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26/09/2008 – Sur le lagon avec la Brigade nature

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Quand la population mahoraise prépare la riposte

Sur les réseaux sociaux ou dans la rue, formellement ou spontanément, les initiatives se multiplient pour répondre à la délinquance qui flambe à nouveau sur l’île aux parfums. Au risque, parfois, de voir l’exaspération prendre le pas sur la loi. 

Mayotte : une naissance dont ils se souviendront

Une naissance dans la rue, ce n’est pas si courant. C’est pourtant ce qu’ont vécu Jonathan et Mouna, lundi 18 mai, date à laquelle Sarah, leur petite fille, a décidé d’arriver. Un évènement auquel ont participé quelques passants, sur les lieux par hasard. Et quand s’improvise une chaîne de soutien, cela donne une belle histoire. Récit. 

À Mayotte, “le confinement a révélé la capacité perverse de certains à faire du mal aux autres sans qu’ils ne s’en rendent compte”

Deux mois de confinement peuvent en dire long sur un individu, mais ils peuvent également dévoiler les pires et les meilleurs aspects d’une société. La crise sanitaire a mis en évidence les failles de la société mahoraise, partagée entre la conscience de certains et l’irresponsabilité des autres. Le sociologue Combo Abdallah Combo nous explique pourquoi il est urgent de tirer les leçons de ce confinement et essayer de changer la donne. 

Camille Miansoni, procureur de Mayotte : “Mon rôle est de protéger la société avant tout”

L’affaire du rapt en Petite-Terre qui suscite l’émoi dans l’ensemble du Département est révélatrice de nombre de maux dont souffre la société mahoraise au sein de laquelle nombre de personnes semblent valider l’idée que l’on puisse se faire justice soi-même à défaut d’une carence supposée de l’État. Le procureur de la République, Camille Miansoni, revient ici sur ces éléments. C’est aussi l’occasion pour lui de rappeler le rôle qu’il occupe et la vision qui l’anime alors que les critiques pleuvent sur sa personne.

Les opérateurs touristiques aiment à dire que le lagon de Mayotte est un endroit rêvé pour travailler. C’est d’autant plus vrai quand le temps est superbe : soleil radieux, aucun nuage à l’horizon et température avoisinant les 30°C dès 8h30 du matin, heure à laquelle le M’kombé ("le colosse" en shimaore) part faire sa tournée dans le lagon. Aujourd’hui, le nouveau responsable de la Brigade nature Jean Mehn est accompagné d’Antonny Groleau et de Kamal, le Mahorais de la patrouille.
“Normalement les gendarmes devaient être avec nous, mais ils ont eu un empêchement”, explique Antonny Grolleau. En effet la Brigade nature, dont les missions se focalisent autour de la police de l’environnement (protection de la faune, de la flore et des réserves naturelles), effectue des interventions communes avec les Affaires maritimes (règlementation de la circulation en mer et de la pêche) et la gendarmerie pour pouvoir appréhender toutes sortes d’individus qui enfreindraient la loi dans le lagon. A la barre, Antonny Grolleau met le cap vers le Nord. La radio est branchée sur la fréquence de Sea Blue Safari. Avec plusieurs embarcations dans leur flotte, les capitaines des bateaux échangent entre eux des tuyaux pour repérer les baleines.
A l’avant du M’kombé, Kamal scrute l’horizon avec des jumelles surpuissantes dont la portée est supérieure à 250 mètres. Après 10 minutes de navigation, il voit quelque chose devant lui. “Regardez à 100 mètres, il y a un opérateur et des baleines !”, dit-il sûr de lui à ses collègues. Effectivement, à une centaine de mètres, à quelques encablures du port de Longoni, un bateau de Lagon Aventure s’approche d’une baleine.
“On coupe les moteurs et on observe”, glisse Antonny Grolleau. Le bateau et ses touristes sont désormais à 80 mètres du M’kombé. Il a coupé son moteur et s’approche d’une baleine qui sort son dos à quelques mètres, suivie de son baleineau. Le spectacle est grandiose et les touristes ne seront pas venus en mer pour rien. Ils profitent même de l’aubaine pour se jeter à l’eau et nager aux côtés du mammifère géant.

