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12/03/2010 – Journée de la femme : Portrait

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Quand la population mahoraise prépare la riposte

Sur les réseaux sociaux ou dans la rue, formellement ou spontanément, les initiatives se multiplient pour répondre à la délinquance qui flambe à nouveau sur l’île aux parfums. Au risque, parfois, de voir l’exaspération prendre le pas sur la loi. 

Mayotte : une naissance dont ils se souviendront

Une naissance dans la rue, ce n’est pas si courant. C’est pourtant ce qu’ont vécu Jonathan et Mouna, lundi 18 mai, date à laquelle Sarah, leur petite fille, a décidé d’arriver. Un évènement auquel ont participé quelques passants, sur les lieux par hasard. Et quand s’improvise une chaîne de soutien, cela donne une belle histoire. Récit. 

À Mayotte, “le confinement a révélé la capacité perverse de certains à faire du mal aux autres sans qu’ils ne s’en rendent compte”

Deux mois de confinement peuvent en dire long sur un individu, mais ils peuvent également dévoiler les pires et les meilleurs aspects d’une société. La crise sanitaire a mis en évidence les failles de la société mahoraise, partagée entre la conscience de certains et l’irresponsabilité des autres. Le sociologue Combo Abdallah Combo nous explique pourquoi il est urgent de tirer les leçons de ce confinement et essayer de changer la donne. 

Camille Miansoni, procureur de Mayotte : “Mon rôle est de protéger la société avant tout”

L’affaire du rapt en Petite-Terre qui suscite l’émoi dans l’ensemble du Département est révélatrice de nombre de maux dont souffre la société mahoraise au sein de laquelle nombre de personnes semblent valider l’idée que l’on puisse se faire justice soi-même à défaut d’une carence supposée de l’État. Le procureur de la République, Camille Miansoni, revient ici sur ces éléments. C’est aussi l’occasion pour lui de rappeler le rôle qu’il occupe et la vision qui l’anime alors que les critiques pleuvent sur sa personne.

 

 

 

{xtypo_dropcap}C’{/xtypo_dropcap}est pendant sa séance de footing que Myriam a pu nous accorder un peu de son temps. A 35 ans, la Mahoraise est ce qu’on appelle une femme moderne. Une des rares à avoir réussi à s’émanciper de la pression sociale et familiale. Sa vie se partage entre son travail dans une grande entreprise locale, sa fille de 12 ans et ses loisirs. Boite de nuit, activités sportives, sorties entre amies, elle a même réussi à briser un tabou social interdisant à une femme de vivre seule, sous peine de passer pour une femme de petite vertu.

Aujourd’hui, elle le sait, sa situation fait toujours des gorges chaudes. Mais l’évolution des mœurs a fini par la rendre presque normale aux yeux de la société. Et quand bien même, le regard négatif de ses semblables sur sa vie ne lui fait plus rien. "Moi je m’en fous, je ne regarde pas ce que les gens font ou disent. Je me fais plaisir. J’essaie juste de rester discrète sur ma vie, tout en étant fidèle à moi-même."

Une liberté chèrement acquise après des années de soumission à un mari violent et beaucoup plus âgé, rencontré à l’âge de 22 ans. Une période où la jeune femme rêve de se libérer du carcan familial traditionnel et de sa famille qui la surprotège. Sans emploi et ayant suivi une scolarité avortée, elle peut difficilement justifier ses sorties. Pour en sortir, elle choisit la même option que les autres : le mariage. Seul moyen pour se libérer de cette virginité sur laquelle tant de familles mahoraises placent leur honneur.

C’est ainsi qu’elle croise le chemin de Boina, son futur époux. Elle a 23 ans, il en a 45. Certes la différence est importante, mais la famille ferme les yeux; il a une très bonne situation. Et puis elle l’aime son bacoco. Les années passent et petit à petit Boina révèle son vrai visage de mari infidèle. "Il ramenait régulièrement ses maitresses à la maison. Quand j’allais me plaindre à ma famille, on me disait : quand tu as des soucis il ne faut pas les étaler". Au fur et à mesure la jeune fille ne supporte plus la situation, elle veut vivre sa vie de son côté. Mais la jalousie et l’idée qu’elle en trouve un autre est insupportable pour Boina. Il devient de plus en plus agressif.

"Il me frappait, me menaçait avec un couteau sur la gorge. Avec l’âge, il lui était de plus en plus difficile d’avoir des érections. Alors le soir, au lit, il devenait agressif. Il me frappait et me menaçait pour ne pas que j’aille voir ailleurs." Mais de son côté, il continue toujours à ramener ses maitresses à domicile. Des filles de plus en plus jeunes pour se rassurer sur sa virilité défaillante.

"Je n’ai jamais eu de plaisir avec lui, c’était mon premier amant; d’ailleurs, ma première fois, c’était presque un viol. Je n’étais pas préparée, ma famille m’a juste dit que le moment était venu de me donner à mon époux. J’ai tellement eu mal que j’ai pleuré, je suis partie m’enfermer dans la salle de bain jusqu’au matin."

