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07/05/2010 – Justice – Comparution immédiate

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Quand la population mahoraise prépare la riposte

Sur les réseaux sociaux ou dans la rue, formellement ou spontanément, les initiatives se multiplient pour répondre à la délinquance qui flambe à nouveau sur l’île aux parfums. Au risque, parfois, de voir l’exaspération prendre le pas sur la loi. 

Mayotte : une naissance dont ils se souviendront

Une naissance dans la rue, ce n’est pas si courant. C’est pourtant ce qu’ont vécu Jonathan et Mouna, lundi 18 mai, date à laquelle Sarah, leur petite fille, a décidé d’arriver. Un évènement auquel ont participé quelques passants, sur les lieux par hasard. Et quand s’improvise une chaîne de soutien, cela donne une belle histoire. Récit. 

À Mayotte, “le confinement a révélé la capacité perverse de certains à faire du mal aux autres sans qu’ils ne s’en rendent compte”

Deux mois de confinement peuvent en dire long sur un individu, mais ils peuvent également dévoiler les pires et les meilleurs aspects d’une société. La crise sanitaire a mis en évidence les failles de la société mahoraise, partagée entre la conscience de certains et l’irresponsabilité des autres. Le sociologue Combo Abdallah Combo nous explique pourquoi il est urgent de tirer les leçons de ce confinement et essayer de changer la donne. 

Camille Miansoni, procureur de Mayotte : “Mon rôle est de protéger la société avant tout”

L’affaire du rapt en Petite-Terre qui suscite l’émoi dans l’ensemble du Département est révélatrice de nombre de maux dont souffre la société mahoraise au sein de laquelle nombre de personnes semblent valider l’idée que l’on puisse se faire justice soi-même à défaut d’une carence supposée de l’État. Le procureur de la République, Camille Miansoni, revient ici sur ces éléments. C’est aussi l’occasion pour lui de rappeler le rôle qu’il occupe et la vision qui l’anime alors que les critiques pleuvent sur sa personne.

 

 

{xtypo_dropcap}L{/xtypo_dropcap}a pauvreté et la coutume villageoise peuvent-elles justifier des massacres sur des animaux protégés ? C'est l'épineuse question à laquelle a dû répondre la justice. Mardi après-midi, deux individus interpellés pour avoir tué quatre tortues vertes, sont passés en comparution immédiate. Une procédure qui montre bien la gravité des faits aux yeux de la loi.
Classée parmi les espèces en voie de disparition de la surface de la Terre, la tortue dont il est question est en effet hautement protégée, aussi bien à Mayotte que dans le monde entier. Le troisième braconnier étant toujours en fuite, aujourd'hui ils ne sont que deux à se tenir face au juge. Deux frères, accompagnés de leurs femmes et de leur vieille mère.
Dès l'ouverture de la séance, cette dernière entame une longue litanie de prières afin d'attirer la miséricorde divine sur ses deux fils. Au cours de leurs rondes de ces dernières semaines, les agents de la Brigade nature ont trouvé des cadavres de tortues à plusieurs reprises. Des têtes et des pattes coupées qui jonchaient les plages de Chanfi et de Moutsoumbatsou. "On se doutait qu'il y avait des braconniers sur ces plages du nord, autour d'Acoua et de M'tsangamouji", explique Jean Mehn, le responsable de la Brigade nature de Mayotte.
En tout, une quinzaine de carapaces ont été récupérées sur ces différents sites. Grâce à des renforts venus spécialement de la Réunion, une opération de surveillance en pleine nuit a pu être montée. Debout face à la juge, M. Mehn raconte le déroulement des évènements. ″Nous avons trouvé une tortue retournée sur la plage de M'liha Chanfi. Elle était encore vivante et avait les pattes coupées. Nous nous sommes cachés jusqu'à l'arrivée des trois hommes."
Ces derniers avaient déjà tué et vidé trois autres tortues selon des méthodes bien connues des braconniers. Après les avoir retournées, ils leur coupent les pattes afin d'éviter de dangereux coups de griffes. Ils se mettent ensuite à dépecer les bêtes vivantes !… Une méthode qui choque par sa barbarie, mais qui selon les spécialistes serait un moyen de conserver la viande fraiche, l'opération pouvant durer plusieurs heures.

