Mlezi Maore accompagne les enfants non-scolarisés “vers l’école normale”

À Mayotte, des milliers d’enfants ne sont pas scolarisés. Pour pallier le manque de places dans les établissements, Mlezi Maore accueille une soixantaine d’enfants au sein de trois centres, pour les former à se retrouver un jour sur les bancs de l’école.

Enfants aux pupitres et professeur au tableau, le local de Mlezi Maore, à Tsoundzou 1, pourrait se confondre avec une salle de classe. Pourtant, ce lieu d’accueil n’est pas une école, mais bien un lieu pour accompagner les jeunes non scolarisés. “Notre objectif c’est de les sortir vers l’école normale, l’école de la République”, explique Onroufiati Bacar, cheffe de service du lieu d’accueil de jour de l’association, ajoutant que le centre connaît une très forte demande. Une structure qui s’est hissée parmi les 45 finalistes 2025 du dispositif La France s’engage. L’école associative a été sélectionnée parmi 441 dossiers pour participer à un bootcamp à Paris du 20 au 22 mai, où chaque finaliste devra faire un pitch de trois minutes.

Une reconnaissance qui montre l’utilité de l’accueil de jour, selon Hugues Makengo, directeur de l’association Mlezi Maore : “Cela permet aussi de socialiser les enfants, de prendre l’habitude de se rendre en cours, d’avoir un rythme.” De 8h à 16h chaque jour de la semaine, une vingtaine d’enfants de 6 à 11 ans sont accueillis par leur professeur Anfouanlou Saïfi, qui ce jour-là leur apprend à lire l’heure. “Il y a des enfants qui n’ont jamais été scolarisés, qui n’ont pas le niveau, des niveaux différents, il faut adapter à chaque fois”, explique-t-il face à sa classe aux multiples tranches d’âges. Majoritairement originaires des Comores, les enfants attendent parfois un à deux ans pour rejoindre le milieu scolaire. “Le maximum qu’on a eu c’est quatre ans d’attente”, détaille Onroufiati Bacar. Une attente dûe au manque de places dans les 221 écoles, 22 collèges et 11 lycées de l’île.

24 enfants inscrits en 2024

Si l’accès au collège est plutôt fluide, le Casnav (centre académique pour la scolarisation des enfants allophones nouvellement arrivés) ayant des commissions d’affectation entre 3 et 5 fois par an, celui à l’école élémentaire est plus compliqué. Les communes gérant les inscriptions au 1er degré, certaines exigent parfois des documents comme un passeport, titre de séjour, extrait d’acte de naissance ou encore justificatif de domicile, difficiles à fournir pour les parents généralement issus de l’immigration.

En 2024, les trois lieux d’accueil de jours de Mlezi, accueillant une vingtaine d’enfants chacun, ont affecté 24 enfants en milieu scolaire, dont 8 au collège, 14 à l’école élémentaire à Mamoudzou, et deux à l’école élémentaire à Tsingoni et Chirongui. Un rapport de la Chambre régionale des comptes pointait d’ailleurs du doigt la Caisse des écoles de Tsingoni pour la quantité de pièces justificatives non réglementaires demandées, soupçonnant des pratiques visant à prioriser les ressortissants français. De son côté, le maire de la commune, Issilamou Hamada, maintient que cette exigence avait pour but de prioriser les enfants résidant dans sa commune après que de fausses attestations d’hébergement aient été utilisées. Il réfute toute discrimination en raison des origines et affirme avoir inscrit tous ceux l’ayant demandé pour la prochaine rentrée.

5.000 voire 9.500 enfants non-scolarisés

Selon l’étude “Non-scolarisation et déscolarisation à Mayotte: dénombrer et comprendre”, parue en 2023 et menée par Gilles Séraphin et Tanguy Mathon Cécillon, 2.263 enfants étaient sur les listes d’attente des communes pour intégrer le 1er degré. Au total, au moins 5.000, voire 9.500 enfants n’étaient pas scolarisés au moment de cette étude.

“Je ne pense pas que c’est un manque de volonté, mais un manque de moyens”, estime Hugues Makengo, dont l’association accompagne les familles dans les démarches d’inscription et suit l’enfant jusqu’à ce qu’elles aboutissent. Il reste néanmoins convaincu que chaque enfant doit être scolarisé : “Il ne nous est pas possible d’imaginer que des enfants ne soient pas scolarisés, d’autant plus qu’on sait que l’éducation est l’arme la plus puissante contre les violences, contre le chômage.”

Journaliste à Mayotte depuis septembre 2023. Passionnée par les sujets environnementaux et sociétaux. Aime autant raconter Mayotte par écrit et que par vidéo. Quand je ne suis pas en train d’écrire ou de filmer la nature, vous me trouverez dedans.

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