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El Had ou la renaissance de l’utende à Mayotte

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Sur les réseaux sociaux ou dans la rue, formellement ou spontanément, les initiatives se multiplient pour répondre à la délinquance qui flambe à nouveau sur l’île aux parfums. Au risque, parfois, de voir l’exaspération prendre le pas sur la loi. 

Mayotte : une naissance dont ils se souviendront

Une naissance dans la rue, ce n’est pas si courant. C’est pourtant ce qu’ont vécu Jonathan et Mouna, lundi 18 mai, date à laquelle Sarah, leur petite fille, a décidé d’arriver. Un évènement auquel ont participé quelques passants, sur les lieux par hasard. Et quand s’improvise une chaîne de soutien, cela donne une belle histoire. Récit. 

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Deux mois de confinement peuvent en dire long sur un individu, mais ils peuvent également dévoiler les pires et les meilleurs aspects d’une société. La crise sanitaire a mis en évidence les failles de la société mahoraise, partagée entre la conscience de certains et l’irresponsabilité des autres. Le sociologue Combo Abdallah Combo nous explique pourquoi il est urgent de tirer les leçons de ce confinement et essayer de changer la donne. 

Camille Miansoni, procureur de Mayotte : “Mon rôle est de protéger la société avant tout”

L’affaire du rapt en Petite-Terre qui suscite l’émoi dans l’ensemble du Département est révélatrice de nombre de maux dont souffre la société mahoraise au sein de laquelle nombre de personnes semblent valider l’idée que l’on puisse se faire justice soi-même à défaut d’une carence supposée de l’État. Le procureur de la République, Camille Miansoni, revient ici sur ces éléments. C’est aussi l’occasion pour lui de rappeler le rôle qu’il occupe et la vision qui l’anime alors que les critiques pleuvent sur sa personne.

Le slameur El Had a été bercé pendant toute son enfance par l’utende, cet art poétique mahorais issu de la tradition orale, exercé par les « anciens » jusque dans les années 80 à l’occasion de veillées ou de cérémonies. Art poétique par excellence, l’utende avait également pour but de faire passer un message aux jeunes générations. Nostalgique de l’époque où cet art était encore vivant, El Had souhaite le faire renaître par l’intermédiaire du slam, l’art oratoire contemporain qui s’en rapproche le plus : « L’utende était, dans mon enfance, l’occasion de véritables voyages poétiques en compagnie des anciens. J’aimerais que les jeunes aient, comme moi, la chance de connaître à leur tour cet art caractéristique de notre culture. S’il venait à disparaître, ce ne serait pas seulement une perte pour les mahorais, mais aussi pour l’humanité toute entière car l’utende fait partie du patrimoine mondial. »

Si El Had est passionné de musique et de poésie depuis son enfance, il a néanmoins voulu assurer ses arrières en entreprenant des études de commerce et création d’entreprise en métropole. Après l’obtention de sa licence, il est rentré à Mayotte avec le projet de monter un magasin de fruits et légumes. Mais celui-ci s’est révélé plus complexe que prévu et El Had est finalement devenu instituteur. Il est actuellement en formation à l’IFM de Dembeni, ce qui lui convient parfaitement car cela lui donne l’occasion de pouvoir enseigner directement son art aux jeunes générations : « Je pense qu’il est très important qu’il y ait des artistes au sein du corps enseignant. En effet, les enfants n’ont pas seulement besoin d’apprendre le français et les maths, ils doivent aussi s’ouvrir l’esprit grâce aux arts afin de devenir de bons citoyens. »

« L’utende pourrait avoir toute sa place dans le milieu artistique mahorais »

La carrière artistique d’El Had a réellement débuté en 2008 lorsqu’il a remporté le concours « jeune talent SFR » dans la catégorie « slam ». Cet évènement a été un véritable tremplin pour l’artiste car le tout Mayotte suivait cette émission. S’en est suivi la sortie d’un CD où El Had se partageait l’affiche avec Désiré, le gagnant de la catégorie « musique ». Depuis, l’artiste poursuit sa route avec toujours comme ligne directrice le projet de faire renaître l’utende à Mayotte.

