Le directeur du CHM et son directeur de cabinet quittent leurs fonctions au 1er juillet

Jean-Mathieu Defour, directeur général du Centre Hospitalier de Mayotte depuis 3 ans, quitte son poste au 1er juillet. A l’occasion de son départ, une cérémonie a été organisée hier au CHM. Jean-Michel Beaumarchais assurera l’intérim jusqu’au 1er septembre, date à laquelle un nouveau directeur « stable » aura normalement été trouvé par l’ARS et le ministère de la Santé.

Si Jean-Mathieu Defour, directeur du CHM depuis avril 2022, a été fort décrié de toute part pendant l’exercice de ses fonctions, ce ne sont que des éloges qui ont plu sur sa tête pour son « pot de départ ». Il faut dire qu’en 3 ans, ce directeur n’a fait qu’essuyer crises sur crises dont « le clou » a, bien sûr, été Chido. « J’ai calculé qu’en moyenne, depuis ma prise de fonction, il y a eu une crise tous les 3 mois », a-t-il révélé avant de remercier chaleureusement les équipes du CHM, qui n’a jamais fermé malgré les 90 % de bâtiments touchés par le cyclone. « Les contraintes étaient majeures, ce n’est pas facile de travailler dans un hôpital tout cassé, mais le CHM a quand même répondu présent », a-t-il affirmé avant qu’une montée d’émotion ne vienne interrompre son discours, dévoilant son humanité derrière « le masque de fer » de son rôle de dirigeant. Même à un niveau personnel, la région ne l’a pas épargné puisqu’après Chido et Dikeledi, c’est Garance qui l’a frappé alors même qu’il croyait pouvoir prendre un peu de repos à La Réunion.

Le directeur du CHM et son directeur de cabinet quittent leurs fonctions au 1er juillet
Sergio Albarello, le directeur de l’ARS, a salué « la force, l’intégrité et le sens du service public » de Jean-Mathieu Defour

Il est néanmoins satisfait de ce qu’il a pu apporter à l’établissement. « On a fait beaucoup de choses dans des conditions parfois rocambolesques », a-t-il déclaré en rappelant que le CHM était « un petit hôpital avec de gros projets » et, Mayotte, « un petit territoire avec de gros défis ». Il part à présent dans la région de Cannes où il compte prendre un peu de repos après ces 3 années « intenses ». Mohamed Zoubert, son directeur de cabinet depuis le 1er mai 2023, quitte également ses fonctions pour rejoindre la technopole de Dembeni. S’il a été remercié par Jean-Mathieu Defour pour, notamment, « le décodage local qu’il a su lui apporter », Mohamed Zoubert n’a pas caché qu’il y a eu « de fortes tensions sur les personnels médicaux et paramédicaux » au cours de ses 2 ans d’exercices et a estimé que la pire crise que le CHM ait eu à subir a été interne. « Mais on a tenu bon », s’est-il félicité.

Jean-Mathieu Defour regrette « de ne pas avoir réussi à réconcilier les Mahorais avec leur CHM »

S’il part avec « le sentiment du devoir accompli », Jean-Mathieu Defour a confié n’avoir qu’un seul regret : celui « de ne pas avoir réussi à réconcilier les Mahorais avec leur CHM ». Il faut dire que de beaux locaux et du matériel de pointe financé par les fonds européens ne servent pas à grand-chose tant que le problème des effectifs de médecins n’est pas résolu. Car un hôpital avec un effectif de médecins inférieur aux besoins réels de la population, c’est un peu comme un beau tribunal sans juges ou avocats et cela explique très certainement la frustration qu’éprouve une grande partie de la population mahoraise. Bref : les millions investis ne se voient pas au regard du quidam lambda qui tombe malade et qui ne trouve pas, au sein du CHM, ce qu’il était venu chercher : une prise en charge efficace.

Ben Issa Ousseni déplore « un turn-over trop important au sein des hauts fonctionnaires d’Etat »

Présent à la cérémonie de départ de Jean-Mathieu Defour, Ben Issa Ousseni, le président du conseil départemental de Mayotte, a salué le travail accompli par Jean-Mathieu Defour pendant ces 3 ans, sa gestion efficace des différentes crises, surtout celle de Chido, bien évidemment. Il a toutefois tenu à nous confier qu’il « déplorait le turn-over trop important des hauts fonctionnaires d’Etat ». « Je préside le conseil départemental depuis 4 ans et, pendant ces 4 années, j’en suis déjà à mon 3ème recteur, mon 3ème préfet et bientôt ma 3ème SGAR et mon 3ème directeur général du CHM », s’est-il plaint. Il estime en effet qu’avec un turn-over aussi important, établir une collaboration professionnelle efficace et sereine s’avérait particulièrement difficile. Nous noterons de notre côté qu’en outre, peu de ces hauts fonctionnaires ne prennent la peine de se renseigner sur la réalité du territoire d’une manière concrète avant leur arrivée, ajoutant bien des difficultés aux élus qui doivent « recommencer à expliquer les choses à chaque fois ».

Jean-Michel Beaumarchais, nommé directeur par intérim

En attendant que l’ARS et le ministère de la Santé ne choisissent conjointement un nouveau directeur pour le CHM, c’est Jean-Michel Beaumarchais qui en assurera l’intérim du 1er juillet au 1er septembre 2025. Venu de La Réunion, cet « homme d’administration » était au préalable directeur préfigurateur d’un projet de regroupement des EHPAD publics et, encore avant, directeur des achats et de la logistique au sein du groupement hospitalier de l’Est-Réunion. Nous ne pouvons que souhaiter que le futur directeur « stable » du CHM ait davantage de rapport avec le monde des soins afin que la future gestion du seul hôpital de l’île ne soit pas déconnectée de la réalité des Mahorais.

nora-godeau
Journaliste

Nora Godeau est journaliste indépendante à Mayotte. Elle couvre les enjeux sociaux, culturels et environnementaux du territoire, avec une attention particulière portée aux voix locales et aux initiatives de terrain.

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