’abord installé à Mangajou, mais depuis, il la laisse dans les locaux de l’entreprise Electro Rapide. “Ici l’électricité est stable, il y a des locaux pour se poser”, décrit-il, le remerciant de mettre à disposition leurs locaux. En effet, moins de monde qu’à Chiconi, mais une salle de réunion calme, où naviguent une vingtaine de personnes. Pour Etienne Mouillet, même si les proches sont maintenant prévenus, il est important de maintenir la communication avec l’extérieur : “On espère pouvoir favoriser la coordination, car pour l’instant on a l’impression que c’est compliqué.”