A terme, El Had souhaiterait bien sûr pouvoir vivre de son art afin d’avoir le temps de le pousser le plus loin possible. Son but n’est cependant pas de réaliser des CD, car il est conscient de l’état délicat du marché du disque, mais plutôt de donner le plus de concerts possibles sur l’île et de se faire connaître via internet : « Je privilégie les concerts car ce sont des moments de partage avec le public et c’est ce qu’il y a de plus important pour moi. Si d’autres personnes prenaient la peine de le développer, l’utende pourrait avoir toute sa place dans le milieu artistique mahorais. »

Les textes d’El Had tentent de provoquer un sentiment esthétique en exploitant toutes les potentialités poétiques de la langue mahoraise. Mais, tout comme dans l’utende traditionnel, son but est également de faire passer des messages. Le thème de la ségrégation raciale est l’un de ceux qui lui tiennent le plus à cœur : « Qu’ils soient noirs ou blancs, tous les hommes sont égaux. Si de grandes victoires ont été remportées dans la lutte pour l’égalité entre les Hommes, c’est loin d’être encore gagné, d’où la nécessité de continuer le combat ! » L’autre grand thème d’importance pour El Had est l’éducation. L’artiste pense en effet que les nombreux problèmes de délinquance que rencontre Mayotte sont majoritairement dus à une perte de repères chez les jeunes : « L’ancienne organisation de la société mahoraise s’est complètement perdue. Les jeunes ne reçoivent plus d’éducation solide à la maison de nos jours et c’est la raison pour laquelle il y a tant de problèmes actuellement à Mayotte. J’ai la nostalgie de ma propre enfance où il y avait encore des règles que tout le monde devait respecter au sein de la société. » El Had aborde également d’autres thèmes fondamentaux dans ses textes, comme par exemple les violences faites aux femmes.

Le concert de samedi s’intitule « Sisamizi » ce qui signifie « prendre racine ». Aucun autre titre n’aurait pu mieux refléter le projet d’El Had de faire revivre la culture mahoraise à travers la beauté de sa langue, mais également par ses appels à restructurer la société de notre île, actuellement un peu à la dérive. El Had souhaite que les Mahorais se souviennent de leurs racines et s’ancrent réellement dans leur propre société, mise à mal par une occidentalisation sauvage et bien trop rapide.

« Mon but est d’arriver bientôt à me passer complètement d’accompagnement musical. Dans l’idéal, la beauté des mots seule devrait suffire à émouvoir les spectateurs. »

Si les textes d’El Had sont principalement en shimaore, cela ne constitue cependant pas selon lui un obstacle pour jouir de la beauté des mots : « Il n’y a aucun besoin de connaître le shimaore pour venir m’écouter. La musique des mots, leur saveur, suffisent normalement à provoquer un sentiment esthétique chez le spectateur, indépendamment de leur signification. » Lors du concert, il y aura néanmoins un ou deux textes en français pour rendre hommage à la variété des langues parlées sur notre île.

Pour le moment, El Had accompagne encore ses textes de musiques. Il joue lui-même de la guitare et Philou, son musicien, l’accompagne à la flûte traversière. Il utilise également parfois des bruitages informatiques et s’est récemment procuré un bol tibétain afin d’introduire de nouvelles sonorités susceptibles d’accompagner en beauté ses textes. Son but est cependant d’arriver, à terme, à se passer totalement d’instruments et de parvenir à émouvoir le public uniquement grâce à ses textes : « Pour le moment, je crains encore que les spectateurs ne ressentent de la monotonie en écoutant des textes uniquement a capella. Je ne pense pas être encore arrivé à un degré de maîtrise de la langue qui me permettrait de me passer totalement d’instruments. Mais c’est pourtant là mon but. Je pense vraiment qu’une poésie parfaitement bien ciselée est suffisamment puissante pour émouvoir à elle seule les spectateurs, sans qu’il n’y ait besoin d’un support musical. »

Le concert Sisamizi aura lieu samedi 14 février à 21h, horaire choisi afin de laisser le temps aux gens de fêter la Saint-Valentin au restaurant avant de venir écouter le concert. Une première partie en compagnie des poètes de l’émission Zalada (= succulence) est prévue. Celle-ci, conçue et réalisée par First Prod, en partenariat avec l’association Shimé, fait régulièrement venir des poètes sur le plateau de Mayotte Première pour déclamer des poèmes dévoilant « la succulence » de la langue mahoraise.

 

Nora Godeau

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