"Un jet-ski n’a pas le droit de s’éloigner à plus de deux milles du rivage"

Désormais sans jumelles, Kamal toujours à l’affût voit surgir un jet-ski sur la gauche du M’kombé. Celui-ci a coupé le moteur et a à son bord trois passagers. “Les jet-ski, c’est interdit”, nous signale-t-il. Antonny Grolleau précise qu’en plus l’embarcation a enfreint la législation nautique puisqu’un jet-ski n’a pas le droit de s’éloigner à plus de deux milles du rivage. Dans son malheur, l’embarcation s’est arrêtée à la perpendiculaire de celle de Lagon Aventure et se trouve sur la trajectoire de la baleine, ce qui est également interdit. Finalement la baleine s'éloigne. Les baigneurs de Lagon Aventure, encore abasourdis par la proximité et l'imposante taille des cétacés, remontent tous contents sur leur bateau. Jean Mehn décide d’approcher le jet-ski pour faire un rappel de la réglementation.
– Bonjour madame, bonjour messieurs, nous sommes de la Brigade nature. Connaissez-vous les règles d’approche des mammifères marins ?
– Je ne m’en rappelle plus très bien, indique le pilote.
– Est-ce la première fois que vous approchez une baleine ?
– Non.
– Tout d’abord, vous n’avez pas le droit d’approcher les baleines avec un jet-ski. De plus, vous ne devez pas dépasser la zone de deux milles. Enfin, vous devez vous placez en parallèle de l’animal comme l’a fait l’autre bateau.
– J’ai coupé le moteur et puis la baleine s’est dirigée vers nous, nous ne sommes pas venus à sa recherche, explique le pilote. On a le droit de plonger à côté de la baleine ? Les baigneurs ne la dérangent-ils pas plus que nous ?, continue le jeune homme.
– Ils ont le droit de plonger à l’eau, mais ne peuvent pas toucher l’animal, répond très pédagogue Jean Mehn.
Pour cette fois-ci, les passagers du jet-ski ne seront pas sanctionnés et auront droit à un sourire et une plaquette d’informations sur l’approche des mammifères marins et des tortues.

“On vérifie s’ils ne transportent pas de viande de tortue”

Quelques minutes après, le M’kombé repart et file vers la passe de M’tzamboro. “C’est la Brigade nature qui est à côté de toi”, crache la radio. “On passe au téléphone”, répond une seconde voix, qui n’a visiblement pas très envie de voir les agents de la brigade écouter leur conversation. D’ailleurs, les trois agents rient de bon cœur. “Ces deux opérateurs s’entendent plutôt bien. Mais il y en a qui ne s’entendent pas du tout”, révèle Antonny Grolleau.
Entre la Brigade nature et les opérateurs touristiques le courant passe. “Nous avons fait des réunions avec tous les opérateurs pour qu’ils soient informés. Ils ont bien compris que s’ils enfreignent les règles, ce sont les animaux qui sont menacés et par conséquent leur travail. En revanche, nous faisons souvent des sorties le week-end car il y a beaucoup de nouveaux arrivants à la rentrée à Mayotte. Bon nombre achètent un bateau et ne savent pas toujours comment se comporter face aux animaux”, continue le plus ancien des agents métropolitains.
La Brigade nature travaille sur instruction du procureur de la République. Et pour bien faire comprendre dans quelles conditions ils travaillent, Jean Mehn et ses hommes emmènent souvent en mission des magistrats ou des personnalités administratives. Récemment, le nouveau préfet Denis Robin est ainsi monté à bord du M’kombé.
Après une heure et quart, le M’kombé arrive dans la passe de M’tzamboro. Des petits poissons argentés nagent en bancs à la surface de l’eau. Kamal décide de monter sur le toit du navire. Ses collègues à la barre stoppent le radar. Celui-ci sert surtout lors des sorties nocturnes pour détecter des embarcations ou des animaux. Désormais, la boussole et le GPS suffiront pour guider le M’kombé.
Il est 10h et le navire se trouve en dehors du lagon. Le moteur vrombit de toutes ses forces et le M’kombé file à la vitesse de 15 nœuds. Le bathymètre indique 36 mètres de profondeur. Des pêcheurs dans leurs pirogues font figure de nains face au bien nommé M’kombé. Ceux-ci saluent les brigadiers. A chaque pirogue croisée, Kamal est aux aguets. “On vérifie s’ils ne transportent pas de viande de tortue”, indique-t-il. La patrouille fait route vers la Petite Terre. Au fur et à mesure de notre avancée, le récif corallien se dévoile.

"Nous savons bien que la protection de l’environnement passe après le fait qu’ils doivent gagner leur vie. Mais quel lagon vont-ils laisser à leurs enfants ?"

