Les premiers résultats de Parcousup sont tombés le 2 juin dernier et les élèves sur liste d’attente patientent dans l’angoisse, les résultats arrivant au compte-goutte. Au lycée des Lumières, certains élèves sont soulagés, quand d’autres attendent encore…Tous ont en tout cas le désir de quitter Mayotte au moins le temps de leurs études afin de « découvrir le monde ».
« Je suis contente du résultat de parcoursup : j’ai été acceptée dans une double licence maths/physique-chimie à l’université Gustave Eiffel en région parisienne », raconte Sonia, élève de terminale au lycée des Lumières. Une excellente nouvelle pour la jeune fille dont c’était le premier vœu sur Parcoursup, mais qui était 58ème sur la liste d’attente. Un peu timide, mais loquace une fois lancée, elle nous a évoqué son enthousiasme à l’idée de se rendre dans l’Hexagone pour ses études car elle n’avait jamais eu l’occasion de quitter Mayotte jusqu’à présent. « J’ai besoin de découvrir d’autres endroits, mais mon rêve est de revenir ensuite travailler à Mayotte en tant qu’ingénieure dans le génie civil », détaille-t-elle. Tous les élèves de terminale interrogés nous ont d’ailleurs fait part de leur envie de voyager, pas seulement dans l’Hexagone, mais « autour du monde ». Si plusieurs filières d’études supérieures ont été ouvertes ces dernières années à Mayotte, la plupart des jeunes ont envie de « découvrir de nouveaux horizons », quitte à revenir sur leur île une fois leurs études terminées.
Pour Isaac, les résultats de Parcoursup se sont révélés très satisfaisants également : tous ses vœux ont été acceptés ! Le jeune homme a toutefois changé d’avis entre-temps. « J’avais demandé des BTS, mais finalement j’ai envie d’aller en licence d’informatique à Angers. Je vais donc formuler ce vœu lors de la phase complémentaire », explique-t-il. Isaac et Sonia ont de la famille dans les régions de l’Hexagone choisies, ce qui facilitera leur adaptation. C’est en effet souvent l’isolement qui, ajoutée au changement radical de climat et de mode de vie, explique en partie l’échec d’un grand nombre d’étudiants mahorais en première année d’études supérieures.
Les mitigés…et les désillusionnés de Parcoursup
Tous les élèves n’ont malheureusement pas la chance de voir leur premier vœu accepté par la plateforme d’inscription en ligne. Nilam, par exemple, a été acceptée en licence de psychologie et en licence Accès Santé à Toulouse, mais elle est déçue. « Ce n’est pas ce que je voulais », confie-t-elle. Souhaitant devenir chirurgienne orthopédique, la jeune fille souhaitait intégrer une licence « PASS », mais n’a eu que des licences « LAS ». « Aujourd’hui il y a deux voies pour faire des études de médecines, ce sont chacune des doubles licences, mais la licence PASS met l’accent sur les études de santé tandis que la LAS met l’accent sur l’autre domaine choisi. On a donc plus de chances de réussir le concours pour entrer en médecine en intégrant une licence PASS », explique Nilam. Pour l’instant, elle attend donc les résultats de ses autres vœux. « La psycho, j’aime bien, mais pour moi c’est plus « un plan B » en cas d’échec au concours de médecine, par exemple », affirme-t-elle. Soundoussia est, elle aussi, en attente de réponse pour les licences PASS, mais elle a accepté pour le moment de faire un IUT santé à La Réunion. « Je voulais m’assurer au moins une filière dans la santé », raconte-t-elle. « Et ça me permettra d’apprendre à mieux m’organiser pour retenter d’obtenir une place en licence PASS l’année prochaine », développe celle qui rêve de devenir médecin sans frontières.
Enfin, il y a les « désespérés » de Parcoursup. « Pour moi, c’est une désillusion totale », se lamente Ikram. « J’ai eu 18 vœux refusés et 18 vœux en attente. Je ne m’attendais vraiment pas à ça », se plaint-il en déclarant qu’il se lève chaque matin avec l’espoir de voir enfin l’inscription « admis » mentionnée sur la plateforme. Le jeune homme explique ces nombreux refus par le fait d’avoir des résultats moyens dans les matières autres que ses spécialités SVT et physique. Souhaitant devenir ingénieur en génie civil, il avait demandé principalement des bachelors universitaires de technologie (BUT) et des brevets de technicien supérieur (BTS), mais aussi des licences en SVT, en guise de « plan B ». N’ayant toujours rien pour le moment, il se sent perdu. « Si je n’ai toujours rien à la fin, le RSMA sera peut-être mon dernier recours », lance-t-il sans grand enthousiasme.
La phase complémentaire de Parcoursup s’est ouverte ce mercredi 11 juin et court jusqu’au 9 septembre. Étant réservée prioritairement à ceux n’ayant pas encore trouvé de formation post-bac, les élèves comme Ikram ont encore une chance de décrocher une formation qui leur convienne.
Nora Godeau est journaliste indépendante à Mayotte. Elle couvre les enjeux sociaux, culturels et environnementaux du territoire, avec une attention particulière portée aux voix locales et aux initiatives de terrain.