Zangoma expose ses artistes dans les rues de Mamoudzou après Chido

Privée par Chido de la MJC de Kaweni où elle exposait les artistes mahorais chaque année, l’association Zangoma a été accueillie dans les locaux de la mairie de Mamoudzou, mais aussi dans les rues des différents villages de la commune.

« L’art magnifie les choses, même les plus difficiles », a déclaré Denis Balthazar, artiste-plasticien et cocréateur de l’association Zangoma avec Fatima Ousseni, lors de l’inauguration de l’exposition « Mémoires du vent » à la mairie de Mamoudzou mercredi 16 avril. Ce « vent » dont il est question est, bien sûr, celui de Chido, cyclone qui a ravagé Mayotte en décembre dernier. « L’idée de départ n’était pas de parler du cyclone, mais de demander aux artistes de réunir leurs œuvres pour les exposer en plein-air dans les rues de Mamoudzou », a relaté l’artiste. « Toutefois, la plupart des œuvres évoquent bel et bien cet évènement, surtout les photographies, œuvres de l’instantanéité ne nécessitant pas le temps de la maturation lié à la peinture », a-t-il ajouté.

La sublimation du traumatisme de Chido est donc bien au cœur des œuvres exposées jusqu’au 26 avril prochain. Mais pas uniquement, puisqu’un certain nombre d’artistes ont suivi les consignes d’origine en exposant tout simplement les œuvres qu’ils souhaitaient, sans rapport avec le cyclone. « Il était important de montrer que, cette année, les artistes continuent malgré tout à créer, que l’art est toujours présent à Mayotte », a déclaré Fatima Ousseni. « Chido a certes été une grande catastrophe pour l’île, mais il nous a aussi permis de nous unir face à l’adversité et de réveiller notre vitalité pour nous relever », a-t-elle poursuivi.

Peintures, photos, mais aussi poèmes « en balade » dans la ville

Si les locaux de la mairie de Mamoudzou accueillent une partie de l’exposition, les rues des différents villages composant le chef-lieu en accueillent une autre. L’association Zangoma a en effet voulu réaliser cette année une « exposition en plein-air » afin de toucher le public le plus large possible. De Tsoundzou à Majicavo, il suffit de concentrer son attention pour voir des œuvres d’art fleurir un peu partout. « Cette exposition s’inscrit dans une stratégie culturelle ambitieuse qui souhaite opérer une rencontre entre les habitants des villages, les artistes et les visiteurs », a déclaré Ambdilwahedou Soumaïla, le maire de Mamoudzou. « Il s’agit de rendre hommage à la résilience de la population face à Chido, à sa mémoire collective et de lui redonner de l’espoir », a-t-il continué, faisant ainsi écho avec les paroles de Denis Balthazar qui a affirmé avoir voulu « offrir à la population une danse avec l’art et les couleurs permettant de voyager ».

Si la plupart des artistes exposés sont des familiers de l’évènement tels que le grapheur Papajan, les peintres Boaz, Béatrice ou encore le photographe Isma Kidza, certains sont nouveaux dans le paysage artistique mahorais. C’est notamment le cas de Fazade Ali M’dahoma, jeune dessinateur de seulement 17 ans, au « coup de crayon » hyper réaliste étonnant. Autre nouveauté, la poésie a été invitée à participer cette année à cette exposition d’ordinaire réservée aux seuls arts visuels. Le poète Gaucher de l’association Shimé a d’ailleurs déclamé deux poèmes au cours de l’exposition, l’un en français et l’autre en shimaore, tous deux sur le thème de Chido. Une preuve de plus que tous les arts peuvent contribuer à exorciser le traumatisme lié au cyclone en transmutant la douleur en beauté.

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Journaliste

Nora Godeau est journaliste indépendante à Mayotte. Elle couvre les enjeux sociaux, culturels et environnementaux du territoire, avec une attention particulière portée aux voix locales et aux initiatives de terrain.

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