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Quinze ans de prison pour trente-six coups de tournevis assenés

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Rendue ce jeudi en appel devant la chambre d’instruction de La Réunion, la décision de placer les quatre hommes mis en cause dans l’affaire du rapt de Petite-Terre n’est pas sans soulever de questions selon leur avocat. Me Nadjim Ahamada dénonce notamment une violation des droits de la défense et une motivation politique à l’endroit des divers collectifs contre l’insécurité qui affichent un soutien farouche à ses clients.

La deuxième journée d’audition a clôturé le procès d’Harouna A., jugé en appel pour tentative de meurtre. Il avait planté une trentaine de coups de tournevis en mai 2016 à un homme de son village, Halidi A. et il avait fait appel de son jugement en 2019. Experts, témoins et proches se sont suivis à la barre afin de donner leur version des faits ou leur expertise sur le cas de l’accusé. Après deux jours d’échanges parfois tendus, le jugement est tombé en fin de journée, ce vendredi 23 juin.

« Il y a deux choses qui abrègent la vie : la folie et la méchanceté ». Cette citation de Baltasar Gracian y Morales a été prononcée par l’avocat général, Albert Cantinol, au cours du procès. Elle est représentative de cette deuxième journée d’audition. La salle d’audience B du tribunal de Mayotte a été le théâtre d’une bataille de points de vue au sujet de la santé mentale de l’accusé. Cette journée d’auditions, dirigée par le président de la cour d’appel, Cyril Ozoux, devait permettre de répondre aux questions suivantes : Harouna A. a-t-il commis une tentative de meurtre ? Et son discernement a-t-il été altéré ou aboli lors de son passage à l’acte ? « J’ai perdu le contrôle, j’ai fait quelque chose que je ne comprends pas ». C’est en reprenant les mots de l’accusé., que le docteur Ruimy – expert psychiatre – commence son audition. Ce médecin a mis en avant les regrets dont l’accusé avait fait preuve peu de temps après son acte mais il a également, et surtout, insisté sur la « tendance à la simulation » de ce dernier. « C’est un personnage névrotique qui manque de maturité et qui a un déséquilibre caractériel, à tendances manipulatoires ». Contrairement à certains de ses confrères qui ont analysé la personnalité d’Harouna A., le Docteur Ruimy a insisté sur l’absence de tout trouble schizophrénique lorsqu’il l’a ausculté.

Cette affirmation n’est pas du goût de son avocat, maître Soumetui Andjilani, qui a défendu l’idée que son client n’aurait pas pu commettre un tel acte tout en étant pleinement conscient. « On juge ce garçon sur un mois de sa vie pour deux actes de folie qu’il a commis alors qu’il avait son discernement altéré. » Son avocat a, par ailleurs, insisté sur la vie compliquée et instable que son client a menée. « Ce garçon n’a jamais été bien dans sa vie et n’a pas eu une vie normale, comment voulez-vous le juger comme quelqu’un de normal ? ».

Cet argument n’était pas de l’avis de l’avocat général, qui a pointé du doigt l’acharnement dont Harouna A. a fait preuve lorsqu’il a assené les 36 coups de tournevis dans des zones vitales du corps d’Halidi A. « Le crime qui lui est reproché lui est imputable car à l’époque, il était responsable », a-t-il soutenu devant la cour. L’avocat général a réfuté les possibles troubles psychologiques dont Harouna A. serait atteint, « Un acte fou n’est pas forcément un acte d’un fou », a-t-il déclaré. Enfin, il a également rappelé qu’Harouna A. ne sait ni lire, ni écrire et fait preuve d’un « niveau intellectuel médiocre, ce qui semble très défavorable à une réinsertion dans la société ».

Une première incarcération qui a laissé des séquelles

 Le visionnage de l’interrogatoire d’Harouna A. par les gendarmes, datant de mai 2016, a été le moment culminant de la journée. Cette vidéo d’une vingtaine de minutes, montrant l’accusé sous un autre jour, a permis de faire comprendre aux jurés que l’homme qu’ils ont à juger aujourd’hui n’a plus rien à voir avec le jeune de 21 ans auditionné par les militaires. Ces derniers ont pu noter que les quelques années d’incarcération d’Harouna A. ont été dévastatrices pour cet homme qui est constamment sous l’emprise de médicaments et de sédatifs – afin de le calmer et d’éviter toute récidive.

Son avocat est d’ailleurs revenu sur la faiblesse psychologique de son client qui risquerait de s’aggraver s’il venait à effectuer une lourde peine de prison. « Vous voyez les gens errer sur les routes, tout proche de ce tribunal d’ailleurs… ils ne sont pas conscients, ils sont malades et ont été délaissés par la société. La pire chose à faire pour Monsieur A. serait de le laisser en prison et de le faire sortir dans un état similaire ».

Tout au long du procès, le président a tenté de discerner les raisons qui ont poussé Harouna A. à commettre cet acte. Il a ainsi réussi à obtenir quelques informations personnelles de la part de l’accusé qui restait pourtant mutique depuis le début de son audition. « Vous dites que des gens du village vous qualifiaient de “tapette“ et de “mauviette“ – qu’est-ce que représentent ces mots pour vous ? » – « Je ne sais pas comment expliquer… mais c’est pas gentil ». Le magistrat a également évoqué la consommation importante de chimique et d’alcool de l’accusé avant son incarcération. « Aviez-vous consommé ces substances peu de temps avant les faits ? »« Non »« Mais vous étiez conscient de ce que vous étiez en train de faire ? », demande le président – « Oui, mais je n’avais pas prévu en avance de le tuer, c’est venu comme ça… », lui répond Harouna A.

Malgré les quelques réponses de la part de l’accusé, plusieurs questions restent en suspens. Il a fait preuve d’une grande froideur tout au long du procès et semblait détaché, comme perdu. Que son discernement ait été altéré au moment des faits ou non, la tentative d’homicide a bien eu lieu. C’est ce qu’a défendu l’avocat général : « C’est un rescapé que vous avez là, il a frôlé la mort », a-t-il répété à plusieurs reprises en désignant Halidi A. sur le banc des parties civiles. C’est sans doute ce qui aura finalement été retenu par les jurés qui ont statué en fin d’après-midi. L’accusé a été condamné à quinze ans de prison – soit la même peine qu’il avait obtenue en première instance.

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