Présidente de Maore Solidaire et ancienne maire de Sada, Anchya Bamana réagit aux différentes tribunes de ces dernières semaines concernant l’opération Wuambushu, qui vise à l’expulsion de milliers de personnes en situation irrégulière. Elle évoque notamment celle des soignants, rappelant que « les Français de Mayotte ne jouissent pas de leurs pleins droits au sein de la France sans que cela ne les préoccupe ».
« Après la sortie remarquée dans les médias de la représentation locale du syndicat de la magistrature, c’est autour de 170 soignants du centre hospitalier de Mayotte (CHM) de protéger la grande misère inhumaine bien concentrée dans les 374 km² du département de Mayotte. C’est certain, quand les soignants font de la politique au lieu de soigner, il est légitime que les politiques du territoire s’insurgent ! Par cette tribune, permettez-nous d’apporter un éclairage face au réveil brusque de ces soignants qui ont signé une pétition contre la future opération Wuambushu, tout en faisant la morale aux autorités sur le respect « d’un état de droit ». Faut-il leur rappeler que les Français de Mayotte ne jouissent pas de leurs pleins droits au sein de la France sans que cela ne les préoccupe ? Pour cause, le système de santé de Mayotte est en grande difficulté, car non dimensionné pour les ressortissants de la région d’une part, des mesures de droit commun manquent à l’appel d’autre part pour améliorer les conditions de prise en charge. Et pourtant, aucune initiative de leur part pour les réclamer. Il s’agit en particulier de :
– la non-déclinaison de l’aide médicale d’État (AME) à Mayotte. Pourtant cette manne financière permettrait de soulager les dépenses liées aux soins des Etrangers en situation irrégulière (ESI) sur le territoire. Faut-il leur rappeler que le département prend en charge, sans compensation de l’État, toutes les dépenses liées à la prise en charge des ESI dans les PMI (plus de 70% du public accueilli), de l’aide sociale à l’enfance ? L’AME permettrait aussi le développement de la médecine de ville et la médecine privée nécessaires au territoire.
– la non-application pleine et entière du Code de la santé publique à Mayotte qui laisse persister des dérogations injustes pour le territoire, à l’image du quota autorisé pour l’installation d’une pharmacie : 2.500 habitants au niveau national contre 7.500 pour Mayotte ! Est-ce normal ?
– la non-application du décret du 31 mars 2020 qui permet aux DOM d’être renforcé en professionnels de santé hors Union Européenne dans un contexte de désert médical, sauf pour Mayotte qui est le territoire le plus concerné de la nation ! Et j’en passe…
Comme vous le dites si bien « vous devez garantir la santé des personnes sur le territoire… » ! Faut-il leur rappeler que les ESI vivent, pour une grande majorité d’entre eux, dans des conditions indignes d’un être humain. Ces personnes sont exposées en permanence aux risques naturels, car installées dans les ravines, les mangroves, en bordure de mer et même dans la forêt. Ces zones ne sont pas reliées aux réseaux routiers, donc inaccessibles aux secours. Sortir ces populations de ces zones propices au développement d’épidémies et vulnérables aux catastrophes naturelles relève simplement du bon sens. Les élus locaux ne devraient pas être tenus responsables des drames qui surviendraient suite à un ouragan de type Freddy ou IRMA. Au niveau des besoins primaires, faut-il leur rappeler que l’absence d’eau potable dans ces taudis compromet la santé des personnes qui y vivent. Les résultats des efforts menés pour éradiquer les maladies infectieuses comme des maladies hydriques sont en permanence remis à plat par l’apport de l’immigration illégale (paludisme, tuberculose, lèpre, fièvre typhoïde, hépatite A, gale…).
Pour donner du sens à leur lutte, certains ont besoin de faire une immersion dans ces quartiers où des branchements sauvages en électricité ont déjà endeuillé des familles. Vous rejoindrez certainement le combat des mahorais de mettre fin aux visas territorialisés. Vous serez aussi d’accord de repartir ces populations sur l’ensemble des régions françaises qui disposent de structures adéquates pour les accueillir dans de meilleures conditions. Vous pouvez aussi donner davantage d’humanité à vos protestations en acceptant de parrainer une famille ou d’accueillir un ou deux enfants pour leur donner de meilleures conditions de vie. Que penser de l’opportunité qu’offre la situation démographique de Mayotte d’apporter des solutions aux départements de l’hexagone qui se sont vidés de leur jeunesse ? A moins que vous les aimiez mieux cloitrés dans les vastes bidonvilles de Mayotte ! Jamais de réaction de ces soignants face aux agressions que subissent régulièrement les mahorais depuis des années, à l’image de celles perpétrées dans les établissements scolaires, comme celui du Nord ces dernières semaines, ou encore le braquage du cabinet dentaire du carrefour de Chiconi l’année dernière.
Les Mahorais vivent dans la peur depuis des années, beaucoup sont marqués dans leur chair, certains ne peuvent même plus jouir de leurs biens, voire récolter le fruit de leur travail (agriculteurs). Beaucoup ont vécu des agressions gratuites et sont traumatisés à vie. Le rapport de la mission inter-inspections de janvier 2022 estime à 6.600 les jeunes en situation de déshérence, nous proposons aux pétitionnaires de saisir les autorités ministérielles pour plaider en faveur d’une régulation nationale de la gestion des mineurs, en appliquant la circulaire Taubira de 2013. La prise en charge de ces jeunes et leur formation dans les structures appropriées au national, donnerait de réel potentiel de mains d’œuvre dont a besoin la France, de la libre circulation, sur l’ensemble du territoire français, des détenteurs de visas obtenus à Mayotte et d’une déclinaison locale de l’AME.
Enfin, dans un élan de solidarité, nous proposons que chaque signataire de la pétition, comme à tous ceux qui se reconnaissent dans leur démarche, de parrainer deux mineurs isolés ou bien deux enfants de familles nombreuses vivant dans les bidonvilles pour les aider à retrouver une trajectoire d’espoir dans leur vie. Peuple fortement résilient, les Mahorais ont le droit de vivre en paix chez eux, comme tous les citoyens des départements français. Face à la multiplication de réactions anti-mahorais, la situation impose un sursaut de solidarité et d’unité des élus pour défendre les intérêts du territoire.
L’opération Wuambushu est l’une des réponses à la situation dramatique que vivent les Mahorais, nous soutenons l’initiative du gouvernement.