À Mayotte, le droit du sol se resserre encore. La nouvelle loi, promulguée le 12 mai, conditionne désormais l’acquisition de la nationalité française par droit du sol à Mayotte à la régularité du séjour des deux parents depuis au moins un an au moment de la naissance.
La nouvelle loi visant à restreindre l’acquisition de la nationalité française par le droit du sol à Mayotte a été promulguée ce lundi 12 mai. Publiée ce 13 mai au journal officiel, la modification de l’article 2493 du livre V du Code civil stipule désormais que “pour un enfant né à Mayotte [l’acquisition de la nationalité par droit du sol n’est applicable] que si, à la date de sa naissance, ses deux parents résidaient en France de manière régulière, sous couvert d’un titre de séjour, et de manière ininterrompue depuis plus d’un an”. Pour les familles monoparentales, le principe s’applique au seul parent.
Ce texte de loi, porté par Les Républicains (LR) dans le but d’endiguer l’immigration irrégulière, a été adopté définitivement par l’Assemblée nationale le 8 avril. Malgré les critiques visant cette loi renforçant l’exception mahoraise, le Conseil constitutionnel, saisi par plusieurs députés et sénateurs de gauche et écologistes après le vote, a validé le texte début mai, tout en émettant une réserve d’interprétation sur l’exigence d’un passeport biométrique de la part des parents au moment de la naissance. En effet, il estime qu’un tel document ne peut être exigé de la part d’un ressortissant d’un pays n’en produisant pas.
Un texte ardemment débattu
Cette mesure marque un nouveau durcissement du droit du sol spécifique à Mayotte, après une première restriction adoptée en 2018, qui imposait qu’un seul parent soit en situation régulière depuis au moins trois mois. Ce premier durcissement n’avait pas fait ses preuves, et Thani Mohamed Soilihi, ancien sénateur de Mayotte désormais ministre, qui avait porté la loi de 2018, avait lui-même reconnu le manque d’efficacité de cette dernière sur la limitation de l’immigration clandestine. Du côté de l’actuel sénateur mahorais Saïd Omar Oili, les doutes sur l’efficacité de cette mesure sont clairs. Dans son discours du 25 mars précédent un des débats parlementaires sur cette proposition de loi, il avait déclaré : “Force est de constater que depuis 2019, le nombre de personnes reconduites à la frontière n’a jamais été aussi important. […] Alors vouloir limiter les accès à la nationalité française, c’est encore donner des faux espoirs aux Mahorais”.
Il indiquait être davantage en faveur de la fin du titre de séjour territorialisé, une des revendications principales des élus au moment des discussions sur la loi de programmation et des collectifs citoyens mobilisés. Une mesure qui n’a pour l’heure pas trouvé echo au sein du gouvernement, malgré les annonces faites à l’issue des barrages en 2024 par Gérald Darmanin, alors ministre de l’Intérieur et des Outre-mer.
Cette nouvelle loi va avoir un impact certain sur une grande partie des enfants de l’archipel, déjà mis en grande difficulté par le durcissement de 2018 : en 2024, à Mayotte, l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) estimait la part d’enfants nés de deux parents étrangers à 46%.
Journaliste à Mayotte depuis septembre 2023. Passionnée par les sujets environnementaux et sociétaux. Aime autant raconter Mayotte par écrit et que par vidéo. Quand je ne suis pas en train d’écrire ou de filmer la nature, vous me trouverez dedans.