 

"Tu n’y arriveras jamais, tu es trop bête ! "

 

Comme souvent dans ce genre de cas, la famille a longtemps refusé de voir cette souffrance. La priorité était de préserver l’honneur du groupe. En guise de solution, les matrones de sa famille lui proposent de jeter des sorts pour le rendre fidèle. "Il faut trouver une solution pour qu’il ne soit qu’à toi", me disaient-elles, "mais de mon côté je me demandais pourquoi je faisais tout ça pour le garder, alors que je n’étais pas heureuse."

Pour s’en sortir elle décide de reprendre ses études. Elle demande l’aide de son mari, qui, par peur d’une trop grande indépendance, la rabaisse constamment. "Tu n’y arriveras jamais, tu es trop bête ! À force de me répéter ça, de me dire que je n’étais pas normale, que tous nos problèmes venaient de moi, j’avais fini par douter de moi, par accepter que tout était de ma faute."

Rabaisser l’autre, le dénigrer, pour mieux le faire douter de ses capacités physiques et intellectuelles, quel meilleur moyen pour installer la soumission. C’est ainsi que Boina instaure peu à peu l’idée qu’elle n’est rien sans lui. Une mauvaise image d’elle-même entretenue par le fait que sa famille elle-même ne fait rien pour l’encourager à s’en sortir. "Mes proches pensaient que je n’allais pas pouvoir m’en sortir sans lui."

Comme souvent dans les cas de violences conjugales, en public son mari est irréprochable. "Il était aimé par tout le monde et il avait énormément d’amis. Chaque soir on recevait des gens à manger. Je passais la journée à préparer les repas. Même si j’étais très fatiguée, j’étais contente parce que ca m’évitait d’être seule avec lui." Le déclic viendra finalement le jour où, accompagnée de leur fille et d’un groupe d’amis, elle le surprend une énième fois avec une fille.

"Quand nous sommes rentrés, ils étaient sur le fauteuil du salon. Ils venaient de finir et la fille se rhabillait, se souvient-elle, lui était nu. Il a alors appelé ma famille pour leur dire qu’il ne voulait plus de moi. Il croyait me punir, mais au fond c’était une libération. Je ne suis plus jamais revenue." La séparation lui permet de prendre conscience qu’elle vaut quelque chose et qu’elle peut y arriver, même sans lui.

 

"Il m’a redonné confiance dans les hommes, en montrant qu’ils n’étaient pas tous des monstres"

 

Et en dépit des persécutions de son mari pour l’inciter à retourner avec lui, du manque d’argent et de cet enfant à charge, elle se bat pour s’en sortir. Une période difficile pour elle comme pour sa fille, en pleine adolescence. "Je n’avais pas le temps de m’en occuper, elle était livrée à elle-même. Un jour elle a failli se faire violer par quatre hommes. J’ai cru devenir folle."

Heureusement, quelque temps plus tard elle trouve du travail et commence à mettre de l’argent de côté. Mais là aussi elle doit faire face au harcèlement sexuel de son chef. "Il savait que je n’avais pas le choix, il voulait me forcer à travailler tard le soir pour pouvoir exercer ses avances."

Elle réussit finalement à se débarrasser de lui, pour se rendre compte que son mari ponctionnait d’importantes sommes sur son compte personnel, grâce à une procuration qu’elle lui avait faite. Peu informée sur les démarches à suivre, elle le laisse faire jusqu’à ce qu’on lui explique qu’elle pouvait bloquer les prélèvements. Pourtant, avec un salaire de plus de 3.000 euros mensuels, qui avait augmenté depuis la naissance de leur enfant, Boina n’est pas vraiment dans le besoin.

Mais après leur divorce, il refuse catégoriquement de payer la pension alimentaire. De 600, il réussit à la faire baisser à 400 euros qu’il ne paie pas pour autant. Au bout d’un an de démarches, Myriam réussit à avoir le remboursement des impayés eux, aussi stoppés au bout de quelques mois.

Aujourd’hui, la Mahoraise s’en sort de mieux en mieux financièrement. A force de cumuler les problèmes financiers, son mari a quitté l’île. Définitivement débarrassée, elle ne lui réclame même plus de pension alimentaire. Un destin qui à ses yeux n’est que le résultat de la justice divine. "Quoi qu’il arrive dans la vie, il faut toujours rester droit. Quand on te fait du mal, ne réplique pas de la même manière. Car tôt ou tard le résultat de nos actions finit par se répercuter sur notre vie."

Même si elle n’envisage absolument pas de se remarier, Myriam a retrouvé la paix grâce à son compagnon. "Il m’a redonné confiance dans les hommes, en montrant qu’ils n’étaient pas tous des monstres". En guise de revanche sur cette vie qui l’a malmenée, elle a décidé d’offrir le maximum à sa fille. Une instruction solide pour pouvoir s’en sortir sans l’aide de personne, des cours de karaté pour pouvoir se défendre. Elle tient surtout à lui inculquer les armes mentales pour faire face à un monde où la femme est souvent réduite à un "bien matériel et sexuel".

 

Halda Toihiridini

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Mayotte hebdo n°1084

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