A une centaine de mètres à tribord, l’eau devient turquoise. De l’autre côté du M’kombé une vingtaine de dauphins s’amusent à cache-cache. La matinée aura été riche en visions animales, puisqu’un peu plus tard au large de Moya notre expédition apercevra une tortue. En revanche Kamal, seul agent parlant shimaore, aura la désagréable surprise de découvrir des pêcheurs sur le récif de Petite Terre en train de pêcher au filet. La première pirogue appréhendée a voulu s’enfuir par-dessus la barrière de corail. Mais les agents ne se sont pas laissé prendre. Très énervé, Kamal fait savoir vertement aux pêcheurs qu’il est strictement interdit de pêcher au filet sur le récif et que la prochaine fois, les choses se passeront nettement moins bien pour eux s’ils récidivent.
Pour la deuxième embarcation, la Brigade nature procède autrement. Jean Mehn muni d’un appareil photo prend un flagrant délit de pêche au filet. Celui-ci mesure au moins 300 mètres. Dans ces conditions, impossible de rater ce qu’il y a dans l’eau… y compris les jeunes poissons et le corail. Mais pour verbaliser, il faut la présence d’un agent des Affaires maritimes. Au large de l’aéroport, le M’kombé est obligé de se diriger vers la passe en S avant d’arriver à Dzaoudzi pour aller chercher un fonctionnaire des Aff’mar’.
Malheureusement d’autres obligations nous obligent à finir notre équipée sur le M’kombé à Dzaoudzi. Toutefois, on apprendra que par la suite la Brigade nature et les Affaires maritimes auront interpellé 5 personnes, dont 4 en situation irrégulière à Mayotte. Deux d’entre eux s’enfuiront en plongeant à l’eau, alors que les trois autres, dont le propriétaire mahorais, seront entendus par la gendarmerie puis verbalisés.
“Ce sont des choses qui arrivent. Mais si on relâche notre surveillance, ils recommenceront. Ils avaient pêché plus de 100 kilos de poissons. Nous savons bien que la protection de l’environnement passe après le fait qu’ils doivent gagner leur vie. Mais quel lagon vont-ils laisser à leurs enfants ? Les poissons pêchés dans le lagon sont de plus en plus petits”, constate un brin désabusé Antonny Grolleau.

Faïd Souhaïli


Mammifères marins et tortues, la règlementation
La règlementation concernant la capture ou l’approche des mammifères marins et des tortues est claire et précise. Il est interdit de blesser, tuer, capturer les tortues et les mammifères marins du lagon. On ne peut vendre, acheter ou utiliser des objets issus de ces animaux. Pour éviter que ces animaux se prennent dans les filets de pêche, ceux-ci sont interdits d’usage sur le récif corallien, à moins de 100 mètres des animaux. Ne pas respecter ces règles peut provoquer une amende s’élevant à 9.000 € et à une peine de prison de 6 mois.
Par ailleurs, lorsqu’on approche un dugong ou une baleine, il faut couper son moteur à 100 mètres de l’animal. Si plusieurs embarcations sont proches de l’animal, elles doivent se mettre en parallèle du mammifère, être au maximum 2 et rester dans ce périmètre au maximum une demi-heure. Pour les dauphins, la distance pour couper le moteur est ramenée à 30 mètres.

Un responsable sensibilisé à la faune et la flore tropicales
Jean Mehn est le nouveau responsable de la Brigade nature. Il remplace Franck Charlier. Tout comme ce dernier il a déjà une expérience de l’Outremer, puisqu’avant de venir à Mayotte il a officié pendant 4 ans à la Martinique et 2 ans en Guyane. “Ma mission va consister à faire augmenter le nombre d’agents commissionnés et assermentés au sein .de la Brigade. Pour l’instant nous sommes 3, mais nos agents mahorais se forment et j’espère qu’ils pourront dresser des PV et être armés comme nous le sommes”, indique-t-il.
Les missions de la Brigade nature contiennent un gros volet d'information en direction des scolaires, mais aussi des professionnels du tourisme, de la pêche ou de toute personne désireuse de connaître la règlementation en matière de police de l’environnement. La Brigade nature participe également à des recherches (thèses, études diverses) et à des comptages d’animaux ou d’espèces végétales dans les milieux protégés.

Un lagon protégé
Le lagon est un véritable aquarium vivant, magnifique, exceptionnel et l’expérience d’une plongée marque à jamais les esprits de celui ou celle qui s’y essaie. Pour le protéger, des aires marines protégées ont été mises en place. Dans la passe en S, autour de la pointe de Saziley ou à N’gouja, il est interdit de pêcher au fusil sous-marin, au filet, à l’hameçon (autorisé à Saziley).
Par ailleurs, il existe des périodes de reproduction pendant lesquelles les crustacés ne doivent pas être ramassés (novembre à mars). Toute contravention peut entraîner la confiscation du matériel de pêche et des captures, une amende de 457 à 22.867 €, la saisie du navire et parfois l’emprisonnement (braconnage de tortue ou de mammifère marin).

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