Sur le dos, les pattes coupées, dépecées vivantes…

Cent kilos de viande par tortue, revendue entre cinq et sept euros le kilo. Avec de tels chiffes, difficile pour la juge de croire que le butin n'était destiné qu'à la consommation personnelle des prévenus. Ce soir-là, trois tortues ont été dépecées, soit 300 kilos de viande. La dernière, dont les pattes avaient été coupées, a été euthanasiée.
Un seul individu été attrapé ce jour là : Madi, le plus jeune des deux frères. Grâce à ses révélations, les enquêteurs ne vont pas tarder à retrouver Bina, le second. Sentant l'épée de la justice au-dessus de sa tête, l'homme est parti vider son compte bancaire dès le lendemain. Une somme de 1.400 euros qui, selon le prévenu proviennent d'arriérés d'allocations familiales… ″J'ai eu peur que ma famille reste sans argent si je vais en prison″, explique-t-il à la juge, tout à fait conscient de son infraction.
Ce chômeur d'une cinquantaine d'années a en effet une nombreuse famille à sa charge : deux femmes et quinze enfants. Sans moyen financier, il va chercher sa pitance directement chez la mère nature. En ce qui concerne la viande de tortue, il dit ne l'avoir vendue qu'une seule fois à l'un de ses frères. Aucun des deux ne nie les autres accusations. Madi, le petit frère, avoue même chasser la tortue depuis qu'il a 17 ans. Mais l'enquête a révélé l'existence d'une mini filière de vente de viande de tortue dans le nord de l'île.
 Pour M. Mehn, c'est la même bande qui faisait toutes les plages de la zone. Ils allaient ensuite revendre la viande dans le village de Longoni, où ils résident. Depuis plusieurs semaines, plusieurs témoignages circulaient sur la vente de cette viande. Durant l'interrogatoire des prévenus, Me Aly, leur avocat, n'intervient qu'à une seule reprise pour les interroger sur leur village d'origine. ″M'tsahara″, répondent les deux frères.

4 mois de prison ferme et 3.000 euros d'amende

Dans son réquisitoire, la condamnation du procureur Dupas est sans appel. ″Ces monsieur s'en prennent au symbole même de Mayotte. La justice doit aussi prendre en compte le préjudice écologique que subit la Collectivité." Il explique à l'assemblée pourquoi la tortue verte est en voie de disparition dans le monde. Sur une centaine d'œufs pondus, une seule tortue arrive à l'âge adulte.
Pour l'homme de loi, les agissements des prévenus sont encore plus graves parce qu'ils s'en sont pris à des tortues qui allaient pondre. Il termine son intervention en regrettant que les peines liées à des délits environnementaux ne soient pas assez lourdes. Selon lui, si les mandats de dépôt étaient plus fréquents, elles seraient plus de dissuasives. Il demande six mois de prison et une peine de1.500 euros d'amende pour chacun des accusés.
Au cours d'une plaidoirie fortement inspirée, Me Aly choisi de mettre l'accent sur le mode de vie de ces deux hommes. ″J'ai tenu à avoir des précisions sur leur village d'origine, car il est bien connu que les gens de M'tsahara sont des consommateurs de tortue depuis la nuit des temps. Tout le monde dans ce village sait comment on attrape une tortue. Ils savent tous qu'une seule espèce est consommable et que les autres tortues vous donnent la lèpre. Que si on les consomme, on a la peau qui part et on finit par perdre ses doigts."
Après avoir longuement disserté sur les coutumes du village en matière de consommation de tortue, il explique que l'arrêté préfectoral sur ces animaux ne date que de 2000. Une législation trop récente pour avoir été intégrée par la population, d'autant plus qu'il n'existe aucun panneau précisant que leur capture est interdite. Selon lui, sans profession, ces hommes n'ont fait que perpétuer la traditionnelle chasse aux tortues pour nourrir leurs familles.
Et pour mieux mettre l'accent sur l'indigence des prévenus, il désigne le T-shirt de l'un d'entre eux. Sur celui-ci est inscrit : ″Comores toujours unis″, avec les quatre îles réunies. ″Une véritable provocation pour tout Mahorais digne de ce nom″, précise l'avocat. ″Un Mahorais fier ne porterait jamais ce vêtement, mais lui n'a pas le choix. De même, il va attraper les tortues en cachette pour nourrir sa famille″. Il estime enfin que l'expérience de la garde à vue et de l'interpellation a nettement suffi à leur faire peur.
En dépit de la pertinence des arguments de l'avocat, la juge reste inébranlable face à l'ampleur des massacres. "Vous êtes sur une île magnifique. Il y a des îles où on n'a même pas le droit de cueillir des fleurs sans prendre une amende. Vous devez protéger les tortues, pas en faire le commerce. Le tribunal a l'obligation de vous empêcher d'exercer définitivement cette activité. Même si elle est habituelle, il faut la faire cesser", assène-t-elle gravement.
Les deux hommes ont été condamnés à quatre mois de prison ferme et à 3.000 euros d'amende chacun, dont la moitié avec sursis. Ils sont partis en prison dès la fin du procès.

 

Halda Toihiridini

 

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