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12/09/2008 – Réinsérer l’élève en difficulté dans un cursus scolaire normal

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Sur les réseaux sociaux ou dans la rue, formellement ou spontanément, les initiatives se multiplient pour répondre à la délinquance qui flambe à nouveau sur l’île aux parfums. Au risque, parfois, de voir l’exaspération prendre le pas sur la loi. 

Mayotte : une naissance dont ils se souviendront

Une naissance dans la rue, ce n’est pas si courant. C’est pourtant ce qu’ont vécu Jonathan et Mouna, lundi 18 mai, date à laquelle Sarah, leur petite fille, a décidé d’arriver. Un évènement auquel ont participé quelques passants, sur les lieux par hasard. Et quand s’improvise une chaîne de soutien, cela donne une belle histoire. Récit. 

À Mayotte, “le confinement a révélé la capacité perverse de certains à faire du mal aux autres sans qu’ils ne s’en rendent compte”

Deux mois de confinement peuvent en dire long sur un individu, mais ils peuvent également dévoiler les pires et les meilleurs aspects d’une société. La crise sanitaire a mis en évidence les failles de la société mahoraise, partagée entre la conscience de certains et l’irresponsabilité des autres. Le sociologue Combo Abdallah Combo nous explique pourquoi il est urgent de tirer les leçons de ce confinement et essayer de changer la donne. 

Camille Miansoni, procureur de Mayotte : “Mon rôle est de protéger la société avant tout”

L’affaire du rapt en Petite-Terre qui suscite l’émoi dans l’ensemble du Département est révélatrice de nombre de maux dont souffre la société mahoraise au sein de laquelle nombre de personnes semblent valider l’idée que l’on puisse se faire justice soi-même à défaut d’une carence supposée de l’État. Le procureur de la République, Camille Miansoni, revient ici sur ces éléments. C’est aussi l’occasion pour lui de rappeler le rôle qu’il occupe et la vision qui l’anime alors que les critiques pleuvent sur sa personne.

La classe de 6e Segpa du collège de Kawéni est bien silencieuse ce mardi matin. Les 16 élèves se concentrent du plus qu'ils peuvent sur la traditionnelle évaluation de mathématiques du début de collège. A la lecture de l'évaluation de français remplie plus tôt on ne peut s'y tromper : ces élèves sont loin du niveau requis en 6e. La majorité de leurs phrases sont en phonétique, l'énoncé ne semble jamais parfaitement compris.
"C'est évidemment plus difficile pour eux, mais cela permet de vérifier le diagnostic qui nous a conduit à les orienter en Segpa", estime Thierry Denoyelle. "Pendant cette courte période, ils peuvent se considérer comme les autres élèves de 6e. C'est le seul moment de l'année où il y a une demande institutionnelle pour les Segpa, le reste du temps leur professeur adapte le programme officiel à leurs compétences."
Si ces 16 élèves se trouvent aujourd'hui dans ce cursus adapté – mis en place cette année à Mayotte dans trois établissements – c'est qu'ils répondent à des critères particuliers observés en primaire : difficultés graves et durables, un an de retard à l'issue du CM2 et un quotient intellectuel évalué entre 60 et 80. Mais avant la décision d'orientation en section adaptée, le Rased travaille en primaire avec tous les élèves repérés comme étant en difficultés, pour leur donner une chance de remonter le niveau avant l'entrée en collège.
Le Réseau d'aides spécialisées aux élèves en difficultés, Rased pour les initiés, ce sont 51 personnes divisées dans les 8 circonscriptions de l'île, des maîtres surnuméraires voués entièrement au recul de l'échec scolaire. Les 8 Rased possèdent chacun un psychologue scolaire, un maître G, instituteur spécialisé à dominante rééducative, et un nombre de maîtres E, instituteurs spécialisé à dominante pédagogique, qui varie selon les besoins.
 
 

Impliquer les parents dans la scolarité

Djailane Mohamed et Bacar Abdou font partie de ces spécialistes de la pédagogie. "Lorsqu'un enseignant repère un élève en difficulté dans sa classe et qu'il ne parvient pas à l'aider, il remplit une demande d'aide à destination du Rased, qui comprend quatre feuillets : scolaire, social, médical et psychologique. Nous étudions son cas ensemble et déterminons lequel d'entre nous est le mieux placé pour traiter son cas. Après une première visite sur le terrain nous avons une idée plus précise du travail à effectuer avec l'élève."

Quelle que soit sa difficulté, l'objectif du Rased reste toujours de la surmonter pour permettre à l'élève d'atteindre le collège comme les autres. Les maîtres E fonctionnent ainsi en aide complémentaire à la scolarisation, une aide à la fois directe – ils interviennent auprès de l'élève et lui apportent des outils supplémentaires – et indirecte – les actions mises en place permettent à l'instituteur d'enrichir ses pratiques pédagogiques et de se renforcer. "L'idéal serait bien sûr qu'à terme plus aucun instituteur n'ait besoin du Rased", rêve M. Denoyelle.

Attention, les maîtres E ne sont pas des conseillers pédagogiques, leur rôle n'est pas de juger le travail de l'instituteur. "Nous sommes avant tout des collègues du maître, précise Djailane. L'aide que nous apportons se construit en partenariat avec tous les acteurs : enseignants, parents, direction…" Les parents, chaînon indispensable, doivent être mobilisés. "Souvent les parents pensent que le domaine de la scolarité ne les concerne pas, ils avaient l'habitude de les confier au foundi qui s'occupe de tout", expliquent Bacar et Djailane.

