Le préfet François-Xavier Bieuville et le procureur de la République Guillaume Dupont ont dressé ce mercredi un bilan à mi-année du Comité Opérationnel Départemental Anti-Fraude (CODAF) mis en place il y a tout juste un an.
Protéger les Mahorais et les entreprises qui suivent la réglementation en vigueur dans le 101ème département : tel est le rôle du Comité Opérationnel Départemental Anti-Fraude (CODAF) créé il y a tout juste un an. Co-présidé par le préfet et le procureur de la République, avec la collaboration de tous les services de l’Etat, il a pour objectif de mettre fin aux fraudes dans tous les domaines : le travail clandestin, l’agriculture clandestine, les filières de vente de viande de tortue, les marchands de sommeil, les taxis clandestins, les restaurants et supermarchés ne respectant pas les règles d’hygiène ainsi que les fraudes fiscales. Entre autres. Bref, le CODAF « ratisse large » afin de mettre Mayotte au diapason des lois françaises. « Avant mon arrivée, ce travail n’était pas fait », note le préfet François-Xavier Bieuville qui déclare qu’à présent « 30 à 40 opérations de contrôle sont désormais effectuées par mois contre le même nombre par an avant sa prise de fonction en février 2024 ».
La co-présidence de ce comité avec Guillaume Dupont, le nouveau procureur de la République depuis avril 2025, a permis la mise en œuvre d’un système « d’action/réaction » qui se veut rapide et efficace. Les sanctions sont principalement des peines d’amende car Guillaume Dupont estime que « toucher au porte-monnaie des fraudeurs leur fait plus mal qu’une peine de prison avec sursis ». A ces amendes peuvent venir s’ajouter des sanctions administratives comme une fermeture pour les restaurants, par exemple, les 2 peines étant totalement indépendantes l’une de l’autre. Le CODAF a 3 objectifs principaux : protéger la santé de la population, lutter contre les facteurs d’attractivité de l’immigration clandestine et protéger le tissu économique local.
Protéger la santé de la population
Selon le préfet, si le travail clandestin est « l’un des points qui domine » dans la lutte contre la fraude, le non-respect de la chaîne du froid par certains supermarchés et restaurants l’est également. Depuis janvier 2025, le CODAF a ainsi saisi 2 tonnes de marchandises non conformes dans les supermarchés, 890 kg de produits dans les restaurants et 103 kg de végétaux auprès des « vendeurs à la sauvette ». Il a aussi mis 4 supermarchés en demeure pour mise en conformité et adressé 13 avertissements. « La rumeur disant que nous ne nous attaquons pas aux grandes enseignes est une légende urbaine », affirme le préfet, qui précise que tous les établissements sont concernés par les contrôles, sans distinction.
Lutter contre les facteurs d’attractivité de l’immigration clandestine
Du côté de la lutte contre les facteurs d’attractivité de l’immigration clandestine, ce sont plus d’1,2 millions d’euros d’argent liquide qui ont été contrôlés à l’aéroport et à la gare maritime, avec 36 procédures rédigées. « Chaque année, environ 150 millions d’euros sont acheminés illégalement vers les Comores. C’est autant d’argent qui manque à l’économie mahoraise et à l’épargne. C’est, en outre, de l’argent souvent public puisqu’à Mayotte 80% de la commande est publique », affirme le préfet. Guillaume Dupont ajoute qu’« en droit cela s’appelle du blanchiment d’argent ». Par ailleurs, 14 procédures à l’encontre de marchands de sommeil ont été dressées et 7 autres pour vol d’électricité et raccordements illégaux. Enfin, 20 étrangers en situation irrégulière ont été conduits au CRA à la suite d’opérations menées par le CODAF.
Protéger le tissu économique local
La lutte contre les taxis clandestins, dont les taxis-motos, est une autre grosse partie du travail du CODAF. Depuis ce début d’année, 85 scooters ont été saisis lors d’opérations de lutte contre les taxis clandestins. « Une amende forfaitaire s’élevant à 500 euros est appliquée pour récupérer le véhicule, sinon il est détruit », explique le préfet, qui révèle que cette amende va être augmentée sous peu. « Si le conducteur est en situation irrégulière, il est reconduit s’il vient d’un pays qui l’autorise », ajoute-il.
1132 articles de contrefaçon ont également été détruits, 1400 kg de produits venant de la pêche clandestine ont été saisis ainsi que 295 kg de viandes d’espèces protégées. Le procureur affirme « orienter les investigations sur les filières de vente de viande de tortue afin de mettre fin au braconnage ». Enfin 33 procédures ont été engagées lors de contrôle sur la vente d’eau embouteillée et 6 embarcations illégales (barques ou pirogues) ont été saisies.
Par ces diverses actions, le préfet, en collaboration avec le nouveau procureur, entend « protéger la population et rétablir la justice et la concurrence pour les entreprises qui respectent les règles ». « En tant que 101ème département, Mayotte doit désormais suivre les mêmes règles que n’importe quel autre département français », a-t-il conclu.
Nora Godeau est journaliste indépendante à Mayotte. Elle couvre les enjeux sociaux, culturels et environnementaux du territoire, avec une attention particulière portée aux voix locales et aux initiatives de terrain.