"C'est à nous de leur expliquer le rôle qu'ils ont à jouer, il y a une pratique à construire. A Mayotte, de plus en plus, les gens commencent à intégrer leur rôle de parent, mais il y a trois types de cas distincts : d'abord la nouvelle génération qui fait des parents intéressés. A côté il y a ceux qui n'ont pas eu accès à une éducation et donc ne sont pas impliqués dans celle de leur enfant, d'autant plus qu'ils ne se pensent pas capables de les aider. Et enfin les clandestins qui n'osent pas venir à l'école par peur de l'arrestation. Il faut toujours se demander à quel type de parents on s'adresse."

 

L'aide n'est pas du soutien

Même les parents qui s'impliquent n'ont pas toujours la réaction adaptée selon Thierry Denoyelle. "Dans la famille, quand un enfant est en difficulté scolaire, on pense tout de suite à prendre quelqu'un pour faire du soutien. Ça ne fonctionne pas forcément car le prof de soutien n'est pas en liaison avec ce qui est fait en classe. Il joue le rôle de répétiteur mais ne travaille pas sur le fond du problème. Et quand l'élève reste en échec malgré le soutien, il va de plus en plus mal."

C'est là toute la différence entre l'action du Rased et le soutien scolaire : le but des enseignants spécialisés est d'apprendre aux élèves à mieux apprendre, mettre en place des outils pour lui permettre de mieux comprendre et mieux travailler. Pour ce faire ils disposent de deux fois 45 minutes par semaine en tout petit groupes de 6. Il faut ensuite transférer ces outils dans la classe pour permettre à l'élève de s'y réintégrer. D'où le besoin d'associer l'instituteur aux travaux faits avec l'élève.

"Souvent, celui qui ne sait pas se tait pour éviter l'erreur et la punition. Il faut l'amener à comprendre qu'il peut se tromper. L'élève mahorais est habitué à recevoir des ordres sans rien dire, ça se passe comme ça à la maison et à l'école coranique", diagnostique Djailane. "Pour lui, l'éducation est à sens unique, or à l'école on lui demande autre chose, à savoir de comprendre et de s'exprimer. Certains vieux enseignants sont eux-mêmes bloqués dans ces pratiques car ils ont été éduqués de cette façon."

Une aide qui concerne donc les élèves comme leurs enseignants. A Mayotte ils sont 35 maîtres E à sillonner les classes pour travailler au cas par cas. 35 postes non affectés à des classes pour améliorer le qualitatif, pour ne pas faire de l'éducation que du remplissage de salle. Autrefois, une formation spécifique à Mayotte remplaçait celle de maître E qui est désormais accessible à l'IFM, cette année ils sont 12 instituteurs spécialisés stagiaires prêts à grossir les rangs du Rased.

Les Segpa, des filières spécifiques pour mieux revenir au normal

Pour ceux à qui l'aide du Rased n'a pas suffit à remonter le niveau, deux options sont possibles à la fin du CM2. Il y a les PPF, classes pré-professionnelles de formation spécifiques à Mayotte, qui comptent quelques 1.500 élèves. Le but est de réussir à les amener en 5e PVP (préparation à la voie professionnelle, en collège), puis en CAPP (cycle d'adaptation pré professionnel, en deux ans) et enfin au CAP pour avoir un diplôme et un métier. La majorité sort malheureusement sans diplôme à l'âge limite de 16 ans.

Autre option nouvelle à Mayotte depuis la rentrée : les Segpa, sections d'enseignement général et professionnel, qui récupèrent des élèves avec un profil ciblé de la 6e à la 3e. Leur emploi du temps est le même que les autres, à ceci près qu'ils ont un seul maître pour toutes les matières générales, un enseignant spécialisé maître F.

A Kawéni, M. M'déré assure toutes les matières à l'exception de l'anglais et de la technologie. "Pour chaque activité, je remplis une fiche d'évaluation individuelle pour voir la progression de chacun", explique celui-ci. "Ils n'ont pas les mêmes capacités de compréhension que les autres élèves de 6e, ils lisent un texte sans le comprendre par exemple. Je dois d'abord les connaître, les comprendre, voir pourquoi ça ne fonctionne pas et les mettre en confiance. Mon objectif est de leur donner les moyens d'être autonomes dans leur vie future, de se construire."

Les 16 élèves, nombre maximum autorisé en Segpa, bénéficient de deux heures par semaine pendant lesquelles M. M'déré les fait travailler sur les outils d'apprentissage, sur leur projet, ils peuvent débattre de leurs difficultés et de leurs idées. Tous sont assidus aux cours. "Les élèves de Segpa sont destinés à des filières professionnelles courtes", précise M. Denoyelle.

"Le but est qu'ils apprennent un métier et qu'il soient certifiés. En général ils ne dépassent pas le CAP, c'est pourquoi leur projet professionnel doit se définir rapidement." En 6e et 5e ils bénéficient d'un enseignement général, à partir de la 4e celui-ci se partage avec un enseignement professionnel autour de plusieurs disciplines pour leur permettre de faire un choix et de se spécialiser dès la 3e. Ensuite, ils rejoignent un CAP en lycée professionnel et donc ainsi un cursus "normal", mais ils ont été armés pour affronter ce cursus.

Hélène Ferkatadji

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